Semper Anticus - Ted.

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₪ Semper Anticus ;

— (transl. Always forward ; always in the front). . . . . . . . Motto of the 45th Infantry Division and its successor, the 45th Infantry Brigade Combat Team.

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| Antidaté aux alentours de septembre / octobre. Apparence a environ 2 ans. |

Cela fait maintenant des mois qu'elle vit une vraie vie solitaire.
Il n'y a plus de simulacre de famille, autour d'elle, pour forger l'illusion d'une enfance à peu près normale : son géniteur qui de toute façon n'existait pas beaucoup plus qu'une ombre est mort depuis quelque chose comme un an - le fil du temps est difficile à suivre pour une âme isolée - et peu de temps après, Cassius s'était libéré de ses propres chaînes en quittant la tanière qu'elle même avait le plus fréquenté.
Laissant le vieux Joaquin derrière, qui finit par un jour rencontrer le même destin funeste que celui qu'il eut pour - seul ?- ami. Mort au combat, mais pas aspiré par une entité supérieure.

Si la disparition de Joaquin ne l'avait pas plus touchée que celle de Justice, elle ne l'avait cependant pas arrangée. Car contrairement à Cassius, l'adolescente d'alors était souvent revenue louvoyer dans la Passe, un sourire triste aux lèvres et les yeux plein d'espoir. Cette expression factice endossée comme un costume, elle cherchait alors le vieux loup noir et obtenait systématiquement de quoi se renflouer un peu, sans effort aucun à fournir.
Parce que Joaquin avait toujours eu pour elle une place bien plus confortable dans sa compassion et son affection que celle qu'il accordait à son propre fils, et Apparence savait que d'apparaître face à lui si maigre et misérable équivalait automatiquement à ce qu'il s'occupe d'elle.

Mais maintenant, il n'est plus et cette solution de facilité s'est évaporée. Alors que s'est installée la mauvaise saison, avec ses arbres brun et jaune qui perdaient déjà leurs feuilles par paquets, elle en aurait pourtant eu bien besoin.
Des compétences, elle en a développées : par ses quelques rencontres, par ses propres moyens et un cerveau qu'elle sait faire fonctionner ; mais ses atouts compensent difficilement tout ce qui l'handicape. Alors ses flancs sont creux, ses angles sont saillants : elle se débrouille, mais ce n'est parfois pas assez.
Aller voir Cassius est chaque fois une manœuvre à double tranchant. Elle se sert de ses capacités de la même manière qu'elle put exploiter Joaquin pour la nourrir, et son presque-frère non plus ne lui refusera jamais un repas. Mais il s'inquiétera aussi pour elle, d'une envahissante manière, et elle s'imagine qu'il pourrait même l'empêcher de repartir si elle vient un jour le trouver en paraissant trop physiquement affaiblie.

Alors elle doit jauger. Départager les moments où elle apparaît assez en forme pour le choisir lui, de ceux où au contraire c'est la pitié d'inconnus qu'elle exploite. Elle a remarqué que ne plus être une enfant joue légèrement en sa défaveur : la plupart des loups sont plus enclins à aider un louveteau orphelin qu'une adolescente pratiquement adulte, solitaire esseulée qui peut un peu déranger.
Fort heureusement pour elle, sa constitution lui permet souvent de jouer sur la perception que les autres ont d'elle et de se faire passer pour une jeune d'adolescente d'à peine un an plutôt que pour une louve quasiment adulte.
Ça aide.

C'est près d'une formation rocheuse, à l'opposé des monts qui ont dominé son enfance de leur ombre déchiquetée, qu'Apparence s'est fait depuis un moment une place. À la limite entre une vaste plaine parsemée de bois mort et de champignons en tout genre et un plateau de falaises irrégulières culminant sur des hauteurs saillantes se cache son repère. Non loin, elle a repéré la présence de groupes de solitaires qui souvent se rassemblent - le mot court qu'il y a là haut, dans le gouffre, un refuge. Mais Apparence ne se sent pas encore prête à interagir avec trop de personnes en même temps, elle doit encore continuer d'apprendre. Un peu plus loin au Nord elle sait également se trouver les frontières d'un clan différent des Etelkrus, dont parlaient si souvent Joaquin et Justice pour les mettre en garde : elle en déduit que cette autre meute ne suit pas la même politique et elle compte bien s'en approcher un jour.
Pour le moment, elle reste le plus souvent dans les alentours directs de sa tanière de fortune : elle doit apprivoiser cet environnement, en étudier les richesses à exploiter.

Et c'est ce qu'elle fait en cet instant, fine silhouette qui louvoie entre de rares grands troncs creux et morts, le regard se posant tour à tour sur plantes et champignons en tous genres.

L'endroit a pour principal avantage d'offrir une vue dégagée sur tous les alentours tout en étant pourvu d'occasionnelles cachettes en cas de besoin.
Alors la silhouette d'un congénère penchée sur quelque chose, à moitié masquée par une brume diffuse, elle la repère de loin : son approche se fait la plus silencieuse et discrète possible alors qu'elle s'abaisse proche du sol et se met à raser de près troncs et souches, rochers et amas de champignons. Apparence s'approche suffisamment près pour mieux détailler la scène. Le loup, non conscient d'être observé, est occupé à comparer des végétaux avec quelque chose qu'il a rapporté. Un objet à lui. L'individu en lui-même ne paraît pas dangereux, même si une haute taille se laisse deviner même ainsi courbé. Il a également l'air plutôt âgé.
Pendant quelques minutes, Apparence se laisse absorber par le silence et perpétue sa surveillance à l'abri d'un grand tronc tombé depuis longtemps et maintenant rongé par le lichen, les insectes et des champignons plats. Mais rester ici ne lui apprendra pas grand chose de plus, face à cette activité très calme et immobile de l'inconnu.
D'une patte qu'elle lève doucement, elle appuie volontairement sur quelques branches amoncelées par les années. Le craquement n'est pas sec tant le lieu est humide ; mais il suffit à alerter le grand mâle qui pour la première fois lève les yeux et cherche autour de lui.
Elle le voit ensuite refermer son objet, prêt à partir au moindre danger - c'est du moins ainsi qu'elle interprète son attitude soudain plus fébrile, et l'intonation de sa voix qu'elle pense pouvoir qualifier de nerveuse.

Mais le but n'est pas de le voir s'enfuir. Il lui est pratique de constater que ce loup ne sera sans doute pas agressif : c'est dans ce terrain qu'elle s'épanouit pour le moment le mieux.
En attirant la sympathie, voire même la pitié des âmes sensibles.
À gestes lents et qui se veulent timides, Apparence laisse dépasser sa tête de sa cachette et tente quelques pas maladroits vers lui, imitant une certaine prudence qui serait similaire à la sienne. Ses yeux vont fréquemment sur lui tout en fuyant à plusieurs reprises vers le paysage, ses oreilles pivotent en toutes directions.
Elle s'arrête à une distance raisonnable, sa longue queue entre les jambes, passant sa langue sur ses lèvres.

— ... Bonjour. Pardon, je voulais pas faire peur.

Son visage fermé osa s'essayer à un petit sourire maladroit, ses yeux se firent plus curieux et téméraires en venant chercher le regard orange de l'inconnu et elle inclina la tête, attendant sa prochaine réaction.

A sa propre attitude, celle qu'adopte le grand loup en réponse confirme ses premières évaluations.
Il a l'air mal à l'aise, sans qu'elle ne puisse encore tout à fait définir pourquoi, mais c'est pour elle un terreau fertile à la suite de l'interaction. Tout comme elle obtient au passage des bribes d'informations. Sa méfiance et sa nervosité, cette mention d'un autre truc peuvent tendre à supposer que l'endroit n'est peut-être pas dépourvu de présences dangereuses... Tout comme cela peut signifier qu'il est simplement peureux, prêt à détaler devant la moindre menace.
Elle n'en laisse transparaître aucun signe, de menace. Déjà au vu de sa stature qui n'intimiderait pas grand monde, ensuite par sa réponse corporelle qu'elle calque à celle de l'inconnu pour danser sur cette même limite entre la crainte et une certaine curiosité, un besoin de présence et d'être rassurée, peut-être ; et qui la pousse à rester ici auprès de ce grand mâle silencieux et gêné.
Dans cette place d'adulte - de guide - qu'elle lui laisse, il finit bel et bien par reprendre la parole pour détailler davantage sa première remarque et consolider l'une des pistes. Que peut-être l'endroit n'est pas sûr.
Si l'information ne provoque rien en elle, elle est cependant précieuse pour développer la suite et bâtir ses réactions. Apparence se ramasse soudain un peu plus, le contour de ses yeux tressaille pour les refermer sur des fentes qui se mettent à darder des regards anxieux sur le paysage brumeux qui les encercle.
C'est l'occasion d'esquisser un pas de plus vers le loup, sans pour autant venir se coller à lui - juste de quoi chercher chez lui un peu plus de réconfort, sans pour autant oser franchir encore une limite.

— Des monstres ?... Tu en as déjà vu ?

Sa voix se fait un peu plus faible et tremblante, devenant presque un murmure, alors qu'elle ramène ses yeux crépusculaires dans ceux du plus âgé - comme si la moindre évocation de ce mot effrayant avait le pouvoir de les mener sur eux.
Et de son embarras assez évident elle ne fait mention, ni même ne semble y accorder la moindre importance - ce n'est pas face à sa propre incertitude qu'elle veut le mener.
Mais vers ce qu'il a d'expérience en ce monde.

Ce vieux loup est expressif. Ça lui rappelle un peu Cassius, qui passait son temps à s'inquiéter pour elle, et dont elle pouvait tirer beaucoup de choses. Celui-là ne la connaît pas, mais sa nervosité et sa gêne sont palpables, même pour elle. Elle accroche ses yeux à chacun de ses gestes, aux mouvements plus ou moins subtils qui se dessinent sur son visage. Elle apprend.
Quand il se remet à balbutier, essayant visiblement de la rassurer mais ne pouvant s'empêcher de mentionner l'agressivité de ces fameux monstres, elle le voit un peu plus perdre pied. Apparence se questionne quelques instants sur la marche à suivre, puis se décide à ne pas trop escalader le malaise du grand loup. S'il panique trop, il ne lui sera peut-être plus utile.
Elle prendra donc le rôle de celle qui comprend et rassure, du mieux qu'elle le peut, et un léger sourire qui se veut mi-amusé, mi-encourageant se dessine sur ses lèvres alors qu'elle soutient son regard. Ses yeux ne fuiront plus sur le paysage ; elle se veut brave, et elle lui fait confiance. Voilà qu'il reprend la parole et lui fait une proposition qui va dans son sens.
Son sourire s'affermit, elle redresse même un peu la nuque et les oreilles et s'essaye à faire briller une lueur d'intérêt dans ses yeux bicolores.

— Peut-être. Je sais pas les reconnaître.

Lui, en revanche, a l'air d'être ici dans un but précis. Elle a d'ailleurs remarqué le léger mouvement de ses doigts, toujours posés sur cet objet à lui qu'il a ramené, et qui peut maintenant redevenir un sujet - puisque l'introduction est faite, en quelque sorte ; et qu'il l'a invitée à rester.

— C'est quoi ?

Apparence se veut appuyer sa curiosité - aussi penche-t-elle la tête sur le côté, les pupilles rivées sur la forme rectangulaire qui sembler avoir vécu beaucoup de choses.