Tarte aux pommes [PV Lucian]

Lorsqu’il s’abrita sous les plus belles ramifications du grand pommier, ses plumes perlaient abondamment et une mèche de crin détrempée venait s’abattre en travers de son visage, obstruant en grande partie sa vision. En silence, il attendit qu’elle se joigne à lui, Le mage s’écarta alors pour lui laisser place sous l’abri de fortune, avant de se replacer face à elle.

Elle voulait connaître les valeurs qui étaient siennes, et lui, il était guère du genre à dissimuler ce qui le rendait le plus fier aux yeux des autres, ces valeurs qui lui semblaient essentielles, bien loin de celles que les Nakhus avait pour habitude de répandre autour d’eux. Ses valeurs, appartenaient à une poignée d’initié, elles se faisaient d’autant plus rare d’année en année et n’avait su gagner en popularité.

Il les énonça dans un souffle.


« La logique, l’érudition, l’intelligence. »

Quelles autres auraient pu mieux le représenter, l’entêtement peut-être, si tant que cela puisse être considéré comme une valeur. Le fait de ne jamais renoncer. Il la voit déposé une nouvelle corne à ses pattes, lui se saisit de ce nouveau cadeau et le range au côté du premier sans rien dire avant d’en détourner son regard et de revenir sur la louve.

Hébété, ses aigrettes de plumes sombres tombent à demi de chaque côté de son crâne, il ne savait pas s’il saurait. Chanter des chansons qui n’avaient ni sens, ni logique, partager ces jeux d’enfants, dont il ne se sentait plus investi d’aucune sorte, il était, il est vrai, un enfant turbulent et capricieux, mais cette image de lui appartenait au passé, il avait grandi et se voyait investi d’autres préoccupations et de responsabilité qu’on incombe seulement aux adultes.

« Hm, je ne sais pas si je saurais. Chanter juste, apprendre ce genre de chose. Et puis peut-être qu’ils naîtrons comme mon frère et moi. »

Sourd, eux aussi alors la musique et les chansons seront de bien peu d’intérêt pour les sans-oreille. Mais peut-être devait-il en dire plus afin qu’elle le comprenne. Alors il s’éclaircit la voix sans perdre son air grave.

« Nous sommes maudit, ils seront la quatrième génération à porter la malédiction du manoir. »

La louve se tourna progressivement vers lui, ajustant sa posture afin de lui faire totalement face. Le loup monochrome, pencha la tête sur le côté, se demandant si ses paroles lourdes de son pragmatisme avaient provoqué une quelconque gêne chez la louve. Les deux aigrettes se redressèrent tout à fait au dessus de son crâne et il s’avança d’un pas, comme pour ajuster à son tour sa posture.

«  Il va de soi que nous ne manquerons pas de trouver de quoi les occuper, ce n’est pas les jeux d’intelligence qui manquent et les enseignements à transmettre sont nombreux. »

Elle rayonne une nouvelle fois, semble satisfaite malgré la pluie, lui, il lui répond à son tour d’un sourire satisfait laissant apparaître la pointe de ses crocs, il avait dit tout ce qu’il avait à dire, tout ce qui lui semblait indispensable à connaître, sans pour autant se joindre à son impatience. Il y avait des choses qui méritaient que du temps y soient alloués, agir prudemment et sans précipitation, ne lui semblait pas compatible avec un enthousiasme débordant.

Il ne quitta pas la louve des yeux, lorsqu’une odeur sucrée vint lui chatouiller le museau. La regarda aller se saisir du nectar sucré et revenir avec un peu de miel et quelques piqûres.

« Il serait préférable oui. De revenir un autre jour. »

Il relève le museau vers le ciel, la pluie redouble.

« Tu devrais faire retirer les dards et soigner tes piqûres en rentrant. » S’enquit-il par ce simple conseil.

Peut-être qu’elle aurait besoin d’aide, il ne savait pas vraiment, se retire automatiquement de l’équation, puisqu’il n’était pas sorcelier. Il s’éloigna, l’attendit à quelques pas, avant de se mettre en route.