Prenons le large ! ☠ libre

« Prenons le large !

« Creek & libre


Aujourd'hui était un grand jour. Aujourd'hui, Maman avait accepté de laisser sortir ses garçons sans surveillance, jugeant qu'elle n'avait plus besoin d'être systématiquement présente à chaque sortie. Bien-sûr, elle leur avait demandé d'être prudent et réfléchi. Evidemment, cette demande passa entre les deux oreilles du jeune mousse sans vraiment s'y arrêter et à peine Heever leur avait-elle souffler sur la truffe en riant pour les laisser explorer leur île qu'ils connaissaient déjà par coeur, Creek avait bondit dehors. A l'abordage d'un monde plus grand que leur petite île. Forcément, ce qui ressemblait le plus à du plus loin que leur terre natale, c'était le bateau échoué qu'Heever leur avait formellement interdit. Un très large sourire étira les babines du louveteau qui courait à en perdre haleine. Des étincelles pétillèrent dans ses prunelles bleu nuit. A chaque bond les perles accrochées à ses atebas et les boucles à ses oreilles teintaient les une contre les autres, des bruits de breloques caractéristiques qui faisait de lui une cible facile. Du haut de sa colline, Heever suivait ses fils des yeux, et la destination de Creek était loin d'être méconnue de la mère de famille. Dans un soupir, elle haussa les épaules et s'allongea. Son fils avait quelques difficultés avec l'autorité, mais bon, cela ferait un bon pirate. Elle le punirait pour tard, pour la forme. Elle restait la mère, après tout. Le regard de la louve-murène suivit ensuite Tatch puis son troisième fils.

Creek, quand à lui voyait déjà les voiles déchirées de la carcasse de bois flottant dans la brise. Lorsqu'il parvint sur la plage, il bondit un peu partout en jetant des gerbes de sable dans de grands éclats de rire. Il était libre. Liiiibre. Liiiiiiiiiiiiibre. Libre de toute surveillance, de toute autorité. Il pouvait faire tout ce qu'il voulait. Et ce qu'il voulait, c'était trouver le trésor du bateau ! L'enfant aux coquillages s'avança vers la mer. Le bâtiment échoué n'était pas très loin, mais le ressac pouvait se révéler violent, ça il le savait. Et si son but était d'atteindre le bateau, c'était pas pour aller patauger avec les mérous. Le conseil de prudence de sa mère tinta à ses oreilles tout de même. Baaaah ! Il savait nager quand même ! Dans un haussement d'épaule, il entra dans l'eau fraîche et battit des pattes vaillamment jusqu'à l'épave. Ce fût long et fastidieux et le jeune mâle crû bien qu'il n'arriverait pas au bout ! Finalement ses petites pattes n'étaient pas encore assez puissantes et lorsqu'il grimpa enfin sur un rocher au bord du château de bois, il dû d’abord se laisser choir en respirant de grands goulées d'air. Bon, le trajet n'était pas facile ! Pas grave ! Cela mettrait du piment dans son récit à ses frangins ! Comme ça avec fierté il raconterait comment il avait braver les flots déments de l'océan en colère pour rejoindre la vieille épave et partir en quête de son trésor. Même Maman serait impressionnée par ses exploits de forban !

Son foulard de Raeder dégoulinait tant d'eau salée qu'il le passa autour de cou pour éviter d'avoir toute l'eau dans les yeux. Une fois cela fait, il observa un peu la carcasse du navire de l'extérieur : son bois humide et rongé par les algues et le sel, les trous dans sa coque, les poutres qui l’éventraient et les potentielles entrées. Finalement, le trajet le plus simple était de suivre cette collection de rochers, de sauter de l'un à l'autre pour atteindre le plancher moyen du bateau et atterrir dans les cales. Le seul risque était de glisser sur les cailloux humides et de se rompre le cou ou les pattes ou la colonne vertébrale ou n'importe quel autre os de son corps. Facile ! Débutant une chanson typique de la meute pour se donner du courage, il sauta précautionneusement en avant, assurant sa posture et recommencer jusqu'à atteindre le bois solide et ferme du bateau. Ici débutait sa quête. Tranquillement, la truffe proche du sol bien qu'il ne pouvait sentir autre chose que l'iode et la moisissure, il commença son repérage, restant attentifs au moindre détail. Ce soir, il rentrerait victorieux !    

« Prenons le large !

« Creek & Safran & libre

Un glapissement de surprise jaillit de la gorge du louveteau lorsqu'on l’attrapa au collet. Pendu au dessus du vide, Creek s'immobilisa par peur de tomber mais la voix de Safran chatouilla ses tympans et il se rassura : elle n'allait pas le tuer. Enfin, pas littéralement. Elle risquait peut-être de l'assassiner froidement, de le décapiter et de faire un collier de ses boyaux, pour le punir de braver l'interdit. Des jappements de contrariété remplacèrent la peur finalement alors que la louve au grand chapeau de pirate lui rendait sa liberté. Le Mousse fit un saut en arrière pour éviter tout coup de patte ou risquer d'être repris. Il ne rentrerait pas tout de suite, et certainement pas en étant rapatrié comme un prisonnier. La noiraude se détendit pourtant, en comprenant que sa cousine n'allait peut-être pas le sanctionner pour sa présence ici. Il y avait une infime chance pour que la femelle, plus ou moins garante de l'ordre chez les Raeders prennent sa petite escapade comme de l'audace et de l'intrépidité plutôt que comme la stupidité et l'inconscience de la jeunesse. Peut-être qu’elle serait fière de voir dans leurs rangs un jeune loup de mer aussi vaillant et fier ! Après tout, il prouvait qu'il avait la patte marine en venant ici tout seul ! Un large sourire étira les babines de Creek, dévoilant ses crocs de bébés inoffensifs. Il s'ébroua rapidement, afin de faire disparaître la sensation désagréable qu'avait laissé les dents de la Seconde.

« Comment tu fais pour faire pas de bruit sur le bois qui craque et qui gliiiiisse ? »

Le louveteau étant aussi curieux qu'audacieux, il lui était donc assez facile de s'asseoir et d'attendre sagement un apprentissage qu'il estimait bien mérité puisqu'il était venu le chercher jusque ici ! Il ne doutait pas que la brune était déjà sur place avant lui, de toute façon elle y passait beaucoup de temps.

« Tu m'apprends à être une ombre ? A glisser sur le navire comme un poisson dans l'eau ? »

Grand sourire. Le regard de nuit du jeune mâle pétillait d'espoir. Il ne fallait surtout pas qu'elle refuse, même si la possibilité d'une sentence planait encore sur la crâne du jeune forban en délit.  

« Prenons le large !

« Creek & Safran & libre


Oh. Oh évidemment. Voilà pourquoi Safran était aussi forte, voilà pourquoi elle était l'idéal du jeune pirate : parce qu'elle avait baigné dedans depuis sa naissance. Tandis que pour lui et ses frères, Heever les avait gardé cantonnés prêt de sa tanière, prisonniers de cette pseudo sécurité. C'était ridicule déjà, qu'elle ai si peur pour eux, voyons, un flibustier n'avait peur de rien ! Comment aurait-il pu se douter que leur génitrice avait été un peu trop protectrice et exigeante par peur de les voir s'enfuir loin d'elle comme Spleen des années plus tôt ? Le louveteau sombre fronça le museau. Il devait trouver un stratagème pour venir ici plus souvent et vivre sur ce navire échoué afin d'en apprendre tout ce qu'il pouvait et ainsi faire corps avec le bateau au point d'être aussi silencieux que l'un de ses nombreux habitants invertébrés. Ce serait un très bon apprentissage, un excellent entraînement. Mais pour ça, il devait aussi être plus agile, plus affûté et plus endurant. Il devait se tailler un corps fin comme brochet. Le sourire du gamin s'élargit comme s'il s'imaginait déjà être le poisson à l’impressionnant râtelier. Safran était en plus en train de lui dire la même chose : il lui fallait des pattes musclées, puissantes. Il allait devoir s'entraîner ferme et il allait commencer tout de suite !

« Apprend moi à devenir le meilleur des pirates ! »

C'était une demande dissimulée sous la certitude d'être un bon petit dominant et un fier Raeder. Parce qu'un vraie pirate ne cherchait pas la permission, il prenait ce qu'il voulait comme il le voulait. S'il convoitait un trésor, alors il devait tout mettre en oeuvre pour le dérober. Or ici, les joyaux, c'était la connaissance et l'expérience de la Seconde. Aussi fallait-il la jouer plus malin que ça. Mais tandis qu'il réfléchissait à comment ramollir le coeur de Safran pour qu'elle accepte d'être sa mentor, elle posa une patte aux longs doigts sur sa face et lui boucha la vue. Il gronda aussi vaillamment qu’inutilement car la femelle était bien plus forte que lui. Adulte vs enfant oblige. Plus pour longtemps ma vieille. Il allait devenir le plus fort, le plus féroce, et le plus craint de tous les forbans ! Il allait lui montrer à celle là ! Bientôt il la surpasserait et irait directement se placer au rang de Capitaine. Il en avait l'étoffe, il le savait. Il lui fallait juste grandir encore un peu. Poussé vers l'arrière, le marmot finit par s'asseoir pour essayer de contrer la pression de Safran mais il finit sur le dos plus vite qu'il n'aurait cru. Alors qu'il allait protester, la première leçon de la femelle brune apparut sous forme d'un conseil bien avisé : il devait nager à contre courant pour gagner en puissance. D'un bond il fût debout à nouveau et parti en courant, non sans déraper de temps en temps sur le plancher humide, vers un hublot ou une ouverture dans la coque, histoire de rejoindre la mer plus vite ! Qui avait besoin de redescendre de l'épave, retrouver la terre ferme et ensuite seulement rentrer dans l'eau froide ? Pourquoi aps directement se jeter dans la gueule de l'océan fougueux ?

« Ok ! Je commence tout de suite ! Tu verras je deviendrais le plus fort et le plus effrayant des Raeders ! »

Jeta-t-il en s'enfuyant dans un couloir sombre où le sol n'était pas très régulier...