Oeuf y es tu ? l Libre

L'excursion au Terrier Lumineux avait été très fructueuse. Il y avait croisé Holly et ils y avaient discuté tout en fouinant dans les environs. Il appréciait la présence calme de la louve bleue qui n'avait jamais un mot plus haut que l'autre et qui, si elle s'avérait curieuse, avait assez de tact pour ne pas empiéter sur son cercle personnel (ce qu'il détestait au plus haut point). Lors de cette petite excursion, Cendres avait trouvé un oeuf. Et si vous connaissiez Cendres, vous sauriez qu'il n'est pas loup à laisser un petit oeuf trainer dans un coin sans parents. Il avait plongé l'oeuf dans sa sacoche, entourée d'herbes de fertilité et de plumes récoltées au terrier, de quoi espérait-il lui tenir chaud.

Cendres était soucieux. L'oeuf, de taille moyenne, était visiblement presque à terme. C'était si délicat un oeuf, le moindre choc ou écart de température pourrait l'avorter. Alors il l'avait vite rapporté dans la vallée des murmures, après un crochet au Dédale. Il avait récupéré une bonne quantité de nourriture, sachant qu'il arriverait vite à court et n'aurait pas le temps d'aller chasser et...

Il couva.

C'était un peu étrange au début, mais il finit par s'habituer au contact froid de l'oeuf nacré. Il le détailla. Il était d'un blanc laiteux en tout point semblable à celui des progénitures galinacés de Raison. Rien ne le distinguait, pas même une teinte brillante ou des veinules bleues comme on aurait pu s'y attendre de la part d'un présent du Terrier Lumineux.

Menthe observait l'objet avec jalousie. Quoi ! Son compagnon des quatre-cent coups cherchait à le remplacer ! C'était un crime, une honte ! Il ne pouvait pas laisser ce faire !

Mais il suffit d'un petit claquement de langue du loup capé de blanc pour que le petit écureuil roux vienne se blottir dans le cou. Allons, il y avait assez d'amour à partager comme ça. Cendres n'avait pas l'occasion d'en prodiguer beaucoup, ce serait l'occasion de travailler un peu ce point.

C'était si simple, avec la faune. Les loups étaient tellement plus compliqués. Plus facile à ignorer, à dénigrer. A repousser. La nature acceptait tout le monde sans jugement.

Cendres soupira.

L'attente dura plusieurs jours. L'oeuf s'agitait parfois légèrement, avant de retomber inerte. Cendres ne s'ennuyait pas : les environs présentaient bien assez de sujets d'intérêt pour qu'il se laisse emporter dans de douces rêveries. Le ciel parsemé d'oiseaux curieux, merles, petits faucons, hiboux corneilles pigeons et pies bien entendue ! Il s'amusait à les reconnaître à la forme de leurs ailes et au tracé de leur vol, validant ses devinettes lorsque les volatiles touchaient le sol et lui offraient les mouchetures de leur plumage.

Un craquement retentit, si doux et léger que Cendres hésita l'avoir entendu. Mais un second suivit, et un troisième, et le loup bleuté se redressa pour observer la coquille de l'oeuf. Elle se fendillait, une toile d'araignée dont le centre était le fait de l'oeuf et les ramures se glissaient sur tout le corps.

C'était l'heure.

Qu'allait-il en sortir ?

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