Le prix du Silence [ft Iris ]

Ibéris était mort.

Les mots s'enchainent, difficiles. Autant pour elle que pour lui. L'éclat des yeux est peut-être le plus prenant du tableau, mélange intense de peur, de tristesse, qui donnait au discours une dimension bien trop réelle. La gueule de l'alpha s'entr'ouvre, sans qu'il ne parvienne à dire quoi que ce soit.
Il aimerait qu'elle ralentisse.
Il voudrait qu'elle s'arrête.

Mais elle parle. Continue. Lui ne comprend pas encore la première phrase. Mort, avec sa compagne ? Ce n'était pas possible, lui qui aimait sa fille, sa vie ? Lui qui avait survécu au dragon ? Pourquoi ? Son ventre se serre. Car se poser cette question, c'était accepter cette idée vertigineuse que son frère n'était plus.
Là, comme ça.
Le sol tangue sous ses pattes, et il doit s'asseoir. Gorge sèche, nausée.
C'était un cauchemar.
Un cauchemar qui continuait encore et encore, depuis que maman était morte.

Il prend une brève inspiration, avant de comprendre le reste des paroles de Litchi. Ses enfants. Il en avait plusieurs. Iris n'avait rencontré que Nour. Et puis ...

La louve noire.

Un silence, dans son esprit affolé.
Un silence de mauvaise augure.


La voix est fébrile, le regard soudain plus intense, comme raccroché à un souvenir. Cela ne pouvait pas être elle, cela ne pouvait pas-
Mais, lui se souvenait. Elle était l'amie de la demoiselle rose. Elle lui était proche, de par sa nature. Et lui se refuse à y croire, comme tout ce que Litchi lui avait dit. Il le refusait.

Une fourrure noire comme la nuit.
Un masque, qu'il avait su blanc.
De fines ailes, pareil à celles de mouches, plutot que papillon.

Deux yeux bleus. Si intenses.

C'était Elle.

Iris sent le sol tanguer sous ses pattes alors que la nausée le prend à la réalisation de ce qui s'était passé. Il n'avait pas besoin de confirmation : C'est Elle. Et elle avait pris la famille de son frère, qui-



Il s'était assis, peut-être. Gueule ouverte, le choc se transforme peu à peu en une détermination plus froide. Son expression se mue en une mimique de colère, sourcils froncés et regard perdu dans le vide. Elle était allé trop loin. Il l'avait cherchée, si longtemps et pourtant, avait fini par abandonner. Elle s'était cachée, oh ! Elle s'était cachée, mais n'avait pu s'empêcher de faire une erreur.

La seule et unique qu'elle ferait, du reste de sa vie.

Il était temps de finir cette mascarade. Il était temps d'aller chercher sa famille. De sa piste, il trouverait sa cachette, l'endroit où elle faisait grandir les ombres en silence. Une cachette où se trouvait Nour, son frère ... Et peut-être ses propres enfants. Il ne voulait pas y penser. Il se redresse, alors. Son frère était perdu, mais Iris se raccrochait à la dernière lueur d'espoir pour son sang. Son regard violacé trouve celui de Litchi, plus sur cette fois-ci.


Il se redresse. La nausée a disparu, le sol tangue moins mais il sent toujours le sang battre dans ses tympans. Un sourire un peu pale effleurer ses babines, se voulant rassurant.


Une pause. Puis, il tend la patte pour venir la poser avec douceur sur l'épaule de Litchi. La messagère, qui s'était battu pour sa nièce et son neveu. La messagère, qui avait pourtant déjà tant souffert et maintenant, avait du les voir arrachés.
Par Elle.
Litchi ne pouvait savoir. Personne.
Ce secret devait être enterré. Au sens propre.

La colère qui passe sur le visage de Litchi, Iris ne la comprend pas. Ou plutot, il avait peur de la comprendre. Voulait-elle aller la rencontrer elle-même ? Aller chercher Nour et son frère des griffe de la démone, seule ?
Il n'en était pas question.
Iris devait maitriser les informations qui se diffuseraient.

Sa patte se pose, passant sur un air plus fatigué. Elle voulait savoir - peut-être devinait-elle que sa description avait évoqué des souvenirs. Ce n'était pas un secret : La louve était connue du clan. Rien ne permettait de tirer un lien avec lui. Rien. Il s'y raccroche, alors que sa voix se fait plus posée en continuant.


Ses yeux violacés trouvent ceux de Litchi. Il y fait transparaitre la douleur qui l'agitait, mais surtout la colère, qui n'était feinte. Tout ce qu'il disait était vrai - après tout, c'était la base d'un bon mensonge. Personne ne connaitrait la vérité, il s'en assurerait. Elle mourrait avec cette dernière, et lui l'emporterait dans sa tombe. Sauf si ...
Il ne préférait pas y penser.


Il inspire avant de continuer, les crocs serrés.


Sa gorge se serre, encore. Il ne voulait perdre personne, et pourtant, Iberis était parti. Il n'avait rien pu faire, rien. Impuissant. Le male se rabattait sur la famille qui lui restait, sur sa nièce, son neveu. Litchi comprenait-elle ? Son regard se fait plus dur.


Peu importe, si c'était un mensonge ou non. Ils reviendraient ici. En sécurité. Et Elle disparaitrait.