Arbre-abri [Libre]

ʊ Arbre-abri

Cela faisait de nombreux mois qu'il avait atteri ici. Des congénères, il n'en avait pas croisé depuis des lunes. Non utilisés, les codes canins et la parole disparaissaient petit à petit. Son côté primitif reprenait le dessus. Ses journées, il les passaient à suivre le troupeau de Styracosaurus. Il n'était pas encore accepté parmi eux. Trop différent avec son pelage au ton chaud. Pourtant, il possédait la même collerette et la même corne qu'eux. C'était les seuls êtres familiers dans ce monde glacial. Des Dinosaures tout droit sortis de son passé, de sa Tribu disparue. Alors, il s'accrochait. Il refusait de lâcher prise. Il continuait ses approches. Il se faisait chasser à chaque fois. Parfois, il récoltait des blessures. Ce n'était pas bien grave. Ils finirait par l'accepter. Ils comprendraient qu'il n'était pas l'un de ces foutus Direwolves. Il ne les attaquerait pas lui. Il l'aurait bien un jour sa maison.

En parlant d'abri, avec les Prédateur rôdant dans cette plaine, il était urgent d'agir. Dans sa Tribu, ils se protégeaient en dormant les uns collés aux autres. Avec les petits au centre. Mais là, il n'avait pas le droit à cette protection. Ils devaient agir seul pour sa propre survie. A force de suivre le troupeau, il avait compris que celui-ci comptait s'installer durablement dans le coin. Alors, il pouvait se lancer dans la construction de son chez-lui. Un chez-lui temporaire sûrement.

Vêtu de sa peau de smilodon retravaillée, il s'éloigna de son principal centre d'intérêt. Une grotte serait parfaite. Une grotte un peu en hauteur et depuis laquelle il pourrait surveiller les allées et venues de ses frères à écailles. Mais aussi des Carnivores. Malheureusement, il était en plaine. Un type de terrain qui n'offrait aucun refuge de ce genre.

Il se tourna vers la neige. Il avait pu observer des bestioles faire leur nid à l'intérieur. Construire un terrier peut être ? Sauf que ses pattes s'enfonçaient si facilement dedans. Et il avait beau se faire violence, il refusait de vivre sous de la neige. C'était beaucoup trop humide. Il n'aimait pas être mouillé. Et trop dangereux. Il ne voulait pas mourir de cette manière. Ce serait trop con.

Il chercha une nouvelle idée. Il marcha lentement dans la végétation. Regard attentif et oreilles dressées. Ouvert à son environnement. Car lui seul lui permettrait d'atteindre son objectif de la journée. Et de le prévenir de l'avancée d'un danger aussi. Mais pour çà, il savait compter sur son expérience. Ses yeux bleu finirent par se poser sur un arbre. Un sapin dont la vie ne tenait qu'à un fil. Beaucoup trop d'Herbivores étaient venus se frotter à lui. La voilà sa solution !

Prenant son élan, il fonça tête baissée vers l'arbre repéré. Il le chargea comme une furie et heurta le tronc de toute sa force. Le premier coup ne suffit pas à l'achever. Fenouil recula, fit demi-tour et recommença. Encore et encore. Temps pis pour le bordel qu'il foutait. Il le voulait son abri. La cinquième fois fut la bonne. Un craquement se fit entendre et l'écorce éclata. Le loup-dino s'éloigna rapidement. Il ne voulait pas perdre un œil ou se faire écrabouiller. Le tronc déjà fragilisé se brisa et l'arbre chuta lourdement.

Au sol, il ne représentait plus une menace. Mais une super opportunité pour notre primitif. Celui-ci en fit le tour. Oui, il était bien assez grand et large. Il n'aurait aucun mal à se retourner et à s'installer à son aise. Déjà, il se faufila sous les branches. Maintenant, il fallait faire du ménage. A l'aide de ses crocs et de sa puissance naturelle, il enleva les branches qui bloquaient le passage. Il créa un tunnel végétal. Quand aux morceaux arrachés, il les disposa au sol, pour créer un tapis l'isolant de la neige. Ce fut un travail grossier. Pas très joli. Mais la beauté n'avait pas d'importance. L'utile était bien mieux pour sa survie.

Après de longues heures, son abri fut terminé. Il l'essaya plusieurs fois. Son corps étaient couvert d'égratignures. Çà griffait bien les branches de sapin. Tiens et si il s'en servait de rempart ? Ou plutôt de piège ? Il lui en restait un bon stock. Alors, il enterra verticalement quelques branches et laissa dépasser le côté pointu. Il prit soin de les installer en forme d'arc de cercle autour de l'entrée. Comme des crocs sortant de la terre. Il tassa bien la neige pour les faire tenir droit. Et les extrémités des pieux improvisés, il les camoufla sous un léger tapis de feuilles. Voilà ! Quiconque s'approcherait de trop près de son arbre-abri s'enfonceraient les coussinets dessus. Çà ferait mal. Çà ferait crier. Et çà donnerait l'alerte à Fenouil. Il ne pourra être pris par surprise comme çà. Il aura le temps d'agir.

Content de son nouveau abri sécurisé, le loup-dino retourna à proximité du troupeau. Çà lui avait donné faim tous ses efforts. Il se fit un petit encas à base de plantes.

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ʊ Arbre-abri

Heureusement qu'il possédait un estomac à toutes épreuves. Car trouver de quoi chasser était compliqué ici. Il ne fallait pas se leurrer. Une âme solitaire avait peu de chance de trouver et de mettre à terre une bonne proie. Elle risquait plus de finir par mourir de faim, à moins que les Carnivores ne l'ait dévorée avant.

Le Troupeau de Styracosaurus ne comportait pas de blessés ou de membres proches de la mort. Il ne pourrait pas compter sur une carcasse opportune. Il n'avait pas non plus l'envie de trop s'éloigner aujourd'hui. Alors, il commença par brouter un peu d'herbe dépassant de la neige. Çà n'avait pas du tout le bon gout de viande. Ni la texture. Mais, au moins, çà nourrissait. C'était l'essentiel.

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En parlant de Carnivores, en vla un ! Un Dimetrodon en pleine forme. Avec son immense voile dorsale, il était très loin de passer inaperçu. Pourtant, Fenouil se doutait bien qu'il n'était pas aussi lourdaud qu'il paraissait. Il en avait déjà vu un à l’œuvre. C'était féroce ces bestioles-là ! Surtout avec leurs double dents. Fallait surtout pas se faire chopper par leurs mâchoires.

Çà lui rappela les crocs de Chimaera. Son arme secrète. Il se demanda si le Loup des Mers faisait honneur à leurs entrainements. Ou si il avait tout oublié. N'empêche, il restait une étrange expérience. Apprendre des trucs aux autres n'avait pas été très naturel. Il était trop peu habitué. Mais il gardait la fierté d'avoir réussi à améliorer son apprenti. Leurs combats lui manquaient.

Ici, les adversaires n'étaient pas bons. Pas bon pour sa propre survie. Son regard glacé suivit les lents mouvements du reptile géant. Si il lui venait l'envie de rejoindre ses Anciens, il suffirait de le charger. Mais ce désir n'était pas là. A défaut de sa Tribu, il y avait le troupeau de Styracosaurus. Un lien qui le maintenait dans ce monde, dans cette vie austère.

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ʊ Arbre-abri

Le Dimetrodon ne semblait pas l'avoir pris pour cible. Il ne se dirigeait pas vers lui, mais plutôt vers le troupeau. Pas besoin de tester son arbre-abri alors. En même temps, Fenouil était une piètre Proie face à des Styracosaurus qui faisaient facilement le triple de sa taille. Toutes ces tonnes de bonne viande rassemblées devaient en faire saliver plus d'un ! Lui même aurait pu être tenté, si il ne possédait pas ce lien d'appartenance. On n'attaquait pas ceux que l'on considérait comme des semblables. Et il ressemblait plus bien à ces placides herbivores qu'aux loups rencontrés.

La menace écartée, le loup-dino reprit sa marche. Il faisait entièrement confiance aux Styra' pour leur capacité à se défendre par eux-même. De toute manière, il n'aurait pu jouer le rôle de protecteur. Pas cette fois-ci et pas face à ce danger. Il se mit à chercher quelque chose de plus appétissant que de l'herbe neigeuse. Des feuilles pourraient faire l'affaire. En craquant sous ses crocs, il aurait l'impression de briser des os.

Les sens toujours en alerte, car il n'était jamais trop prudent, il s'éloigna de sa zone de vie. Mais pas trop quand même. La limite c'était de garder un contact visuel avec le troupeau. De façon à pouvoir rapidement le rejoindre en cas de besoin.

Il continua sa recherche de nourriture. Jusqu'à apercevoir une masse inhabituelle. Cette forme ne faisait pas partie du paysage. De sa plaine. Car il en avait passé des heures à surveiller les alentours. La silhouette là, il ne l'avait jamais vue avant. C'était pas normal.

Encore un Carnivore ? Il ne savait pas se cacher alors. Ou alors l'arrivée d'un nouveau troupeau d'Herbivores ? Cette hypothèse lui plaisait davantage. Plus ils seraient nombreux à vivre ici et plus ses chances de survie seraient élevées. Il deviendrait insignifiant, presque invisible parmi les Proies géantes.

Comme il n'aimait pas être dos au mur ni pris par surprise, il décida d'aller au devant du mystère. Plus tôt il sera fixé sur son identité et plus tôt il pourra réagir. Il se grandit, prenant une posture sûre de lui, dominante. Et à pas prudents, il avança vers la silhouette.

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Son approche lui fit découvrir deux formes. Deux énormes silhouettes. Totalement inconnues. Des bêtes comme çà, il n'en avait encore jamais croisées. Et il ignorait quel comportement adopter. Il commença par la base de tout survivant : observer.

Son regard détailla les deux grosses choses. Il remarqua immédiatement l'absence d'écailles. Un bon point. Il était plus facile de percer une fourrure qu'une armure écailleuse. D'ailleurs, ces poils marrons pourraient tout à fait venir garnir son nouvel abri. Ou améliorer sa peau de smilodon. Intéressant.

Quatre pattes. Semblables à celles des Sauropodes. Qui devaient parfaitement être capables d'écraser un ennemi. Méfiance.

Il ne voyait ni plaque dorsale ni piques pour se protéger. La queue n'était pas armée d'un gourdin. Elle était même ridicule, sans intérêt particulier. Par contre, à l'avant, il y avait deux grandes cornes. Elles étaient belles. Il en ressentit une pointe de jalousie. Les siennes n'étaient pas aussi impressionnantes. Mais il en avait plus qu'eux !

Et que penser de ce truc qui pendait. Etait-ce là leur arme secrète ?

Il hésitait. Il ne savait dans quelle catégorie classer les bêtes. Carnivores ou Herbivores ? Il fallait déclencher une réaction de leur part pour le savoir.

Il allait jouer la carte Proie.  Il se débarrassa de sa peau de fauve qui pourrait gâcher sa ruse. Il se prit pour un Styracosaurus, ses frères de sang. Il perdit toute attitude dominante.Il imita leur démarche lente et impassible. Il baissa le museau au raz du sol pour arracher quelques touffes d'herbes. Il les mâchonna lentement avant de leur avaler. Il recommença.

Ses yeux guettaient la moindre réaction des Poilus face à un paisible loup-dino broutant de la verdure.

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ʊ Arbre-abri

Il a été répéré. Il sentit bien ce lourd regard posé sur lui. Il resta inébranlable. Pour l'instant, il n'était pas en danger. Voilà deux êtres qui s'évaluaient mutuellement. Cette pensée lui tira un léger sourire. La Bête était dans le même état que lui. Elle ne savait pas comment réagir. Il pouvait avoir l'avantage.

Il suivit le mouvement du truc qui pend. Il découvrit que c'était vachement souple. Comme un serpent. Mais un serpent rattaché au corps. Et sans écaille. Il devrait pouvoir facilement planter ses crocs dedans. Oui, voilà la zone à cibler en priorité en cas de contact. Arracher ce qu'il pensait être une arme pour déstabiliser l'adversaire. Bon, il faudrait faire gaffe aux deux immenses cornes. Mais il improviserait. Le combat n'avait pas sonné. Aucun Prédateur ne s'était révélé.

Il se figea au cri et fixa la mère. Etait-ce un signe d'intimidation ? Il cligna lentement des yeux. Nulle attaque ne suivit ce son. Un coup de langue vint récupérer quelques brins d'herbes collés à son museau. Pas de gâchis.

Il reprit sa manœuvre. Avançant de son pas tranquille, broutant ici et là. Il suivait une ligne parallèle à celle des deux Poilus, mais dans le sens inverse. Bientôt il les dépasserait. Mais il n'était pas pressé. Il aimait tout connaitre sur son environnement et ses habitants. C'était mieux pour survivre. Sa réponse, il ne l'avait pas encore eu. Il était toujours dans le flou. Autant jouer la comédie jusqu'au bout. Çà le mènera bien quelque part. Et çà enrichira son expérience.

Il fit une pause près d'un arbre bordant la plaine. Il décida de laisser une marque de son passage. A destination des Direwolves dont il se méfiait grandement. Ici, il était chez lui. Il frotta sa collerette sur le tronc rugueux, enlevant l'écorce. Comme un bon Styracosaurus. Son attention restait portée sur les Bêtes.

Regardez comme je suis inoffensif ! Et vous, vous l'êtes ? Ou c'est un piège pour mieux me dévorer ?

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ʊ Arbre-abri

Ce petit jeu d'analyse finit par lui apporter une réponse. Le plus petit des Poilus venait de décamper. Il courrait comme si la Mort était derrière lui. Comme une Proie poursuivie par un Prédateur. Fenouil s'immobilisa et chercha ce qui avait pu le faire fuir. Mais ils étaient seuls tous les trois. Le Dimétrodon était plus loin et toujours occupé avec le troupeau.

La deuxième Bête, elle ne s'enfuit pas totalement. Elle eut ce comportement d'une mère protégeant son petit. Elle resta en arrière, à le fixer. Et il comprit. Il put enfin classer ces grosses bestioles dans une catégorie. Celle des Proies.

Mieux encore, leurs réactions lui apprirent qu'il était considéré comme une Menace. Que lui, simple loup-dino, pouvait leur faire du mal. Qu'il était craint. Qu'il pouvait vaincre. Çà lui plut cette information. Çà éveilla à nouveau son envie de garnir son nid et sa peau avec un morceau de leur fourrure brune. Çà faisait bien longtemps qu'il n'avait pas ajouté de trophée à sa collection. Il était temps.

Il se tourna, acceptant ce face à face. Oh, il n'était pas bête. Le cri et l'herbe foulée, il savait ce que cela voulait dire. Une dernière intimidation avant l'assaut. L'adrénaline déjà coulait dans ses veines. Il était estimé dangereux par les Poilus. Alors, il redevint Carnivore.

Son camouflage de Styracosaurus disparut d'un coup d'épaule. Il se redressa, le regard dur. Il reprit une posture dominante et sûr de lui. Il était un Prédateur prêt à tenter sa chance.

Il ne lança pas d'ultimatum. Il préféra tenter de prendre de vitesse la Bête. Ce fut lui qui se mit à la charger, inversant les rôles attendus. Cornes et collerette en avant. Ses armes naturelles. Ses pattes faisaient de grandes foulées, augmentant rapidement son allure.

Il y aurait-il contact direct et brutal ? Elle ou son petit ? Çà, il l'improviserait en fonction du comportement de son adversaire. Un combat çà se vivait au moment présent. En prenant en compte les forces et faiblesse de chaque combattant. Bon, là, il nageait dans le flou. Mais il ne s'en faisait pas. Il aurait très vite quelques réponses. Il suffisait d'oser.

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ʊ Arbre-abri

En réponse, la Poilue chargea à son tour. Le sol trembla sous ses pas. L'air vibra sous son cri de guerre. Deux êtres qui fonçaient droit l'un sur l'autre. Cornes contre défenses. Mastodonte contre loup-dino. Un combat complètement inégal. Un combat de témérité et d'analyse. Mené par une envie d'améliorer sa survie et d'engranger de l'expérience.

Qui se soumettrait en premier ? Qui abandonnerait et ferait un pas de côté au dernier moment ? Qui voudrait oublier ce "jeu" de ruse et d'intimidation ? Aucun des deux.

Hors de question pour Fenouil de mettre de côté sa fierté. Il était un Prédateur envahi par de l'adrénaline. Par le désir de se confronter à plus grand que lui. Il était craint. Il voulait profiter de ce statut temporaire. Car ici, il n'était rien. Pas assez puissant pour se confronter à un Dino. Trop seul pour compter sur des alliés. Toujours pas accepté par le troupeau de Styracosaurus. Magnifique vie.

Laissons-le pour ces courtes secondes se croire en féroce guerrier. Grappiller quelques miettes de rêve et d'optimisme. Il n'en aura sûrement pas d'autres. Temps pis pour les conséquences.

La collision fut inévitable. Violente et sanglante.

Lui qui appréciait les contacts physiques brutaux, il fut servi. Sa peau fut trouée. L'air éjecté de ses poumons. Son corps transpercé. Son précieux liquide vital se répandit sur l'herbe enneigée. Tiens, çà apportait un peu de couleur à ce morne paysage.

Douleur. Douleur. Douleur.

Qui parcourut tout son être. Qui fit exploser son assurance et vriller son cerveau. Et qui lui tira un gémissement malgré ses tentatives de garder la gueule fermée. Goût du sang dans sa gueule aussi. Des gouttes qui coulaient de partout. Il laissa une marque bien nette de son passage. Bien mieux que les frottements de sa collerette sur les troncs.

Mais il n'était pas mort. Il fixa son regard empreint de souffrance sur la tête et les deux cornes tâchées de rouge. L'ennemi était proche, trop proche avec ses immenses pattes. Il se sentait incapable de fuir assez vite. Pas avec un corps aussi endommagé. Il ne tarderait pas à tomber. A succomber au voile noir. Comme lors du combat contre Bébé-Corne.

Il fallait agir tant qu'il en avait encore la force. Avant que le robinet à adrénaline soit coupé.

Dans un soubresaut, il se releva et bondit. Crocs découverts et corne en avant. Prêt à découper et arracher. Il ne se laisserait pas piétiner sans réagir.

Toute bête blessée et acculée se défend. Il ne fait pas exception à la règle.

Et puis, il le voulait son morceau de fourrure ou son bout de trompe.

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ʊ Arbre-abri

Des poils, il en récolta plein la gueule. A s'en étouffer presque. Avait-il réussi à réellement blesser, à voler un morceau ? Il aimerait s'en persuader. Pour ne pas que tout fut vain. Pour avoir la satisfaction d'avoir provoqué à son tour de la douleur. Certes, bien maigre comparé à celle qui parcourait son corps en circuit fermé.

Il sentit son être vibrer en réponse aux barrissements. Puissance à l'état pure. Une Proie qui n'en était pas vraiment une. Une Bête qui le plongea dans l'obscurité. Le voile noir de inconscience ? Non, bien pire. L'ombre de sa patte. Une patte identique à celle qui écrasait impitoyablement tout Carnivore sortant d'un œuf. Pour protéger le troupeau de leurs penchants qui s'éveilleraient à l'âge adulte. Aujourd'hui, c'était à lui que ce geste était destiné.

Tout s'achèverait ici. A proximité du groupe de Styracosaurus qu'il avait échoué à rejoindre. Sa carcasse finirait sûrement par être dévorée par le Dimétrodon. Un repas facile. Donnée sur un plateau.

Il garda les yeux ouverts. Affrontant insolemment cette mort. Espérant que la Poilue s'empalerait les doigts sur ses cornes. Il ne serait pas un lâche. Pas cette fois-ci. Il se comporterait comme un Survivant. Fier d'avoir survécu jusqu'à maintenant.

Et... le coup final prit beaucoup de temps à venir. Normalement, il ne devrait pas pouvoir réfléchir. Les noms de Ted et de Chimaera ne devraient pas avoir le temps de monter à son cerveau. Çà devrait être rapide. Qu'est-ce qui clochait ?

L'ombre de l'énorme patte disparut et rendit la place à la lumière. L'adversaire même eut un mouvement complètement inattendu. Un pas en arrière. Ce qui faisait beaucoup comme distance pour un simple loup. Pourquoi ?

La réponse lui vint en suivant le regard de la Bête. Ils n'étaient plus deux. Mais trois. Sigi était là. Celle qui n'était pas forte. La Dire qui était amoureuse des gros cailloux. Il ne réfléchit pas plus. Il ne vit dans sa présence qu'un signe. Une aide de ses Ancêtres. Ils veillaient sur lui. Encore. Et ce, malgré son absence de peinture corporelle. Si il survivait, il se promit de les honorer en réparant cet 'oubli'.

Il saisit cette ultime chance. Avec tremblements et halètements saccadés, il se redressa. Chacun de ses gestes le privait un peu plus de son énergie. Agrandissait ses plaies et donnait à boire à la neige. Le poussant plus près de la frontière avec l'évanouissement. Il ne pourrait aller bien loin, pas dans son état. Son arbre-abri lui semblait inaccessible. Comment pourrait-il sauter au-dessus de ses propres pièges ? Il allait s'empaler dessus. Ce serait une mort vraiment conne. Il lui restait un seul choix : Sigi.

Il serra les crocs aussi fort qu'il le pouvait, bavant du sang. S'interdisant de gémir en présence de la Dire'. Çà l'embêtait déjà suffisamment de devoir compter sur elle pour sa survie. Mais il ne pouvait tourner le dos à cette chance. De toute façon, la souffrance lui fit oublier toute trace d'orgueil. Elle irradiait tout, de la pointe de sa corne à sa queue disparue. Elle lui volait même sa vision par intermittence. Et il commença à se déplacer avec lourdeur. A trainer son corps meurtri et transpercé. A accepter de ramper si besoin. Pour grappiller quelques secondes de vie supplémentaires.

[Utilisation de 2 Dés Réussite END pour s'éloigner de Maman Mammouth malgré ses importantes blessures et se réfugier derrière Sigi]

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Il n'est qu'un zombie à cet instant. Au déplacement incertain, alternant entre marche et rampage. Qu'importe. Il lui faut s'éloigner à tout prix. Ne pas gâcher la patte tendue. Ne pas déshonorer la chance offerte par ses Ancêtres.

Il n'a plus vraiment conscience de son environnement. Il ne remarque même pas la disparition de la Poilue. Il se focalise sur la silhouette de Sigi. Il ne la perd pas de vue. C'est son repère dans ce tourbillon de douleur.

Aux mots parlant de soins, il grimace. Il a le désagréable souvenir des Yeux-Tueurs. Mais là, ce ne sont que des choses qu'il connait. Que du naturel. Pas de trucs qui percent la peau. Il n'a pas la force de lutter. Ni l'envie.

Mais il gronde néanmoins sous les soins. Jamais il ne s'habituera à ce que l'on touche à ses blessures. Il n'aime vraiment pas çà. La dépendance, la faiblesse... des signes qui symbolisent beaucoup trop la Mort à son goût.

La question lui fait oublier ce mauvais moment. Un divertissement bienvenu, même si lui aussi pique son orgueil. Il se sent bien con. Presque piégé par de simples mots. Bien obligé d'admettre que son action a contredit ses précédentes paroles. Ou pas.

"Pas un Dino, çà compte pas."

Pas d'écaille, pas Dinosaure. C'est aussi simple que çà. Il lâche un profond soupir, mêlant souffrance et fatigue.

"C'était une connerie."

Çà, il veut bien l'avouer.

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