Mystère et crinière [Feat Ori]

Alys était las. Incapable de trouver une quelconque satisfaction, se contentant de bougonner lorsqu’il exécutait les tâches qu’on lui confiait, maugréant lorsqu’on lui adressait la parole. La seule chose qui parvenait encore à le distraire c’était ses mutilations. Aussi tordu que cela pouvait paraître, le bêta tirait un profond désir d’aller plus loin dans ses blessures, de voir jusqu’où il pouvait pousser ce jeu mesquin qui pouvait à tout moment le conduire à une mort certaine. Il voulait tester son pouvoir, voir si il pouvait le manipuler autant que ce dernier le manipulait. Alys voulait lui renvoyer la balle, lui montrait que ce n’était pas qu’une simple punition que de le posséder, que cela pouvait devenir amusant. Certains n’aurait pas trouvé de sens à tout cela, mais le disciple de Dairo était en train de découvrir, plus il allait loin et plus ses blessures guérissaient vite, ne laissant que pour toute preuve, une ligne rosée. Bien sûr, il se pouvait que tout ceci n’ait rien à voir avec le fait qu’il accentuait ses mutilations, peut-être même que son pouvoir était juste dans une bonne période qui pouvait s’arrêter à tout moment, mais il n’empêche que tout ceci satisfaisait Alys, tant et si bien qu’il voulait plus. Le bêta avait envie de jouer avec la Faucheuse, la défier en lui montrant qu’il ne craignait plus sa faux. Il voulait faire preuve d’audace en lui montrant que désormais elle n’était plus rien, pas même une adversaire digne de ce nom.

À cette pensée, son esprit dériva vers Nephthys. L’Etelkrus la revoyait pleurant contre lui, mais ce qui le hantait le plus, ce qu’il voyait lorsqu’il était troublé, c’était son regard détruit, anéanti par sa propre faiblesse. Une partie de lui avait beau vouloir le nier, l’état de la louve était de son fruit, celui de la faiblesse. Il lui fallait désormais devenir plus fort, gagner en puissance. Qui sait serait le prochain ? Gloriel ? Mayuri ? Un frisson lui parcourut l’échine rien qu’à cette sombre idée. Il ne voulait que plus personne ne soit mis en danger, plus aucun des siens, ils étaient sa meute et s’était son devoir de les protéger, coûte que coûte, même si pour cela il devait se vider de tout son sang. Sa vie importait peu après tout, il n’était qu’un simple mortel, pas un Dieu, ni un alpha, juste un loup lambda, incapable d’accepter ses propres tourments.

Ces derniers d’ailleurs semblèrent l’avoir conduit à la plaine savane, là où la température restait sûrement la plus agréable compte tenu de la saison qu’ils étaient en train de traversaier. Certains gibiers s’étaient d’ailleurs réfugiés ici et Alys comprenait très bien pourquoi. Il recracha une nouvelle bouffée de fumée, enchaînant les cigarettes les unes après les autres ces derniers temps. Ses prunelles vairons se posèrent soudainement sur un grand fauve non loin. L’animal était couché de dos et remuait avec agressivité sa queue. Un instant, le disciple de Dairo hésita, un lion en colère n’était pas un être à déranger, mais trop tard, le fauve l’avait remarqué et poussa un feulement d’agacement. Alys l’observa, constatant qu’il parvenait à compter ses côtes, la chaleur des plaines savanes ne permettaient visiblement pas d’obtenir un repas facilement. Statique, le mâle attendit, espérant que le félin irait voir ailleurs, mais il n’en fit rien se contentant d’observer le canin, se pourléchant les babines.

« — Cherches par les noises minou… »

Sentir les prunelles dorées du lion le guettant comme si il allait devenir son prochain repas, mettait le bêta fort mal à l’aise. C’était d’ailleurs sans compter la présence d’un autre individu non loin de là. Alys ne pouvait se permettre de l’observer directement, de peur que le félin prenne cela pour une offense, néanmoins le parfum fort qu’il dégageait lui permit de comprendre qu’il s’agissait d’une femelle. Comme quoi même son odorat capricieux semblait mieux se porter...

« — Si vous ne bougez pas gente Dame, il se pourrait bien que sa majesté à crinière ne nous cherche pas trop d’embrouilles...»

Enfin ça, c’était ce qu’il espérait, la Nature était par moment si capricieuse.

Où qu'elle aille, ses pattes la guidaient toujours vers cette plaine à la chaleur étouffante. Lieu non sans aucune valeur, c'était ici qu'avait commencé sa débauche. C'était ici qu'elle avait découvert les vices charnels. Depuis cette découverte, les conquêtes avaient été nombreuses. Qu'elles soient mâles ou femelles, Ori ne pouvait déjà plus compter ce avec qui elle avait couché sur le bout de ses griffes. Mais elle connaissait leur nombre exact. Mentalement elle les comptait et gardait en mémoire chaque visage, chaque nom dit. Ils étaient vingt-six. Oui, vingt-six loups et louves qui l'avaient touchée mais à aucun moment elle n'était arrivé à combler son appétit comme ce fut le cas le jour de sa découverte. Etait-ce les fleurs qui avaient contribué au bien être de ce fameux jour ? Elle l'ignorait mais quoiqu'il en fut, la Nakhus n'était jamais parvenue à retrouver la flore aphrodisiaque et les arbres n'étaient guère nombreux dans cette plaine. Elle redoutait que quelqu'un est détruit ces plantes de la passion charnelle. Grimaçant légèrement, elle reprit sa recherche dans les hautes herbes, lançant des regards au-dessus de ces dames, guettant le feuillage touffu d'un arbre proche.
Elle marcha pendant de longues heures, découvrant encore et toujours l'absence de cette flore étrange autour des arbres. Tout semblait avoir disparu, comme s'il ne s'était toujours qu'agit d'un mirage. Ori avait besoin de savoir. La Vérité quant à ses orgasmes étaient importantes. Les fleurs étaient-elle la cause de son épanouissement la première fois ? Ou était-ce le mâle inconnu qui avait réussi à la faire monter là où les autres avaient échoué ? Elle l'ignorait mais cette drogue du premier jour gangrenait son esprit. Elle avait besoin de retrouver ces sensations. Flore et mâle demeuraient absents dans ce monde rempli de chaleur.

Elle était prête à s'en aller quant une odeur de fumée embauma l'air. Elle pista l'odeur, se demandant quel fou oserait consumer une cigarette dans un monde susceptible de s'embraser si le mégot encore allumé touchait les herbes sèches. Elle n'eut pas bien loin à aller qu'elle trouva un mâle. Gris majoritairement, il arborait d'autres teintes qui lui allaient à la perfection. Le regard de la demoiselle s'arrêta un instant sur les grandes plumes qu'il portait dans sa longue chevelure. Il était un peu comme elle : une coiffe longue à en faire peur, des plumes comme apparats. Seuls l'absence de crânes marquaient une différence niveau accessoire. Elle s'approcha de lui mais elle ne remarqua le félin que lorsque l'inconnu le lui fit remarquer par ses paroles. Ori se tourna vers le fauve. Un roi de la Savane s'approchait dangereusement, feulant et dévoilant ses longs crocs. Ainsi donc la faim tenaillait l'animal. Il avait piteuse allure. le gibier manquait-il donc à ce point ici ? Pourquoi un mâle chassait, n'était ce pas le boulot des lionnes ? Ou était-il le paria d'un clan de lion ? Cette question était intéressante à étudier ... Dommage qu'elle ne puisse pas l'observer davantage sans que sa vie ne soit en danger.

Gardant le silence, elle se rapprocha lentement de son congénère, rampant sur le sol en signe de soumission. Si le fauve attaquait, ils seraient plus à même de le repousser en étant proche ... Du moins, elle l'espérait. Ori n'avait pas la fibre guerrière, élevée dans les moeurs de la paix et de la sagesse. Il n'était pas impossible qu'elle commette une erreur en s'approchant, d'autant plus que la flagrance de Mère Nature embaumait son corps et l'air. Le mâle loup avait de la chance : la demoiselle n'était pas en quête de sexe. Elle était donc lucide et calme.

« Que nous bougions ou pas ... S'il désire attaquer, il le fera.

Elle espérait simplement que son odeur n'attiserait pas l'instinct du lion solitaire. Son visage ne laissait aucune émotion transparaître. Elle était aussi froide qu'un hiver dénudé du moindre jour ensoleillé. Ses yeux étaient clairs, dénudés des blizzards qui auraient pu s'y trouver tant son visage exprimait le froid de la saison des neiges.

Toujours immobile, Alys guettait du coin de l’œil l’inconnue qui se dressait non loin. Recrachant une nouvelle bouffée de fumée, le bêta finit néanmoins par poser un regard perplexe sur la louve lorsqu’elle s’approcha de lui. C’était soit du courage, soit de la stupidité. Ne craignait-elle donc pas d’agacer un peu plus l’animal ? Il était clair que même si le fauve était en piteux état, le fils de Méléagant n’était pas réellement de taille et l’étrangère n’avait guère l’allure d’une combattante. L’Etelkrus se permis de poser quelques secondes ses prunelles vairons sur elle. Elle n’était pas désagréable à regarder, son apparence globale mélangeant inquiétude et curiosité. Qui porterait des crânes de piafs sur lui ? Peut-être une manière de rendre hommage à ses potentiels chasse, cependant au fond de lui Alys éprouvait quelques doutes quant-a la nature de cet « hommage ». Les marquages n’étaient pas inconnus au mâle, même si il ne se rappelait pas où il avait pu les voir… Le plus intriguant chez elle demeurait néanmoins son aura. Elle était telle une rose, attirante mais terriblement dangereuse. C’est ce dernier point qui éveilla légèrement la méfiance du disciple de Dairo, difficile de lui accorder une once de confiance pour le moment, tant qu’elle ne lui aurait pas réellement démontré ses intentions. La réaction du félin fut quant-a-elle des plus intéressante face à l’arrivée de la nouvelle venue, l’animal remuait plus agressivement la queue, poussant des feulements étranges. C’était comme si il était… attiré par elle. Qui était donc cette inconnue pour susciter une telle réaction ?

« — Qu’est-ce que vous lui faites ?»

Une pointe de suspicion se mêlait au ton un peu plus sévère qu’il venait d’emprunter. Il était clair qu’elle faisait quelque chose à l’animal, pour qu’il soit autant excité. La tentation semblait tellement forte pour le félin qu’il s’avança de quelques pas en direction des deux loups. Alys avait l’impression que quelque chose lui échappait dans cette histoire, une pièce du puzzle essentielle. Le déclic se fit alors, alors qu’il inspira de nouveau la gueule ouverte, une fragrance lui chatouillant de nouveau les narines avec insistance. Aussi, à son propre étonnement il ne fit non pas face au loup mais à l’inconnue, tout crocs dévoilés, portant toute son attention sur elle.

« — Votre odeur, qu’avez-vous fait pour qu’elle soit aussi puissante ?!»

Pauvre Alys, il avait face à lui le fruit de Mère Nature qu’il pouvait sentir pour la première fois. Son odorat habituellement trop faible voir inexistant ne lui avait encore jamais permis de sentir cette odeur. Il fronça les sourcils ne sachant comment réagir, ni même si s’était réellement de la faute de la louve. C’était sans compter l’ombre du lion qui se dressait derrière lui, le prenant probablement pour un potentiel rival face à sa conquête et Alys avait été si stupide de lui tourner le dos, amplifiant probablement l’affront.