Les flots chantaient de nouveau, l’eau reprenant doucement ses droits face à la glace de la déesse. Jésus était-il pour quelque chose à ce dégèle ? Le bleu se le demandait mais au moins il ne mourrait pas de soif. Mais alors pourquoi avait-il bougé son cul déjà ? Judas se trouvait assit sur la berge enneigée à regarder la glace qui partait par blocs. C’était un sentiment mêlé d’incertitude, il devait bien avoir une chose à faire en venant ici.

« Bon je sais pas, un signe serait intéressant non ? »

Dit-il en regardant le dôme qui s’élevait devant lui. Combien de temps allait-il attendre avant de pouvoir fuir ses responsabilités ? Et de fuir les soigneurs qui le tannait sans cesse pour avoir telle ou telle plante. Comme si il avait le temps de se faire fouetter et de cueillir, non, clairement trop d’incompatibilité dans son emploi du temps franchement.

Le mâle se roula part terre en regardant cette vitre verdâtre à son côté, puis dans un mouvement las, se tortilla sur le dos au plus proche du dôme. Sa longue chevelure à moitié teintée trainait à son côté, son poil s’humidifiait à cause de la neige. Rien de bien confortable, mais bon, il n’était plus à ça près vu sa position. Heureusement que ses ailes n’avaient pas réellement de densité, sinon il était bon pour rester cloué au sol. Bon avec la faiblesse des pouvoirs, on pouvait les voir plus que de coutume et ça, ça le dérangeait. Trop grands, trop visibles, il ne pouvait pas passer inaperçu ainsi pour mieux vous laisser en plan à la première difficulté et des difficultés il y en avait beaucoup. Beaucoup trop, à commencé par les récoltes amoindries, les soigneurs pressants pour que lui se démène. Mais tergiverser ne lui apporterait rien.

Alors Judas se releva puis fixa l’autre côté du monde. Le vent semblait si froid au dehors, au moins une chose que le lazuli ne regrettait pas. Sans trop savoir pourquoi, il se mit à lécher la vitre salement, dégueulassant le tout d’une bave beige comme la pêche. Sa couronne et ses ailes qu’il trainait étaient de la même teinte et le jeune loup cherchait encore une explication à ces changements. En attendant, il ouvrait grand la gueule laissant ses crocs bien visible collés à la vitrine de Mido.

Le dôme était si insipide, c'était limite la plus grosse déception du cueilleur en cet instant mais il continua de tartiner la surface verdâtre. Ça ne lui rapportait rien mais ça l'occupait et pendant ce temps, il se prit à rêver de la sensation du vent dans sa fourrure. C'était étrange de se trouver bloquer à ce territoire sur lequel il avait atterri sans sa voir comment. Le loup bleu gris fermait les yeux, laissant sa tête dessiner des ondulations et son cul se colla naturellement au sol. Quand il rouvrit les yeux, un être étrange se présentait devant lui.

Dubitatif, Judas le regarda, la langue collée sur la prison de Mido. Il était pas normal celui là avec son air bizarre et ses piafs tout autour de lui. D'ailleurs le poulet à 3 yeux fit reculer le lazuli à la langue pendante. Ses pupilles en croix se braquèrent sur l'animal à l'air plus débile que le sien. Il plissa ses paupières comme pour juger l'animal. Ignorant l'autre loup qui lui parlait. Le son était étouffé par la vitre entre eux. Malheureusement, il aurait beau faire, Judas ne pouvait lire sur les lèvres et encore moins quand un foutu masque cachait le si joli minois d'un petit Nakhu. Le lazuli lâcha donc la poule des yeux, fixant de ses grands yeux l'autre loup.

«Il est pas normal ce gus!»

Remballant sa langue, Judas se trouvait sans possibilité de communication. Les dieux seuls savaient pourquoi mais le lupin appréciait bien cette situation cocasse. Et puis il avait un client pour s'occuper un peu en ce jour fabuleusement peu passionnant.

«Hey... HEY... En fait je crois que ça sert à rien de communiquer, bon tant pis, on va tenter un truc!»

Sa gueule se fendit d'un sourire satisfait. Une idée venait de germer dans son cerveau dérangé. Il se leva, battit des ailes et tourna le dos à... on ne peut même pas appeler cet inconnu un interlocuteur puisqu'ils ne s'entendaient pas parler. Et Judas leva sa queue haut, s'approcha du dôme pour y coller ses fesses. Dans un mouvement gracieux, bougea son cul en dandinant tout fier de ses conneries.

«Si avec ça il fuit pas, je tiens un excellent spécimen à emmerder. Si seulement c'était Jésus...»

Quelque part, c'était à moitié décevant de ne pas avoir de punition. Il soupira sans pour autant arrêter son manège.

Ignorant de ce qui se tramait dans son dos, le lupin bleuté commença à ralentir son tortillage de croupion. Quelque peu lassé de son manège, sans la réaction en direct, ce n’était pas drôle. Son regard se tourna lentement vers l’autre loup. Une étrange lueur violette, un vague éclat, avait fuit quand il se décida à tourner le museau. Cependant la réaction de Judas ne tarda pas, d’abord surpris, il se mit à hurler de douleur oui c’est une chochotte et partit en courant dans tous les sens. Ses ailes se mirent à se débattre sans logique et il se trouva au dessus du sol. Des petites larmes de douleurs se mêlaient à ses cris, puis il redescendit, enfin il se laissa tomber plutôt, fesse en avant et plongea dans la rivière. C’était glacé, c’était humide, sa fesse brûlait d’un feu étrange que le cueilleur n’aurait su décrire sur le moment. Trempé, la crinière en bataille, Judas se tourna vers l’autre en lui lançant un regard agacé.

« Qu’est-ce que tu m’as fais toi ? Démon ! »

Dans un bond, le loup se rua en direction du tigré violet. Seulement, il avait complètement oublié le dôme et se fracassa dessus tel une poupée de chiffon. Sonné, il se releva tout de même, mis ses pattes avant sur la vitre et colla sa tronche dessus. La buée se faisait plus intense à chaque respiration et un bruit sourd quand sa patte choquait le mur invisible. Il semblait marmonner à lui même des choses, mais franchement c’était pas tout public alors on passera ce chapitre.

Comme ses insultes ne semblaient pas passer la barrière, il lâcha l’affaire et tourna en rond devant l’inconnu. Maudissant Mido un peu plus à chaque passage, que pouvait-il faire ? Puis le lazuli s’arrêta net et leva la tête. Il savait que le son ne passait pas, alors il allait mimer. Se replaçant dos à la vitre, il put admirer le tatouage sur son fessier dans le reflet et gémit pour lui même. D’une patte, il montra cette chose étrange, se colla un peu plus à la vitre pour que l’autre puisse voir correctement. Une fois fait, il se tourna et fusilla du regard le Nakhu innocent puis gesticula un dôme virtuel avec ses pattes avant. Le message ? En gros, quand le dôme pète, je te pète la tronche. Il y avait encore des subtilités mais c’était la substance du message. Bien que ce fut plus par colère qu’il tentait de faire comprendre ça, plus tard, il ne serait pas aussi vindicatif bien entendu. Il voulait récupérer sa fesse. Le plus étrange pour le mâle, c’est que sa fesse semblait vouloir aller vers cet individu désormais.

« Bon dieu, va falloir que je fasse quelque chose, maintenant ça démange, je suis sûr que c’est infecté merde ! »

Tournant en rond comme un gogole pour essayer de jauger de la situation, il devait faire encore plus de peine à voir.

Alors qu’il tournait en rond, le Nakhu se mit à son tour à mimer des choses. Judas s’arrêta et regarda d’un air circonspect l’étranger. Il marmonna pour lui même :

« Corneille… fesse… cœur… glowstick ? Hein ? Il est en train de me dire qu’il enfonce son glow dans... »

N’osant finir sa phrase, le mâle eut un haut-le-cœur et manqua de repeindre le dôme avec son vomi. Il secoua le museau et tenta de dire clairement :

« Mais t’es pas bien ? D’où tu fais ce genre de choses avec un corbac, il a rien demandé l’animal. Et puis je suis pas intéressé par tes délires chelou inter espèce ! »

Judas s’assit et fixa l’autre loup qui semblait dire une chose. Mais sincèrement, il n’allait pas se mettre à lire sur les lèvres pour le plaisir de comprendre. La situation ne semblait pas s’arranger, et ce gus allait sûrement subir sans raison ladite situation. Le cueilleur s’avança tout de même dans un ultime espoir de compréhension. Il souffla sur la vitre pour faire un maximum de buée, puis d’une griffe mal assurée, commença à griffonner un dessin. Il représentait Jésus, debout sur ses pattes arrières fouettant les fesses de Judas et aussi celle du loup. Concrètement c’était vaguement l’idée mais ses talents en dessin se limitait presque à des bonhommes bâtons.

« EN GROS, ON VA PRENDRE TOUS LES DEUX ! »

Articulé et parler plus fort ne servait à rien bien sûr, pourtant il gogolisa à tenter de se faire comprendre. Sa fesse douloureuse le ramena bien vite à d’autres considérations et il tourna les talons tout en disant :

« Non mais là je perds mon temps, je dois me faire soigner… et après j’irais voir Jésus ! »

Tout guilleret à l’idée de se faire taper par son mentor, il dandina du cul et s’envola vers le gouffre aux faucons.