Mon sauveur [PV Kaylee et Athelstan]

La silhouette pourtant était loin de simplement se balader.
Le jour tombait doucement, et la brise froide de l'automne faisait écumer la surface de l'eau et onduler le pelage du grand loup brun. Les jours se rafraîchissaient bien vite ces derniers temps, ce qui n'annonçait rien de bon concernant l'hiver à venir. Enfant du printemps, Athelstan n'avait pas encore connu de vraie mauvaise saison, mais ses parents s'étaient abondamment chargé de leur en faire le récit à lui et sa fratrie lorsqu'ils vivaient encore dans le giron maternel. Les lunes qui étaient toujours les plus dures à vivre pour la meute, même si le dernier hiver avait été salvateur en gelant les plantes d'Everbloom pour permettre aux loups de parvenir à le vaincre. Mais cette année-là, il n'y avait pas de forêt tropicale sauvage qui venait réchauffer les terres. A la merci des embruns en cette fin de journée, le mâle ne put retenir un frisson. Il força l'allure pour réchauffer ses muscles. Ses lourdes mèches noires claquaient le long de son cou et de ses épaules.

Il avait passé une journée plutôt tranquille, ayant été uniquement affecté à une patrouille ce matin et à une dernière ronde ce soir jusqu'à la côte qui bordait l'Ouest des terres Etelkrus. les rumeurs circulaient que des odeurs de solitaires y avaient été perçues, non loin du temple de Dairo. Cela lui allait parfaitement d'aller s'assurer qu'il n'y avait aucun individu n'ayant rien à faire ici dans les parages, et le froid parvenait même à lui faire souhaite une petit escarmouche qui lui permettrait de travailler ses coups et ses bottes. Son père n'était toujours pas venu les rejoindre au sein de la meute, et Elaine n'avait plus guère le temps de s'entraîner en jouant avec lui. Il avait fait quelques simulacres de combat avec sa jeune soeur Korra avant qu'elle ne leur annonce qu'elle était enceinte - ce qui la rayait de la liste. Et il n'aurait jamais demandé à dame Alwine de combattre avec lui, elle qui lui semblait bien trop délicate pour être une combattante. Il léger sourire lui étira le museau à la pensée de son frère Nachos. C'est vrai s'il voulait affûter ses griffes et sa langue, il lui suffisait d'aller trouver le loup gris avec un peu de provocation sur le bout des lèvres, et l'autre réagirait au quart de tour. Il était prêt à le parier.
Il n'appréciait pas l'individu, alors que ses soeurs étaient, toutes différentes qu'elles soient l'une de l'autre, tout à fait charmantes. La vie était bien drôlement faite parfois.

Alors qu'il longeait les hauteurs des Falaises Littorales, le regard papillonnant entre le simulacre de sentier qu'il suivait et l'horizon gris-bleu sur lequel se reflétaient les lueurs du couchant, un bruit attira son attention. Il se figea, les oreilles redressées, pour distinguer de nouveau un son tout à fait identifiable. Par delà le bord de la falaise montait le cri d'un jeune loup. Sans perdre une seconde, le brun se précipita sur le bord et s'y pencha assez pour distinguer une silhouette sombre qui semblait dans une bien périlleuse situation. Apparemment elle avait commencé à emprunter la sente étroite qui menait au Temple de Dairo et s'était retrouvée piégée par la dangerosité du trajet. C'était sans doute l'un de ces solitaires - il était trop loin pour distinguer si même il connaissait cet individu - mais l'âme chevaleresque d'Athelstan se refusait à le laisser dans cette posture. Dans le pire des cas, il lui flanquerait une rossée une fois sauvé pour lui ôter l'envie de revenir chasser sur leurs terres.

"Ne bougez pas, j'arrive !" Jappa-t-il avant de se redresser pour filer, retournant sur ses pas.

A force de patrouilles, il connaissait parfaitement l'endroit où le sentier se divisait, l'un restant sur les hauteurs des Falaises et l'autre serpentant le long de ces dernières pour mener au temple de la Renarde. Il s'engouffra dans l'étroite sente aussi vite que la prudence le lui permettait, et commença à descendre, le flanc collé à la paroi. Il ne souffrait pas de vertige, mais il devait bien avouer que la vision de l'a-pic à un souffle de ses pattes combiné à la sensation que le vent tentait de l'en arracher était quelques peu intimidante. Pas après pas, il progressa le long de la paroi rocheuse. Et son regard put, au bout de quelques instants, accrocher la silhouette à demi-suspendue un peu plus loin. Il jappa de nouveau pour annoncer son approche et s'efforça d'y parvenir au plus vite. Il n'était pas question de tomber lui aussi, mais maintenant qu'il se trouvait tout proche il pouvait voir que l'autre ne tiendrait pas longtemps. C'était visiblement un louveteau, aucunement redoutable. Une femelle, identifia-t-il à l'odeur lorsqu'il en fut suffisamment proche.

D'un geste leste, il saisit la petite louve par la peau du cou et la tira pour qu'elle repose les quatre pattes sur le petit chemin. Inutile de penser même à la remonter entre ses crocs, ils tomberaient tous les deux au moindre trébuchement. D'un coup de museau léger, il lui indiqua d'avancer. Il fallait qu'elle marche jusqu'en haut, et il était là, au-dessus d'elle, pour la protéger.

"Monte." Dit-il. "Je te suis."

Kaylee

La louvette ne pouvait plus crier. Sa voix refusait de sortir de sa gueule, elle refusait d’alerter qui que ce soit. La peur la tétanisait, si bien que ses muscles d'habitude résistants et puissants lâchèrent. Elle tomba, de quelques centimètre. Et crut mourir, mais sa chute fut stoppée net par un loup. C'était lui? C'était vraiment lui? Celui qu'elle avait vu quelques minutes auparavant tout là haut? Non, bien sûr que non. Il ne se serait pas déplacé. Alors qui aurait pu venir? Peut importait en réalité, elle était en vie.
En. Vie.

Kaylee s'arrêta quelques secondes, elle écouta, elle sentit, elle observa. Sa respiration encore haletante après ce choque, la petiote essaya de se calmer. Elle se concentra sur les battements de son cœur et ne pensa plus qu'à ça. Elle sentit aussi, s’imprégnant de l'odeur du mâle qui l'avait rattrapé, et elle leva les yeux pour mieux le voir. Il était mignon, accueillant, vaillant. Un loup de meute quoi. Mais il semblait prêt à l'aider. Lorsqu'elle voulut avancer, elle s'effondra, s'allongea et pleura, elle avait eu si peur. Kaylee enfoui sa tête dans ses pattes et laissa les larmes couler le long de ses joues poilues. Le choc, un tel choc. Cela lui avait tellement fait peur. Elle se releva et regarda de ses yeux mouillés l'inconnu.
Elle devait lui faire confiance, pas le choix. Pour son bien et sa survie. Alors elle mis une patte devant de l'autre, elle chemina d'un pas non assuré vers l'arrivé. Protégée par sa bonne étoile qui brillait haut dans le ciel en compagnie des autres lueurs. Kaylee devait vivre pour elle, comme ça elle aurait des choses à lui raconter une fois en sa compagnie.

La gamine commença alors son périple en compagnie du grand loup. Elle mis une patte devant elle, puis ce fut de l'autre et de ces antérieurs. Et enfin, tout son corps se mouva. Elle fit attention et évita les zones friables pour posa ses petites jambes frêles là ou elle avait à peu près confiance. Et ce fut comme ça juste à la fin du chemin.
Une fois arrivée, elle courut et sauta sur son sauveur, se noyant dans sa douce fourrure chaude. Peu importait si il était méchant, dangereux ou bien un tueur en série. Elle voulait le remercier. Kaylee voulait rester avec lui, elle voulait qu'il la protège encore. Elle voulait une famille, un grand frère, lui il serait parfait. Lui, ses qualités et ses défauts.


Merci. Mais pourquoi tu m'a aidé? Je ne suis même pas de ta meute. Tu ne me connais pas non plus. Alors pourquoi?

Elle ne dis rien, mais il se trouvait qu'elle était heureuse lui parler, de communiquer. La petite se rendit compte qu'elle n'avait rien dit d'utile alors elle enchaîna.


Je, je suis Kaylee. Et c'est tout ce que je peux te dire de moi, j'en suis désolée. C'est pas que je ne veux pas! Sûrement pas! Ou que je n'ai pas le droit, mais c'est tout ce que je sais de moi même. Désolée.

La remontée du sentier périlleux lui sembla durer une éternité. Il devait rester extrêmement concentré pour surveiller à la fois ses propres pas sur le chemin abrupt, mais également les mouvements de la petite silhouette sombre qui avançait devant lui. Le vent fouettait son pelage, tantôt comme pour le plaquer contre la paroi, tantôt comme s'il tentait de l'en arracher. A leur gauche, le soleil déclinait en se rapprochant de l'horizon, peignant les nuages de couleurs feu et cramoisies. Après de longs instants, ils parvinrent enfin à rejoindre le sommet et le chemin bien plus sécurisé qui courrait en haut des Falaises. A peine le grand mâle eut-il fait un pas pour s'éloigner du bord et de la mer rugissante que la petite silhouette venait se blottir contre lui. Il redressa légèrement la tête, pris de court par cette démonstration soudaine d'affection. Il tapota le dos de la petite d'une patte qui se voulait réconfortante. Il avait dans sa vie eut assez peu affaire à de jeunes enfants. c'était surtout ses parents qui avaient veillé sur leur plus jeune couvée, alors que les trois aînés s'entraînaient dur pour devenir des combattants aussi émérites que leur paternel. Il n'état sans doute pas la personne la plus adaptée pour s'occuper de la jeune louve, du moins dans l'immédiat. Il réfléchit rapidement. Elle portait l'odeur des solitaires malgré sa présence sur les terres Etelkrus, aussi avait-elle potentiellement une famille à sa recherche. Une mère ne colère ou un père féroce, quelque-chose qui ne sentait pas bien bon.

Son regard vairon se posa sur la petite alors qu'elle releva le museau vers lui pour pépier une avalanche de phrases dont certaines qui paraissaient presque dépourvues de sens. Il attendit qu'elle ait terminé - ou n'ait plus de souffle, peut-être - pour prendre le temps de lui répondre.

"Aucun loup bien éduqué et avec un tant soi peu de bon sens ne laisserait quelqu'un en danger sans venir lui porter secours, jeune Dame Kaylee." Répondit-il avec un sourire bienveillant. "Mais que faîtes-vous ici ? N'avez vous pas une famille qui vous recherche ?"

Il vit du coin de l'oeil le ciel qui s'assombrissait à l'horizon. Cette mauvaise saison qui venait diablement trop vite apportait avec elle nombre de tempêtes. Il avait déjà été pris par surprise un matin, à lÎle Abysse, et ne tenait pas spécialement à renouveler l'expérience. Certes, ils avaient encore un peu de temps avant qu'elle n'arrive sur eux, mais s'il fallait compter le retour à Grand Castel avec ces petites pattes dans son sillage, le délai semblait nettement moins long.

Le flot de paroles de la petite était rapide et semblait intarissable, tant et si bien que sa voix fluette finit par arracher un léger sourire au grand brun. Visiblement, elle avait eu un accident ou quelque-chose de cet acabit qui lui avait fait perdre toute - ou au moins partie de - la mémoire. Il fut cependant surpris de l'entendre évoquer les Etelkrus sont tiquer sur le nom, comme le faisaient nombre de jeunes loups. Ses parents avaient sans doute dû en parler bien des fois, peut-être même faisaient-ils partie de la meute puisqu'elle semblait avoir évoqué un glowstick rouge. Légèrement désemparé face à ces informations qui, finalement, ne l'éclairaient que très peu, le grand loup s'accorda un instant pour réfléchir avant de répondre :

"Je me nomme Athelstan, jeune Dame, et je suis en effet Etelkru. Je vous avoue être intrigué par votre histoire, cependant nous ne pouvons rester ici plus longtemps, comme vous le voyez."

Il montra du bout de la queue le pan de ciel qui s'emplissait de nuage et approchait dangereusement de l'endroit où ils se trouvaient. Avec la marée qui montait, la tempête arriverait sans doute très rapidement, brusque et féroce. Un rideau grisâtre masquait déjà une partie du paysage, à l'endroit où les cieux s'étaient noircis.

"Si vous en avez la force, nous allons rejoindre Grand Castel, le camp de ma meute. ma soeur y est Alpha, c'est elle qui décidera si vous pouvez rester ou non." Ajouta-t-il. "Vous ne vous êtes pas blessée dans votre chute ?"

Elle n'avait pas de blessure visible, mais pour le reste, il doutait fort d'être assez compétent pour établir un diagnostic précis si il s'avérait qu'elle souffrait. Dans le pire des cas, elle était largement assez légère pour qu'il puisse la transporter jusqu'à Grand Castel, et ce même si le temps se montrait capricieux. Son entraînement avait tout de même porté ses fruits et, combiné à l'énergie de sa jeunesse, lui donnaient une force qu'il appréciait grandement dans son rôle de Garde.
Déjà, le vent soufflait de plus fortes bourrasques, qui soulevaient ses lourdes mèches brunes autour de ses épaules.