Il ne l’avait jamais senti si clément, si patient à l’égard des mortels. Devaient-ils tous en être féliciter ? Il avait toujours évité de croisé son regard, fait cas de moult stratagème pour ne jamais décevoir, vécu pied et poing lié par le contrat qui les liait alors.  Il avait beaucoup parlé aussi, avait décri son dieu à ceux qui se montraient curieux, sans idole, sans fioriture, seulement décrit des faits. Pourquoi il l’avait choisi ? Pour la liberté. Libre d’agir, libre de penser tant qu’il marchait sur les chemins de la logique et de l’esprit, ainsi aurait-il pu s’en détourné du peuple, des Nakhus qui l’avaient élevé. C’était une option parmi tant d’autre. Et pourtant, il avait bien fini par y faire sa place.

De murmures glissés à son oreille, il tait et ne partage. Les yeux clos, il accepte. Il fera ce qui doit être fait sans état d’âme, sans être troublé, parce qu’il est ainsi émotif lorsque cela le concerne, froid et absent lorsque cela est nécessaire. L’on n’a nul besoin de lui demander accord ou permission lorsqu’on est un Dieu d’autant lorsqu’on est sien. Il a appris sa mortelle leçon, en connaît le moindre verset, ne saurait y déroger sans en accueillir la punition.

Les échanges se poursuivent. Il en écoute les tenant et les aboutissants. Mido en juge intraitable, fini par trancher le cas du félon. Il n’en attendait pas moins, le guide, car il sait ce qui attend les traîtres et les déshonorés. Il a craint d’en faire parti pendant si longtemps, avait eu l’occasion d’en faire moult scénario, et même si aujourd’hui n’a plus peur pour guide, il n’oublie les conséquences.

Puis vint le temps, celui qu’il redoute plus qu’il attends. Il se place à l’arrière, laisse Nocera ouvrir la marche tout comme il l’a fait depuis le commencement de cette quête, se laisse distancer et marche dans son ombre. Il se noie d’angoisse qui le noue autant dans son cœur que dans son esprit fatigué. Pourtant, il se veut toujours faire bonne figure, garder les apparences face aux autres.

Il n’avait oublié, la situation qui était la leur, sans jamais osé en demander l’ultime résolution.
Car Mido est un dieu que l’on ne saurait presser. Il l’avait appris à bien des égards lors de ses errances de jeunesse et l’avait payé de moult regrets. Flatté par les murmures glissés aux creux de ses oreilles plus tôt, sans parvenir à en établir pleinement les raisons, c’est sans conviction qu’il se joint à Nocera lorsque l’invitation fut donnée.

Le lieu de la vision, là où les cinq porteur de verts seraient réunis pour s’abreuver du calice. Sa tête, il la penche observe plus en détail, s’interroge sur ce lieu tenu dissimulé, savoir confidentiel. La gueule s’entrouvre lorsque de jade paré, le dieu se matérialisé à partir d’une cloison. Longtemps, il l’avait espéré apercevoir la divinité de ses yeux. Puis il avait perdu espoir, se contentant toujours de ce que son Dieu daignait lui concéder sans demander plus. Etait-il seulement autorisé à le dévisager ainsi gravant son image en lui comme l’on inscrirait des pensées sur une page vierge ?
C’était donc à  cela que ressemblait un dieu, son Dieu.

Puis vinrent les paroles, les explications auxquelles ils se devaient de se plier. À la mise en garde, le pelage se hérisse, se froisse. Réminiscence de ses erreurs passées, de ses hantises qui servent dorénavant de conseils lorsqu’il doit agir en guide. Il ne saurait convoiter plus maintenant, bien qu’il serait blessé. Blessé, il l’était déjà de n’avoir plus d’intérêt aux yeux du divin qu’il sert depuis tant d’année. Outragé de n’être à la haute une nouvelle fois, mais il n’avait de doute que cette colère et cette honte, sur lui-même il déverserai car ce serait sa responsabilité. Jamais, il ne l’envierai.

Les énigmes énoncées s’écrivent clairement apparaissent en lettre brillante. Il les lit. Les transcrit en pensée. Puis souffle, ses griffes éraflent la pierre lorsqu’il se tend. Il doit rester concentré. Il le doit puisqu’il s’agit d’un ordre lancé. Mais la question demeure tout fois.

Devait-ils souffrir de la comparaison ? S’affronter d’arme savante sans possibilité de discourir entre eux, sans débat. Mido doutait-ils encore d’eux deux ? Il souffle, la douleur en sa poitrine se fait sentir, du pouvoir dont il abusa et dont il abuserait encore si tout cela était à refaire. Les crocs, il serre, de l’énigme, il mâche les mots. Une réponse, une idée. Puis le regard se perd et il surprend un échange.  Du regard, il interroge, levant un sourcil, il tente de lire dans le regard de l’autre, sans user de son pouvoir. Il est ainsi, observateur de l’ombre, mais ce n’est pas les réponses aux énigmes qu’il cherche mais les raisons de ce regard porté sur lui.
La réponse ne se fait attendre.

"Ma nature est d'être un bras droit. Si tu le veux... Je serais derrière toi."

Ses oreilles s’agitent alors, il interroge, se demande pourquoi ? Quelle en est la raison ? Mais si telle est sa volonté comment pourrait-il s’y opposer ?

Il réfléchit, il hésite, mais ce n’est que par intelligence qu’il n’accepte précipitamment, il n’est avide de pouvoir et de contrôle. Il n’avait vocation à dirigé les autres. Il avait toujours eu le cœur solitaire et vagabond, ne tendant vers ce but, garder liberté, savoir et errance pour lui. Et pourtant, il savait agir en laissant outre les conséquences, en oubliant ses propres besoins, faisant montre de bien moins de compassion que les autres Nakhus lorsqu’il fallait trancher pour le bien commun. Mais les choses avaient changer avec elle et les promesses qu’il lui avait faite. Il se voyait difficilement quitter sans avoir le cœur déchiré, sans causer une peine qu’il ne saurait supporter. Mais comment être sûr de ne pas s’égarer. Comment être certain de ne pas reproduire les schémas passés…

Le regard, il le porte en réponse à Nocera. Il se ressaisit comme lorsque l’on atteins certitude. Il y a condition.

« Ce rôle, je peux l’endosser, à la seule condition, même si la décision finale ne t’appartiens plus, que toujours, tu continues à conseiller afin que jamais je n’emprunte une mauvaise direction. Les autres parfois font preuve de bien trop de compassion, concernant celle-ci je peux toujours compter sur eux, mais concernant la logique, je ne vois personne d’autre que toi. »

L’expression reste neutre. Faire ce qui doit être fait, sans s’opposer, se déchirer, il préfère cela à la confrontation après cette journée d’échange qui se voulait interminable.

« Ensemble, nous pourrons guider ceux qui le souhaitent vers les valeurs du Raptor et ainsi créer une nouvelle génération porteuse de nos valeurs communes. »

Rétablir l’équité parmi les rangs des nakhus. Les faire progresser sur les chemins de la logique, ensemble.
Garder le contact. Il le sait qu’il le peut grâce à ce pouvoir qui lui a été confié. Rester diriger tout en faisant circuler l’information.
Puis il s’incline face au raptor, comme il l’avait déjà fait des années auparavant.

« Que votre volonté soit faite. »

Le souffle du raptor encore semble se poser sur lui. Alors qu’il attends mot, acceptation ou refus, il ne voit qu’action, mouvement et changement. D’un souffle, la cape du medium se décolore, de noir javellise à blanc. Jusqu’à la plume dorée se trouve remplacée, troquée pour celle à l’effigie du raptor lui-même.

Décevoir, il ne pouvait se permettre, jamais il ne relâchait les efforts qui étaient siens. peut-être un jour serait-il dépassé alors ne tiendrait qu’à lui d’abdiquer, laissant place à plus méritant s’effaçant pour regagner une place à l’ombre de la bibliothèque. Une possibilité parmi tant d’autre, mais en attendant se montrerai aussi capable qu’il puisse l’être.
Faire ses preuves encore et toujours. Porteur inlassablement ce fardeau afin qu’un jour, il soit transmit.

Une nouvelle fois, les murmures inaudibles font tressaillir ses oreilles, une promesse de retrouvaille lors de la prochaine pleine lune, un impératif, là où il devra agir en digne représentant. Il ne pouvait douter qu’ils seraient là tout deux afin que puisse se réaliser la prophétie bien assez retardée.

Lorsqu’on le félicite, il s’incline en guise de remerciement, trop protocolaire et trop scolaire peut-être.
Merci
La longue queue derrière lui forme un arc de cercle, il se redresse à son tour.

Il faut y aller, il y a encore tant de chose à faire, tant de chose qu’il ne peut remettre à demain désormais. La guide ouvre déjà la marche. Le nouvel oracle tourne les talons et abandonne le domaine sacré après un dernier regard, il marche désormais dans les pas de celle qui le précède.