L'incompréhension - Alexandrine

Curieuse, Holly n’avait pas tardé à prendre connaissance des dernières naissances Etelkrus.
Depuis quelques temps déjà, leur meute à la natalité autrefois inquiétante, voyait leurs effectifs augmenter grâce aux arrivées successives d’adorables boules de poils. Elle en était ravie, aussi bien en tant qu’Alpha qu’en tant que louve qui avait toujours aimé les enfants.

Sa joie avait, cependant, été de bien courte durée, cette fois ci, anéantie lorsque ses yeux s’étaient posées sur l’une des dernières nées.
Crème, bleue foncée, orangée et verte.
Les similitudes étaient bien trop grandes pour qu’elle ne lui évoque pas une certaine Alexandrine et elle s’était sentie confuse et peinée.
C’était stupide, et elle le savait, par ce que la louve-dragon était désormais libre de faire ce qu’il lui plaisait, y compris des enfants avec d’autres mais…
Mais voilà.
C’était là.

C’est sûrement un accident.

Son regard s’était voilé, son coeur serré, et elle avait tourné les talons sans demander son reste pour se perdre dans les boyaux du Castel jusqu’à apercevoir la lumière de l’extérieur.
Elle inspira.

Ou alors, c’était juste avec moi que tu ne voulais pas d’enfants.

Hollyhock secoua la tête.
Il était probablement inutile, de s’imaginer toutes ces choses.
Est-ce par amour, que cette enfant est née?
Elle n’était même pas près de sa fille.
Elle fait peut-être partie de ces enfants qui ne sont pas assumés.
C’était peut-être un malentendu.
L’enfant lui ressemble tellement.
Il valait mieux cesser d’y penser.
Pourquoi, avec lui?

Perturbée, elle resta immobile, à l’écart des autres, le regard perdu sur un point invisible.

Je n’ai rien vu.
Pas de ventre rond, pas d’odeur différente, rien.
Mais tu n’es pas souvent au Castel, non plus.

Quand on pensait à la louve, on en voyait la gueule balafrée.
Ce n’était pas quelque chose dans le genre, cette expression ?

Holly se redressa et s’approcha à son tour de la louve ailée pour la détailler du regard, peut-être de façon un peu indiscrète. Il n’y avait, définitivement, aucun signe qui pourrait laisser penser à une grossesse récente… Mais peut-être que tout le monde n’était pas égal, à ce niveau là.
Dans tous les cas, cette ressemblance avec l’enfant ne pouvait pas être une coïncidence : Ca lui sautait davantage aux yeux, maintenant qu’Alexandrine se tenait sous son nez.

Est-ce qu’elle jouait aux innocentes ?
Est-ce qu’Alexandrine savait seulement mentir ?

- Bonjour Alex. Non, tout va bien pour les enfants.

Son regard chercha le sien, à la recherche d’un indice, de quelque chose…

- Elle te ressemble tellement, la dernière née.

Pourquoi tourner davantage autour du pot ?

C’était tout ce que ça lui inspirait, alors ?
Est-ce qu’elle jouait vraiment aux innocentes ?

- Mais arrêtes de te moquer de moi.

Le ton n’était pas agressif, ni même accusateur, par ce qu’une fois encore, Alexandrine faisait bien ce qu’elle voulait de son derrière, maintenant. Il n’empêchait qu’Holly demeurait blessée par cette découverte, et peut-être un peu par sa conduite, aussi.

- Elle a des ailes quand son père n’en a pas. Elle a tes yeux, ton vert, ton orange, ton bleu, ton beige, même ses rayures me font penser aux tiennes… Même sa queue ! C’est ton portrait craché, même ta soeur ne te ressemble pas autant.

L’enfant ressemblait clairement davantage à Alexandrine qu’à son propre père.

Mais.
Elle ne comprenait vraiment rien ?

Une chose était certaine, elle ne lui mentait pas.

- Ben. De la dernière née de Fafnir. Tu es sa mère, non ?

Ou alors, c’était Anita… Mais l’enfant ne ressemblait pas tellement à Anita. Mais les gênes, tout ça, peut-être que ça arrivait, parfois, que des petits ressemblent davantage à leurs oncles et à leurs tantes qu’à leurs véritables parents ?
Enfin, elle partait peut-être trop loin et préférait, pour le moment, guetter la réaction d’Alexandrine.

… Bon, définitivement, Alexandrine n’était pas au courant d’être maman.
Holly n’y voyait qu’une raison et son pelage se hérissa.

- De toute évidence. C’est peut-être le monstre aux yeux tourbillons, qui a fait ça.

Ce serait encore le plus logique.

Ce qui suivit l’aurait probablement faite rire aux larmes… Si elle n’avait pas le coeur si lourd à cause de la situation initiale.
Elle emboîta le pas d’Alexandrine et prit connaissance de la situation. Tout continuait de la laisser perplexe, elle peinait à le croire. L’Alpha soupira.

C’était vraiment une solitaire, la mère, alors ?

- Tu es bien sûr de toi ? Elle lui ressemble tellement, à Alexandrine, ta fille.

Ses oreilles se couchèrent sur l’arrière de son crâne.
Ils semblaient plutôt proche, en plus, tous les deux. Voilà qui n’était pas vraiment (pas du tout) pour la rassurer. C’était difficile, de prendre du recul, de s’en moquer, de…

Elles avaient finalement parlé en même temps, posé le même genre de questions, avant qu’Alexandrine ne parte de nouveau et qu’Holly se sente obligée de lui emboîter le pas.

Au delà de sa propre peine, ce fut la détresse d’Alexandrine, qui la toucha.
L’aversion de la louve crème pour les enfants ne datait par d’hier et, aujourd’hui, encore, elle n’était pas prête à être mère. Elle ne le serait probablement jamais, c’était évident, et ce n’était pas quelque chose qu’Hollyhock pouvait condamner.
Elles étaient opposées, sur ce point.

La louve bleue détestait cette situation.
Elle détestait voir cette enfant aussi ressemblante avec Alexandrine. Elle détestait voir cette même Alexandrine dans un tel état, elle détestait la façon qu’avait Fafnir de prendre les choses avec autant de nonchalance, elle…
Elle inspira profondément.

Elle ne savait pas trop quoi dire à Alexandrine pour la rassurer, Holly. Alors, en guise de soutien, elle vint toucher son épaule de la sienne, avant que son regard ne se pose à nouveau sur Fafnir.

- Il y’a un monstre qui s’amuse à faire des enfants aux gens sans leur consentement. Donc non, elle ne l’aurait pas forcément senti.

Ce n’était pas rassurant.
Elle gronda, en colère.

- Il le paiera.