Illidan ▬ Éclate-roc [Garbann]

Des fois, Illidan se sentait l’esprit un peu prompt à l’aventure. Il décidait subitement de faire un truc stupide et dangereux, juste pour voir, parce qu’après tout il était déjà revenu de la mort une fois. Des fois, il essayait même presque de mourir volontairement. Pour voir. Jouer avec les résurrections n’est pas bon pour la santé mentale, si le doute était encore permis.

Ce matin, il s’était réveillé fiévreux, incapable de se souvenir de ce qu’il avait fait la veille. Il était dans un endroit rocheux avec une forte odeur de brume, et où il faisait froid, lui indiquant qu’il était sûrement assez haut dans les montagnes. Il ne savait pas où il avait réussi à dégoter une bouteille de rhum, mais ça avait été une terrible idée sur tous les plans possibles, il se sentait nauséeux, déshydraté et sa gueule 10x plus pâteuse que ses matins habituels. Il détestait déjà cette journée.

Il ne devait pas avoir atterri bien loin de la Lagune du Crépuscule, être ivre ne voulait pas dire renouveler une deuxième jeunesse, mais il n’avait aucun repère et était bien parti pour se perdre un bon moment avant de retrouver le chemin de la plage. S’il ne se perdait pas et ne finissait pas par mourir bêtement dans un éboulement, en chute quelque part ou simplement déshydraté. Il poussa un long râle, terriblement agacé. C’était subitement moins marrant d’aller tester les limites quand on était en gueule de bois. Il n’avait même plus l’excuse de la possession démoniaque pour accuser cette situation…

Empruntant aléatoirement un chemin qui lui semblait se diriger à peu près vers le bas, il entama avec un certain dépit et une haine de la vie particulièrement aigüe ce qu’il espérait être le chemin retour.

Un grand bruit d’ailes attira son attention malgré son mal de crâne, et il s’attendit à tout instant à se faire agresser par un rapace de passage. Il ne s’était pas attendu à cette mort-ci, mais après tout elle était tout aussi crédible que les autres, vu sa faiblesse et ses limites physiques. Cependant l’oiseau se posa proche, et non sur lui, l’arrosant d’un nuage de poussière qui ne manqua pas de faire tousser le loup abîmé. Ça sentait le loup finalement, qu’était-ce donc cette aberration qui venait lui voler dessus ! Il n’avait jamais rencontré d’autre loup ailé, et encore moins capable de s’élever du sol. Sa famille n’en avait jamais eu les capacités, leurs ailes étaient trop petites.

-Je n'irais pas dans cette direction si j'était vous.

Oh, de quoi je me mêle. Il y avait quoi au bout, une mort certaine ? Quel dommage, dire qu’il aurait pu aller inconsciemment vers un moyen encore plus efficace qu’un doliprane pour faire cesser ce mal de crâne. N’ayant pas de moyen de se rendre compte de la mine horrifiée de l’inconnu, Illidan n'y accorda pas d’attention et bougonna en se détournant de vers où il allait, traînant des pattes vers une autre direction aléatoire.

« Merci bien... »

La nausée le reprit tandis qu’il avançait vers le nouveau chemin, et sa respiration trembla alors qu’il concentrait ses sens à tâtonner devant lui pour se prévenir d’un trébuchement éliminatoire.

N’ayant toujours strictement aucune idée d’où il allait, le loup sans âge traînait à nouveau vers ce que son oreille interne lui indiquait comme le bas, mais ses tâtonnements le menaient régulièrement vers des rochers encombrants ou des précipices. Mais quelle idée de grimper ici, vraiment. Pour ne rien aider, l’inconnu décida évidemment de le suivre, comme s’il n’était pas déjà d’assez mauvaise humeur. Rencontrer des gens sur la plage quand il réfléchit c’est une chose, sur une falaise escarpée en gueule de bois en était une autre.

« La même chose qu’au reste de mon corps, » grince-t-il en soulevant une patte bandée et l’agitant sous le nez du jeune.

L’Ancêtre, non mais l’autre. Il supposait que vu la démographie de loups ailés sur le continent —à sa connaissance, il pensait qu’ils étaient très peu— il pouvait comprendre que voir l’état des siennes pouvait choquer, ils étaient déjà pas beaucoup alors si en plus il en faisait n’importe quoi...

« ...mais comme tu le constateras, mon enfant, d’autres types de problèmes ont été bien plus entravants à leur utilité que ça, plus tôt dans ma vie. »

Il sait très bien repérer vers où se trouve la tête d’un interlocuteur dès lors que ce dernier se met à parler, et il fixe le mâle de son visage détruit. Avec un peu de chance il penserait à une blessure juvénile et comprendrait rapidement sa cécité, son corps portait un peu trop de stigmates pour les différentier au premier coup d’œil.

« Que fais-tu donc à traîner ici, même ? » dit-il en se retournant vivement, à la recherche d’un autre passage.

Ce qu’il regrette instantanément, il a l’impression que son cerveau se décroche de son crâne, et tous ses sens le fourmillent, rappelant violemment sa nausée au taquet.

Illidan ne put s’empêcher de renifler bruyamment. Avec son allure maladive, un ancien guerrier ? Les jeunes voyaient vraiment ce qu’ils voulaient voir.

« Non. Je n’ai jamais pu vraiment me battre. »

Peut-être dans une autre vie, avec un passé différent, quelqu’un aurait pu l’aider à surpasser sa fragilité et apprendre à jouer avec les difficultés de son handicap. Mais, le destin n’avait pas pris ce chemin le concernant, le poussant vers d’autres, connaissances, disons.

La voix du gamin lui tapait sur le crâne, et le vieux loup se tourna finalement vers lui, se redressant de tout son corps pour prendre un peu d’allure, et réfléchit à une manière efficace de lui demander de le laisser tranquille...avant de dégobiller le peu que son estomac possédait sur les pattes du jeune. Oups.

Finalement recroquevillé devant lui, la tête lui tournant encore et la gorge brûlée, Illidan reconsidère ses options quand ses esprits lui reviennent, et il finit par croasser faiblement :

« Je veux bien un peu d’aide. »

Et respectez vos ancêtres hein, surtout.

Dé agi esquive:

Il était bien aimable, pour un petit jeune sur lequel il venait presque de recouvrir la fourrure de bile, Illidan devait bien lui reconnaître ça. Le jour où il aurait de nouveau une flasque sur lui, il lui offrirait bien un coup tiens.
Cela faisait si longtemps qu’il n’avait pas vu d’autre mâle sur ces terres peuplées de femmes…à part l’étrange éphèbe sur la plage. Un frisson surprenant lui descend l’échine à cette pensée. Etrangement, la présence du jeune ailé lui produisait un étonnant effet de solidarité avec le nouveau venu, et il se prit à accepter l’aide plus facilement qu’il ne l’aurait cru. La gueule de bois aidait certainement, cela dit.

« Et bien, soyons fous… »

La solution éternelle à une mauvaise cuite était toujours quelques litres d’eau et une bonne nuit de sommeil, voilà ce que l’ont apprenait assez tôt aux enfants chez les Raeders de son époque.

« Je m’en remet à vous, jeune homme… »

Qu’il était satisfaisant, d’utiliser l’aide d’un jeune de la sorte. Des tréfonds profonds de galanterie le faisaient toujours garder un semblant de distance avec les demoiselles, mais le fait que ce soit un gaillard lui faisait perdre tout faux-semblant.

« Mon estomac semble un peu contrarié pour le moment, il devrait pouvoir me laisser avancer quelques temps. »

Il avait super mal au bide, mais ce n’était pas comme s’il n’avait pas globalement l’habitude de la douleur, depuis.

Qu’il était agréable de se laisser balader, pour une fois. Le loup d’une autre époque n’appréciait pas vraiment le contact physique à cause de sa peau sensible, mais aujourd’hui il en faisait fi, suivant de près le jeune mâle. L’inconvénient de suivre quelqu’un peu renseigné sur la cécité était de risquer de trébucher sur un objet que la personne n’avait pas calculé comme dangereux à sa propre échelle, mais c’était un piètre problème contrairement à errer plusieurs jours sur une montagne, sans eau ni nourriture.

Illidan ne l’écoutait blablater que d’une oreille, mais il crissa des dents sur un élément précis.

« C’en est assez : l’ancêtre, et maintenant papy ? Je n’ai pas d’âge et suis encore moins de ta famille, il suffit. Je me tape une sacrée gueule de bois, si tu veux tout savoir. Mon corps malade ne supporte plus grand-chose, et ma cuite d’hier a fortement contrarié ma carcasse. »

Peut-être n’était-ce pas très malin de rouspéter contre son sauveur, mais Illidan était actuellement dénué de la patience qui lui permettait généralement de survivre, et son intelligence en pâtissait.

« Bref...oui j’ai soif. » Il pause. « D’eau. »

Blague d’alcoolique.

Il lui courait sur le haricot le jeune, décidément, mais Illidan était bien obligé de s’accommoder de lui s’il voulait rentrer en un morceau. Affectueux ? On n’était pas affectueux avec Illidan, sorcier aux démons intérieurs et invoqués, c’était du suicide, ou un manque évident de jugement.

Le loup d’un ancien temps aurait levé les yeux au ciel en l’entendant.

« Encore jamais bu d’alcool ? Mais qui t’a donc éduqué, une nonne ? »

Mais le son du ruisseau désintéressa totalement le solitaire, qui clopina jusqu’à l’eau comme un drogué en manque. Il dérapa légèrement sur les galets humide, impatient de tremper sa langue dans ce liquide dont il avait tant besoin : il se sentait revivre. Toujours une belle idée de merde, le rhum, mais il ne pouvait s’en empêcher, l’envie se faisait parfois trop forte.

Il reste longtemps là, à laper par intermittence, prenant une pause pour respirer, avant de remplir à nouveau d’eau son estomac torturé. Les babines dégoulinantes, il secoua ses moustaches pour en faire tomber les gouttes, et son sentiment de soulagement l’adoucit lorsqu’il reprend la parole.

« Bon. Je dois te remercier. »

Le loup aux longs cheveux blancs s’éloigne un peu du ruisseau, ses longues pattes osseuses effleurant sans poids le sol.

« Sommes-nous encore loin de la plage ? Si elle t’est perceptible, alors je cheminerai seul maintenant. Cependant, dis-moi ce que tu souhaites en échange de cette aide. Je ne possède presque rien, et suis capable de peu de services, mais j’ai encore quatre pattes fonctionnelles. »

A avoir principalement échangé avec des démons au cours de sa vie, Illidan savait que rien n’était gratuit en ce bas monde.

Eduqué chez les nonnes, en voilà une bonne. Monsieur le curé l’accompagnerait donc encore un peu, soit. Illidan ébroua sa fourrure miteuse, attendant que le jeune formule sa demande, las d’avance. Mais il n’aurait jamais imaginé, dans aucun monde, que cet énième inconnu dans sa vie prononce le mot démon. Était-ce une vaste blague, une fausse vie ? Peut-être rêvait-il son retour parmi les mortels, depuis un au-delà facétieux où des astres plus puissants que lui décidaient de le torturer un peu plus longtemps. Entre une descendante démoniaque, et tout ce monde croisé au minima curieux si ce n’est déjà concerné, il en viendrait à croire à une caméra cachée. Mais l’air ne portait que leurs odeurs, son corps subissant les douleurs de ses erreurs lui semblait bien vivant, et rien n’indiquait qu’on le suivait ou qu’il n’était pas réellement présent. Sans plus d’informations…il n’avait plus qu’à suivre ce courant inattendu. Au pire, il devait bien avouer que c’était un beau rêve.

« Quelle ironie se joue de nous ainsi, je me le demande, » s’esclaffe mollement le loup. « Je suis l’oncle d’Emilitia, je la côtoie quotidiennement. »

Il baisse l’encolure, un sourire mutin sur les babines.

« Et par ailleurs, c’est de mon fait qu’elle possède sa nature de démon. Si c’est un sujet qui t’intéresse, je serais ravi de plus t’en parler sur le chemin... »

Monsieur le curé prierait-il leurs amis les démons, au final ? Illidan adorerait former un nouveau prêcheur de l'ombre.

Même aveugle, Illidan avait appris à être sensible à l’attitude des gens pour lire leurs expressions ; il n’avait pas manqué son coup avec sa proposition. Le jeune loup semblait bien plus excité, ce qui ne manqua pas de faire naître sur ses babines le sourire brisé signature de son âme souillée. Ses projets d’engeance démoniaque portaient presque à terme avec le dragon, et voici qu’il se dégotait un apprenti ? Merveilles, le destin semblait décidément lui sourire. Mais il lui faudrait toutefois encore le tester. Il fallait donner...beaucoup, énormément aux démons si l’on souhaitait vraiment qu’ils nous entendent. Si le jeune n’avait pas l’intention d’abandonner toute autre ambition, de sacrifier son âme et ce qu’il chérissait, alors les démons le dévoreraient vivant. Seules les âmes damnées possédaient la folie nécessaire pour s’aventurer sur ces sombres chemins.

« Le hasard n’a que peu d’importance, jeune homme. La vie est faite d’occasions, et même si ce hasard te pousse vers mille horizons, seuls ceux capables de prendre entre leurs crocs ces occasions iront là où ils l’ont choisi. »

Voilà qu’il se prenait à déblatérer des morales, aujourd’hui, peu étonnant qu’il se fasse traiter de papy. Mais quelque chose lui plaisait bien, chez ce jeune. Emilitia était grande déjà, et sa nature de démon lui donnait une puissance d’âme largement suffisante pour avoir la force de s’emparer elle-même de sa vie et ses pouvoirs. Il était plaisant de suivre son développement. Mimosa était une chapardeuse, Illidan savait qu’il n’en ferait une disciple, mais sa compagnie lui changeait un peu. Celui-là...il était curieux d’apprendre à le connaître. Resterait-il, abandonnerait-il.

« Seras-tu capable d’arracher ton destin au hasard ? » Le ton d’Illidan était joueur, mais son expression était difficile à lire ; il semblait y prendre un peu trop de plaisir. « Comment t'appelles-tu ? Pour ma part, je suis Illidan. »

La fébrilité de son cadet est contagieuse : même Emilitia n’avait exprimé autant d’émotions à leur rencontre. Illidan reste composé, mais son visage ne peut se défaire du grand rictus lui déformant le museau. Le jeune a déjà l’air sûr de lui, c’est un très bon début. Je n’ai rien à perdre. Voilà qui est intéressant...cela est-il réellement vrai ? On oublie parfois des choses que l’on pense peu importantes, et c’est toujours une fois perdues qu’on découvre qu’elles nous manquent. Mais ça, le jeune le découvrirait de lui-même...Garbann.

Son nom lui plaît, la consonnance est juste. Illidan. Garbann. Comme c’est amusant.

« Si tu gardes cet état d’esprit, alors tu feras des progrès à vue d’œil, » ronronne l’éclopé. « Tu pourrais passer où je loge, si le cœur t’en dit. Je vis auprès d’Emilitia, c’est là que j’étudie la démonologie. »

Il reprend son pas tâtonnant, se dirigeant vers ce qui lui semblait être le bas, en ondulant sa longue queue décharnée. Décidément, il en invitait du monde. Il espérait que sa grande nièce de lui en voudrait pas trop ; au moins avait-elle déjà rencontré celui-ci.

« Cela nous donnerait l’occasion de voir de quoi tu es capable… »

Comme il aimait le mettre au défi.

« Mais, peut-être as-tu déjà des questions ? »

Ses mots sont plaisants, mais l’aîné savait être patient avant de s’emballer. Il faudrait un désespoir certain au petit avant de s’enfoncer là où lui-même était descendu...ou bien qu’il soit un peu stupide. L’un comme l’autre, il saurait l’accueillir le temps qu’il le désirerait.

Illidan aurait pu concocter des plans, des pièges, pour attirer âmes faibles et êtres en perdition dans sa secte, mais ça n’avait jamais été le style du personnage. De nature plutôt solitaire, il n’avait jamais recherché qu’un sentiment de force, et de sécurité, dont il avait manqué une grande partie de sa vie. La terreur de vivre sous le jugule des dieux, d’être privé de liberté, pouvant à chaque instant se faire balayer par un éclat de colère comme celui ayant ravagé les terres de son enfance...il s’en souvenait très bien, encore aujourd’hui. Bien des choses avaient été avalées par sa mémoire, mais ce qu’il avait ressenti, tapi dans un terrier, tandis que le sol tremblait et les pouvoirs divins s’entrechoquaient sur le champ de bataille, jamais il ne pourrait l’oublier. Cette peur était devenue une part entière de sa personnalité.

Et c’est cette peur dont il s’est défait en se liant aux démons, une forme de puissance contraire à celles des dieux qu’il abhorre. Une porte vers des possibilités, une ouverture vers des plans bien plus grands que ceux qu’il aurait pu envisager à l’époque, maudit sur une île. C’est grâce aux graines qu’il a plantées qu’il se retrouve aujourd’hui entouré, les pattes fermement ancrées au continent, et surtout vivant. Aucun de ses rêves les plus fous ne l’aurait fait imaginer que ce rituel-là avait fonctionné, et qu’il puisse revenir des générations plus tard, le Fel coulant dans ses veines.

Aujourd’hui encore, ce qu’il cherche, et propose, malgré quelques distractions, c’est une manière de prendre entre ses griffes son destin, et ne plus jamais le laisser entre celles de divinités immatures. Et c’est ce qu’il compte offrir à ce jeune Garbann s’il décide de rester à ses côtés.

Il lâche un petit rire léger, à sa question. Qu’il était hâtif ! Mais il ne peut que le comprendre : c’était après tout les mêmes envies qui l’avaient poussé là où il était aujourd’hui, avant de réfléchir à ses plans actuels bien plus vastes.

« C’est possible, si tu pratiques avec moi. Quant aux hybridations...il nous faudra en rediscuter, quand je t’aurais appris les bases. Les corps mortels et démons ne se marient pas bien ensemble, à moins de s’y prendre très tôt dans l’existence d’un être. »

Si possible, dès lors que le fœtus existe. Lier un enfant à un démon comporte une marge d’erreur considérable...

« Je me suis éloigné de ce chemin assez rapidement dans mes recherches, je n’ai jamais eu vocation à détruire le monde de mes propres pattes. Mais cela pourrait composer ton sujet d’étude propre à toi, » répond-t-il d’un ton léger.

Même chez les prêtres de l’ombre, on trouvait sa petite place rien qu’à soi. Illidan s’était plutôt spécialisé dans les rituels d’invocation ou manipulation des transferts entre mortels et démons, peut-être Garbann lui parviendrait à devenir maître des mutations.

Une histoire de vengeance, voilà qui poussait bien des gens sur des chemins déraisonnables, et Garbann semblait y tendre aussi à son tour. Chercher la force qu’il lui manque, se créer de lui-même les chances de reprendre une place qu’il considère à sa juste valeur…il se reconnaît étonnamment en lui, dans une certaine mesure. Etrange destin, qui poussait ainsi à la rencontre les âmes aux atomes crochus.

Il semble en tout cas prêt à apprendre, son entrain et son approche sont appréciés.

« Très bien, très bien… »

La mer leur apparut enfin plus proche, après cette descente qui lui était parue interminable, malgré le rehaut d’intérêt suite à leur conversation. Sa tête lui semblait toujours pleine de sable et son ivresse passée laissait sur sa gueule un arrière-goût de mauvaise cuite, malgré l’eau salvatrice. Il rêvait d’aller se rouler en boule et dormir.

« Tu m’en vois ravi, jeune homme, » répond-t-il à l’au-revoir de son cadet.

Il l’entend battre des ailes, lui rappelant sa nature de loup ailé, et il est curieux quant à leurs capacités. Il sait que Garbann l’a rejoint depuis les airs, mais cette faculté l’intéresse : si sa future expérience pouvait posséder ce pouvoir...cela lui apparaissait comme extrêmement pratique.

« Merci pour cette promenade, et au plaisir de nous recroiser, » lui dit-il, le museau déformé d’un sourire patient. Patient et carnassier.