Un échange comme un autre [PV PV Loth & Xercès]

La nuit était tombée sur ce petit monde bizarre. Le noir manteau nimbé d’étoiles scintillantes masquait l’avancée lente du grand solitaire. Peu de temps avant, on lui avait dit que quelqu’un cherchait à le trouver mais la source avait volontairement gardé tous les détails de côté. Une bien étrange personne d’ailleurs. Mais Tarik avait décidé d’y croire et s’était mis en route assez tard pour ne pas arriver trop tôt et profiter de l’obscurité. Non pas que les séides le dérangeait, hormis une, une seule petite erreur et il ne pouvait pas la mettre sur le compte de la jeunesse. Il en avait même quitté sa tanière de l’époque de peur de la recroiser.

Le lupin faisait la route en direction du Nasrin, un peu perplexe. Son visage resta fermé tout le trajet tant ses réflexions le minaient. Sa tête suivait comme un prolongement de sa colonne vertébrale, dessinant un mouvement de métronome, tout son corps décrivait ce même cycle perpétuel. Autant dire que d’aller par là ne le réjouissait pas tellement et certainement encore moins lorsqu’il saura la nature de cette convocation.

Il finit par rejoindre les lieux, encore assez vivants malgré le froid qui commençait à pointer le bout de son nez. Tout d’abord, il se trouva seul, pas un bruit. Aucune chouette, pas même un rongeur. Pourtant ce n’était pas un endroit réputé invivable et c’était, à sa connaissance, pour ça que la meute avait choisi de garder ces terres. Au bout d’un moment, Tar’ se disait même qu’il allait repartir tant ça devenait flippant. Quelque chose le retint, peut être son instinct, mais sa patience fut récompensé. Une ombre se détachait du décor et s’avançait vers lui. Il crut reconnaître une vieille connaissance.

La silhouette fine et gracile se détailla pour laisser apparaître un démon. Tarik ne réprima pas un léger grondement à son encontre. Mais en voyant les petites boules de poils qui l’accompagnaient, le vieux se contenta de la fixer avec un air agacé, ignorant au maximum les deux choses qui la suivait. Un traquenard assurément, l’histoire puait mais quand il s’agissait de cette femelle, Tar’ s’attendait au pire. Il aurait du le parier. La suite le laissa bouche bée. D’un coup, d’un seul, elle lui lançait que leurs ébats avaient débouchés sur les deux louveteaux qui l’accompagnaient. Il la regarda de nouveau, un peu perdu dans le fil de ses pensées. Il était devenu père, à son âge avancé ? En effet, l’idée ne lui déplaisait pas, mais la mise en forme le laissa perplexe.

« Ce n’est pas un plaisir de te revoir Loth… »

Mais lorsqu’il posa ses yeux verts sur les deux jeunes, il ne put s’empêcher de les aimer. Pourquoi en serait-il autrement ? Les enfants n’étaient pas les pires choses du monde, c’était un cadeau. Le mâle s’approcha doucement de ses gosses puis baissa la tête pour atteindre leur hauteur. On ne lui avait jamais appris à aimer et choyer des petits êtres fragiles et maladroitement, il leur lécha le bout du museau. Xercès et Amestrys, ils étaient si grands déjà, quelque part il n’aurait pas pu les renier.

« Je suis heureux de vous rencontrer tous les deux. »

Fit-il doucement de sa voix rauque. Tarik se releva pour adresser tout son mépris à leur mère puis lança sèchement :

« Tu comptes les abandonner sans rien dire ? »

Plus les jours passaient, plus Amestrys comprenait son monde. Son frère un peu plus grand que lui, bien plus joyeux de vivre. Sa mère, toujours douce et gentille envers eux et les autres jeunes, mais dès que les autres adultes partait, maman ne leur adressait plus aucuns mots gentils. Au début, cela paraissait si normal mais plus la conscience grandissait, plus les choses changeaient. Les pires moments restaient ceux où Both, leur oncle, se ramenait. On lisait la haine dans ses yeux, un ressentiment des plus profonds, quelque chose d’animal l’animait dès qu’il les voyait. Xercès en avait toujours tellement peur que Trys voulait le faire disparaître. Bon elle ne montrait pas son affection envers son frère tout le temps mais elle l’adorait quoi qu’il fasse. C’était certainement la seule chose qu’elle savait être vraie.

Un jour, tout se mua en une crainte sourde. La belle louve à la chevelure rose sortit avec son frère dans sa gueule. Un ordre tacite lui indiquait de suivre la grande femelle. Ames’ ne comprenait pas vraiment pourquoi cette première sortie se fit si tard, et pourquoi ils y allaient tous les trois. Une peur lui tiraillait son petit corps à peine potelé mais la demoiselle grise suivit le mouvement sans faire d’histoire. Marcher aussi longtemps était fatiguant, et quand le petit mâle toucha le sol, sa sœur tenta de se ranger avec lui. Il suivait une drôle de bestiole avec laquelle il joua quelques secondes. Sans trop s’en rendre compte, ils étaient arrivés au Nasrin. Xercès se mit à reculer sur leur mère qui lui dit sèchement de se pousser.

La louvette intriguée, tourna le museau vers ce que regardait l’autre louveteau. Une immense masse velue se détachait du manteau d’étoiles. Ca faisait peur et ça impressionnait la louvette grisâtre mais il ne semblait pas agressif envers eux et en fait, il les ignorait pour grogner sur la louve blanche. Cette dernière s’avança vers le loup à la grande crinière et dans le même temps, son frère la rejoignit pour s’extasier sur le paysage. Déconcentrée, la demoiselle aux cheveux rosés regarda le jardin qu’elle avait occulté comme tout le reste du voyage.

« Euh oui c’est joli… dis Xercès, il te fait pas peur lui ? »

Fit-elle un peu évasive. Mais Loth lança bien fort à leur encontre qu’il était leur père. Le mâle eut la même réaction que sa fille, interloquée et la bouche bée. Cette chose énorme était donc leur géniteur ? Et ils allaient vivre avec ? Et pourquoi donc ? Amestrys prostrée sur ses quatre pattes et la queue entre les pattes vit le géant s’approcher d’eux et lui lécher la truffe. Il n’avait pas l’air méchant mais l’idée même de quitter le clan l’effrayait.