Somebody out there ? | Libre

Ici, tout était sec.

Entre ses griffes, le sable crissait. La louve claire leva la tête et eu la surprise d’être éblouie par des rayons lumineux dorés. Le soleil, qui semblait ne pas vouloir se montrer, se révélait maintenant, ici, en ces lieux. La chaleur de celui-ci réchauffa le poil humide de la solitaire en quête inconnue qui venait de se prendre la pluie. Littéralement. Les yeux plissés la queue basse et l’échine relâchée, elle marchait depuis près d’une heure pour arriver ici sans but précis. A l’approche d’un arbre solitaire, elle fut soulagée, et se dit qu’elle allait pouvoir se prélasser un peu près de celui-ci tout en séchant au soleil. Ses pattes cédèrent alors sous son pois et se laissa s’étaler contre les racines maigres de sa trouvaille. Elle inspira longuement et ferma les yeux, levant légèrement le museau pour apprécier la chaleur.

Ça faisait du bien.

Le silence était au rendez-vous. Pas un seul être vivant en vue si ce n’est cet arbre contre lequel elle s’était adossée, les écorces de ce dernier s’emmêlant légèrement avec la chevelure foncée de la femelle. Solitude.

Elle soupira.
Même si elle appréciait pour sûr ce silence et ce temps de repos, elle aurait quand même bien aimé un peu de compagnie, peu importe qui… Ou même quoi. Elle pensa que le fait d’analyser les autres devait lui manquer, ce qui expliquait ce besoin actuel. Analyser les autres était intéressant. Observer les autres était passionnant. En bref, quoi de mieux que de deviner une personne… Surtout quand on s’ennuie.

Ne voyant toujours pas d’ombre à l’horizon, elle se mit à observer les frêles branches au-dessus d’elle.

Lorsque River ferma les paupières pour apprécier la chaleur du soleil sur celles-ci, un crissement la fit relever les yeux aussitôt. Dans un soupir, elle balaya la plaine de sable de ses prunelles bleues, et c’est à ce moment-là qu’elle aperçut une ombre brune. Une forme lupine se dessinait au loin, devenant de plus en plus grosse. Elle se rapprochait. Elle entendit alors des cris. De détresse ? De douleur ? Ou bien de folie ? Elle aurait presque pu entendre un ricanement derrière ce bruit aigu de douleur. La louve claire se redressa, interloquée. Qui était ce loup étrange qui poussait des cris ? Au fur et à mesure qu’il se rapprocha, elle remarqua qu’il ne l’avait même pas remarquée. « LAISSEZ-MOI !! LAISSEZ-MOI !! » La détresse cette-fois, était bien réelle. Le loup se prit la tête entre les pattes, elle supposa qu’il essayait de se calmer.

C’était un mâle, son pelage était brun chocolat, et possédait une crête blanche jusqu’à l’échine. Elle avait également remarqué ses yeux verts d’eau, emplis de peur, de détresse. Ils étaient rougis. Des marquages blancs parcouraient son corps. Elle ne le connaissait pas, mais il fallait dire qu’elle ne connaissait pas grand monde ici.

River regarda autour d’elle, mais elle ne vit que du sable et de la brousse sèche. Non, il n’y avait personne. Elle en déduisit que ce loup était hanté par des démons intérieurs. Voyons voyons. Le loup qui sembla l’avoir enfin remarquée, la regardait maintenant avec une figure décomposée. Cette scène l’amusa un peu, mais elle n’en montra rien. Pas même un sourire déplacé. Elle se mit sur ses pattes.

« Ne sois pas effrayé de ma présence, loup. »

Elle avança doucement, pour qu’il ne panique pas après une telle crise. Et là, elle remarqua une entaille sur l’épaule de l’inconnu. Elle s’arrêta à deux mètres de lui et plissa les yeux. C’était finalement un petit peu plus grave que ce qu’elle pensait. Elle observa sa blessure puis releva le regard vers le loup.

« Je suis River Song, je suis une solitaire. Comment t’appelles-tu ? »

Elle songea d’abord à le mettre en confiance avant de tenter d’en savoir davantage ou de comprendre quoi que ce soit d’autre. Elle attendit alors sa réponse tranquillement.

Le loup la dévisageait. D’une façon très étrange, à presque faire peur. Cependant, River n’était pas facilement impressionnable. Elle trouvait même cela intéressant. Oui, intéressant. Une chose était d’abord certaine, c’était que ce loup n’était pas bien. Physiquement et mentalement. Mais pas au mauvais sens du terme, juste… Elle constata simplement. « Mon nom est Haku. Je suis… Un chasseur Séide. » Un séide, donc. Quoiqu’elle aurait pu le remarquer. Ou pas d’ailleurs. Son odeur était mêlée à celle du sang et de la peur. Pas très beau à voir ni à sentir. Elle avait envie de savoir ce qui le hantait. Cette fois, elle fut curieuse. Elle savait qu’il ne valait mieux pas lui poser directement la question, mais l’envie lui démangeait. La femelle se leva et marcha en diagonale d’Haku. Elle s’en rapprocha un peu, sans pourtant en donner l’impression. Elle l’observa derrière son épaule.

« Ah bon. Enchantée. »

Elle avait dit cela sur un ton très neutre, voire jovial. Un peu paradoxal vu la situation, car elle a cru voir dans ses yeux une envie plutôt malsaine à son égard. Mais bon, cela amusait River plus qu’autre chose alors, amusons-nous. De toute façon, elle ne voyait pas trop ce qu’il pourrait lui faire dans le pire des cas. S’il l’attaquait de folie… Elle saurait se défendre toute seule. Elle était plus maligne que cela. Mais bon. Si elle pouvait l’éviter…

Elle admira de nouveau le soleil vif avec un sourire.

« Qu’est-ce qui amène un Séide comme toi par ici ? Tu avais envie… D’un peu de chaleur ? »

Oui d’ailleurs, c’est vrai, qu’est-ce qui l’avait donc amené par ici, en terres neutres ? Elle s’ennuyait. Peut-être qu’après qu’Haku se soit calmé, et après s’être occupé de cette vilaine blessure à l’épaule, ils pourraient aller se balader, ou parler pourquoi pas. Elle pourrait ainsi mieux observer son comportement. Elle se demandait comment il chassait… Était-il ainsi possédé lorsqu’il traquait une proie ? Cela pourrait être fascinant à observer… Bref, elle délirait complet.

Rire.

Cette fois, ce loup dérangé commençait à agacer notre louve blanche. Il avait une drôle façon de s’exprimer envers ceux qui tentent de comprendre. Il ne devait certainement pas y avoir beaucoup de loups ici qui devait apprécier ce dénommé Haku. River fronça les sourcils, toujours de marbre. Il ne l’effrayait guère, mais il l’agaçait très sérieusement maintenant. La patience en ce jour ne semblait donc ne pas être au rendez-vous. Pourtant, River Song aimait analyser les autres, deviner les pensées, placer les loups dans des catégories. Mais là, c’est bon. Haku était dans la catégorie « Je fais genre je suis trop badass et détraqué alors qu’en fait je suis hyper seul dans ma vie. » Pour elle, il avait juste besoin d’un peu d’attention. « En fait ce qui me plaît ici c'est que c'est vaste... Vide... Isolé... Et que peu de loups passent par ici. Je viens souvent ici pour m'éloigner de tous ces idiots qui composent mon clan ! »

À priori ce loup ne portait en effet personne dans son cœur, pas même son clan. Mais alors pourquoi était-il séide ? Et pas solitaire, comme elle ? Peut-être serait-il bien mieux. Ou alors n’était-il pas assez débrouillard pour mener la dure vie de solitaire et de chasser lui-même sa nourriture ?

À cela s’ajoutait ce sourire forcé qu’il voulait sans doute effrayant. Mais toujours, River ne fut pas du tout impressionnée. Elle resta statique, et soupira même longuement.

« Tu m’exaspères, Séide. »

Elle se leva, et tourna autour du taré.

« Si tu penses ne serait-ce qu’une seconde à m’impressionner avec ta « folie » comme tu aimes la montrer, eh bien tu te trompes.
Si tu détestes tant ton clan, pourquoi es-tu encore là, à jouer au petit rebelle ? Tu cherches à profiter du confort, de la facilité ? Pourquoi ne quittes-tu pas les tiens, si tu les hais tant ? »

La louve plissa les yeux, mettant le mâle au défi.