Oups, un croco [PV Madeleine]

Elle était perdue. Non Vinara n'était pas perdue dans l'immensité de ce monde, perdue physiquement mais psychologiquement. Les doutes commençaient à la ronger. Elle avait renié une grande part de sa liberté pour l'adhésion d'un clan. Bien qu'elle demeurait fidèle à sa religion d'envoyer bouler les dieux sans demander le port d'un de leur présent divin, elle s'était enrôlée chez les Ethelkrus. Doyenne par son absence de glowstick, elle aidait là où on la demandait. Bien évidemment le boulot ne coulait pas à flot pour elle. N'était-elle pas qu'une vile solitaire qui aurait volé le coeur de l'un des bêtas de la meute ? Oui elle savait comment elle était vue. Même si l'amour la liait à Grimm, la chapardeuse sentait qu'il y avait autre chose. Elle aimait mais elle aimait encore plus la Liberté. Et elle ne s'en rendait compte que maintenant.
Elle soupira, marchant dans cette plaie du monde. Ce lieu était comme son âme actuellement : vide mais surtout blessé par de profondes balafres, et piégé dans le souvenir d'un ancien monde. Vinara se souvenait à peu près du combat qui eut lieu ici. Cronos désireux de tout réécrire, elle parmi les Raeders, elle se joignant à la cause et aidant les dieux. Elle avait été bien sotte. Elle aurait du laisser les autres mortels se charger de cet "incident". Si elle ne s'en était pas mêlée, elle aurait pu continuer sa vie tranquillement. Couler des jours heureux dans la famine et la survie d'une vie de vol et surtout de solitaire. Un nouveau soupire s'échappa de sa gueule. Non elle se trompait. Ce n'était pas son aide à affronter la déité qui l'avait entraîné dans sa situation d'être dans une prise d'or. Elle avait osé aimer. Triste erreur n'est-ce pas ?

« Vous devez bien rire abrutis de dieux.

Elle foudroya le ciel de son regard vairon. Les déités se jouaient bien des mortels et s'étaient-ils joués d'elle ? La rendant esclave à un poison qui rendait fort et aveugle ? Si c'était eux, ils n'allaient pas remonter dans son estime. Au final Vinara ne faisait que commettre des erreurs durant ces dernières années. Elle avait trouvé une famille parmi les Raeders. Elle ne regrettait pas son départ, elle s'était bien amusée avec eux mais ils avaient été le premier pas vers sa vie d'imbécile. Elle aurait du rester loin d'eux, envoyer chier le monde et basta. Idiote qu'elle était, elle s'était attachée et c'était le comble pour une solitaire. Attachez vous à quelqu'un et vous mourrez. Il vaut mieux se lier à une cause qu'à une personne, telle était la morale qui ressortait dans l'esprit de la demoiselle.
Elle se stoppa proche d'un trou et elle regarda le vide. Elle ne pouvait apercevoir le fond avec la brume qui le dérobait à tout regard importun. Il lui suffisait d'un pas pour mourir. Un seul. Ou juste à basculer un peu vers l'avant ... Vinara était proche de la mort et pourtant elle ne se sentait pas à la côtoyer. Pas tout de suite. Si elle tombait et s'écrasait au fond, elle décéderait, d'accord, mais elle prendrait surtout la fuite. Elle soupira. Il n'était pas question qu'elle prenne la fuite. Elle avait une liberté à retrouver. Elle voulait redevenir cet oiseau qui va là où le vent le porte, et non cette perruche coincée dans une belle cage.

« Mais si je déserte les Ethelkrus, je risque d'avoir les crocs au cul. Remarque, les crocos sont réputés pour être aussi cons que des huîtres.

Elle ricana, oubliant volontairement de faire mention du sang viking qui coulait dans les veines de son "tendre". Oui Vinara désirait s'en aller et laisser en plan Grimm. Il ne valait rien face à la liberté et à l'or volé. Elle s'était bien amusée avec lui mais elle trouvait davantage de satisfaction dans le vol et dans son jeu d'actrice pour s'attirer de bonnes grâces avant de piller sans le moindre remord. En tout cas, elle avait oublié de rester sur ses gardes ... Quelqu'un venait. Quelle idiote d'avoir oublier les règles de survie.

Madeleine

La Plaie du Monde est un de ces lieux dont le nom ne correspond pas tout à fait, aux yeux de Madeleine. Il observe d'un œil curieux les anciennes bâtisses, les ruines blanches, la fumée qui s'échappe des gueules béantes de la terre. Madeleine s'éloigne souvent des terres Lazulis, mais il n'a pas peur, les terres libres sont, par définition, libres et tout lupin peut s'y mouver sans redouter des guérillas stupides. Bien que le crocodile albinos porte la couleur du dieu Raptor, il se sent solitaire, peu attaché aux Lazulis. Il trouve, parfois, stupide de devoir vivre en meute selon son appartenance religieuse, cette vaste illusion qu'un point commun divin puisse unir un peuple lui a toujours donné envie de rire. Il est intéressant de voir combien les dieux peuvent être une excuse magnifique, Madeleine s'amuse à observer ses semblables, certains ont leurs caractères, et sans lumière fluorescente leur donnant un pouvoir et une assurance, ils s'ignoreraient. Ils se pensent importants et influents, feignant le savoir-vivre ensemble. Les dieux offrent une confiance aveugle, une sécurité inconsciente à son disciple, Madeleine le sait, son propre pouvoir est stupide. Il pousse un long soupire, ses babines dansent un instant, ses longs crocs l'empêchant de fermer la gueule correctement. L'air est agréable, par ici, une vapeur humide ne cesse de souffler, et les gouttes de sudation coulent le long des écailles de sa queue de crocodile. Il ferme les yeux, couché entre les ruines, son pelage de la même couleur que les pierres brisées, il se sent parmi les siens, bien que le marais lui manque.

Une odeur l'assaille, il ouvre les yeux et voit une silhouette gracile passer devant lui. Elle ne l'a pas remarqué, elle marche et d'un coup, elle s'arrête, parle et regarde le ciel. Il n'a pas entendu ce qu'elle a dit, mais à son ton, elle semble reprocher quelque chose au temps, ou aux Dieux. Madde la suit du regard, ses oreilles courtes se dressent sur son crâne. Il est drôle de voir comme le hasard vous apporte des choses. Il ne cherche que très rarement le contact, et après tout, la femelle ne semble pas chercher querelle. Tant pis, songe-t-il. Il plisse les yeux, l'observe se pencher au-dessus de l'un des trous crachant de la fumée. Elle va se suicider, c'est sûr. Madeleine se lève lentement, sa lourde queue reste sur le sol, il étire ses pattes arquées, préparant ses muscles à porter son poids et s'approche doucement. Il ignore s'il sauverait la petite femelle devant lui, elle est jolie, son corps est court, sa queue aussi, elle a des oreilles étrangement grandes. Madeleine roule des épaules, et baille gueule grande ouverte. Il l'observe sans faire un seul bruit. Si elle saute, il ne sait pas ce qu'il fera. La laisser faire ? Qui est-il pour la sauver ? Et s'il n'a pas envie d'être sauvée ? Le mythe de la D.E.D, Demoiselle En Détresse, n'existe que dans les contes pour jeunes louvards fiévreux. Puis la phrase de la louve lui arrive aux oreilles. Elle veut déserter les Etelkrus, ainsi en est-elle. Il ne peut pas la chasser, elle est en terres libres, mais la suite de la phrase lui fait froncer les sourcils. Les crocos ? Cons comme des huîtres ? Alors, là, ma petite. Elle ignore sans doute que le quotient intellectuel d'un crocodile est bien plus supérieur à celui d'une huître. Bien que les huîtres soient meilleures en apnée, elles ne peuvent pas se mouvoir hors de l'eau, contrairement aux crocodiles. Il sourit, peu offensé, s'approche en annonçant sa venue, et ses mâchoires claquent, ses babines se redressent en un sourire cynique.

"Oh, mais tous les crocos ne sont pas comme ça."

Il tourne autour d'elle, offrant sa longue queue blanche à la vue de la demoiselle. Puis se retourne, son sourire toujours collé à sa gueule.

"Et comparer un crocodile à une huître est vraiment dégradant, pour les crocos."

Il plonge ses pupilles pâles dans les yeux vairons de la femelle. Ses cheveux sont superbes, et autour de son corps, une sorte de mille-pattes s'entortille. Il le regarde avec curiosité, la femelle est d'une beauté étrange, surnaturelle. Et quel culot d'insulter un crocodile alors qu'il y en a un justement pas loin.

Quand la prudence manque, vous le sentez passer. Et Vinara la sentit passer. Une voix la sortit de sa bulle, claquant sur ses joues en une belle gifle, comme lui rappelant son erreur. Elle eut à peine le temps de se maudire qu'elle remarqua ce que voulait dire le mâle qui venait l'accoster. Elle le détailla, fronçant les sourcils, marquant dans son visage élégant la monstruosité de la frustration. Nulle peur ne vint détruire ce masque lorsque ses yeux reptiliens s'arrêtèrent sur la queue longue et dentelée de l'inconnu. Ainsi donc elle insultait les crocodiles et l'un d'eux se faisait un malin plaisir à se trémousser devant elle. Comme lui disant qu'elle a tord. Elle lâcha un profond soupire. Ce mâle lui tapait déjà sur le système. Elle riva ses yeux sur lui et elle la détailla davantage. Seul le blanc semblait avoir bien voulu pigmenter les poils du mastodonte. Ses pattes arquées, ses crocs et sa gueule ... Tout faisait qu'il ressemblait bien plus à un de ces prédateurs des marais que ne pouvait s'en vanter la famille de son "compagnon". D'ailleurs, avait-elle à faire à un membre de cette famille ? Un cousin éloigné ? Elle en doutait fortement. Il était ... Différent. Bien que les couleurs lui manquaient, il avait un certain charme. Il avait les muscles et ce côté prédateur qu'elle avait admiré et qui manquait cruellement à Grimm et à sa famille. Oui Vinara n'était pas tombée en amour pour le physique de son tendre bêta mais pour ce qu'il abritait au fond de son coeur. Le plus bel amour ne nait-il pas de ce que cache les coeurs plutôt que de se cachent les corps ? Et elle ignorait encore si ce bourru de crocodile appartenait aux "gentils" ou aux "méchants". Quoiqu'il en fut, la chapardeuse ne nota aucun accessoire qui valait la peine d'être volé. Aïe, elle s'était embourbée dans une rencontre ennuyante qui n'aboutirait à aucun vol.

« Oooh pauvre p'tit chou. Pardon "Sir" croco, ironisa-t-elle. Après tout, pourquoi cacher ce qu'on est devant une personne ayant vu la "sale" facette de votre caractère ?

Elle le suivait des yeux et instinctivement, elle prit une position de défense, se campant bien sur ses pattes après s'être éloignée de quelques pas du trou. Ses yeux se plissèrent et elle montra légèrement les crocs. Il venait de la mettre de mauvaise humeur. Le monde la mettait de mauvaise humeur. Cette journée était plus merdique qu'elle n'avait pu le penser en se levant. Bien qu'elle avait choisi la liberté, la vie de solitaire venait frapper à sa porte, la mettant déjà dans une situation précaire.

« Tu veux venger tes autres compagnons crocos ? J'en ai presque la larmiche. Regardes ...

Elle fit une petite moue, ses yeux s'embuant légèrement. Elle renifla comme ne le faisaient pas les dames, puis elle se reconcentra sur le mâle albinos.

« Bon, qu'est que tu me veux le croco ? J'suis pas mangeable ... Ou alors, tu veux quelque chose pour que ta sale langue n'aille pas répéter ma désertion aux Ethelculs. Si c'est ça, je revoie mon jugement. Les crocs sont plus intelligents qu'ils ne le laissent paraître. Remarque, les huîtres sont peut-être tout aussi capable d'un tel raisonnement.

Ses yeux se plissèrent moqueusement. Elle jouait avec le feu ou plutôt, avec un crocodile qui pourrait faire qu'une bouchée d'elle. Aaaaah le jeu de survie lui avait tant manqué.

Madeleine

Madeleine ne peut pas se défaire de ce sourire, et la réaction de la louve lui donne encore plus matière à imiter la banane avec ses babines. Elle a du répondant, du piquant. Il adore ça. Sir Croco est un fort joli surnom, songe-t-il, peut-être l'adopter ne serait pas une mauvaise idée. Il reste là, debout, et sans aucun désir de se faire plus gros, il paraît prendre tout l'espace autour de lui. Il est petit, trapu, et pourtant ses muscles sont saillants. La louve aux dreadlocks magnifiques semble adopter une position de défense, pourtant Madeleine n'a montré aucun désir d'agression. Il l'observe, son drôle de manège défensif, comme si sa condition féminine n'était que la seule raison de ce comportement. Triste chose, les mâles n'ont pas besoin de tout ça, leur simple sexe suffit à déjouer les intentions malsaines des autres. Son regard malicieux se fait plus doux, la femelle lui plaît. Elle feint une tristesse, et son jeu d'acteur surprend Madeleine. Ainsi, il a une véritable comédienne devant lui. Le crocoloup sourit et ses mâchoires claquent entre elles dans un rire amusé.

"Venger mes autres compagnons crocos ? Non, à moins que tu en ais tué un, dans ce cas, je devrais t'égorger et te jeter dans un marais infesté de crocodiles."

Son sourire carnassier dévoile ses crocs imposants et sales, ses incisives prennent toute la place dans sa mâchoire. Il l'observe toujours, voir sa réaction face à cette proposition de violence. Mais elle ne semble pas ciller. Elle ne semble pas être de ce genre qui s'évanouit à la mention du sang, à croire que ces louves ne chassent jamais. Il rit encore et s'approche, tourne autour à la manière d'un prédateur en chasse, ou en rut, au choix. Il observe les courbes généreuses de la femelle, son petit panache de poils qui lui sert de queue, ses pattes hautes et fines. Mmh, à croquer. Elle n'est pas mangeable ? Pas sûr, elle ferait un met exquis, à consommer de la manière qu'il lui plaira le plus... Sa sale langue ? Un rire honnête sort de sa gorge, si elle s'imagine qu'il va aller cafter à une meute qui doit s'en foutre d'elle comme d'un grain de sable sur la plage. Il la fixe de ses pupilles presque translucides, les huîtres ne sont pas capables d'un tel raisonnement, décidément, cette louve n'a que sa beauté pour la rattraper, elle est si ignorante que Madde meurt d'envie de lui faire un cours sur le quotient intellectuel et la vie d'une huître, mais il n'a pas suffisamment étudié le sujet. Ses petites oreilles s'orientent vers la femelle, il est curieux. Pourquoi serait-elle prête à lui donner quelque chose pour qu'il n'aille pas raconter ce qu'il a entendu ? Les Ethelculs, comme elle le dit si bien, semblent l'effrayer ou lui apporter un souci assez intense pour vouloir éviter que cette nouvelle ne se propage. Son sourire se fait plus malin, il plisse les yeux et d'une humeur taquine, il passe lentement sa langue sur ses crocs, la faible lueur verte de Mido éclaire l'émail jaunie et le rouge sang de ses gencives impeccables.

"Et qu'est-ce que tu me donnerais en échange de mon silence ? Pour que je n'aille pas répéter tous ça ni à tes amis ni aux huîtres ?"

Sa voix est rauque, chantante, et la malice brille dans son sourire. Nullement agressif, il ne cherche pas à lui mettre la pression, il considère qu'il n'en a même pas besoin. Il lui suffit de montrer ses deux canines, ses griffes bien plus longues que les siennes, sa queue lourde de muscles et d'écailles. Bien qu'il soit un mammifère, les capacités du crocodile lui sont inévitablement intégrés, malheureusement, tout a un prix, sa puissance et sa force lui valent une lenteur hors-du-commun. Il finit par s'asseoir, à quelques pas de la femelle, distance raisonnable si jamais une mouche de la violence la piquait. Il l'observe, et une lueur d'excitation luit dans ses yeux. Il adore les divertissements intellectuels, et cette petite femelle lui offre un jeu superbement intéressant. Excité comme une puce, son cœur se met à palpiter un peu plus fort, et il espère que son pelage ne deviendra pas transparent.

Ohoh mais c'est qu'il ne se laissait pas avoir par son sale langage le pépère croco ! La louve cacha son sourire. Elle était tombée sur une mâle particulièrement joueur et surtout qui ne se démontait pas lorsque ses mots devenaient virulents. Il était différent de bien des loups idiots de clan, qui prenaient la mouche dès qu'une solitaire osait leur balancer des piques. Vinara s'était attendue à un combat pour son affront clanique et pourtant, l'inconnu continua de faire comme précédemment : bouger, tourner autour d'elle. Cette attitude lui tapait sur le système, elle n'appréciait guère être ainsi encerclée, comme si elle était la proie d'un vilain jeu. Qu'attendait-il d'elle ? Désirait-elle la croquer ? Ou avait-il des besoins sexuels à combler ? Remarque, elle doutait qu'il puisse avoir la côte avec son corps qui donnerait la chair de poule à bien des êtres. Les femelles étaient généralement craintives, seules les dames solitaires -et encore- ne se déboussolaient pas pour une apparence différente du commun des mortels. Mais si le loup albinos avait des pulsions à combler, il ne fallait pas qu'il s'attende à ce qu'elle lui montre son popotin gentiment en le priant de la besogner. Tss les mâles sont vraiment méprisable.

« Qui sait ... ? Je suis peut être plus forte que tu ne le penses crochuître.

Une petite voix dans sa conscience lui demandait de cesser ce petit jeu qui la mettrait bien vite en danger ... Mais tout son corps ne réclamait que ça. Elle voulait ressentir de nouveau les pulsions de l'adrénaline, l'approche de la Mort. Vinara avait été trop longtemps enfermée dans une tour du Grand Castel. La sauvageonne désirait retrouver les sensations de sa vie d'avant. Oui elle voulait du danger, elle voulait retrouver la peur qui vous lacère le ventre.
Ses yeux se plissèrent et elle se mit à sourire. Elle s'amusait comme une petite folle à provoquer le mâle. Ce jeu allait-il tourner en bain de sang ? Ou finirait-elle par capter un danger qui la ferait détaler loin des mâchoires du carnassier ? Elle l'ignorait mais elle commençait à prendre des paris dans son esprit, pesant les deux solutions, ce qu'elles apportaient pour sa fierté, et ce qu'elles engendraient comme dommages psychologiques et physiques. La chapardeuse avait bien changé depuis son ancienne vie. Elle se sentait plus réfléchie et plus intéressée par les autres, bien que le monde l'emmerdait toujours. Mais ça, c'est une autre histoire.

Vinara suivait la petite mascarade du loup des yeux, aussi bien ses mouvements que les plissements de ses yeux reptiliens. Il l'intriguait et il semblait que ce soit réciproque ... Ainsi donc la petite proie qu'elle était faisait un effet au crocodile. Son sourire s'agrandit lorsqu'elle l'entendit demander ce qu'elle lui proposait en échange de son silence. La première réponse aurait été "Rien", mais cela signifierait mettre un terme à ce jeu. Ce serait embêtant, elle commençait à trouver cette rencontre moins ennuyeuse qu'au début. Elle pencha la tête sur le côté, regarda de haut en bas le loup désormais campé sur son postérieur. Elle se redressa, oubliant sa position de défense et elle s'approcha de lui, se dandinant. Son corps se balançait avec une grâce déconcertante. La légère couche de graisse prise chez les Ethelkrus avaient parmi à ses courbes de se remplumer. Elle avait fière allure la Vinara ! Pourquoi ne pas user de ses nouveaux charmes ? Son sourire devient mielleux et franchissant les derniers centimètres les séparant, elle se colla à lui et elle murmura dans ses oreilles, sifflant tel un serpent charmeur ces quelques mots :

« Je ne sais pas ... Ce que vous voulez ...

Il était idiot. Comme tous les autres canins. Elle se laissa glisser contre lui, s'écartant doucement de ce corps musclé. Elle le fixait, le regard fiévreux. Puis son expression changea. Elle devint moqueuse et la louve fit plusieurs bonds en arrière. Il n'allait peut être pas comprendre ce changement puis elle lui montra fièrement ses pattes beiges rosés. De magnifiques bracelets à clous venaient désormais les orner. Plus grands que sa morphologie, ils pendouillaient, donnant piteuse allure à la louve.

« Oups, je crois que je vous ai pris vos bijoux ... Dommage que je ne puisse pas prendre ceux de famille.

Son sourire devint moqueur et elle sautilla autour du mâle à une distance qui empêchait sa gueule garnie de sales crocs de la choper. Elle espérait juste qu'il ne soit pas rapide ... Ou du moins qu'elle arriverait quand même à le distancer et à le semer.

« Pour ta gouverne, ils le sauront bien assez vite. Je n'étais qu'un sale rat dans leur immense repère. Ils seront rapidement soulagés de voir que la souillure solitaire que je suis ne traîne plus dans leurs somptueux couloirs.

Son ton était railleur, mauvais. D'ailleurs, elle pourrait peut-être revendre les informations sur le Grand Castel aux Lazulis. Après tout, le but des clans, c'était la guerre non ? Si ce n'était pas le cas, les dieux avaient encore merdé à séparer en trois groupes et puis bon, les Nakhus devaient être au chômage sévère. Décidément, la vie de clan n'était vraiment pas pour elle.

Madeleine

Crochuîte, un nouveau surnom qui donne moins le sourire à Madde. Et d'un coup, il ne sait plus quoi faire, quoi dire, comment réagir. Elle se dandine, ses croupes lui donnent faim, elle est jolie mais... quoi ?! Elle se frotte à lui, se trémousse, et quand son murmure grave et suave lui parvint à ses oreilles, une chaleur atroce lui monte aux joues, il soupire, soumis à cette tentation nouvelle, et regarde ailleurs, plus excité que gêné. Les femelles n'ont jamais joué ce petit jeu avec lui, elles le trouvent laid, repoussant, ses crocs lui déforment le visage, ses griffes bien trop longues donnent à ses pattes un air surnaturel, sa couleur blanchâtre ne donne pas envie aux femelles, et puis cette queue de crocodile. Elle les effraie, toutes. Alors un contact pareil, il n'est pas habitué, il sent une vive douleur dans le bas de son ventre, et il se lève d'un saut, une fois qu'elle est partie, espérant cacher le petit bout rose qui pointe son nez contre son ventre. Son cœur bat bien plus vite, il a chaud, et il devient, malgré lui, transparent, de moins en moins opaque. Affolé, il regarde autour de lui, cherchant à se cacher, puis il marche lentement et avant même qu'elle se soit retournée, une fissure à la gueule béante crache une fumée blanche, le cachant pendant quelques instants. Et quand il voit le regard tiède de la femelle se changer en un air arrogant, il n'a même pas remarqué ce qui lui manque, autre que sa contenance. Elle montre ses pattes élégantes et étirées, et ses grosses bracelets à clous qui ne vont pas du tout avec sa morphologie. Les femelles peuvent avoir de drôles de goût parfo-... Quoi ? Il baisse rapidement la tête vers ses pattes et remarque que ses cinq bracelets manquent à l'appel. Il relève la tête, nerveux, et la panique le gagne, son rythme cardiaque augmente, et il devient encore moins visible. Il l'a sous-estimé, et alors qu'il s'imagine fait comme un rat, sa voix rauque se répand dans ses oreilles, telle une odeur parfumée.

"Dis donc, t'es la reine des voleuses. Malheureusement, mes bijoux de famille resteront à leur place, même si tu meurs d'envie de les avoir, ma jolie."

Il reprend un peu du poil de la bête, l'inquiétude se dissipe alors qu'elle sautille autour de lui, un air fier de gamine gâtée sur la truffe. Il l'observe, et finit par se rasseoir, espérant qu'en prenant l'air qu'il ne se passe rien au niveau de son pelage, elle ne remarquera rien. Son air de gros dur peut être vite bafoué quand on s'aperçoit qu'il devient transparent, s'effaçant comme un jeune louveteau peureux. Il reprend son sourire sarcastique, plonge ses yeux dans les siens, puis il se lève alors lenteur, n'espérant en rien la surprendre, si elle est aussi intelligente que voleuse, elle devrait faire l'équation masse corporelle importante est égale à lenteur de pachyderme, puis il s'approche d'elle, sa voix moqueuse, mauvaise lui donne envie de sourire encore plus. Il est tombée sur la princesse des grossièretés, la reine des garces. Sa queue de crocodile se balance lentement de droite à gauche, il approche sa gueule puissante, et murmure d'un air désabusé.

"Si tu les voles, c'est logique qu'ils ne t'aiment pas trop..."

Il sourit et claque les mâchoires, s'éloignant à nouveau, il regarde la louve, observe ses pattes bien trop fines pour ses bracelets à clous. Il ne va pas les récupérer tout de suite, il a lu quelque part que les femelles aiment porter les affaires des mâles, ça leur donne l'air toute petite, toute frêle. Et elle, elle n'a pas besoin de ses bracelets, elle semble si... fragile. Son court corps, ses courbes, ses pattes, ses oreilles bien trop grandes. Elle semble aussi étrangère à la beauté conventionnelle que lui. Il sourit et sa langue passe sur ses babines lentement, il l'observe et regarde sa patte, il est encore un peu transparent, il voit la terre et quelques brins d'herbe verte à travers lui. Il ignore tout des Etelkrus, il n'en a jamais rencontré un, jamais vu un, il sait juste que son alpha est la sœur des Alphas Etelkrus, et rien qu'à voir Anastasia et son beau petit fessier, Madde imagine sa benjamine sexy et tyrannique. Il l'observe, patient, elle semble à l'ouest, dans ses yeux se lisent une sorte de mélange de sentiment, comme si quitter cette meute était en même son souhait le plus cher mais aussi son cauchemar le plus terrible.

"C'est pour un couillu que tu restes parmi cette bande d'huîtres ?"

C'est une question un peu facile, il se demande ce qui peut pousser une femelle à rester là où elle ne s'y plaît pas et deux solutions s'offrent à lui : l'amour, qu'il soit familial, charnel, amical ou alors la peur. Si ce n'est pas pour un mâle qu'elle bafoue ses envies de liberté, alors elle craint peut-être quelque chose ou quelqu'un, là dehors, hors des somptueux couloirs dont elle parle. Il sourit, et cette fois-ci, ses babines forment un arc plus sympathique, compatissant. Il veut bien être à son écoute, après tout, Madeleine n'est pas qu'une brute écervelée, il a un petit cœur qui bat sous son poil pâle.

Qu'elle était fière de porter ces attributs volés. Elle ne cessait de bouger, comme si elle dansait. Sa joie n'était guère dissimulée, teintant de milles étoiles ses yeux vairons et reptiliens. Elle n'avait rien perdu. Vinara savait toujours se servir de ses pattes avec une expertise à faire peur. Ces mois enfermée n'avaient pas émoussé ses sens de voleuse. Son sourire s'agrandit et elle riva ses yeux sur le mâle. Le pauvre petit chou semblait avoir du mal à s'en remettre. Il devait avoir été comme tous les autres, croyant avoir devant eux une pauvre demoiselle ... Quel idiot. Il s'était fait roulé, comme les autres. Comme quoi elle était bien plus intelligente et maligne qu'elle ne le laissait paraître. Etait-il dégoûté ? Etait-il triste d'avoir eu sa fierté piétinée dans un vol aussi bête que celui-là ? Quoiqu'il en fut, elle avait compris qu'il n'avait pas l'habitude d'être ainsi charmé ... Ou d'avoir tout simplement une demoiselle collée contre ce corps musclé. La chapardeuse connaissait un minimum ses congénères. Elles étaient toutes pareilles, cherchant la perle dans la beauté, s'arrachant les poils, se faisant des coups bas rien que pour avoir ce beau prince charmant. Vinara en avait trouvé un qu'elle avait du défendre en montrant parfois les crocs. Elle s'était lassée de ce petit jeu du "à moi". Après tout, personne ne pouvait être à personne. Seuls les objets pouvaient appartenir à quelqu'un. N'était-ce pas une raison qui faisait que la petite louve aimait voler ? Elle était négligeable aux yeux de tous, aux yeux des clans. Elle n'était qu'une solitaire. Mais volez quelque chose de précieux à un clanique et là, vous passez de poussière à adversaire de taille. Et le crocoloup venait d'en déguster une belle démonstration.

Ainsi donc il revoyait son jugement en l'appelant "reine des voleuses" ? Ou était-ce juste une appellation commune pour la qualifier ? Quoiqu'il en fut, cette dénomination lui fit plaisir mais elle le cacha. Les compliments sont les meilleurs moyens de se perdre de vue, de tomber dans le paradis de l'égo. De sombrer dans l'idiotie de la puissance à en oublier les valeurs premières qu'on défendait. Vinara fit taire cette petite voix ronronnante qui s'émerveillait d'être qualifiée de sang royale. Ce n'était pas un petit vol qui pourrait la faire avoir cette couronne. Il ne fallait pas rêver. Si elle la désirait, il fallait frapper gros. Comme dérober des alphas. Ou des dieux. Elle se mit à sourire, se miroitant sur la réaction des déités si elle arrivait à les voler. Cela devrait bien les faire chier ... Ils ne bronchaient pas autrefois quand elle chapardait leurs offrandes mais en soit, c'était pour eux mais pas à eux. Là, si elle volait leurs biens, elle donnerait un sacré coup au poulailler divin. Intéressant. Très intéressant ...

Vinara se reconcentra sur le mâle et elle fronça légèrement les sourcils. Il semblait ne plus être ... Hmm ... Physique ? Son corps semblait normal mais elle ressentait comme autre chose. Comme s'il était un espèce de fantôme. Etrange. Elle ne dit rien, se contentant de le fixer. Elle le laisse s'approcher, désireuse de le voir de plus près. Aurait-il le courage d'entrer en contact avec elle ? Elle l'ignore mais elle s'amuse. Enfin.

« Quel dommage ... Ils auraient pu me faire un beau collier ... Ils auraient été utile au moins ...

Elle mima de toucher un collier imaginaire, prenant des postures de fierté de porter un tel accessoire. Elle cligna plusieurs fois des yeux. Si elle devait retenir un truc positif des Ethelkrus, c'est qu'elle avait pu admirer les prouesses des dindes Ethelculs pour plaire aux paons moches. Elle en avait retenu pas mal de choses et pauvre crocodile, il devenait le cobaye à ses expériences. Vinara pourrait se réjouir de bien avoir appris les leçons.

« Tu es le premier volé depuis des mois ... Tu devrais être heureux.

Son sourire devint narquois et elle pencha la tête, prenant un air adorable. Elle sentait qu'elle allait s'amuser à l'avenir à changer entre la beauté fatale alléchante et l'innocente naïve qui a besoin d'être protégée. Sa vie de comédienne allait prendre une tournure très intéressante. Mais ce qui faisait le plus plaisir à la demoiselle, c'est que ces numéros pourraient lui rapporter gros. Très gros.
Vinara riva son regard sur lui. Il était bel et bien à demi physique. Des éclats de transparence semblaient passer, révélant le fond derrière lui. Elle était guère idiote et elle comprit rapidement que le mâle usait de son don. Devenait-il simplement transparent ? Ou devait-elle s'attendre à pis ? Cela n'était pas impossible. Les loups des clans étaient plus fourbes que les solitaires quant ils jouaient avec leur puissance divine. Ils se reposaient trop dessus. Elle soupira.

« Tu comptes récupérer tes biens en jouant les fantômes ? Ou trames-tu un sale plan ? Dire que je commençais à t'apprécier.

Puis elle se figea en calculant enfin les dernières paroles du crocodile. Son visage devint neutre. Elle le fixa avec une froideur étrange. Elle avait envie de l'étriper. Pourquoi gachait-il tout ? Ne pouvait-il pas se contenter de garder son rôle de victime de vol ? Aaaah ces claniques étaient tous des abrutis. Elle montra un instant les crocs puis elle posa son postérieur sur le sol, et ses épaules s'affaissèrent en même temps qu'elle poussait un long soupire.

« Initialement, oui. Elle regarda le trou proche d'eux. Mais cet Amour est idiot. Il m'a tout pris. Je me suis retrouvée parmi les Ethelculs. Je pensais trouver une famille et je me suis faite enfermée.Je n'étais qu'à leurs yeux qu'une sale solitaire qui n'avait rien à faire là. Ils avaient pas tord remarque. Triste non ? Je suis bien mieux dehors, à chasser à mon compte ... A survivre. Et à voler. Elle le regarda droit dans les yeux. Je renie mes sentiments pour le vrai amour : la Liberté.

Madeleine

Madeleine a du mal à perdre ce sourire peint sur ses babines, la petite femelle lui donne envie de rire, son attitude désinvolte, son arrogance, elle est telle une vipère qui ondulerait devant ses yeux, une vipère portant des magnifiques bracelets à clous en cuir véritable. Son sourire narquois, ses yeux aux longs cils noirs, Madeleine l'observe et rigole, les yeux moqueurs et intéressés. Il se met à marcher, vagabonder, faisant l'équilibriste en suivant le bord des fissures de la terre. La tête penchée, il essaie de voir ce qui peut bien avoir au fond, mais à part une abysse noire et opaque, il ne voit rien. Il rit encore, et pose son regard clair sur elle.

"Quel honneur, la première victime de la Reine des Voleuses, j'ai de la chance."

Il s'approche d'elle, dans un jeu de séduction inconscient mais aussi une sorte de rapport prédateur/proie, et malgré les apparences, rien n'est sûr que ce soit le crocodile albinos qui soit le prédateur. Il apprécie, malgré tout, masochiste sur les bords, sa longue queue écailleuse se balance doucement, au rythme de sa respiration, douce et profonde. Son cœur a cessé de cogner fort, mais malgré tout, son poil reste plus ou moins transparent, comme si l'on avait ajusté l'opacité de Madeleine à 70%. Le lupin baisse la tête, et ses petites oreilles semblent plus relâchées, la déception le ronge, elle a remarqué son changement d'intensité. Il grogne doucement, plus menaçant, et claque à nouveau ses mâchoires à quelques centimètres de la gueule de la femelle. Il soupire, las de ce pouvoir que Mido lui a confié. Quelle ironie du sort, il est déjà bien trop remarquable avec son pelage blanc, sa queue de crocodile et ses excroissances.

"Je deviens transparent quand une petite garce me vole mes affaires."

Il sourit, tire la langue d'une manière arrogante et mutine. Il ignore si sa remarque l'a blessé, mais elle se met à montrer les crocs, puis elle soupire, ses épaules s'aplatissent et Madeleine l'observe, sa curiosité piquée à vif. Quand elle entame son explication, Madeleine l'écoute d'une oreille sincère et attentive. Il la regarde, décrit ses babines qui bougent pour former les mots, il s'assoit en face d'elle, de l'autre côté de la gueule béante du trou qui fissure la terre. Ses grands yeux ouverts, il pourrait paraître spectral, il semble réellement transparent, vide de tout. Malgré tout, il réfléchit. Ainsi donc elle a fait cette erreur que beaucoup de femelles font, suivre un mâle dans sa famille ou sa meute, renier ses amours, ses sentiments. Il la considère un instant, une brève mine de pitié l'afflige, il a perdu son sourire mais il récupère vite, taquin et cynique.

"Une voleuse qui s'est fait volé son cœur. Touchant."

Il ouvre large sa gueule et rit, son rire est rauque, cynique. Malgré tout, il ressent une certaine peine, lui n'a jamais connu l'amour, et il sait très bien qu'aucune femelle ne le suivrait nulle part. L'amour appartient aux beaux, aux riches, aux puissants, pas aux difformes. Il cesse de rire et son regard se fit plus lucide, moins blessé.

"On ne peut compter que sur soi-même dans ce bas-monde."

Sa voix se lézarde légèrement, plus sombre et mélancolique. Il a toujours compté sur lui-même, il ne peut se remettre aux autres, et il trouve ça bien bête de mettre sa vie entre les pattes d'un autre, surtout un mâle attiré que par une seule chose. Qu'ils peuvent être cons, tous autant qu'ils sont. Dommage que la petite princesse des voleurs soit tombée dans ce piège grossier, il commençait seulement à l'apprécier. Il hausse les épaules et se remet en marche, il saute avec agilité sur une ruine plus haute que lui, sa lourde queue fait pencher son corps, il marche le long du muret brisé, observe la pierre blanche. Il ne sait trop quoi dire, il ne sait pas la réconforter, et puis il n'en a pas envie, elle lui a quand même volé ses bracelets. Il la regarde du coin de l'œil, sa solitude lui hurle de la sommer de partir mais d'un autre côté, il est content d'avoir de la compagnie, surtout cette petite femelle au caractère bien plus trempé qu'un alligator impoli. Il finit par s'allonger sur un mur plus haut, sa queue pend mollement dans le vide, il doit lutter pour ne pas la suivre et basculer, ses longues griffes raclent un instant la pierre. Il la regarde plus intensément.

"Alors tu vas quitter le prince charmant, le confort, la sécurité et la tranquillité pour retrouver ta liberté ? Ça serait du jamais-vu."

Bien que Madde soit lui-même un Lazuli, l'idée d'être solitaire lui a souvent trotté dans le crâne, mais ça serait signer son arrêt de mort. Albinos, il est facilement remarquable, la chasse lui est difficile, il ne pourrait jamais se reposer, il serait chassé, où qu'il aille, il serait un monstre non-désiré. Alors, certes, il doit parfois ramener une proie, mais il n'a aucune obligation envers qui que ce soit. Peut-être avoir un minimum de respect envers ses supérieurs, aller prier de temps en temps, mais ce glowstick qui brille sur sa langue est synonyme de confort, de sécurité. Il peut vivre sa vie comme un solitaire, personne ne vient l'emmerder, il dort où il veut, et le simple fait de ne pas mourir de faim le motive à rester parmi sa meute. Malgré tout, il envie la femelle. Pouvoir tout quitter, sur un coup de tête, vivre sa vie, seule et loin de tout, ne se soucier de rien, être partout chez soi. Madde baisse le regard, pensif, ses oreilles s'affaissent doucement, il sent le piercing qui abrite le liquide de Mido contre son palais, contre ses crocs. Les Lazulis sont un moyen de vivre, pour lui, il ne survivrait jamais seul et sans ressources, sans aide. Sa queue crocodilienne tressaille, il la redresse et la pose le long du muret, ses écailles roses brillent à la lueur d'un rayon de soleil qui le traverse sans aucune gêne.

Tais-toi Ego, j'ai pas besoin de toi. Vinara fixait le crocodile qui lui faisait des éloges. En quoi était-ce un honneur d'être la première victime depuis des mois d'une voleuse ? Certes elle lui avait dit d'en être heureux mais de là à qualifier ce vol d'un honneur, il fallait le faire. Il riait et pendant un instant, elle se demanda s'il ne se moquait pas ouvertement d'elle. Remarque, il lui rendrait la monnaie de sa pièce. Elle afficha une mine déçue. Elle l'était car le mâle ne sembla pas broncher qu'elle ait pu désirer se faire un collier avec ses bourses. A croire que cet inconnu ne semblait pas réellement inquiet au fait de l'avenir qu'elle peut lui réserver. Aaaaah les mâles sont étranges. Tantôt ils se braquent à en pâlir quant on menace leurs bijoux, tantôt ils s'en moquent. Ils ne sont pas très fidèles à leurs pensées. La solitaire lâcha un petit soupire.

« Y a pas d'honneur à se faire voler. T'es un drôle de couillu.

Il s'approcha d'elle ... Tel un prédateur bien que le jeu ressemblait plus à celui de la séduction qu'à celui du chat et de la souris. Vinara ne s'ennuyait pas. Elle venait de trouver une distraction plus que satisfaisante. Pourquoi diable était-elle restée aussi longtemps enfermée ? Elle avait manqué de voir de nouvelles têtes et surtout de pouvoir trouver des amusements comme ce cher Crocoloup. Un immense sourire se peignit sur le visage de la demoiselle tandis que le mâle changea son expression pour une mine dépitée. Elle avait donc mis le doigt sur le pouvoir du canin. Ses yeux se plissèrent lorsqu'il passa de reine des voleuse à petite garce. C'était vexant. Elle montra légèrement les crocs, fouettant l'air de son moignon de queue. Il savait jouer avec ses nerfs. Pourquoi gâchait-il ce jeu en la surnommant ainsi ? Il devenait ennuyeux et le visage renfrognée de la solitaire suffirait à lui indiquer qu'il l'avait vexée.

Son tirage de langue le sauva. S'il ne l'avait guère fait, elle aurait tourné talon et serait partie sans demander son reste avec les bracelets de cet idiot d'huître blanche. Dommage qu'il enchaine avec une mine de pitié. Croyait-il sincèrement qu'il était à même de pouvoir la considérer en pitié ? Non, il ne l'était pas. Personne ne l'était. Vinara ne voulait de ce regard, de cette pitié de la part de personne. Elle était fière, même lorsqu'elle faisait des conneries. Elle ne pleurait jamais. Elle ne se laissait pas abattre. Elle finissait toujours par s'en sortir et lui, ce petit Lazulis osait la regarder en pitié ?! Ses longues oreilles se plaquèrent sur son crâne.

« Gardes ta pitié pour les autres.

Son ton était tranchant et glacial. Son visage était tellement renfrogné qu'elle en perdait de sa beauté. Il ne manquait plus l'écume aux coins de ses babines pour croire qu'elle était atteinte de la rage. Il avait touché une corde sensible le pépère albinos. Mais tout cela disparu rapidement lorsqu'il se mit à rire cyniquement. Elle savait parfaitement ce que cela signifiait. Il ne devait pas avoir connu l'amour. Il était fortement possible qu'elle soit réellement la seule dame à s'être ainsi comportée avec lui, que ce soit de la simple parole à oser le toucher. Vinara lâcha un profond soupire et elle hocha la tête, approuvant sa remarque sur le fait qu'on ne pouvait compter que sur soi-même. Juste avant d'intégrer un clan elle était indépendante, fière et forte. Après elle s'était reposée sur Grimm, sur un clan entier et elle en avait souffert. Et elle avait été bien idiote.

Elle ne lui répondit guère et elle se contenta de suivre son action du regard. Elle fut surprise qu'il parvienne à se hisser sur le muret, elle qui pensait que la corpulence du mâle devait l'empêcher de se mouvoir, de sauter avec grâce. Elle s'était trompée et elle se releva le suivant à petites distances. Elle ne savait pas vraiment ce qu'elle attendait de lui, ni pourquoi elle le suivait. Etait-ce par désir de lui rendre ses bracelets ? Non. Un gain volé était désormais sien.Mais alors pourquoi ? Elle ne le savait pas vraiment mais elle le regarda se poser puis elle ne broncha pas lorsqu'il la regarda intensément. Elle esquiva un grand sourire.
Elle ne disait rien et elle se hissa sur le muret. Elle s'approcha de lui en balançant son corps. Elle devenait le prédateur de ce carnivore des marais. Ses babines s'étirèrent pour un sourire des plus éblouissants. Elle ne savait pas vraiment à quoi elle jouait mais elle appréciait de se montrer ainsi ... Tellement décadente, tellement attirante. Vinara n'avait jusqu'alors jamais réellement senti le besoin de plaire mais avec ce crocodile, elle se prêtait à un jeu qui ne cessait de lui convenir. Aimait-il la voir ainsi se trémousser ? Elle l'ignorait mais ce qui fut sur, c'est qu'elle continua, s'approchant à petites foulées de lui. Elle était très proche mais elle décida de rompre cette proximité et elle se glissa sensuellement sur le canin, collant son frêle corps contre le dos musclé du Lazulis. La chapardeuse colla sa truffe près de son oreille courte.

« Oui ... Je ne suis pas une louve de luxe ... susurra-t-elle en collant davantage son corps contre lui. Et toi ? Serais-t-u prêt à abandonner ce confort pour la Liberté ?

Que les jeux commencent.

Madeleine

Pour être un drôle de couillu, Madeleine tient sûrement la palme d'or. Il est d'une maladresse folle, brute de décoffrage, il ne connaît pas tant que ça l'empathie et encore moins la sympathie. Il baisse ses oreilles courtes en voyant la mine déconfite de sa nouvelle amie. Bien, très bien, il gardera sa pitié si elle n'en veut pas. Mais il ne faudra pas qu'elle se plaigne que personne ne la comprend, ou que tout le monde se fout de ce qu'elle ressent. Il lève les yeux un instant, et soupire d'une façon lasse. Sa mère se plaignait beaucoup, quand il était jeune, elle se plaignait d'être aveugle, d'avoir une fille aussi peu dégourdie, et surtout pourvue de cette queue immonde de reptile. Elle se plaignait de la moiteur des marais, l'humidité qui faisait boucler ses mèches brunes et courtes, de cette odeur tenace qui lui collait à la peau. Oui, Madeleine n'y connaissait rien en femelle, mais il savait combien elle pouvait râler. Alors qu'il est paisiblement installé sur son muret de craie blanche, la femelle le suit du regard, il plonge ses iris diaphanes dans son regard vairon, puis quand elle sourit, il ne peut s'empêcher d'esquisser un rictus. Ses grandes oreilles lui donnent un air un peu niais, mais elle est mignonne. Et elle a du caractère, ah ça. La longue queue d'écailles laiteuses se balance doucement, il pose son museau sur ses pattes avant, évitant au passage de s'éborgner avec ses griffes de trois mètres cinquante, puis ferme un instant les yeux. Elle finira par partir, quand elle verra qu'il ne sait plus quoi dire pour attiser la conversation. Ou alors imaginera-t-elle qu'il est un rustre de s'endormir ainsi ? Il l'ignore, il hausse les épaules et sent une drôle de pesanteur sur son dos. Il relève la tête, et regarde la femelle qui s'est confortablement installé sur lui. Il hausse un sourcil, et un sourire surpris se dessine sur ses babines, dévoilant ses crocs jaunâtres et puissants. La petite maligne approche sa gueule de son oreille et son haleine chaude taquine ses conduits auditifs. Il sourit, une légère envie se créer en ses tripes. Il maîtrise, il contrôle. Elle ne manque pas de toupet, celle-là, sa queue de crocodile se balance un peu plus vite, et sa couleur transparaît légèrement : ses palpitations cardiaques s'accélèrent. Il n'a jamais été dragué, pas même regardé avec un désir particulier, il est un monstre difforme, aux couleurs translucides, un crocodile mutant qui ne mériterait peut-être même pas de vivre. Et elle, sortie de nulle part, cette voyou aux grandes oreilles, elle se met à le chauffer comme s'il était le plus beau des Dieux. Il ferme les yeux, son souffle se fait plus court et intense. Il ne doit pas céder à cette envie, ça serait de la folie. Peut-être essaie-t-elle tout simplement de lui voler quelque chose. Il se redresse d'un seul coup, embarquant la femelle sur son dos, il sent ses pattes se serrer autour de lui pour éviter de tomber, il rit doucement, amusé.

"Si tu essayes encore de me voler quelque chose, ça va barder, votre Majesté."

Il descend du muret dans un saut lourd, ses pattes arquées atterrissent dans un chuintement sourd, la petite femelle tient le choc, et reste sur son dos. Il sourit, et se balade avec sa passagère. Il n'est pas bien grand, mais sa force lui permet de ressentir la petite comme une véritable plume.

"Non, je ne suis pas prêt à sacrifier tout ça pour une Liberté. Je suis libre, parmi ma meute, ils me foutent la paix, je mange à ma faim, je dors tranquillement et..."

Sa voix se lézarde et se mue en un soupir blessé. Il était solitaire, avant de rencontrer les Lazulis, sa mère vivait bien, sans personne. Mais sa queue de crocodile, toutes ces modifications physiques lui valent à présent une grande peine. S'il était seul, livré à lui-même dans ce monde injuste, le pauvre Quasimodo lupin ne ferait pas long feu. Il ne peut pas courir vite, ses excroissances lui donnent l'air monstrueux. Il pourrait vivre en tant que solitaire, mais il serait seul, si seul. Et la compagnie, même cordiale et désintéressée, l'apaise d'une façon particulière. Il se secoue quelque peu et laisse la femelle descendre, faisant attention, tout de même, qu'elle ne chute pas. Il se retourne pour la regarder, un sourire aux babines.

"Moi c'est Made-... Madde, ouais, Madde."

Hors de question de dire son vrai prénom. Si la femelle apprend qu'il se prénomme Madeleine, elle se foutra de sa gueule jusqu'à ce que les poules aient des crocs, et peut-être même lui faussera-t-elle compagnie. Il la regarde, attendant qu'elle dévoile son prénom. Il évite de s'asseoir, malgré tout son contrôle, un certain petit bout rose a ressorti son nez. Le poil diaphane, Madeleine observe les alentours. La nuit se lève tranquillement, la lune se fait de plus en plus tardive en ce moment, les beaux jours reviennent. Les bourgeons éclosent, donnant de jolies fleurs parfumées. Il pose à nouveau son regard sur la voleuse, et sourit un peu bêtement, un air niais sur la truffe. Elle aussi va éclore, quitter sa branche qui la vampirise, étaler ses pétales au soleil levant, laissant la rosée se poser sur elle et vivre pleinement en volant la lumière et les nutriments présents dans le sol à d'autres plantes.

Confortablement installée sur ce large dos, Vinara profitait, sentant qu'elle faisait un petit effet au mâle qui se retrouvait à devoir la supporter … Il avait l'air de bien le vivre, comme si le jeu était aussi plaisant pour lui que pour elle. Il souriait de surprise, dévoilant sa dentition à en faire frissonner un ours. La solitaire refrénait son envie de trembloter devant ces crocs carnassiers. La chair devait être plus facile à découper, à trancher et à déchiqueter avec de telles dents que les siennes en étaient jalouses de devoir galérer à sectionner un morceau un peu trop dur. Le loup albinos avait en soit de la chance dans son malheur.
Il se redressa d'un seul coup et ne s'y attendant pas, la chapardeuse resserra son étreinte, se cramponnant à cette boule de muscles. Pourquoi diable bougeait-il ?! Elle voulut pestiférer mais il resta gentillet. Il ne semblait pas décider à la déloger et même lorsqu'il descendit de son promontoire, son saut ne la délogea pas, au contraire, elle resta bien accrochée tant l'atterrissage fut sans grand choc pour elle. Vinara restait sur son dos, plongeant sa tête dans les poils de la nuque du crocodile. Elle profitait d'une affection qui lui avait quelque peu manqué et elle souriant franchement, bien que le mâle ne put voir ce beau sourire. Elle l'écoutait calmement puis lorsqu'il se stoppa, elle se laissa glisser le long de son flanc, retrouvant le sol de ses pattes et retirant sa charge du dos de Madde. Elle riva ses yeux vairons dans les siens.

« Majesté a rendu les biens.

Il ne s'en était pas rendu compte mais il avait désormais ses bracelets autour des pattes avant même qu'il ne saute du muret. Elle souriait moqueusement. Vinara n'était pas du genre à rendre et pourtant, elle venait de le faire. Par gentillesse ? Non. Simplement parce qu'elle avait compris que ces accessoires ne lui rapporteraient rien au marché noir des solitaires. Et puis les garder ne lui serviraient à rien à part l'encombrer par leurs grandeurs. Elle se demanda un instant comment le mâle percevrait ce geste. Croirait-il qu'elle était une voleuse sympathique ? Ou prendrait-il cela pour de la pitié ? Des remords de voleur ? Hmm cette question était intéressante et elle attendrait la réaction avec patience.

« Je vois. Un solitaire dans une meute.

Il avait de la chance. Elle, elle n'aurait jamais pu avoir cette position tellement les Ethelkrus voyaient d'un mauvais œil les solitaires. Elle n'avait jamais été la bienvenue et elle n'aurait jamais pu avoir la liberté clanique que les Lazulis laissaient à ce cher crocodile.
Elle lâcha un petit soupire et baissant la tête, elle remarqua l'état dans lequel était Madde. Un grand sourire se dessina sur ses babines et elle s'approcha de lui.

« Vinara.

Pas besoin de dire enchanté. Ils se connaissaient depuis un moment déjà et ces mondanités avaient le don de donner la nausée à la chapardeuse. Elle était enchantée de connaître personne, bien que le mâle blanc suscitait quelque chose d'inédit en elle. Elle franchit les quelques centimètres et se planta devant lui. Elle le fixait droit dans les yeux. Il était différent. Il réagissait. Il était attiré par elle. Etait-ce uniquement parce qu'elle lui donnait de l'attention ? Osait le toucher ? Elle l'ignorait mais de le voir dans cet état lui faisait plaisir. Elle se sentait combler là où Grimm avait échoué. Vinara se sentait louve. Elle attirait par ses courbes, elle charmait le crocodile blanc et lui réagissait. Elle n'avait pas besoin de cette odeur de chaleurs pour le rendre toute chose. Elle n'avait pas besoin de Mère Nature. Non il réagissait de ses actes, de son comportement … Il était intéressé là où les autres mâles ne bronchaient pas.
La chapardeuse avait partagé une litière de mousse avec son ancien compagnon. Ils avaient dormi l'un contre l'autre mais à aucun moment il n'avait désiré aller plus loin. Il ne semblait en avoir envie que lorsque l'odeur des chaleurs venait embaumer le pelage de la louve. Et ils n'avaient jamais consumé le lien de leur union. Vinara l'avait quelque peu regretté. Elle aimait Grimm et lui il fuyait dans sa tâche, la négligeant quant elle avait besoin de lui. Elle n'était pas du genre à se plaindre, à dire quand ça ne va pas et lui était resté insensible à ses signaux de détresse. A croire que la charge de bêta valait plus que de l'amour.
Elle soupira à cette pensée. Madde était différent. Il ne restait pas de marbre. A croire que Mère Nature lui importait peu et que ses pulsions étaient tout le temps présentent.

« Madde. Prends moi.

Nul sourire moqueur, nul rictus machiavélique, seule la sincérité de ces mots brûlaient dans les yeux de la femelle. Elle avait besoin de se sentir complète, elle avait besoin de cet acte pour continuer, pour se sentir libre. Son raisonnement était sans doute faussé mais elle avait besoin de cet amour charnel d'un coup pour reprendre sa vie. Elle voulait combler ce manque qui lui avait fait défaut de nombreuses années. Elle ne s'était jamais pliée par fierté mais aujourd'hui, elle ne se sentirait pas bafouée s'il acceptait sa requête. Non. Elle était celle qui venait de faire le premier pas. Elle était celle qui l'avait mis dans cet état. Et elle voulait être celle qui le comblerait en s'offrant à lui. Elle le désirait et puis, elle ne risquerait pas de finir en cloque de cette union d'une fois.

Madeleine

Le loup-crocodile regarde la femelle d'un air interloqué, elle a eu le temps de lui rendre ses bracelets, il regarde les bouts de cuir cloutés, ils sont tous remis comme avant. Elle est d'une discrétion folle, il ne l'a même pas senti, ou alors son esprit était occupé à autre chose, comme maîtriser son drôle de désir. Il repart faire les cent pas, ne comprenant pas vraiment pourquoi cette femelle lui fait autant d'effets. Pourtant, avec son sarcasme et son humour noir, Madeleine fait fuir toute être vivant. Ses débats philosophiques n'intéressent personne, on lui reproche sa flemme constante, et son besoin en eau considérable. Il est un poids pour la société et pour toute louve, il ne ferait même pas un bon amant, il en est persuadé. Malgré tout, il la suit du regard et quand ses babines prononcent et formulent son prénom, un violent frisson lui parcourt l'échine. Vinara. Son prénom lui va à ravir, elle est acide et chantante, la langue se délie en prononçant ces quelques syllabes. Vinara est ensorcelant, et alors qu'il répète mentalement son prénom tout en la décrivant, son envie se fait plus forte. Son esprit de mâle pervers s'égare quelque peu. Il l'imagine la croupe relevée, le dos cambré, un regard de braise collé sur le visage. Il secoue la tête pour chasser ses idées qui ne l'aident pas du tout à se calmer. Un sourire coquin dévoile ses crocs.

Il saute au-dessus d'une fissure tandis qu'elle le regarde. Ce jeu de séduction taquin se révèle particulièrement divertissant, et le crocodile a repris toute son opacité initiale. Tandis qu'il atterrit de l'autre côté, la fissure béante crache un panache de fumée, il sent les écailles de sa queue chauffer quelque peu. Il ignore si c'est la vapeur ou son envie qui lui donne aussi chaud. Il ne sait pas si c'est le manque d'eau ou le désir qui rend sa gueule si sèche. Il revient près de la belle et indomptable Vinara, son odeur l'enivre et son cœur bat plus lourdement, comme si un mutisme les englobe tous les deux, leur créant une bulle particulièrement intime. Il ignore si elle sent la tension qu'elle a crée, mais il ne cessera pas de faire son charmeur. Il lui tourne autour, passant sa queue de crocodile sous son museau, une fine écaille caresse son poitrail. Il sourit d'un air amusé, et quand elle prend la parole, il se stoppe. Ce n'est pas tant une parole, c'est plus un murmure, une supplication, une prière. Il s'arrête, la regarde, à la recherche d'un rictus blagueur ou moqueur. Mais non, elle semble sérieuse, et ses yeux suintent d'un désir ardent soudain. Il n'y croit pas une seule seconde. Il s'approche, et reste devant elle, attendant qu'elle explose de rire et lui dise "t'y as cru, avoue" mais rien ne se passe. Soudainement fiévreux, son cœur triple ses battements, il perd peu à peu sa couleur crème, et son pouls lui bat aux tempes. C'est un miracle. Jamais une femelle ne l'a trouvé beau, jamais une femelle ne l'a désiré. Sa propre mère pouvait lui dire qu'il était beau, elle ne le voyait pas, au point de le traiter comme une femelle toutes ces années. Il replonge un instant dans ses souvenirs. Sa mère l'appelant de sa voix grave et enrouée. Madeleeeeine, ma chérie, où es-tu ? Il ignorait, à l'époque, et il obéissait tendrement, pensant qu'après tout, il pouvait bien être une femelle. Mais il lui en avait terriblement voulu quand sa puberté était venue. Quand il avait eu ses premières érections, et quand sa voix avait mué. Son aveugle de mère avait réussi à confondre son propre enfant avec une femelle. Depuis, Madde apporte une grande importance à son apparence, ses cheveux sont rasés, il fronce souvent les sourcils et s'entraîne pour développer ses muscles. Il ne sera plus jamais pris pour une femelle. Plus jamais. Et si Madeleine restait son prénom de baptême, à présent, il était Madde. Aux yeux de tous, il était Madde.

Il revient à la réalité dans un bref sursaut, la femelle est contre lui, et sans faire attention, il a plongé son museau dans le cou de la belle Vinara. Ses poils sont doux, et il sent ses deux incisives racler le long de sa peau. Il craint toujours que ça ne soit une mauvaise blague. Après tout, cela pourrait être son genre. Elle lui a volé ses bracelets, elle l'a taquiné. Mais elle semble si sérieuse, si consentante alors qu'il caresse le long de son échine du dessous de sa mâchoire. Elle sent si bon. Et une délicieuse impression de prendre quelque chose qui appartient à quelqu'un d'autre l'assaille. Elle était promise à un mâle, et elle vient se pâmer sous sa truffe. Elle était amoureuse, elle avait quitté sa liberté et ses convictions pour lui, et elle venait de lui demander, à lui, de la prendre. Un sentiment de jouissance intense le prend, il sourit et dans un geste brusque et une fierté masculine propre aux couillus, il grimpe sur elle. Sans faire attention à ses longs crocs, il lui pince la nuque entre ses mâchoires, sa longue queue de crocodile ne semble plus qu'une plume, et il s'affaire à rendre service à la dame. Après tout, c'est elle qui a demandé, et Madde ne saurait dire non à une charmante demoiselle. Et puis, ce n'est pas comme s'il allait le regretter ou alors avoir un souvenir de cet acte. De plus, ça lui permettrait de se faire la patte. Et pourquoi pas garder la nana sous la patte si une envie lui revient ? Madde sourit, sa langue percée à demi sortie de sa gueule, son sourire est presque dément, son cœur bat si vite qu'il est presque transparent. Comme si la femelle avait un nuage de brume sur le dos.

Un long râle puissant et libérateur signe la fin de l'acte. Il se retire, et s'approche de Vinara. Il imagine qu'elle n'est pas très câlin, en général et encore moins après ça. Il sourit tout de même, se frotte à elle et lui assène un coup de hanche taquin. Même si le jeu a eu une finalité, il n'est pas fini pour autant. Le reptile-lupin garde ce sourire aux babines, on voit presque à travers son corps tant son cœur bat vite, le souffle court, il finit par revenir sur son muret. Il se sent plus léger, comme si une horrible appréhension venait de se taire. Il est un mâle, il a fait un truc de mâle. Il n'est pas une femelle. Et toc, prends-toi ça m'man. Ta petite Madeleine a fait du bien à une dame. Il regarde Vinara du coin de l'œil, il aime la regarder, sa petite moue boudeuse, elle semble si loin de tout. Une drôle de rencontre vient de se produire, et Madde lui-même n'arrive pas à cerner comment tout cela a pu se passer. Dans un premier temps, elle lui avait volé ses affaires, ils avaient discuté et le voilà vide comme une coquille d'escargot, fier et heureux d'avoir apposé sa marque à la femelle devant lui. Elle est d'une beauté cruelle, presque piquante. Madde pose sa mâchoire sur ses pattes avant, il sent les clous de ses bracelets s'enfoncer dans sa peau presque diaphane. Il sourit toujours, et son regard ne quitte pas Vinara.

"Une vraie Reine, toi. On pourrait s'enfuir tous les deux, si tu veux."

Il ricane doucement, pour se donner une contenance. Si elle disait oui, il la suivrait, si elle disait non, il jouerait la carte du c'était pour la blague et le cliché des deux amants qui se cassent. Il l'observe toujours, un sourcil plus haut que l'autre, il se pourlèche les babines et sa large gueule s'ouvre pour bailler. Il se sent bien, il ne s'est jamais senti aussi bien. Il se demande si, après tout, le sexe n'était pas une finalité en soi, un accès au bonheur. Lui qui se moquait de tous ces jeunes adolescents excités du gland, le voilà aussi bête et niais qu'un louvard découvrant une croupe. Il sourit, encore et toujours, et au fond de lui, il espère que la femelle ne va pas se barrer, le laisser en plan après avoir obtenu ce qu'elle voulait. Il ne lui passe pas la bague au doigt, mais il l'apprécie, de premiers abords. Une sensation de manque se pose sur son dos, et si elle revenait là, sur lui ? Il pourrait s'endormir, il pense, et d'un coup, il réalise que le besoin d'eau se fait moins terrible, ses écailles sèches le tiraillent moins. Il ira se baigner plus tard, mais pour l'instant, il veut garder le parfum de la femelle entre ses poils.