Qu'est-ce que j'fous là (libre)

Plusieurs fois déjà que je passais devant, plusieurs fois déjà que je regardais l'immense bateau avec curiosité, puis, sans aucune raison, je continuais mon chemin, je l'oubliais, je passais à autre chose j'allais voir Papa, j'allais voir les crabes, j'avis fini par m'y attacher à ces petites bêtes, mais elles aussi, elles partaient, elles finissaient par mourir dévorées ou par disparaître dans l'immense monde aquatique, celui qui nous séparait, celui qui dictait la vie de tout le monde ici, mais j'avais fini par y penser, de plus en plus,avec l'âge venait la curiosité, et puis maintenant, me voilà, encore minuscule par rapport à la carcasse de bois.
Depuis un an que j'étais ici, il était temps que je m'y aventure, il était temps que je découvre ce fragment du passé, je ne demande pas grand chose sur l'île en général, je préfère découvrir, je préfère voir sans me fier aux légendes, ce passé n'est pas à découvrir en urgence alors pas besoin d'aller chercher des infos dans les mémoires des autres.
Je me recroqueville, je sens les algues sur le sol, je sens les gouttelettes me mouiller, le froid m'avait un peu manqué je l'avoue, en cette saison, je ne m'aventure plus dans l'eau, je ne tiens plus autant le froid qu'avant, toute petite, je me serrais contre ma sœur, maintenant, je me serre contre Ska, mais il n'est pas là, je me sens seule au monde en cet instant, autour de moi, je ne vois personne pour me voir frissonner, personne pour me voir sauter sur le bois, personne tout court en fait. Dès que mes griffes touchent le bois, je glisse, je ne sais pas si il est toujours mouillé, mais là, les vagues m'atteignent, je ne dois pas avoir choisi le bon jour pour découvrir la carcasse. Aplatie contre le sol, je regarde le ciel, on ne le vois pas caché derrière les nuages, on dirait un tapis de coton, le soleil est tout flou derrière, je peux le regarder, il ne me brûle pas les yeux, il est là mais ne sert à rien, un peu comme moi sur le bateau, un peu comme moi sur l'île, j'aurais adoré être plus utile, mais je ne le suis pas, ce ne sont pas deux trois poissons ou crabes qui aident vraiment les autres, de mon point de vue du moins. Cela dit je n'ai rien d'autre que mon point de vue ici, le principe de la solitude je suppose.

-C'est pas mal ici en fait

J'en profite, personne pour me prendre pour une folle, personne pour me juger, peut-être la mer, elle qui juge et prends sans demander, je l'aime pas.
Je me demande si elle est en colère ou juste enthousiaste à une idée quelquonque, puis je me relève, les ailes et les oreilles plaquées pour ne pas résister au vent, peut-être que c'est juste lui qui anime l'océan, comme d'habitude je n'en sais rien, j'en saurais jamais rien, et voilà. Je marche vers le bord du bâteau je la regarde, je ne recule que très peu lorsqu'une vague me surprend, je montre les crocs avec toujours ce regard vide que j'aime tant, faut vraiment qu'elle arrête de faire ce genre de trucs en hiver, je ne sais pas si c'est pareil pour les autres mais je compte chaque vague comme un petite patte de la mer, un geste de son corps immense, en gros là elle vient de me foutre une gifle. Je me retourne et vais me réfugier dans un recoin du navire où je suis protégée du vent, puis je pose mon museau sur mes pattes, inutile de préciser que je viens de me croûter et que résultat : j'suis par terre. Je sais même pas pourquoi je reste, j'ai froid, j'suis trempée, mais je suis bien, alors je regarde juste vers ce qui semble être l'intérieur du navire, il a l'air assez grand vu d'ici, plus que d'en bas déjà.

Je soupire, rien ne se calme, si je finit dans l'eau je pourrais m'en prendre qu'à moi même.

Brutalement, je suis sortie de ma contemplation du bois pourri par un claquement, dans un sursaut, je retourne ma tête, parce que flemme de bouger complètement, et le regarde avec de grands yeux, avant de me rendre compte que j'ai en face de moi un autre loup poisson, qui ressemble vachement à Naïade, mais avec les couleurs d'Abysse, pas besoin de chercher bien loin pour comprendre de qui il sort lui...

J'aurais pu lui sortir une déformation de son nom moi aussi, mais pour ça il faudrait déjà que je me rappelle son nom, je suis même pas sûre de le connaître alors c'est pas forcément aussi simple que ça. Je crois que je sais où le situer au niveau des loups que je connais déjà, ça doit être un des gosses d'Abysse et Nana, après réflexion, je sais pas si je peut dire que c'est le "gosse" de ces deux là parce qu'il est quand même plus vieux que moi, je suppose que ça marche aussi mais bon...

-Dis juste Amma c'est plus simple, et, sinon, je sais pas plus que toi ce que je fous là..., que je lui dit, un peu agacée.

Flemme de chercher, alors, j'esquive juste, je demanderais à mon père plus tard, de toute façon, ici, ce que j'avais assez rapidement compris, c'est que y'a pas besoin d'être polie, limite c'est ça qui paraît étrange...

-Et toi ?

Manière la plus simple de faire la conversation quand on ne sait pas du tout quoi dire... Des fois je me dis quand même que j'suis un peu conne, bien sûr que je sais quoi dire, suffit de lui demander c'est quoi son nom ! Ca m'évitera de devoir aller demander, sérieux ça fait un je sais pas combien de temps que je suis là et je sais toujours pas comment parler aux gens ? J'suis pas sociable, ça je le sais, mais faut peut-être pas exagérer.

-En fait, te vexe pas mais t'es qui ?

Je baille, j'espère un peu qu'il sera pas ennuyant, juste pour rendre cette visite pile au mauvais moment, un peu plus utile.

Je ne sais pas si j'ai l'air de l'écouter avec la grimace que je fais, c'est pas ma faute non plus remarque si j'ai froncé le museau en recevant une gouttelette dessus, c'est pas tant d'être mouillée qui me gêne, je l'suis déjà, c'est plus par principe, j'aime pas qu'on me mouille, point.

Au final, il me sort son arbre généalogique complet, j'en demandais pas tant mais au moins là on est fixés, j'essaie de retenir les nouveaux noms mais je pense que même si à un moment je me retrouvait face à eux j'arriverais pas à m'en rappeler. En les récitant dans ma tête, je le regarde plus qu'à moitié, concentrée sur totalement autre chose, mais mon attention retourne rapidement sur lui quand je me rends compte qu'il fait un faux sourire, je le le regarde avec ce regard perplexe que font des fois les gens, des fois ils posent leurs questions après, mais moi j'irais pas plus loin, pour deux raisons: primo, j'en ai rien à cirer, secondo, avec le nombre de fois où j'ai feint un sourire, ce serait assez hypocrite de ma part de le faire chier avec ça. Qu'il garde ses histoire pour lui. Moi, ça me regarde pas, sinon on est bien d'accord que je serais plus chiante. Beaucoup plus chiante.

Pourquoi je fait rien ? C'est une bonne question, peut-être parce que je sais pas quoi faire, même si c'est lui qui m'élève maintenant, Ska remplacera jamais vraiment les deux bizarres qui m'ont créée, et les deux bizarres en questions, ils m'ont jamais dit ce que je devais faire quand je m'ennuyais, ici c'est plus simple de s'ennuyer en plus, pas de glace pour faire de la luge, pas d'oursin à lancer, que dalle, mais surtout, y'a moins de trucs à faire pour survivre, donc plus de temps libre, je devrais pas m'en plaindre mais y'en a peut-être un peu trop à mon goût. Ça force à faire des choix, et pas de bol, j'ai pas d'imagination, pas assez pour remplir tout ce temps. Du coup je fais rien, je chasse un peu, pis j'erre toute la journée, j'explore de temps en temps, ouais, une fois par an quoi... La preuve, j'étais jamais allé ici, je l'avais jamais vu non plus, lui, ou peut-être que je l'avais vu sans vraiment le regarder, une silhouette floue sur le passage que j'empruntais tout les jours, j'y connaissais chaque plante, je peux pas dire chaque brin d'herbe parce que, Eh ! Au bout d'un moment, étonnamment, ils finissent par être tout rabougris et par mourir, trop piétinés, du coup ça me fait des chemins boueux quand il pleut.

-Parce que tu veux que je fasse quoi ?

Cette fois je me lève, pour m'approcher du bord.

-Plonger là dedans ?, je montre la mer en furie de la tête, Excuse moi mais le temps m'a pas l'air idéal...

Même si mes paroles peuvent paraître agressives, mon ton ne l'est pas du tout, calme comme toujours, adoucissant un peu ce discours que je lui tiens. Ça doit être l'ennui qui me fait dire des choses comme ça, mais c'est tout ce qui m'est venu à l'esprit, désolé si tu t'es senti agressé mon pauvre, j'aime bien parler au gens dans ma tête, surtout quand c'est pour dire des trucs gentils, tu peux toujours laisser tomber pour que je m'excuse en vrai, ou en rêver, c'est plus facile pour se foutre de toi.

En effet, sur le coup, j'ai un peu honte de ne pas avoir trouvé quoi faire, plus encore de le lui avoir dit sur ce ton alors que je me trompais, je regarde le sol, analysant les idées données pour améliorer cette vie qui, de ce que j'ai compris, n'avait pas l'air de le satisfaire beaucoup, cela dit, on ne peut pas lui en vouloir pour ça, question esthétique de l''île, je l'admet, rien ne m'avait vraiment dérangée et toutes ces histoires de légendes et de cultures passerait plus pour un hobby quelconque, mais des armes, ou des outils, ça, j'en comprend parfaitement l'utilité. Sans que je me rappelle quand, je m'étais déjà étonnée, qu'on ait pas plus de choses pour nous défendre alors qu'on avait déjà été attaqués, mais, et honte à moi pour ça, je ne m'étais pas dis que je pourrais en faire moi-même. Son monologue fut long, assez long pour que je réfléchisse au début avant qu'il l'ait fini, et, les dieux peuvent en témoigner, je réfléchit vraiment lentement.

Je relève la tête vers lui, les yeux plissés.
-Mouais, admettons que je parte sur de quoi nous défendre, je ferais comment ?

D'accord, mauvais choix de mots, alors je prend la peine de préciser:
-Enfin, oui, non, plutôt, est-ce que toi t'as des idées ?

Dans tous les cas j'allais forcément demander à quelqu'un, autant commencer quelque part, non ?

Même moi, ça m'étonne la vitesse à laquelle je retourne ma veste, mais il faut bien ça pour que ça avance, si en un an, je n'ai pas fait grand chose, alors faut que je me bouge avant de finir en poussière. Ou en sable, ou en quoi que ce soit, j'en sait rien moi de ce qu'on devient après qu'on soit morts.

Chimaera

Chimaera pencha la tête sur le côté. Cela se voyait qu'elle ne lisait jamais elle, ou qu'elle n'avait jamais rien vu. Le mâle prit une inspiration et levait la tête vers le ciel, avant de reposer son regard sur elle. Comment expliquer, comment trouver des idées dans tous ses choix. Il fit attendre la louve, quelques instants avant de lui répondre tout simplement.


"-Bah, déjà la base, c'est d'être prêt physiquement pour se défendre, tu auras beau avoir tous les dispositifs en place, si tu ne sais rien foutre cela ne te servirait à rien s'ils arrivent à t'atteindre avant même que tu n'avertisses les autres! Au moins connaître les bases ce serait déjà ça! Ensuite, faut penser à la sécurité de l'île, et la aussi faut aller par étapes. D'abord en partant d'abord par les plages qui seront les premiers endroits à être attaqué! D'après ce que j'ai lu et entendu, il faut que nous songions à des places ou des loups pourront surveiller les plages! Si nous avons déjà des loups prévenant du danger, cela pourrait sauver pas mal de vies vois tu! Styles mmh... Un camouflage, ou des terriers ou que sais je. Préparer des pièges! Des loups du continent sous estimes les loups marins! Nos pièges peuvent être mortels pour eux si ils ignorent tous! Ils sont parfois stupides, cela peut être un avantage pour nous! Je dis bien parfois, dans ces groupes, y auras toujours de bonnes têtes pour dicter les plus dénués d'intelligence!" Il soupira.


"-En piège nous pouvons inventer des bombes sous le sable! Installer un prédateur vicieux sur la plage! Des filets épais.. Ou des techniques faciles pour les noyer! Ou alors récupérer les canons, les barils etc qu'on mettra espacés sur tout le contour de l'île... Si tu veux te rendre utile, fait le tour de l'île, cherche les meilleurs emplacements pour que quelques-uns de nos membres puissent s'installer et getter au loin la venue de danger! Cherche si tu le souhaites des camouflages! N'hésite pas à demander à quelqu'un pour t'accompagner!" Il y songeait tellement mais n'en parlait pas de tout ça. C'était peut-être le bon moment? Peut-être.

Codage par Libella sur Graphiorum

Je sais pas vraiment comment interpréter la tête qu'il fait, un autre signes qu'il faut vraiment que je parle plus aux loups de l'île, je ne peux, ni ne veux, juste vivre ici, être Raeder, c'est à l'évidence plus que juste des colocataires, c'est plus comme un cercle que j'aurais trop longtemps évité, mais qui, aussi déconcertant pouvait-il être pour quelqu'un comme moi, m'attirait vers lui. D'autant plus que ça m'empêchait de comprendre des messages comme celui-ci.

Pis il reprend son souffle, attend, quoi je sais pas, et me donne encore une fois une réponse beaucoup plus longue que ce à quoi je m'attendait, peut-être que c'est juste sa façon d'être au final, qui suis-je pour juger ? Je le fais quand même mais bon, je vais pas le lui dire ce serait contre-productif.

Cette fois-ci j'écoute plus attentivement, puisque je n'allais certainement pas lui demander de me le répéter une fois que j'aurais fini les rares choses dont je me rappelle, question de fierté.  Etonnement, ses idées était poussée, je ne parle pas de savoir me battre, ça pour le coup y'a pas plus classique, plutôt des bombes sous le sable, entre autres solutions tordues, mais commençons par le commencement, d'abord, apprendre à se battre, je pense que ça reste le plus simple de tous, reste à trouve quelqu'un pour m'apprendre. Faut demander à Ska.

Je laisse passer un peu de temps, comme il avait fais avant, pour réfléchir, puis je le fixe de nouveau.

-Pourquoi t'as rien fais si t'as autant d'idées ?

Moi, je m'étais cachée derrière mon ignorance, lui, il arrivera difficilement à faire la même chose vu tout ce qu'il vient de me sortir. C'est une question simple, mais j'en attend tellement, parce que je sais qu'à sa place, j'aurais menti, et que résultat, je suis pas sûre que je le croirait si son excuse est pas génial, quoiqu'en y réfléchissant, il va peut-être juste me dire qu'il avait autre chose à foutre de ses journées, ce qui est sans doute vrai.

Et ça le fait réfléchir, en le disant je m'attendait pas à cette réaction là, je m'attendais à qu'il se moque, qu'il s’énerve à la limite, mais pas à ça, encore une fois je ne comprend pas ce qui a pu se passer dans sa tête pour qu'il ait l'air de se poser une question existentielle. Je recule, surprise à la fois par son changement brusque d'expression et ses paroles, parce que cette fois-ci, je comprends pas du tout, c'est bien sa famille, non ? C'était bien eux qui l'avaient élevé ? Alors comment est-ce qu'ils pourraient ne pas en vouloir la peine ? Je le regarde, perplexe, avant d'entendre la suite.

Moi ? Les sauver ? De quoi ? Des malédictions ou des autres ? Mes pensées ne s'arrangent pas, tournent en boucle dans ma tête, sans que j'en démêle quoi que ce soit, je veux volontiers les sauver, mais, hein ? Je baisse la tête, pas pour réfléchir car dans l'immédiat j'y arrive pas, plus pour accepter, faire comme si je comprenais, puis je dis "peut-être".
J'aimerais bien les sauver, les protéger puisque l'île n'y est pas encore apte, mais ça ressemble plus à un rêve qu'à la réalité, parce qu'en vrai, j'ai même besoin d'aide pour savoir quoi faire, et je ne sais pas me battre, même en apprenant, on part d'une situation désespérée.

Je le laisse partir, il a l'air de le vouloir et je suis pas du genre à courir après les gens, il est trop incompréhensible pour le moment, trop mystérieux pour moi qui ne comprend pas bien les autres, un niveau que je n'ai pas atteint en terme de relations sociales, alors je reste là, sur le bateau, pensant non pas à pourquoi il plonge alors qu'il y a la terre ferme à côté et qu'il fait moche, mais à ce qu'il vient de dire. Pour espérer comprendre ces paroles, ces gestes, pour mieux analyser, et pour retenir et demander plus d'infos sur ce qui c'était passé avec lui, il leur en veut, même moi j'avais trouvé ça assez explicite, mais il leur en veut jusqu'à où ? Entre m'aider si j'essaye de les protéger et les laisser crever sans défenses, il y a un sacré écart, trop grand pour que je le comprenne seule, alors je suppose que je vais user de la bonne vieille technique d'aller demander à Ska ce qu'il en pense.