Secrets du savoir | Nocera

Volstein

Il sortir de la grotte et soupira un coup, en regardant autour de lui. Il s'était mis à neiger, des petits flocons blancs tombaient sur ciel pour disparaître dans l'herbe de la vallée. Il pointa ses oreilles vers le ciel, en regardant ce dernier. Cela faisait une éternité, qu'il n'avait pas vu de neige.
Il fit un pas dehors et tourna la tête vers la louve qui l'accompagnait. Nocera était venue le chercher, dans l'ancienne tanière de Hanna, pour le faire un peu sortir de sa stupeur déprimée. Il lui en était reconnaissante : il avait perdu la notion du temps, tout seul, entouré de l'odeur de la louve qu'il aimait, avec qui il était sur qu'il allait passer ses derniers jours. Il la voyait encore dans ce lieu, lorsqu'il retournait la tête, comme une ombre, qui souriait en regardant leur toute petite fille. Qui lui apprenait à compter, qui souriait, ravie, lors de son anniversaire.

Leur fille lui avait dit que c'était le plus beau jour de sa vie... Si seulement il pouvait seulement revivre ce jour, encore et encore, lorsqu'ils avaient tous été heureux, ensemble. Il avait banalisé le bonheur qu'il vivait, avec sa chérie et sa fille, il s'y était habitué, et l'avait pris pour acquis, sans s'en soucier. Il n'avait pas pris plus de temps pour eux, il avait essayé de faire les deu en même temps : père de famille et Oracle. Mais maintenant, il l'avait perdue.
Il sourit doucement au lieu, illuminé doucement par les reflets de lumière sur les cristaux qui en bordaient les murs.

Il reviendrait, il avait encore besoin de croire qu'elle était toujours là, même juste un peu.

Il se retourna vers le chemin qu'ils avaient à suivre.
"J'ai cru observer que tu avais une faux, chez toi, hier. Pourrais-tu me racconter comme tu l'as eu ?" demanda-il calmement.

Nocera resta silencieuse, le temps que son mentor réfléchisse et se reconnecte avec l’instant présent. Elle n’osa, ne voulu l’interrompre dans ses pensées, lui témoigner tout le respect qu’il méritait et que requérait ce genre de moments. Elle sortit à sa suite et à sa question, baissa une oreille.

"Hmn..." Elle était incertaine de la formulation à avoir mais se lança tout de même, "ce manoir qui s'est dévoilé récemment sur l'île fantôme. Nous l'avons exploré, avec Yersine. Je l'ai trouvé là-bas."

Elle repensa à toute cette excurssion. D'abord mystérieux, tout cet endroit avait viré fascinant avec les choses trouvées dedans mais ensuite tout avait viré avec la découverte des dernières choses. La faux, le livre, l'ossuaire et la présence qui était venue les chercher tous les deux.

"Il y a quelque chose d'hostile, là-bas. Une ombre, qui a voulu nous chasser. Nous avons trépassé son territoire trop longtemps, mais ça souhait nous attaquer."

Elle souffla, ayant une moue.
Mais elle se reconcentra sur Volstein.

"Oracle... pensez-vous vous retirer bientôt ?"

Elle avait quelque part un peu peur de cette possibilité, ne sachant pas encore qui lui succèderait, mais de l'autre elle trouvait qu'il le méritait pleinement. Il avait amplement travaillé, défendu et dirigé la meute. Une troisième, petite part d'elle, aimait son enseignement et se demandait si laisser ses responsabilités voulait dire laisser le mentorat aussi.

Le vieux blanc marchait calmement, puis hocha la tête. Le manoir de Mona Lisa. Il attendit qu'elle ait fini de décrire ce qu'il s'était passé, puis pris la parole de sa voix fatiguée.

"Ce Manoir appartient à la sorcière Mona Lisa, c'est elle qui a lancé des malédictions, par exemple sur Hanna, en lui retirant les oreilles." dit-il doucement, un léger scintillement venant illuminer ses pupilles dorées. C'était pas qu'il trouvait cela drôle, au contraire, mais Hanna en avait toujours si peu parlé, et cela était doucement devenu un part de leur vie, encore plus lorsque Kerguelen était née sans oreilles.

Puis il pencha la tête. Se retirer. Oui. Cela faisant si longtemps qu'il avait prévu de le faire, mais il l'avait pas encore fait. Toujours pas, après si longtemps.

"... Je voulais le faire bien avant, pour passer la fin de mes jours avec Hanna ... Mais oui. Je vais me retirer, car je crains que l'âge ne trouve ma vision des choses. Je pourrais ainsi passer plus de temps avec ma fille." dit-il calmement, et son coeur se réchauffa un peu à cette idée, quittant peu à peu les tristes lieux froids de la tanière conjugale.

"Et toi, si tu étais complètement égoïste, que ferais tu de ta vie ?" demanda il.
Cela pouvait être vu comme égoïste, de vouloir quitter son poste de prêtre pour être avec sa famille. Du côté des mortels, c'était compréhensible, mais du coté des dieux ? Yurai, sans doute était l'une des plus compréhensives sur le sujet.

Elle hocha la tête, concentrée.

"MonaLisa..."

Elle enregistra le nom loin au fond d'elle pour ne jamais le perdre, le répétant plusieurs fois dans sa tête pour ainsi le graver. Quand ce fut fait, elle écouta la suite des paroles du loup âgé. Elle s'en trouva rassurée : ainsi il prévoyait donc se retrait bientôt. Elle avait sa réponse, cette séance serait sans doutes alors l'une de leurs dernière, car s'il souhaitait passer du temps avec sa fille, elle achèverait naturellement son mentorat. La réponse lui allait au final.

La question ouvrit son esprit, alors elle se replongea dedans, comme elle l'avait déjà fait lors de leurs leçons précédentes. Si elle était pleinement égoïste, que ferait-elle à cette heure-ci... ? La réponse lui vint après quelques instants de moulinage en bon et dû forme.

"Je l'ai déjà été, je pense. J'ai agit pour Sobieski en quittant les Lazulis mais pour moi-même aussi. J'avais déjà esquissé un début de réflexion là-dessus la dernière fois et j'y ai réfléchit encore plus depuis : je ne voulais pas perdre Sobieski et être là où il serait, tout le temps, par peur de le perdre à son tour. Je crois que j'aurais fait venir Yersine et Avalon aussi avec moi si j'avais continué dans cette voie. " Après une pause. "Depuis j'ai réussit un peu à le laisser s'éloigner, j'ai beaucoup plus foi en notre lien. Et j'ai pu moi-même partager quelques moments avec Yersine, et Eva aussi. Je pense que ça m'a fait du bien."

Elle posa ses yeux dans ceux de l'Oracle.

"En quoi est-ce égoïste pour vous de laisser votre rang pour prendre une retraite ? J'ai l'impression que vous l'avez mérité, c'est ce que ma logique me dicte mais... Je veux comprendre votre point de vue."

Il devait bien y avoir une logique dans l'esprit du sage, pour penser et qualifier son choix comme tel. Elle ne le comprenait pas, mais elle désirait que ce soit le cas. Elle voulait que cette leçon soit un nouveau moment d’apprentissage, de travail sur soi mais pas sur ses propres pensées. Comprendre celles des autres plutôt, réussir à mettre sa logique de côté quelques instants pour capter celles des autres.

Volstein

Il hocha la tête calmement, marchant à côté de la jeune louve. Elle n'était pas seulement intelligente et réfléchie, mais dans son cœur pointait le début d'une sagesse, d'une compréhension plus profonde de ce qu'il se passait, des liens entre le monde des émotions, de la réflexion et de l'action. Il la regardait doucement faire le lien entre les sentiments, les désirs et les faits. Elle ne serait peut être pas disciple de Yurai un jour, mais elle en avait les capacités. Plus que ça, elle avait une place ici, chez eux. Il se fit une note de le lui montrer lors de la cérémonie de passage.

Il était content qu'elle saisisse que son lien avec son frère serait impérissable. Ils étaient très, très proches, mais ils pouvaient également être proches d'autres loups, et il était ravi qu'elle explore d'autres sentiers.

Il comprit sa question et sourit doucement.
"En soi, je pourrais, personne ne m'en voudrait, même noter déesse Yurai sourirait surement sur cette décision de ma part. Ce semblant d'égoïsme serait compréhensible, sans doute, par tous." admit-il.

" Mais moi même, je désire rester encore un moment, le temps d'être sur que tout se déroulera facilement, qu'il n'y aura de difficultés pour la meute à faire la transition. D'ailleurs."

Il se tourna vers elle ses yeux d'or s'emplissant d'affection. Elle était presque devenue comme une deuxième fille, très, très différente de Kerguelen, mais à qui il avait appris à tenir, qu'il avait appris à comprendre.

"Le mur des dieux Lazulis ne tiendra pas éternellement et un jour il tombera. Nous ne pouvons être certains de pourquoi ou comment. Tu pourrais aller voir si ils te permettent de reprendre ton glowstick et si tu désires rester ici avec la lumière d'un autre, cela ne poserait aucun souci. Il n'y aurais que à en parler avec la déesse Yurai. "

Simplement pour aider à lisser la transition.
Il n'y avait pas besoin d'aller chercher très loin, alors. Le loup était simplement altruiste. Elle avait toujours l'opinion qu'il s'oubliait dans l'histoire et ferait bien d'aller prendre sa retraite, mais l'envie de laisser doucement la meute qu'il avait aimé dans les bras de la personne suivante lui apparut comme légitime aussi. Elle hocha silencieusement la tête. Pour comprendre la logique des autres, fallait-il simplement analyser le passé ? Non, insuffisant sans doutes, cela n'expliquait pas tout. Avoir du passé, voir leur caractère, et déduire la chose la plus probable. En entendant des sabots, il valait mieux chercher un cheval plutôt qu'un zèbre, disait-on. Elle comprenait mieux.
Elle avait l'impression d'avoir un petite clé en plus, avec cette réponse simple et en réfléchissant.

Il l'informa ensuite qu'il donnerait sa bénédiction si elle voulait avoir un autre glowstick que violet.
Sa pensée allait clairement vers l'idée d'en parler honnêtement avec la déesse, mais de par ses paroles, il pensait qu'elle le tolérerait comme lui. Elle était une enfant de la logique, pas de la sagesse... c'était vrai. Elle ne se voyait que mal porter la lumière violette. Les couleurs avaient cependant souvent signifier faire parti d'un clan en particulier. Mais ce dôme... Les choses ne se passaient pas bien là-bas, c'était un bouleversement majeur en soi, elle n'avait jamais vu de telle punition. Elle était un peu triste que cela vienne de Mido, qu'elle avait toujours vu comme incapable d'avoir une colère telle, c'était presque abandonner l'image qu'il avait eu pour elle et qui avait forgé sa vision avant de venir chez les Nakhus : une logique froide qui permettait de ne jamais s'emporter.

Mais les émotions avaient une logique, elles aussi, elle le savait désormais.
Dans son ire, elle n'était pas certaine de la réaction de Mido, cependant.

"Je vous en remercie, Oracle. Je ne sais pas si Mido accepterait, mais ce dôme est déjà un changement, c'est une certitude. Peut-être cela en apportera-t-il d'autre. Nous pouvons constater sa colère cependant, j'ai bien peur que cela en apporte des mauvais."

Elle baissa une oreille.

"Je pense que je suivrais cette voie, je retournerais voir Mido une fois le dôme tombé, pour l'apaiser comme a pu tenter de le faire Yersine. Nous pourront peut-être aider les Lazulis aussi. Mais quoi qu'il en soit, glowstick vert, violet si je me sens digne de la sagesse, ou rien... Je serais toujours d'abord du côtés des Nakhus."

Elle baissa la tête, et son visage s'éclaircit d'un sourire.

"Cette meute est ma famille, maintenant."

Volstein

Il sourit. C’était dur, c’était comme s’il étirait un visage qui n’avais jamais souri. Pourtant c’était dans ses habitudes. C’était il autant laissé déprimer que son visage ne se souvenait plus d’avoir souri ? Il pointa ses oreilles vers sa jeune élève.

« Je suis heureux que tu te sentes chez toi, ici. » dit-il doucement, ses yeux d’or brillant doucement.
Il se souvenait encore lorsqu’il était arrivé, lui, chez les Nakhus. Il se souvenait de comment il avait erré, dans les chemins tracés par son grand frère, dans les profondeurs de son désespoir amoureux. Il s’était déboussolé, lorsque les dieux avaient détruit tout ce qu’il connaissait. La meute. Séparé sa famille. Brisé le monde.
Son monde avait été si dur à recoller, mais il avait réussi. Il avait utilisé du vieux, du neuf, et quelques petits parts des mondes des autres. Hanna l’avait tant aidé, dans cette reconstruction, elle lui avait tenu la patte tout le long et il se sentait si chanceux d’avoir eu la chance d’avoir une louve aussi formidable qu’elle à ses côtés, tant d’années. Il aurait tant aimé qu’elle ne le quitte jamais. Il l’aimait toujours tant.

Il aperçut enfin, au loin, l’entrée du Dédale. Chez lui. Chez eux. Leur maison, à lui, aux Nakhus, et a Nocera.

« Merci de m’avoir aidé à retrouver la mienne. » dit-il doucement, en s’arrêtant un instant pour poser une patte sur l’épaule de son élève.
Elle avait dépassé le maître en l’aidant. Il n’y avait plus grand-chose qu’il puisse lui apprendre. Il était si heureux qu’elle avait croisé son chemin.
« Rentrons. Ils nous attendent. »

[finito pour moi & mentorat finito]

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