Atsuko - Anita

L'étoile repart en scintillant, et son passage illumine la présence d'un oeuf aux belles écailles de pierre. Anita ressent une irrésistible envie de le soulever ! Alors elle bande ses muscles et fait de son mieux, en s'arque-boutant contre la coquille.

Elle parvient à déloger l'oeuf de pierre du sol et éclate d'un petit rire à la remarque d'Atsuko. Elle n'est pas sûre d'en être capable dans le vrai monde !
Juste après, c'est encore sur un oeuf cassé qu'elle tombe. Anita lâche un vague "dommage", puis repart sans s'attarder davantage.

Il fallait continuer. Il fallait avancer. Les voix dans vos têtes continuent de se faire pressantes, murmurant de vagues impressions de menaces à l’approche de la fin de tout ce rêve comateux collaboratif étrange. Tu te demandes si le Renard fait partie de ces voix, lui qui orchestre tant de tes actions dans le monde réel, peut-être a-t-il tissé ce monde également, tissant et nouant les piliers du rêve tel une gigantesque toile d’araignée dont vous essayez de vous échapper. Un frisson parcouru ta colonne aviaire en pensant un instant à ce dont l’araignée métaphorique de cet endroit pourrait bien ressembler. Tu espérais ne pas avoir à la rencontrer. Pour rendre le tout moins effrayant, tu t’imagines un petit arachnide en chocolat essayer de vous grimper dessus, et Anita qui l’écrase d’un joli coup de pattes arrière. Slpoutch, plein de jus d’araignée en chocolat chaud par terre. Elle est trop forte Anita en plus, elle qui a réussi à soulever l’œuf lourd. Tu ne l’as pas pesé toi-même mais il avait l’air MÉGA lourd. Trop lourd pour tes petites ailes de poulet BBQ. Tu l’aurais sûrement échappé et il aurait roulé hors de votre portée. Heureusement que ta copine de chasse était là pour sauver la mise !
Le chemin sinueux que vous suiviez depuis un moment abouti vers un autre portail, semblable à celui que vous aviez traversé la première fois pour vous rendre à l’œuf cactus, mais cette fois le paysage était tout le contraire d’un désert. Il s’agissait d’un marécage poisseux et humide, remplis de lianes et de plantes carnivores et d’herbes à l’allure douteuse.

« Ça pue cet endroit ! », tu lâches avec dégoût. Ayant été toujours louve, tu aurais froncé les sourcils et retroussé ta truffe, mais le bec de poule ne te permettant pas de telles possibilités, tu devais tout. Respirer. Et. Endurer. Ça sentait les œufs pourris, le pet de crocodile, l’haleine du matin que les chiens viennent respirer pour vous réveiller. Ça sentait la carcasse, le poison, les vieux brocolis dont même les rats ne veulent plus.
Malgré sa pestilence des plus désagréables, l’odeur s’oublia bien vite lorsqu’un peu plus loin, tu voyais des lianes sauter dans les airs, comme propulsées par une énergie quelconque. Un autre œuf électrique ! Il en pleuvait ici dites-donc !

« Regarde, un autre, là-bas ! », pointes-tu du bout emplumé de tes ailes noires. Tu cours à toutes pattes de volaille devant, observant l’œuf posé sur un nénuphar dans une petite marre boueuse. Pourvu que celui-ci ne roule pas dans l’eau, car bien que tu n’eusses pas énormément d’expérience de vie encore, tu te doutais que l’eau et l’électricité ne faisaient pas bon ménage. Tu te tournes vers ton amie lapine.

« Je vais aller me positionner en dessous, pour pas qu’il roule dans l’eau, okay ? Comme ça s’il tombe, ce sera sur mes ailes. Sil-te-plaît sil-te-plaît fait attention, je veux pas finir grillée. »

Tu te rendit donc dans la marre, prenant une grande inspiration et plongeant ta tête dans l’eau sous le nénuphar, tes ailes déployées de chaque côté.
C’était un très mauvais plan. Mais quel autre choix avaient-t-elles ?

Continuer, continuer, encore, encore !
Comment ça, elle répète des mots ? C'est pas son genre ! Mais Anita est une louve joviale dans le vrai monde - et ce monde-ci n'y changera pas grand-chose. Au contraire ! Il est tellement fantastique. Elle est un petit peu déçue, quand elle y pense, d'avoir fini en lapin. Elle aurait pu être un dragon, une sirène, un loup-garou, ce genre de choses, non ?
Oh, non ! Encore mieux ! Un mort-vivant ! C'était Narcy qui avait dit ça, et Papy Clou avait pas tout à fait dit le contraire : parfois des morts grattaient la terre et ressortaient de là, émergeant du cimetière comme de belles pousses lors d'un futur potager de printemps. Mais au lieu de créer fruits et légumes, là, on se retrouvait avec des corps en décomposition qui parcouraient le monde et terrorisaient les enfants.
Les corps en décomposition ; c'est un peu l'odeur que lui rappelle ce nouvel endroit dans lequel elles se retrouvent en traversant un nouveau portail à la blancheur éclatante - comme un grand soleil qui les absorbe et les englobe dans sa grande gueule lumineuse. Elle fronce le nez et acquiesce à la remarque d'Atsuko, en revanche, malgré l'odeur pestilentielle, elle ne peut qu'être ravie de se retrouver dans de décor ! Le marais, ça lui rappelle la maison. Il y a les lianes, les arbres torturés aux longues branches emmêlées qui semblent un peu se serrer la main, il y a l'eau boueuse qui forme de grandes flaques marron et imprègne le sol jusqu'à ce qu'il soit spongieux, il y a les rochers qui se dressent pour faire des plongeoirs, il y a vraiment un peu tout ce qui lui rappelle la Moere aux Lianes et tous ces bons moments qu'elle y avait passés avec sa soeur et ses frères, sa mère, puis le moment où elle a été voir Kiro, le moment où Dez aussi s'y était trouvé...
Bref ! Pas si mécontente que ça d’être dans un marécage puant, la petite Anita, même si c'est salissant pour ses courtes pattes blanches et qu'elles s’enfoncent bien plus profondément dans la boue que lorsqu'elle est louve.

Elles entendent crépiter des éclairs, voient des lianes voler - un autre oeuf électrique, elles en sont convaincues ! C'est Atsuko qui le pointe de ses plumes sombres avant de se dandiner à toute vitesse vers l'oeuf violet, le lapin blanc sur ses talons. Elles constatent alors que l'oeuf est dans une situation un peu délicate - et Atsuko se place juste derrière pour éviter qu'il ne chute dans la mare. Anita admire son sacrifice d'un hochement de tête solennel, puis réfléchit à comment résoudre la situation.
Le premier oeuf avait cessé d'être un danger quand l'oiseau lui avait permis de décharger son énergie - elle devait trouver quelque chose de similaire ! Son attention se porte sur des larges feuilles sur la berge - celles-ci sont sèches, très grandes et bien vertes. Elle pourrait envelopper l'oeuf de toute l'envergure de la feuille et ainsi l'étouffer ?
Elle lâche un mot à Atsuko avant de bondir vers la feuille.

— T'inquiètes, j'ai une idée !

Et tout fonctionne à merveille, même si elle sent son poil se dresser et se hérisser à cause de l'électricité quand elle s'approche de l'oeuf avec la feuille, il cesse bien vite d'émettre ses éclairs menaçants et toutes deux peuvent à nouveau repartir.

Votre opération récupération d’un œuf au potentiel douloureux se déroula à merveille. Anita eu la bonne idée de le recouvrir avec des feuilles, heureusement qu’elle pensa vite parce que tu commençais à étouffer sous ce nénuphar. D’ailleurs elle avait l’air particulièrement à l’aise dans ce biome spongieux, au contraire de toi qui habitait dans la tanière de ton père dans la forêt des Dents de Roc. Les grands épineux et les canopées épaisses, c’était plus ton truc.

Vous continuez votre chemin, évitant les marres trop grandes qui pourraient cacher des crocos, et tu aperçois un peu plus loin un œuf violet posé bien chill dans des lianes suspendues à la Lion King, comme Simba qui chante Hakuna Matata. Il est un poil trop haut pour toi, alors tu demande à ton amie si elle pourrait sauter de ses pouvoirs physiques de lapin pour aller le décrocher.

Puisque tout est bien qui finit bien, elles récupèrent ce nouvel oeuf et Atsuko peut sortir de cette flaque toute boueuse pour regagner la terre ferme. Elles forment réellement une bonne équipe ! Anita se demande combien de temps tout cela est censé durer, combien d'oeufs elles trouveront, et à quoi ils ressembleront. Elle se demande parfois ce qu'il y a à l'intérieur, aussi - mais ça, elle ne le saura peut-être jamais. Tant pis, ces créatures étranges pouvaient bien garder leurs secrets ! Il y avait déjà suffisamment de choses merveilleuses en leur monde.
Atsuko repère encore un oeuf - décidément, elle a des yeux perçants. Il pend parmi des lianes, suspendu par celles-ci, et elle n'a qu'à bondir pour le récupérer.

Elle recule et prend son élan, puis s'élève dans les airs - hop, l'oeuf est attrapé entre ses pattes ! Au suivant !