Goal — Désastre

Une libération.

Après les derniers événements, c’était bien ce qu’ils méritaient non ?

Narcisse inspira, expira. Calme. Parce qu’il ne laissait jamais la peur dominer ses actions. Le Phénix en profiterait bien trop auquel cas, chose que le loup ne pouvait permettre, contrôler l’appétit de l’oiseau était une tâche qu’il se devait de mener à bien, sous peine de faire souffrir ceux qu’il aime. Chose impensable. C’était pour eux tout cela, pour éviter les souffrances, les peines, leur garantir l’avenir dans la lumière, quand lui se satisferait de l’ombre. Mieux contrôler pour mieux protéger. Et puis… cela lui convenait bien, à l’abris des questions des simples d’esprits, ces imbéciles qui n’avaient aucun scrupule à gaspiller un temps pourtant si précieux… Tss ! N’avaient-ils aucune estime pour les autres ?

Mais qu’importe.

Aujourd’hui au moins, Narcy ne perdrait pas son temps, se sentant enfin suffisamment préparé pour escalader le plus haut pic des Monts Célestes. Après de longues semaines d’entraînements, enfin. Aucun beuglement de son Koridé ne viendrait le déranger durant la montée, car il était resté aux côtés de Sheina. L’insecte gris en revanche, lui, était roulé en boule aux pattes de son maître.

Pour cette fois il ne serait pas le seul loup.

Parce que, comme lorsqu’ils étaient enfants, Désastre l’accompagnerait. Pour atteindre le sommet.

Le disciple de Kiro se contenta d’un regard appuyé à l’intention de son partenaire du jour. Parce qu’entres eux, il n’y avait pas besoin de paroles inutiles dont les autres aimaient s’encombrer. Le loup s’approche de la roche, prêt à commencer l’ascension. Sa queue féline trahissait son excitation.

C’était un parcours dangereux.

Mais où serait l’amusement s’ils ne frôlaient pas la mort, ne serais-ce qu’un peu ?

Ce n’était qu’un mur de plus.

Un objectif de plus.

Les lumières dorées brillent, symboles de Kiro. Épreuves de l’Anaconda qu’eux deux avaient bravé pour en ressortir victorieux. Les yeux mauves de Narcisse suivent la silhouette du gris se saisir de sa première prise. Le Phénix est admiratif d’une telle vigueur, cette énergie lui apparaît tellement puissante… tellement intéressante. Il en aimerait un peu, rien qu’un peu pour agrandir sa collection. Le doré dans les yeux trahit un instant le pouvoir, mais le fils d’Anette et Sheina secoua doucement sa tête. Il ne laisserait pas les instinct primaires d’une créature le dominait. L’oiseau n’avait pas à lui résister, car il était son maître, et s’il le faisait, alors l’hybride se ferait plaisir de le faire tomber.

Mais c’était autre chose qu’il devait faire tomber aujourd’hui.

Un objectif de louveteau.

Parce que si il franchissait ce mur, qu’est-ce qui le retiendrait de faire tomber les autres ? D’abattre les barrières ? De purifier les terres de tout ce qui entravait le pouvoir Etelkrus ? Raeder, solitaires… Tout ce qui n’était Etelkrus, tout ce qui entravait le pouvoir devait disparaître.

Pour ne redevenir que poussières.

(Lancé de dé)

Mais le Phénix demandait de l'attention aujourd'hui. Au moment où les griffes de Narcisse allaient se refermer sur une prise, l'oiseau s'agite, brouille ses pensées et le loup serra les crocs, ordonnant à son pouvoir de se taire. Pas maintenant. Pas en compagnie d'un Etelkrus. Il fallait remettre la bête en cage, au risque qu'elle explose et se nourrisse de tout ce qui l'entourait.

Stupide pouvoir.

Il ne gagnerait pas.

Quelque chose sembla perturber Narcisse.

Non pas lui.

C’est le Phénix qui s’agita brusquement, qui remua, qui étendit ses ailes. Les plantes, tout ce qui semble un minimum vivant autour de l’Etelkrus brille d’une lueur dorée, alors que le disciple de Kiro sent la situation lui échapper. L’oiseau se nourrit, bien plus qu’à l’accoutumé, à cause de cette étrange créature.

Arrêtes ça, maintenant.

Mais le pouvoir ne se laisse pas dompter, pas cette fois, absorbant toujours plus d’énergie, les plantes se tassent sur elles-mêmes, alors que Narcisse entend le couinement d’un rongeur. Non. NONNNNN !

« — Arrêtes. »

Le fils d’Anette et Sheina serrait les crocs de toutes ses forces, le corps tremblant. Parce que le Phénix absorbait bien trop de pouvoir, c’était mauvais. Narcisse ne le laissait jamais être repu pour qu’il ne s’habitue pas à être rassasié, là, il n’avait plus aucun contrôle. Son pouvoir l’écrasait. Les rôles s’inversaient et ça ne plaisait pas du tout à celui qui fut le maître.

Son corps tout entier est entouré de la lumière dorée qui le préserve du vieillissement, pourtant, il perd petit à petit pied. Ses yeux ne parviennent pas à redevenir mauves, parce que Narcisse n’arrive pas à reprendre le contrôle. L’Oiseau influence son jugement maintenant qu’il absorbe une grande quantité de force.

Le loup sourit, mais d’une manière bien peu rassurante.

« — Pourquoi n’y-a-t-il pas plus à manger ? »

Le Phénix a si faim.

Alors le rongeur le plus proche n’émet plus aucun son, parce que le Phénix à absorbé son énergie jusqu’au bout.

Il pouvait continuer encore et encore.

Parce que sa faim n’avait pas de limites.

Tu voulais reprendre le contrôle de tes pensées, hein Narcisse ? Mais le problème, c’est que la force brute de l’Oiseau tu ne la maîtrisais pas, que t’avais pas l’habitude que le Phénix soit aussi fort. Puis cette fois, tu pouvais pas t’en sortir avec une pirouette, pas tant que L’Autre venait briser la cage de l’oiseau.  

Le Phénix ne l’aimait pas, ce loup qui lui donnait des ordres, mais il était comme la créature qui l’avait libéré, ils avaient la même énergie. Intéressant. S’il le dévorait serait-il plus fort encore ? L’Oiseau veut essayer, il en veut toujours plus. C’est peur-être plus grand défaut. Les babines de son porteur dévoilent des crocs prêts à mordre, parce qu’il n’appréciait pas qu’on lui donne des ordres. Pas maintenant qu’il se sentait plus libre que jamais, alors qu’il écrasait la conscience de ce pauvre Narcy.

« — Parce que tout est mort, Désastre, sauf toi. »

Lui qui demeurait le seul vrai vivant.

Il était impatient de la goûter cette énergie, à cet être si important pour le petit Narcisse.

Sous les poils de son garrot, il sentit la brûlure, alors que perçaient les plumes. L’Autre lui permettait de pleinement se manifester au travers de ce loup, d’être souverain. Voilà qu’il pouvait de nouveau reprendre les rennes en ce bas monde.

Puis c’est la douche froide pour le Phénix, qui voit ainsi l’énergie durement acquise au cours de ses repas disparaître. Qui est de nouveau affaiblit, mais prélevant l’énergie sur Narcisse pour ne pas être totalement impuissant. La cage se referma sur lui, alors qu’il proteste contre cette créature qui se joue de lui.

Non ! Tu n’as pas le droit Autre ! Libères-moi.
Ça suffit.

Narcisse parvient à reprendre le contrôle de ses mouvements, à assurer de nouveau son emprise sur le Phénix. Une emprise bien faible, qu’il n’aurait pu maintenir si L’Autre n’avait pas réduit son énergie à néant.

Les pattes du loup cèdent sous lui, alors que sa vue se brouille. Il se sentait complètement vidé, comme si toute l’énergie du Phénix absorbé depuis la remise de Glowstick s’était envolée. C’était peut-être ça… Lui qui avait juré de ne jamais trahir nulle faiblesse, voilà qu’il ployait, parce qu’il n’arrivait plus à tenir debout. Lamentable. Il en avait honte. Le regard doré plongea dans les yeux rougeoyants de son ami. Cela n’aurait pas dû se passer comme ça.

« — Ne leur… dis pas. »

À ceux qui poseraient les questions. À tous ceux qui seraient biens trop curieux.

La tête de Narcisse heurta le sol.

Et ce fut les ténèbres qui l’accueillirent.

Ce ne serait pas aujourd’hui l’escalade.