Azzinoth ▬ Survival [Raven]

Mésange avait envie de casser un truc.

Impression pourtant peu commune chez la louve, qui était généralement plutôt du genre à observer calmement et à une distance raisonnable les choses se passer, mais actuellement elle se sentait incapable de se distancier du problème.

Ayant finalement quitté les Lazulis après avoir dit au-revoir à sa famille, elle s’était lancée à l’aventure de la vie en solitaire, prête à rejoindre les terres libres, et vivre dans son hérétisme en toute quiétude. Réfléchir à de nouvelles façons de renverser les dieux, tout ça. Hors, elle fut confrontée rapidement à plusieurs problèmes : notamment, quand elle était petite elle avait appris à chasser de petites proies comme tout louveteau qui se respecte, mais ne savait pas excessivement bien se débrouiller pour apporter assez de nourriture à un corps désormais immense en plus d’être adulte comme le sien.

Car Mésange, physiquement, était une montagne.

Si il y a quelques temps elle faisait la taille d’un loup adulte et bien formé à peine arrivée à sa deuxième année, maintenant qu’elle s’approchait des trois ans, elle dépassait clairement d’une tête le commun des mortels qu’elle rencontrait. En bonus intimidation, c’était pas mal du tout, avec les crocs et les cornes en bonus. Par contre elle commençait sérieusement à douter de l’existence d’un fond à son estomac.

Et pour en rajouter une couche, elle était complètement perdue. N’ayant jamais vu une carte de la région de sa vie, elle se rendait compte qu’elle n’avait aucune idée de ce qu’il y avait au bout de chaque territoire Lazuli...alors elle avançait au pif. Ce qui était, peu fameux, pour réfléchir à ce qu’elle pouvait essayer de manger aussi.

Alors, Mésange avait envie de casser un truc.

Sortant des Bois de l’Oubli, elle avait traversé une interminable pelouse rouge avant d’arriver...à une autre pelouse sèche. Elle n’avait aucune stricte idée d’où elle était.

Fais un truc pour le corps, j’en ai assez d’entendre cet estomac gargouiller dans le fond de mes pensées.
Si je pouvais régler le problème, je l’aurais fait y’a un moment.
C’est toi la mortelle ici, tu devrais savoir gérer ton propre réapprovisionnement en énergie.

« Si ça te dérange tant que ça tu peux m’aider ! Je sais pas quoi trouver en hiver, moi, » s’énerva-t’elle.

Elle donna rageusement un coup de large patte dans les hautes herbes sèches de la savane, avant de sentir se glisser dans son esprit une demande de la part du démon. C’était la deuxième fois qu’il demandait poliment…la dernière fois, ça avait été pour se jeter sous forme de fantôme dans tous les arbres avoisinants. Soit, probablement pas une bonne idée. Mais sous le coup de l’humeur, elle le laissa faire en râlant.

Au moins, je subirais plus ce besoin primaire et stupide.

Elle s’installa tranquillement à l’arrière de l’esprit, afin de quand même suivre ce qu’allait faire le démon. Encore une fois, la sensation perturbante de sentir une autre conscience venir se mêler à la sienne la submergea, tandis que l’arrivée de la présence imposante du monstre lui retirait à nouveau tout contrôle qu’elle pouvait avoir quelques instants auparavant, la reléguant à simple spectatrice de ce qu’il pourrait advenir du corps. La gêne s’atténua lorsqu’il se concentra sur lui-même, mais elle était définitivement encore loin d’être habituée à cette sensation purement interne à la fois si proche et si éloignée de ce qui ressemblait à une fusion. C’était réellement...un copilotage. Et ce n’était plus elle qui tenait le volant.

Il nous faut quoi ?
Quelque chose qui se mange. Un truc vivant, pas une plante.

Un sourire carnassier se dessina sur les babines du corps.

Parfait.

Et le démon se mit à traquer.