Long lost daugthter | Spleen

< Spleen ;

Il y avait des années que cette petite escapade lui trottait dans la tête. Des années qu'elle aurait voulu le revoir. Des années, en fait, depuis son arrivée chez les Lazulis. Jusqu'ici Spleen n'avait pas osé s'approcher des terres Nakhus. Mais c'était probablement une fausse excuse. En vérité, elle avait eu honte, honte d'être ce qu'elle était, douloureuse épine qui jamais ne sortirait de la patte de l'Oracle, et raviverait dans ses souvenirs la trahison de ses parents. Du moins c'est ce qu'elle avait toujours cru être aux yeux du loup blanc et noir. Elle avait déjà tant de mal à accepter elle-même qu'elle méritait d'être de ce monde malgré l'acte irréfléchi du roi fantôme et de la pirate, alors comment aurait-elle pu soutenir les yeux d'or si plein de douceur du gentil Volstein ? Ce sentiment d'être une erreur avait diminuée finalement grâce à son compagnon, et lentement elle avait appris à s'apprécier au travers de ses prunelles vairons. Et puis, ils avaient fondé une famille, union envers et contre tout de deux âmes adversaires. Une Lazuli et un Etelkru. Un amour plutôt défendu, que la Prêtresse marquée ne regrettait pour rien au monde. Son seul remord était d'avoir délaissé la divinité qui l'avait sauvé du feu courant dans ses veines sous les traits d'une malédiction mortelle à tout Raeder quittant Morne-Oeil, et de n'avoir si l'honorer à la hauteur de sa gratitude pour lui. Elle n'avait pas réagit assez vite quand des jeunes insolents étaient venus étendre leur blasphème a de la casse dans le temple de Mido.

Tout comme eux, elle se retrouvait porteuse d'un seau divin symbole de la déception de son Dieu. Tout en remontant le fleuve en direction de la Vallée des Nakhus, elle voyait son reflet vert briller dans son œil gauche. Ce n'était pas aussi douloureux qu'une marque au fer rouge bien sûr, mais son égo en était tout de même à vif. Heureusement cela n'avait entaché sa vision que les premières heures, probablement à cause de la douleur infligée au moment de la pose. Dans un soupir, Spleen lâcha son image vibrante de la rivière pour se focaliser sur ce mur magique verdâtre qui cerclait le territoire de sa meute. Enfin si on pouvait encore parler de meute, à l'heure où tous se déchirait et où deux clans semblaient se tirer dans les pattes. La disciple du Raptor plissa les yeux. Elle espérait que la barrière de Mido n'empêcherait que la traversée physique de la limite Lazuli et non le passage des sons. Et elle espérait aussi que son oncle soit à porter de voix... Même si elle était prête à courir le long de la frontières un bon moment, elle avait aussi un temple à nettoyer et entretenir afin d'apaiser la colère de la divinité de l'intelligence et de la vivacité d'esprit. Était-ce vraiment malin d'enfermer ensemble des loups dont la vision était diamétralement opposée ? Mido semblait croire qu'ainsi les Lazulis seraient forcés de résoudre leurs désaccords. Punition collective pour quelques dissidents qu'on n'avait pas su apaiser...

Par une chance inouïe, lorsqu'elle parvint à la délimitation magique, là où la rivière courait vers la Vallée des Murmures, une silhouette blanche semblait prête à l'accueillir. Lorsqu'il l'entendit, il se retourna vers elle et elle reconnu avec beaucoup de nostalgie et de tendresse ce regard d'or si doux, mais maintenant chargé par le poids des années. Volstein avait bien vieilli, tout comme elle qui n'était encore qu'une enfant lorsqu'il avait quitté Heever. Son coeur se serra alors qu'elle détaillait ce mâle qui aurait dû être pour elle ce que Roy n'avait jamais su être. Il aurait été la stabilité, la confiance, peut-être la complicité ? Il aurait été la chaleur quand sa mère aurait été le froid. Ou peut-être qu'il aurait été le soleil qui aurait fait fondre le coeur de glace de la pirate ? Si seulement la louve-murène avait su, avant d'être damnée, qu'il était celui dont elle avait besoin. Spleen aussi, de son côté aurait tant eu besoin d'un mâle comme lui dans son existence. Mais comment lui reprocher son départ ? Elle n'avait jamais pu lui en vouloir. Pourquoi aurait-il assumer l'erreur de son ex-compagne et de son frère aîné ? Un sourire timide naquit sur les babines de la femelle blanche. Elle était le parfait mélange de ses deux parents, dur rappel de qui elle était génétiquement parlant. Elle en était désolée pour le Nakhu. Pourtant, en ce monde imparfait, il ne restait à la Lazuli que ce mâle aux sentiments autrefois bafoués. Elle avait perdu tout ce qu'elle avait quitté sur Morne-Oeil, elle avait perdu tout ce qu'elle avait trouvé sur le Continent...

« J'espère qu'il n'est trop tard. »

En dehors de Sly et des enfants, mais eux appartenait à un avenir incertain où elle n'était pas sûre d'avoir encore sa place. Qu'en serait-il si Mido décidait de reposer sur elle la malédiction de son sang ? S'il décidait de la punir plus durement ? Qu'allait-il advenir si les Lazulis implosaient ? Si la meute se divisaient ? Se séparait ? Sans compter sur les tensions extérieurs à la meute, desquels ils étaient protégés momentanément par ce mur divin... C'était pour cela que Spleen était venu quérir Volstein. Pour refermer définitivement, elle l'espérait, les plaies du passé, pour mettre en ordre tout ce qui en manquait dans son existence, et pourquoi pas, quémander un peu de sagesse de l'Oracle Nakhu quand à la façon d'apaiser les âmes en souffrance des Lazulis puisque la réponse n'étaient chez leurs propres dieux...

« Je suis navrée, il m'est impossible d'aller plus loin. »

Mais toute mon âme vole vers toi avec tendresse Loup triste. C'était autrefois ainsi qu'elle le surnommait dans son esprit, à défaut d'osé penser à lui comme à un père. Celui qu'elle aurait rêvé d'avoir. Celui qu'elle aurait dû avoir.

< Spleen ;


Elle observa ce vieux loup barbu, ses ailes de cristal qui scintillaient, elle en était sûre, sous les rayons du soleil, mais dont elle n'avait que l'image verdie par ce mur translucide et légèrement coloré imposé par le Raptor. Elle se sentait si seule de ce côté du dôme. Si faible face à la colère divine. Et c'était tout à fait vrai, puisqu’elle n'était qu'un lapin ou même une fourmi à l'échelle du Panthéon de leur monde. Un faible sourire étira ses babines alors que la voix de l'Oracle lui parvenait, atténuée.

« J'ai trouvé une famille qui n'en était pas une pour moi. »

Répondit la femelle au pelage blanc sans réfléchir. Elle ne savait pourquoi seule la vérité s'imposa à son esprit pour parler à Volstein. Peut-être était-ce parce qu'elle l'estimait au delà de tout autre ? Peut-être parce qu'il était celui qui l'avait connu depuis... Sa plus lointaine enfance ? Peut-être parce qu'il était Prêtre de la Tempérance et de la Sagesse ? Elle se remémorait ses espoirs, ce soir-là lorsqu'elle avait rencontré Sly pour la première fois sur les plages des Côtes de Nacre. Elle y avait grandit avant d'être envoyée avec sa mère sur une île prison. Elle avait cru alors qu’elle trouverait le Roi des fantômes facilement. Il lui avait fallu une année complète avant de parcourir tout le continent en se préservant des autres loups. La sécheresse avaient rendu le monde mauvais et mesquin. Puis quand elle avait enfin découvert sa trace, elle avait aussi apprit qu'il avait une autre famille, une vraie. Une qu'il avait élevée lui-même. Son jeune coeur s'était alors brisé en des miettes que seul le temps savait balayer. Elle avait pourtant essayé, très lentement, de se rapprocher d'eux en intégrant leur meute. Mido l'avait alors sauvé de la damnation coulant dans ses veines. Mais il avait été le seul a vraiment lui offrir une chance. Autant qu’elle fût incapable de nouer de liens avec Roy ou Bree, ils ne vinrent vers elle. Jusqu'à la naissance des louveteaux de sa demie-soeur. Evènement qui leur avait permis de se découvrir finalement, sans toutefois devenir vraiment des sœurs.

« Mido m'a bénie autrefois et sauvée. Je m'efforce de transmettre aujourd'hui sa volonté aux Lazulis.
J'ai aussi ma propre famille. J'aimerais te présenter mes trois enfants, bientôt. »

Elle releva un peu le museau, fixant Volstein. Il aurait dû être leur grand-père. Il aurait pu être un proche chez qui chercher conseil et douceur. Il aurait pu être tant de chose ce pauvre loup bafoué. Spleen aurait tant aimé qu'il en ai été autrement.

« J'ai croisé ta fille l'autre jour. Queen et elle ont joué un moment ensemble. »

Il n'y avait pas d'amertume dans sa voix, même si une pointe de nostalgie serra son coeur. Une enfant si douce et si heureuse. Enfant qu’elle aurait pu être, elle, avec un géniteur différent.

« Je suis contente de voir que tu as rencontré quelqu'un. »

Quelqu'un d'autre qu'elle. Heever était certes une louve avec des qualités, mais elle n'avait jamais su aimer les autres à leur juste valeur, elle n'avait jamais su transmettre la tendresse et la complicité. Elle n'avait jamais su partager des émotions, et en cela elle avait brisé le coeur d'un loup honorable et broyé les espoirs de bonheur de sa propre fille. La vie était souvent injuste. Et cruelle.