Un changement à venir | ft. Kerguelen

C'était un grand jour aujourd'hui et une grande décision avait été prise. Certainement pas à la légère, non ! Holzër avait croisé Stendhal, demandant à voir sa mère, cheffe des Nakhus, pour lui exposer son projet.

A son tour, après Liza et Cloud, dans les pas de papa Violette, il voulait agrandir sa famille, et servir les Nakhus. Pourquoi pas devenir bibliothéquaire ? Ce lieu qui était devenu son refuge, sa seconde maison lorsqu'il ne s'occupait pas de son petit jardin dans le gouffre amménagé.

Le jeune loup avait cogité des mois durants. Il restait timide et peu sûr de lui, mais il avait la chance d'avoir des amis et une famille aimants qui lui donnaient un second souffle dans ses projets de vie.

Alors, d'un pas décidé, il s'était rendu au rendez-vous, tendu, un peu larmoyant également sur le coup des nerfs, mais il se tenait droit, humble. Il fallait faire bonne impression, la meilleure possible. Ca lui tenait beaucoup à coeur. Encore plus après que sa soeur Liza ne soit devenue ce qui lui semblait être un bouc émissaire en boucle, prise pour cible de trop nombreuses agressions.

Ainsi assis face à la petite rivère, il attend, récitant en boucle sa demande, la reformulant pour la rendre la plus sincère possible.

Il n'eut pas à attendre très longtemps. De son regard perçant marqué par des pupilles de serpent, il remarque la silhouette de l'Oracle qui s'avançait solonellement. Et lorsqu'elle arrive à son niveau, malgré la distance mise pour que tous deux soient confortables, il se sent si petit, si ridicule.

La louve grise avait l'une de ces aura magique, une prestance sans nom qui laisse Holzër ressembler encore une fois à un louveteau vulnérable. Mais il se reprend, et tente de faire bonne figure en se redressant, bien que ses pattes se font tremblantes.

Sa voix douce accompagne des mots qui désamorcent l'angoisse grandissante, décrochant un sourire timide, montrant légèrement ses crocs noirs. Il rougit également soudainement sous son poil fin et blanc.

- De même, Ma- Madame.

Elle n'était pas qu'une simple louve, qu'une simple amie de sa mère. Elle était aussi la guide des Nakhus, et c'est en cette qualité qu'il voulait lui parler. Ses yeux se plongent dans les siens, et se laisse bercer par cette même couleur qu'il connaissait que trop bien. Nul doute sur le lien de parenté entre son meilleur ami et cette grande dame.

Sa gueule s'ouvre sans un son, bien que des mots en pagaille défilent dans sa tête. Il s'éclaircit la voix bien qu'elle reste profonde. Ce texte, il le connaissait par coeur, il l'avait récité plein de fois.

- Je souhaiterai avoir l'honneur de ... vous rejoindre. Vous et Stendhal, ma ... maman et ma soeur, et papa Violette, chez les Nakhus.

Sa parole tremblait un peu et se faisait automatisée. Selon lui, les mots utilisés étaient corrects et clairs, un voeux qu'il chérissait, et il se sentait prêt à se plier à de nouvelles habitudes pour bien faire les choses, se rendre utile. Seul son jardin lui manquerait un peu plus, même s'il resterait sans doute libre de lui rendre encore visite.

La patience de la louve le détend un peu. Il n'avait pas à se presser, il n'y avait pas d'épreuve apparente. Juste une discussion, du moins à son sens. Ses oreilles s'agitent toujours dans tous les sens, bien qu'elles s'immobilisaient bien droites lorsque Kerg' prenait la parole. L'un des rares moments où ses angoisses ne se montraient pas.

Hol' se voulait attentif, plus que tout, cherchant dans le regard de la louve des mots qui n'étaient pas dits. Mais rien de tout ça, les choses venaient clairement.

Les raisons, il y en avait milles. Toutes avec un intérêt bien présent derrière. Mais la principale ...

- J'ai peur pour ... Blizzard. Peur qu'elle se perde encore. Peur qu'on lui fasse encore du mal.

Sa voix s'éteint un peu, regardant le sol.

- Ma maman vous a rejoint pour ça, aussi. Je veux l'aider, mh. Et les Nakhus qui ont besoin aussi.

Et réamménager un potager plaisant pour lui fournir, à elle et sa soeur, de quoi les nourir Eté comme Hiver, elles et les autres qui seraient dans le besoin. Celui du refuge, il s'autogérait maintenant qu'il était mûr, évidemment qu'il reviendrait s'en occuper de temps à autre, mais il appartenait aux passants, et à ses quelques occupants principalement.

- Puis, contribuer à la bibliothèque, vous savez- J'y vais souvent.

Un petit rire timide. Evidemment, elle devait l'avoir déjà croisé en chemin vers cet endroit, son cocon, où ses peines et ses doutes s'envolaient en y trouvant parfois des réponses, ou son esprit divaguait ailleurs, loin de ses démons. Devait-il aussi avouer qu'en partie, pouvoir revoir le fils de l'Oracle plus qu'ils ne se croisaient déjà pesait dans cette balance ? Ses yeux bleus reviennent sur la louve.

- Je saurai me rendre utile, à vos côtés.

Il préférait donner que recevoir, après tout.

Rapidement, la bibliothèque devient le centre de la conversation. N'en déplaise à Holzër, qui se détend et s'ouvre un peu plus en affichant un sourire timide. Nul doute que la louve aimait aussi autant cet endroit, après tout, elle en était gardienne ! Le jeune loup continue de lire principalement le non verbal, il y avait un véritable enthousiasme.

- Oh, oui Sobieski ! Il est gentil. Je l'aime bien.

C'était presque comme un miroir, deux loups crédules, un peu neuneus et surtout attentifs à l'endroit dont il était question. Les premières rencontres étaient très étranges et inconfortable, mais rapidement, le bibliothécaire était devenu point d'ancrage pour Holzër pour tout ce qui touchait au savoir, l'un des premiers à avoir lu ses premières écritures maladroites.

Oui, Sobieski était quelqu'un de bien. De très bien et attachant.

- J'aime bien ... Les sciences ? Les plantes, les arbres les insectes, les animaux ... Mais aussi un peu l'histoire mh.

Enfin, l'histoire, il peinait à la retenir. Il s'était efforcé à au moins lire, bien que le sujet soit prenant, il n'éprouvait pas trop d'affinité avec cette partie-ci. L'enfant de Cloud préférait rester rat de la section lui permettant d'avoir ce si beau potager au refuge, et les insectes, depuis que Stendhal lui en avait parlé, était devenu aussi source de fixette.

- Et vous ?

Sa tête tique sur le côté, curieux, mais surtout, il se veut courtois devant cette impressionnante louve.

Le jeune loup adresse un sourire plus franc, moins timide. Oui, ils avaient tous deux sans doute lu les mêmes lignes des mêmes livres. A l'invitation, son coeur s'emballe et il se redresse par automatisme.

La seconde le fait hocher la tête.

- Ce serait avec plaisir, un honneur !

Envolé le Holzër avachi, il avait désormais des étoiles dans les yeux.

- Du coup ... Vous êtes d'accord ?

Il n'attendait qu'un "oui", et il verait le reste de sa vie changée. Un "oui" qui le rapprocherait de sa famille, de son meilleur ami, d'une nouvelle grande famille d'un autre degré. Une explosion de pensées l'envahit.