l Libre

Je suis vraiment désolée-

Son esprit n'est que bruit blanc.

Toutes mes condoléances-

Les mots et les sons, les couleurs et les formes, tout n'est plus qu'un mélange qu'il ne peut comprendre, qu'il ne peut appréhender. Ce qui l'entoure n'est qu'un camaïeu de blanc, de bleu, d'oranges et de vert. Des arbres qui s'étirent à l'infini, d'un ciel qui le recouvre, d'une mer de larme qui lui noie les yeux.

Et le coeur.

Lewis.

Peut-être a-t-il hurlé. Peut-être n'est-ce que dans sa tête - il ne sait pas. Il ne sait plus. Son coeur comme ses oreilles n'est plus qu'un bourdonnement. Il pulse, autant que lorsqu'il a cru sa poitrine être arrachée par les griffes de l'ours. Et il a mal, il a mal oui, bien plus que lorsque sa vie le fuyait de ce trou béant, lorsque le loup gris a du le recoudre de ses doigts de fée pour espérer qu'il vive.

Vivre.

A quoi bon ?

Ca n'est pas son nom, cette fois, juste un hurlement déchirant qui lui échappe et défonce ses cordes vocales. Défonce les oreilles de quiconque l'écoute.

Défonce son coeur la perte de l'être cher.

Pourquoi ?

Il savait qu'elle vivait, et vivrait toujours dans le danger. Il savait qu'elle était partie, qu'elle voulait partir, mais.

Ce vide.

Cette absence.

Ce trou dans son coeur et dans son âme, ce pic de glace qu'elle laissait derrière elle.

Ce gouffre.

Le gouffre d'une âme qui personne d'autre n'aimait, et qui plus rien n'estime bon à contempler. Poser ses yeux sur le monde, pour quoi, pour qui ?

Lorsque toutes les couleurs s'échappent, que reste-t-il ? Il rejette la tête en arrière et au ciel couvert de nuages offre une nouvelle ode à sa douleur. Module sa voix, la laisse éclater au dehors tout ce qu'il n'a jamais-

Est-ce qu'il aurait pu la sauver ? S'il avait été là, s'il l'avait suivi. S'il avait refusé, s'il avait... ?

Aurait-il pu ?

Ou au contraire aurait-il été la pierre qui plus vite encore l'aurait jetée au sol ? Il n'avait pas compris, ce qui s'était passé. Il n'avait pas compris, il avait juste cette douleur. Cette douleur qui l'encerclait comme un étau et qui le jetait à terre, qui l'avalait tout entier. Il avait couru, trotté, galopé à travers les champs, réveillé plus que jamais cette douleur qui l'avait jeté à terre sur les berges du lac. Incapable de bouger plus, éclopé.

Demi-loup.

Demi-âme.

Il se traine sur les bords sablonneux, plonge le bout de ses pattes dans l'eau d'azur qui n'est qu'une tâche floue à travers ses yeux noyés de larmes.

Petit loup.

Il entend encore à ses oreilles sa voix, dernièrement si embêtée, si empruntée.

Il entend, toujours, son rire alors qu'elle trouvait un poisson rigolo, sa silhouette qui dansait autour de lui avec tant de forces et de souplesse, lorsqu'ils jouaient ensemble. Elle est là, si proche qu'il pourrait la toucher.

Elle n'est que le fruit de son esprit malade, de ses souvenirs perdus.

Ses souvenirs.

C'est tout ce qu'il lui reste maintenant.

Sa hanche le lance, mais cette douleur n'est rien face au vide. Celui qui le bouffe de l'intérieur, celui qui le laisse épave.

C'est ici, comme partout ailleurs, qu'il l'a aimée.

Qu'il l'aime, Ô qu'il l'aime.

Précieuse partie de lui, dernière partie de lui à s'effilocher au gré des quatre vents.

Alors il sanglote, sans respect pour son corps, ce que d'autres peuvent voir - s'est-il déjà, après tout, intéressé à d'autres ?

Il mange, dévore sa peine pour qu'elle ne le dévore.

Coquille vide.

Emilitia

Dans le deuil, avant cette étape qui permet de le surmonté, il y a cette descente en enfer qui blesse et noircie le cœur. Un terreau fertile que viennent hanté les démons, poussant à rester dans cet état pour vous mener à la déchéance. Ils sont là, se nourrissent de votre détresse.
Un peu moins métaphoriquement, Emilitia était là aussi, tout demi-démon qu'elle était, attirée par ce long cri de douleur vers ce territoire ressemblant bien trop à un petit bout de paradis sous protection divine désagréable pour qu'elle l'apprécie. Sur les berges de ce lac, un loup hurlant et sanglotant, la louve noire s'en approcha, s'asseyant à quelques mètres de lui, l'observant derrière son masque sans le moindre jugement.

Il y avait quelque chose de beau dans cette scène, une expression si pure du désespoir, ce n'était pas le genre de chose que l'on pouvait observer tout les jours. Son manque d'empathie ne lui permit cependant pas d'éprouver ne serait-ce qu'une once de cette peine par simple partage d'une âme face à une autre, la sienne était de toute façon naturellement tâchée d'ombre.

« Il souffre »
Simple constat, il n'y a pas de compassion dans sa voix, celle-ci va de paire avec l'empathie dont elle est dénuée.
« C'est à ce moment là que les créatures de ce monde sont plus encline à s'ouvrir aux démons... ou à leurs dieux. »
« Oh, je voudrais essayer, je n'ai pas encore pu expérimenté ceci. Loup ! Y a-t-il quelque chose que tu souhaiterais ? »
« Tu es de ces démons du vide et de l'annihilation, et même pas entièrement, tu vas pas pouvoir faire grand chose. »
« Il faudra bien choisir, Drippir dit que les offres sont limités. »

C'était un jeu, un peu.

Sujet: Re: l Libre Mar 14 Sep 2021, 19:38

Au début il ne la voit pas. Il est aveugle, noyé dans ses larmes et dans son chagrin, bien trop profondément enfouis pour s'ouvrir aux autres. Un jappement misérable, lorsque sa gorge n'est plus que douleur. Puis il passe une patte tressaillante sur ses yeux rouges, douloureux.

Elle est ange, elle est démon, elle n'est qu'une apparition qu'il pense surgie de ses sombres pensées. Comment peut-elle être louve, de ses ailes, de son masque, de ses paroles ?

Peut-être l'essence d'un dieu, l'essence d'un monstre.

A sa question, il se rebiffe. Les poils de son dos se hérissent, il rassemble ses membres engourdis et clapote dans l'eau du lac ; fait claquer sa mâchoire dans le vide.

ELLE !

Il se hisse sur ses échasses, mais faible retombe au sol. Pince les babines, fronce les sourcils. Il n'est que douleur, et dans sa douleur il est colère.

C'est elle que je veux.

Il n'avait besoin de rien d'autre.

N'avait jamais eu besoin de rien d'autre.

N'avait jamais rien voulu d'autre.

Elle.

Son tout.

Son monde.

Sujet: Re: l Libre Ven 17 Sep 2021, 20:32

Emilitia

Oh, il se met en colère, ce mâle si misérable en face d'elle. La louve noire doute fortement que ce soit contre elle, c'est bien plus contre le monde, c'est pour cela qu'elle ne bouge pas d'un poil, n'a aucune réaction. C'est parce qu'il lui manque quelque chose à ce loup, il lui manque cette fameuse Elle qui se fait absente. Ce n'est pourtant qu'une petite fissure dans l'âme qui s'exprime ici, recouverte par cet attachement encore présent, recouverte par tout ces sentiments encore existants. Elle est loin d'être détruite l'âme, elle s'exprimait, mais comme le sel sur une coupure, c'était douloureux.

Emillitia pencha légèrement la tête sur le côté.

« Alors pourquoi Elle n'est pas là ? »

C'est une question pour connaître la situation. La louve noire n'est pas omnisciente et n'a pas le don de lire les esprits. L'identité du Elle est ignorée cependant, ça n'avait pas tant d'importance dans l'immédiat.

« Garde en tête que tu ne pourras sans doute rien faire. »
« Sans doute. »
« Et qu'il en sera furieux. »
« Il y est déjà. »

Elle ne le craignait pas ce loup, il avait l'air bien trop misérable, comme une bête blessée, c'est ce qu'il était. Et face à lui, la légèreté d'Emilitia contrastait, sa queue ondulant au gré du vent derrière elle.

Sujet: Re: l Libre Lun 20 Sep 2021, 12:23

Il crache, extrait cette vérité du fond de lui, cette vérité qui si sûrement le blesse :

Elle est morte.

Et ce mot déclenche en lui un spasme de dégoût et de rejet, un spasme violent et incontrôlé. Il crache au sol un filet de bave et de bile qui lui brûle le fond de la gorge et le bout de la langue, un filet vert qui échoue dans l’herbe à ses pattes comme un serpent malade. Elle est morte.

Il se redresse avec un air de défi dans le regard.

Que peux-tu y faire ? HEIN ?

Qu’y peux-tu, toi, simple mortelle ? Qu’y pouvons-nous, aux jeux des dieux et du destin ?

Sujet: Re: l Libre Lun 20 Sep 2021, 21:31

Emilitia

Il vomit ses mots, littéralement, le mâle tigré. Emilitia restait indifférente malgré la douleur que de les dire engendrait. Elle, était morte. Pour la louve noire qui n'avait pu ressentir quoique ce soit au décès de sa mère, c'était curieux, intéressant de voir à quel point cela pouvait provoquer telle déchéance chez d'autres. Au travers des yeux des autres loups, Emilitia apprenait ce que sa part démon empêchait de connaître naturellement.

Parce que la fatalité va au delà du pouvoir de simples loups, même à demi démon, le mâle se relève, défit la louve noire. La question méritait d'être posée effectivement, parce que la réponse était simple, évidente mais Emilitia avait eu la prétention de pouvoir y répondre. Pourtant, son propre regard derrière son masque aurait pu répondre à cet air, sa tenue générale le fait pour elle, ses ailes largement déployée derrière qui pourtant reste assise, elle se veut avoir plus de prestance sans même se relever malgré le fait qu'elle était et serait toujours plus petite que le mâle qu'importe la position. Parce que dans la différence entre eux deux, le chagrin le faisait loque vomissant ses larmes.

Emilitia, malgré sa fierté personnelle -Drippir pourrait dire que les démons étaient d'un naturel fier- restait pourtant dans sa globalité relativement neutre vis à vis de ce loup, et ce surtout dans sa voix puisque la posture répondait à la posture.

« Je connais une louve qui a déjà été morte une fois mais je crois qu'elle a oublié comment on ouvre la porte sur l'au-delà. »

Elles n'avaient pas réussi à leur rencontre, leur rituel hybride n'avait rien donné.

« Je ne saurais pas relever les morts » Elle ne faisait pas dans la nécromancie. « Mais invoquer un esprit n'est sans doute pas si difficile. »
« Numéro 1 des rituels amateurs qui tournent mal. »

Emilitia haussa les épaules.

« Ceci dit la rejoindre est sans doute la solution la plus facile »
« Pour toi ! »
« Sauf s'il se débat. ».

Son dégoût tord sa bouche, tord son corps, tord son âme d’une grimace détestable. Il gronde, un grondement qui exprime cette douleur, cette haine, cette rage, ce trop plein d’émotions qui le jettent à terre. Et il écoute, il l’entend cette louve noire au visage crayeux. Je ne saurais pas relever les morts. ces simples mots percent à nouveau son cœur. Évidemment. Nul ne le pouvait, pas même les dieux. Quant à invoquer son esprit…

Cendres laisse son regard glisser sur sa sacoche, sur son flow stick dont le vert luit faiblement à son cou. La réponse aux questions. Les réponses aux questions. Oui, sur une telle quête il pourrait momentanément se focaliser. Mais si les réponses ne lui plaisaient pas ? Était-il capable de le supporter ? Était-il capable de faire naitre chez lui l’espoir, pour le voir ravagé de nouveau ?

L’apathie était probablement meilleure solution que le déchaînement d’émotions qui le secouaient et menaçaient son esprit.

La seconde solution de la louve noire lui semblait plus accessible, O douce ignorance, O oubli apaisant.

Il secoue la tête violemment, et répond avec humeur :

J’y songerai. Maintenant laisse-moi.

A l’un, comme à l’autre.

Emilitia

Elle a les oreilles dressées vers l'avant, porte sa queue droite dressée au dessus de son dos et restes quelques secondes le corps tendu comme attendant l'arrivée de quelque chose. Il ne dit pas grand chose de plus, pourtant, ce mâle si pitoyable, il veut être laisser tranquille.

« D'accord. »

Ce n'est pas par soudaine considération pour cette pauvre âme qui ne demandait qu'à cesser d'être tourmentée, par lui même, par ses maux ou par une certaine demi-démon qui cherchait là simple distraction. Mais il cesse d'intéressé Emilitia ce loup.

« Peut-être que nos chemins se croiseront à nouveau, à un pas au dessus du vide. »

Et la louve noire s'en va, quitte ce cœur brisé pour retourner à d'autres aventures, d'autres rencontres futures.

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