Sous le froid de l'hiver (Feat Naïade)

Le temps se rafraîchit, je ne sais pas si je dois profiter de la chaleur restante ou me réjouir du froid qui arrive, ça fait un bon moment que je suis là, pas seulement là, sur cette herbe couverte de rosée, à regarder cet animal grimper sur ma patte, mais sur l'île, au côtés des Raeders, du mauvais côté de l'océan, ou le bon, c'est ce que j'avais dit à Limule, que je voulais rester, j'en ai gardé un regret, non pas de mon choix, mais de la manière dont je l'avais dit, je me senw si petite par rapport à ceux que je croise, sauf Makuro, elle qui avait été gentille, bien évidemment je préfère mon papa deuxième du nom, lui c'est le meilleur.

Je regarde de nouveau l'herbe, une goutte dessus m'éblouit, je la vire d'un coup de patte, mauvaise patte, le petit animal avec une carapace tombe et s'envole, alors je me lève pour aller le chercher, rate ce si bel individu, et soupire, j'aurais aimé qu'il reste, il me tenait compagnie en ce moment de solitude, je me dit que je ne pense pas assez à ma maman et à mon papa premier du nom, ni à Qyu, j'ai laissé tomber l'espoir de voir l'une des deux mortes sortir de l'eau, elles sont plus là je m'y suis fait, enfin je pense, quand j'imagine ma sœur gober l'animal de tout à l'heure, j'ai encore la sensation de quand j'étais sur la plage, ça aussi c'était y'a longtemps, sur l'échelle de ma vie je dirais à peu près la moitié, peut-être plus, peut-être moins, en vrai je sais pas, c'est juste y'a longtemps.

Je me relève quand le soleil commence à être assez haut à mon goût, puis j'avance, je sais pas vers où, jusqu'à que je sente une odeur, une gentille, je crois, elle a l'odeur que je connais, mais je sais pas où elle est, cool, un autre exercice de pistage, je colle ma truffe au sol, enfin quasi au sol, et pis j'avance, je suis cette piste invisible, je la suis puis je la vois, je sais pas ce qu'elle fait, elle est loin, un peu trop pour que j'ai ce genre de détails, mais ce que je sais, c'est que si elle est gentille, ce serait bien, d'aller la voir, alors j'avance, je ne me presse pas, j'avance, je marche, pas par flemme, enfin, pas que, mais parce que je ne vois pas de raison d'aller plus vite, quelque soit ma vitesse je finirais par la rattraper, et la distance peu à peu diminue jusqu'à que je sois juste derrière elle, un peu à gauche, de manière à ne pas la surprendre, enfin je pense pas.

-Bonjour, tu fais quoi ?

Je m'approche encore pour écouter, des plantes qui soignent ?
Y'a quelqu'un de blessé ? Ou de malade ? Chez moi ça se terminait toujours mal quand quelqu'un était malade, et ça arrivait souvent, y'avait Tata Rya qui l'avait été, moi je l'ai jamais vue, mais Papa numéro 1, il disait qu'il l'adorait, apparemment elle était gentille, bon pas grave, mais je trouve ça quand même dommage alors qu'ils avaient juste pas de plantes, parce que ça je le comprends, les plantes ça soigne, là bas y'a pas de plantes, il fait beaucoup trop froid, le peu qu'on a part bien vite.
J'arrive à côté de la dame, alors je me reconcentre sur les plantes en essayant de pas trop regarder la pipe dans sa gueule, c'est étonnant ce truc, c'est de la fumée mais y'a pas de feu ou alors il est caché, mais ça sert à quoi de le cacher ? Et ça sert à quoi tout court ce machin ? Je verrais pour essayer plus tard, mais là je sais pas si elle me l'a prêterait...
Oui ! Donc, les plantes, les pitites herbes, j'en vois pas à ses pattes, hum... Elle en a pas trouvé ? Et pis je pense que y'en a peut-être sous son châle, pour les protéger du froid, mais là elle survivrait un peu je pense.

Super, le temps que je pense à Tata et la pipe, j'ai pas eu le temps de lui demander si y'a quelqu'un de malade, j'espère que c'est pas Papa 2.

Apparemment c'est elle, Naïade, en vrai je me rappellais pas qui c'est avant qu'elle le dise, mais attend, du coup, ça veut dire que c'est ma mamie ? Je dois l'appeler comment, Mamie ? Mamie Naïade ? Ou juste Naïade ?

-Donc t'es ma mamie ?

Mes yeux s'était agrandis de surprise, je reprends ma tête habituelle, j'ai déjà croisé Abysse, lui c'est mon papy poisson, qui... mange des poisson, les pêche au moins, c'est triste, c'est comme si on me demandait de manger du manchot. J'en serais dégoutée à vie, et pis j'aurais peur de celui qu'a proposé, parce il est complètement malade, ah oui du coup, les plantes, faut que j'en profite pour demander.

-Dis, les plantes, c'est parce que y'a quelqu'un qu'est malade ?

Pitié le balancez pas à la mer si y'en a un, on lui fait manger de l'herbe bizarre et pis il ira super bien.

Je laisse un peu de temps comme si je réfléchissait mais mon choix s'était vite porté sur Nana, comme ça je comprendrais quand Papa 2 lui parlera, le pratique avant tout, pas moyen de me perdre dans les noms comme ça.

-Hmm... Nana, c'est mieux, je crois, en tout cas je préfère

J'imite comme je peux, y'a trop de trucs nouveaux ici, je m'y perds un peu moins qu'à mon arrivée, mais pour le moment, je préfère faire ce que j'ai vu, ce que je connais, en y rajoutant ce que je voyais chaque nouveau jour. Mes souvenirs d'avant complètent une bonne partie de ce que je ne sais pas niveau sociabilité, je repense à eux des fois, je pense pas que je les oublierais un jour. Mais, même si je m'en doute un peu, je refuse de l'avouer, mais ma mamie à la banquise, c'est plus que ma demi-mamie, je le sais que je ne la verrais plus, je les sépare de ma nouvelle famille, dit comme ça j'ai l'impression qu'ils m'ont fait quelque chose d'horrible, ils l'ont fait ? Je pense pas, je pense beaucoup de chose, mais l'autre mamie, est-ce qu'elle pense seulement que je suis en vie ? Est-ce qu'elle sait pourquoi on m'a jeté dans l'eau ? Si oui, j'aurais aimé qu'elle soit là, à me serrer dans ses pattes et à me parler avec sa voix toute cassée, pour qu'elle me dise. Pourquoi, oui dites moi, pourquoi ? J'ai été méchante ? Je le connaissais même pas ce taré, la frustration de ne pas comprendre me fais serrer les pattes, me donnant une allure plus statique je m'en doute, j'ai moins d'équilibre mais mes muscles sont tendus alors je tiens debout. Je crois que je peux être fière, j'y arrive mieux que tout le monde, à faire partir ma tristesse quand je pense à eux, ça sert à rien, ça a jamais servi à rien, au début je pensais que Qyu aurait mieux fait que moi, mais est-ce qu'elle aurait réussi à se tenir droite, plus militaire encore que lorsque l'on nous apprenait à l'être ? J'avais été pathétique à la plage, incapable de me relever, mais ma sœur, est-ce que tu aurais pu le faire toi ? Quand je pense à toi, je ne vois plus la petite joyeuse, je vois le cadavre, et je me dis "si ça avait été moi, est-ce que tu aurais pensé à moi sans t'écrouler ?", sans doute pas. Alors en fin de compte, j'en suis fière d'être aussi forte, je survis, je respire, sans aucun hoquet pleurnichard pour m'interrompre et je reconstruis ce qu'on m'a enlevé. Une nouvelle famille, celle-ci c'est la vraie, pas celle où je suis née, mais celle où j'ai atterri, c'est elle la vraie mamie, parce que c'est pas elle qui m'a vu la première fois mais c'est elle qui me traite comme telle.

Je ressort, je reviens devant toi, Nana, je laisse les fantômes s'évanouir dans le vide qu'ils avaient créé. Je reviens face aux plantes, celle qui ne sont pas là, et j'entends quand tu me demandes de t'aider, est-ce que tu avais parlé avant ? Ça fait combien de temps que j'étais plongée dans mes pensées ? J'essaie de me rappeler, mais je ne trouve pas, je suis désolée, absolument désolée, mais j'arrivais pas à t'écouter. Mais maintenant que j'arrive à hoche de la tête pour te répondre, je peux t'aider.

-Elles ressemblent à quoi ?

Je me remets dans ma position d'avant, celle qui permet de courir et de trouver. J'attends juste ta réponse pour me remettre à courir vers ce que tu cherches.