Carry on my wayward son — Rhaegar

Les décisions devenaient importantes ces derniers temps. D’abord il a fallu choisir où en était la relation avec Cendres, l’oublier ou essayé d’avancer. Puis y’avait eu un autre choix tout aussi important, celui qui permettrait de briller comme les autres. Hum… les choses se passaient doucement de ce côté là, peut-être même que Lion-Blanc-Qui-Trahit-L’-Océan refuserait… Seul l’avenir le lui dirait. Le plus important, était qu’elle puisse continué à mener sa petite vie sans encombre, avec ses amis.
La truffe de Lewis se met dans une rose, avant qu’elle ne recule en éternuant. Y’avait des fleurs partout ici. Vraiment partout. Plus encore qu’aux champs mystiques, puis elles avaient toutes la même forme, vraiment trop bizarre. Au moins ça sentait bon. La sans-glowstick fit mine d’attaquer une abeille, avant de sauter juste au-dessus et de se redresser soudainement en sentant une odeur familière. Poe croassa sur sa tête, visiblement à deux doigts de régurgiter son dernier repas.

« — RHAEGAR ! »

C’était si drôle de le voir aussi l’ours. La mauve sautille jusqu’à lui, une mine filou, avant de s’assoir face à lui, sa queue recourbée s’agitant. Difficile de voir qu’elle ne tenait visiblement pas en place…

« — Bouh, l’ours il a toujours ce petit air grognon, viens on lui peint un sourire. »
« — Tss, arrêtes un peu Poe ! »

On ne peignait pas le visage de ses amis voyons ! Enfin pas tous. Lewis se contenta d’afficher un large sourire à ses babines. À chaque nouvelle rencontre il semblait un peu plus abîmé cet ours.
Abîmé oui. Comme le fut jadis cette île. Les yeux mauves glissent vers ce qui au loin semble être le temple. Les choses avaient changé après toutes ces années. Au point que Lewis ne se souvenait plus de chaque élément. Après tout, elle n’avait qu’escaladé le monticule pour en récupérer le coeur. Ces souvenirs ravivaient lors de sa discussion avec l’étrange louve aux plantes. Son regard semble un peu perdu dans le vague.

« — Tu sais, j’ai parlé avec Celle-Qui-Permet-Aux-Plantes-De-Vivre-Dans-Son-corps et je me suis rappelée de cet endroit… Lorsque Céto-La-Catin voulait du sang et des coeurs. »

Lorsque c’était une autre époque.
Une époque de sang et de vengeance.
Une époque de pirates.

Rhaegar

Il était assis, immense silhouette ébène et sang dont le dos courbé et l'échine masquait la tête, penchée lourdement vers une pierre haute de 5 pommes à dalle arrondie. Son épaisse chevelure lui tombait sur le visage mais on pouvait encore apercevoir cet iris maudit d'une lueur verte fixer la froideur de la roche avec une tristesse poignante. Il avait apporté un bouquet de fleurs aussi blanches et pures que la neige fraîche d'hiver, symbole de son innocence et de son honneur.

Oh Akira, cela fait bien longtemps que je ne suis pas venu te voir n'est-ce pas.. Pardonne moi d'avoir mis autant de temps, d'avoir été aussi absent. Tu me manques. Tu nous manques.. Même si ils ne viennent pas, ils pensent à toi tu sais. C'est seulement que c'est trop douloureux pour eux de faire ressurgir une blessure aussi profonde.

Il soupira et laissa échapper un petit nuage blanchâtre entre ses babines balafrées.

Que faire Akira, notre famille se déchire et je me sens si coupable. Peut-être que si j'avais été plus présent, peut-être que si je n'étais pas parti pour le nord..  Alors j'aurai pu veiller sur eux. J'aurai pu veiller sur toi.

Mais c'est toi qui veille sur nous à présent.

Il eu un sourire amère.

J'espère que tu n'es pas trop déçue de voir tout ça. Mais ne t'en fais pas, tout s'arrangera, je serais plus présent désormais.

Je serais sur tous les fronts, parce que je n'ai pas le choix.

Il entendit un bruit derrière lui et ses oreilles remuèrent. Il ne prit pas la peine de se retourner, gardant uniquement un silence respectueux pour terminer cette prière. La voix de Lewis le percuta presque de pleins fouet, inattendue et inappropriée et il grimaça, tournant son visage recouvert de cicatrices vers elle.

Lewis, que fais-tu ici ?

La voix est morne et blasée, tout autant que lorsqu'elle l'avait rencontré sur cette île maudite. Heureusement pour la jeune pirate, la prêtresse de cet île est absente ainsi que la plupart de ses enfants. Rhaegar l'avait appris un peu plus tôt de la parole éloquente d'Isrâ qu'il avait croisé près du temple du Raptor.
Le visage flegmatique se décomposa lorsqu'elle vint à parler de la tragédie et il la fixa avec une noirceur nouvelle, les sourcils froncés.

Pourquoi tu viens à parler de ça ? Pesta-t-il, d'une voix plus grave.

C'était ni le moment, ni l'endroit et ça en devenait insultant. Elle réveillait là des démons endormis, Lewis, et jouer avec des démons n'étaient pas une bonne idée.

La louvette vint poser ses deux pattes avants sur le poitrail du grand mâle, avant de coller sa petite truffe contre la grosse truffe noire du mâle. Un éclat de rire s’échappa de sa gorge, avant qu’elle ne repose ses quatre pattes au sol, un sourire amusé aux babines.
C’est qu’il semblait bien grincheux l’Ours, réadaptant ce même ton blasé que lors de leur première rencontre sur Morne-Oeil. Au final, ils n’avaient pas vraiment changé tous les deux. Lewis était demeurée l’enfant de petite taille, un peu casse-cou et lui, le loup plus sérieux et… Si, quelque chose avait changé chez lui. Les sourcils de la mauve se froncent un instant. Rhaegar n’était plus aussi drôle, plus aussi emplie de joie de vivre… Oui. Quelque chose avait changé chez lui, l’avait rendu plus sérieux. Étais-ce ainsi que les loups grandissaient ? En demeurant fixés sur leurs pertes ? Aurait-elle dû, elle aussi, se refermer sur elle-même à la mort d’Alys ? Ou lorsque tous les autres étaient partis ?

Étais-ce ainsi que les choses devaient forcément se passer ?


« — T’es si mécontent que ça de me voir ? J’croyais qu’on était amis pourtant. »

La louvette penche sa tête sur le côté, essayant de comprendre le comportement de son ami. Peut-être un des derniers qui lui restait et qui pourtant semblait tellement distant. Il en vient même à la regarder avec presque méchanceté. Les babines frémissent, par réflexe, alors que le poil de l’échine se gonfle. Voulait-il jouer avec elle, vraiment ?
Mais Lewis se contente d’inspirer. Rhaegar était un ami, son ami. Il ne lui ferait pas de mal, tout comme elle ne lui en ferait aucun. La sans-glowstick vient poser son arrière-train sur le sol, pour regarder le temple au loin.

« — Parce que, j’étais là. »

Il ne palpitait pas le coeur entre ses pattes lorsqu’elle l’arracha du monticule. La terre en revanche trembla, alors que la vie tout autour s’éteignit. Mais ça, Lewis ne le vit pas, car elle avait regagné les terres Raeders.
Le regard de la mauve glisse alors vers la pierre devant lequel le grand loup semblait être en train de se recueillir. La même ou presque, que celle devant laquelle Lewis avait rencontre Volstein. Ça ressemble à…

« — C’est quoi ça Rhaegar… y’a qui là-dessous ? »

Car il ne pouvait y avoir que quelqu’un. Comme la tombe d’Angelica. Un corps qui pourrissait sous leurs pattes.

Rhaegar

Elle était là.

L'affirmation résonna dans ses tympans et son regard se figea sur la violette, la gueule abaissée vers elle, si petite louve à côté de lui. Elle était si proche qu'il pourrait lui broyer le museau d'un coup de mâchoires, et étrangement il en avait terriblement envie en cet instant. Il avait envie de la faire taire, de lui faire mal comme lui avait eu mal durant de nombreuses années. La chaleur monta très vite et son poil se hérissa sous ses muscles gonflés, faisant grimper encore plus la tension qui animait leurs regards. Les crocs se serrèrent et bientôt, les crevasses où siégeaient autrefois ses imposantes canines apparurent sous ses babines retroussées.

POURQUOI FAUT-IL QUE TU SOIS TOUJOURS AUSSI IRRESPONSABLE ET INCONSCIENTE LEWIS ? Hurla-t-il sur elle, le regard hargneux.

Il détourna les yeux sur le côté, lui offrant son visage que de profil.

Tu ne fais qu'attirer des problèmes !

La voix n'était plus hurlée mais toujours plus forte que d'ordinaire, courroucée.

Grandi merde !

Il était émotif aujourd'hui Rhaegar, d'abord de la joie, puis de la culpabilité, du manque, de la tristesse, du regret et maintenant de la colère, beaucoup de colère.
Quelle journée éprouvante.

Il prit une grande inspiration et ferma les paupières, le visage grimaçant de frustration.
Oh Ao, donne moi la force de surmonter cela.

Il rouvrit les yeux sur la pierre tombale recouverte de roses épineuses, où était gravée avec délicatesse les initiales de sa petite sœur ainsi qu'une phrase : « Douce fille de la Prêtresse Anianka et de l'Alpha Gloriel ». La réponse n'était-elle pas évidente ? Était-elle stupide en plus d'être insouciante ? Il avait bien envie de lui cracher cette insulte à la gueule mais il se retint et garda son sang froid en l'honneur de la déesse bleue.

Akira est ma petite sœur..

Ses oreilles se rabattirent contre son épaisse tignasse et de nouveau, il prit cette moue bouleversée.

Ce n'était qu'une enfant.. Et la mer a été impitoyable avec elle.

Cet mer que tu adorais Lewis, jadis.

Lewis continue de sourire, parce qu’elle ne se rend pas compte que ses mots auraient autant d’impact. Mais la dure réalité la frappe. Son sang se glace, alors que son corps se fige, lorsqu’il prend la parole cet ami. D’un ton qu’elle ne lui avait pas connu jusque-là. D’une haine qu’elle ne pensait jamais connaître.
Irresponsable et inconsciente.

Tu ne fais qu’attirer les problèmes.

L’échine se courbe alors que l’expression devient indéchiffrable. Quelque chose semble serrer ses entrailles, si fort qu’ils semblaient sur le point d’exploser. Si fort qu’elle ne se se tait plus capable de respirer.

« — ... Tai-toi. »

Tais-toi. Tais-toi. Tais-toi.

Et lorsque les derniers mots sont dits, Lewis se redresse, écumant de rage, de douleur face à cette  trahison. Les crocs sont dévoilés, alors que les yeux trahissent une colère nouvelle.

« — FERME-LA RHAEGAR ! »

Ferme-la ou c’est moi qui te ferais taire, tu m’entends Rhaegar ? Tais-toi ou jamais plus tu ne parleras.
Parce qu’ils étaient lourds ces mots, lourds de reproches, alors qu’elle n’avait pu prendre en main son existence à cette époque.

« — TU CROIS QUE JE SUIS UN PROBLÈME ?! QUE LE SIMPLE FAIT QUE J’EXISTE, NE SUFFIT PAS QUE JE LE SACHE SANS QUE TU VIENNES ME LE RAPPELER ?! »

Elle, le fruit pourri défendu de l’union d’un alpha et d’une Raeder. L’enfant à problèmes qu’on avait abandonné bien trop tôt. L’enfant qui avait du apprendre à grandir sans famille, sans personne pour la guider, mis à part ses instincts. Les larmes viennent creuser des sillons dans ses joues, alors que son corps tremble sous l’effet de la colère et de la tristesse.

« — Je vous déteste. Je vous déteste tous. Toi, les Nakhus, cette catin d’Angelica, ce traitre d’Alys. Allez donc tous pourrir en enfer ! »

Parce qu’elle avait beau s’efforcer d’oublier la peine, elle se faisait plus grande à chaque fois.  La patte se referment sur Poe, sur laquelle elle appuie progressivement. La grenouille croassa de douleur  entre les griffes de la mauve alors que se faisait de plus en plus forte la pression.

L’océan aurait du tous les emporter.
Tous.

Rhaegar

Toujours plus de colère, toujours plus de mots acerbes et tranchants et alors que l'ours noir s'était maîtrisé, se fut au tour de la pirate de se déchaîner. Son regard ne bougea pas de la petite tombe tandis qu'à ses oreilles la voix de Lewis perçait telle une lame aiguisée. Il se pinça les babines, agacé par ses plaintes et par cette discussion qui ne faisait que de s'aggraver. Sang froid. Sang froid. Sang froid. Tu dois garder ton sang froid.

Et pourtant on dirait que tu le fais exprès des fois. Souffla-t-il d'un ton las en fronçant les sourcils.

Le visage immobile, seul son regard se releva sur la petite silhouette violette. Il eut un pincement au cœur en voyant ces larmes salir ce beau visage d'habitude si souriant et il prit une mine désolée, rabaissant les oreilles.

Alys.

Ce nom lui était étrangement familier, mais où l'avait-il entendu ? Il ne se préoccupa pas plus de cette question, bien trop tourmenté par le cas présent. Il observa la grenouille se faire écrabouiller et il soupira. D'un coup de patte il attrapa la louve et la bouscula vers lui pour lui faire une étreinte, la collant contre son immense poitrine. En temps normal il n'aurait jamais fait ce genre de chose surtout qu'une telle proximité avait le don de le faire tourner à la tomate écarlate, mais la situation l’exigeait et surtout il en avait envie. Car c'est ce qu'on fait quand une personne est triste et qu'on l'aime non ? Rhaegar ressent de l'affection pour cette pirate, quand bien même elle avait participé aux pires tourments de sa vie.

Je me suis emporté, excuse-moi.

La voix se fit sincère et plus calme. La fierté s'était évanouie, il prenait sur lui car elle était son amie.

Poe gigota sous la patte de la mauve, qui ne cessa pas pour autant sa pression, son regard fixant avec rage celui qu’elle pensait être son ami. Après tous, n’étais-ce pas lui qui avait tenté de lui faire voir le bon côté des choses ? Avant que la grenouille ne connaisse un triste sort, la voilà, le museau dans l’épais pelage de Rhaegar qui la sert contre elle.
Il s’était emporté. Emporté. Cela n’ôtait aucune valeur aux paroles qu’il avait prononcé, absolument aucune. Lewis sert les crocs, sans pour autant essayer de se dérober.

« — Menteur. »

Car il s’excusait d’avoir dit la vérité. Lewis ne doutait pas de la sincérité de chaque mot prononcé.
Et il serait si facile pour l’Ours, de régler ses problèmes, alors qu’il l’avait à sa merci.

« — Si je ne suis qu’un problème, pourquoi tu ne me tues pas Rhaegar ? »

Comme ça, tu serais débarrassé non ?
Après tout, combien d’ennuis auraient pu être évités si elle n’avait jamais vu le jour ? Alys n’aurait peut-être pas trahi les siens, sa mère ne serait peut-être pas partie des Raeders en regrettant d’avoir eu des enfants, Trixie serait sûrement restée, Céto n’aurait probablement jamais obtenue le coeur de cette île et gagné en puissance. Les autres… n’auraient pas souffert. Peut-être que Cendres aurait eu cette enfance normale, que chacun devrait avoir.

« — Alors, fais-le. »

En resserrant un peu plus son étreinte, le petit corps ne résisterait pas bien longtemps le museau ainsi dans le pelage. Alors qu’attendait-il ? Qu’attendait-il pour se débarrasser de tous ses problèmes ?

Rhaegar

L'accusation sonna comme un coup de feu dans sa tête et la balle alla droit au but, transperçant son palpitant d'un coup rapide et violent. Lui, un menteur.
Peut-être que ça l'arrivait de l'être mais pas aujourd'hui non, et encore jamais avec elle. Il avait dit ce qu'il pensait oui, mais la colère avait poussé bien trop loin ses mots, au point que cela avait dépassé le stade de la réflexion.

La question lui fit froncer le museau et il gronda doucement entre ses mâchoires fermées, comme une plainte sourde.

Si il y a bien une chose que je ne pensais pas dans ce que j'ai dit Lewis, c'est bien ça.

Parce que oui certes elle avait parfois le don d'attirer des problèmes, mais elle lui avait donné tant d'autres choses aussi, à lui et aux autres. Alors non, il n'acceptait pas qu'elle se décrive comme un boulet.

Il sentit son museau se serrer contre sa fourrure et il baissa le regard vers elle, lui donnant un coup de truffe.

Si je devais te décrire, je ne dirai pas que tu es « qu'un problème » Lewis. Tu es une louve.. certes un peu timbré, gamine sur les bords..

Il roula des yeux, soudainement gêné. Il aggravait la situation là, non ?

Mais aussi pleine de joie et cette façon que tu as de voir la vie, de rire, de faire sourire ton entourage même dans les pires moments, ça ce n'est pas donné à tous le monde tu sais ? Quand bien même tu essaies de faire croire que tu es une insensible, même ta grenouille n'y croit pas. Tu n'as pas besoin de ça pour prouver que tu es forte.

Il sourit et elle peut probablement le sentir sur le dessus de sa tête, car il venait d'y poser la sienne.

Je t'envie tu sais, sur ce point. Regarde moi.. Quand je rigole, je fais peur aux enfants..

Et il se surprend lui même, tant c'est rare. Les ours ne sont pas connus pour rire mais pour tirer la gueule et grogner après tout.

Puis d'un coup, de manière assez spontanée il vint pincer la louve en écrasant sa patte sur la sienne.

C'est tout ce que je peux faire, je suis bien incapable de te faire du mal et tu le sais.

Lewis attend, sans bouger. Que vienne la sentence. Aucune peur, en elle. Combien de fois avait-elle pu répéter que si vivre était l’ordre des choses, mourir l’était tout autant ? Pourtant, il ne fait rien. Enfin rien, il parle l’ours. Beaucoup. Étais-ce sa manière à lui de s’excuser ? Elle n’a pas le coeur à l’interrompre la louvette, le laissant parler encore et encore. Pour finalement sentir le dessous de la mâchoire de Rhaegar sur son crâne. Lewis ne bouge pas, se contente de serrer les crocs, alors que lui sourit.

« — J’aurais aimé… »

… Que tu sois ma famille. Un frère. Quelqu’un qui aurait veillé sur moi, m’aurait protégé, permit de grandir loin de tant de choses.
Mais il avait sa propre famille, Rhaegar. Les paupières se ferment, alors qu’un timide sourire vint étirer ses babines. Dire cela, aurait été égoïste de sa part.

« — … ce n’est rien. »

Mieux valait garder pour elle certaines choses.
La louvette se dérobe, avant de faire face à la tombe. Le regard semble vide de toute expression, alors que la patte vient arracher le foulard qui retenait une partie de sa tignasse. Les griffes tirent doucement, avant de le déposer sur les pierres.

« — C’est tout ce que j’ai à offrir. En mémoire, du sang et du sel, en mémoire du malheur causé. »

En pardon peut-être aussi, d’une erreur du passé.
Là où jeunesse ne rimait pas forcément avec raison.

Rhaegar

Faire peur aux enfants ? Répondit-il à sa phrase coupée, la voix taquine.

Bien qu'elle ne partage ni son sang ni aucun lien de parenté, la petite violette est aussi précieuse qu'une petite sœur à ses yeux. Étrangement il n'avait encore jamais fait le rapprochement, car il était séparé de sa famille depuis si longtemps qu'il en avait oublié ce que c'était que d'être un grand frère. Mais n'était-ce pas ça ? Vouloir protéger, accepter les défauts, aimer, soutenir. Peut-être ne l'avait-il pas assez soutenue, pour qu'elle soit aussi froide et renfermée..

Il l'observa s'éloigner de lui et releva la tête, posant sur elle un regard plus attendrissant.

Merci.

Il posa une ultime fois ses prunelles sur la petite tombe, sur ce souvenir si lointain de sa petite sœur. Finalement ce n'est peut-être pas plus mal que Lewis ne le soit pas, car il aurait sûrement failli à la protéger elle aussi.  Et peut-être que cette tombe aurait été la sienne.

Tss. Sûr que faire peur aux enfants ça devait être… divertissant. Quand Lewis elle, effrayait plutôt les parents. Avec Rhaegar peut-être qu’ils feraient un duo des plus plus étranges.

« — Idiot. »

Elle hoche à la tête face aux remerciements. C’était ainsi qu’on remerciait l’adversaire à la hauteur dans un combat. Un loup qui n’avait eu la chance de combattre, méritait au moins cet honneur. Car même si il avait trépassé, il avait combattu un moment contre le plus terrible des adversaires, la vie.
Finalement, ses babines s’étirent en un sourire.

« — Tu viens ? j’suis sûr qu’on peut faire peur aux gamins Nakhus. »

Pas sûr que ces derniers soient ravis, mais au moins cela les occuperait.
Pour se distraire des sombres pensées.

Rhaegar

Un adjectif qui lui collait bien à la peau, idiot. Il ne l'avait encore jamais entendu et pourtant il s'était toujours senti comme tel, un incapable, un être maladroit qui se doit sans arrêt de prouver sa valeur. Ça aurait pu sonner comme une insulte, le vexer ou pire, faire ressurgir un peu plus sa rage refoulée mais il avait déjà suffisamment laissé ses émotions lui échapper. Bien que les mots aient pu être tranchants et durs, cette explosion de colère et de tristesse lui aura au moins permis de se vider un peu le cœur.

Rien que le fait de la voir sourire de nouveau suffit à lui redonner un peu d'énergie et de joie et il lui rendit un sourire identique.

Comme il plaira à madame.

Il se leva et l'espace d'une fraction de seconde il se rendit compte de l’ambiguïté de cet appellation et son visage se crispa silencieusement. Non pas qu'elle soit sa dame, jamais il ne pourrait prétendre qu'elle lui appartient ou qu'il y aie une quelconque domination..

Mais après ce sera à toi de t'expliquer avec les parents hein.

Il souffla un rire bref en s'imaginant la tête d'Ajani lorsqu'il devra calmer la troupe de mères en colère qu'ils auront déclenché.