Déréliction | Echoes

Feather a écrit:

Nomidala, Umaïma - C'est presque un abandon, celui de ton propre enfant mais peut-on véritablement lui en vouloir? Mimë était grand maintenant, il avait le droit de suivre se propre voie. Mais toi Umaïma, tu te sens seule, terriblement seule au sein de cette meute avec laquelle tu n'as pas l'impression d'être en phase - ta malédiction n'arrangeant rien. C'est l'hiver et au milieu de ces champs trop grand, le froid s'engouffre en toi, au sein même de ton corps et ton coeur que tu sens tout aussi vaste et vide. C'est un parallèle que tu peux presque faire alors que sous tes pas, craque l'herbe gelée.

Ça y est, son enfant était parti au petit matin.

Un peu trop facilement d'ailleurs, laissant une tonne de ses babioles et trésors derrière ellui. Dans le terrier du cimetière - une vraie cabane aux allures de brocante, un coin était dédié à ses choses. Comme s'iel était en fait que parti en chasse ou en excursion, et non pas pour de bon.

Je sais que mes trucs sont en sécurité ici, avait-iel expliqué, le regard taquin.

Uma avait opiné, n'étant pas du genre à vouloir se débarrasser de ces merveilleux objets de toute façon. La pomme n'était pas tombé loin de l'arbre, car elle aussi elle ramassait tout ce qu'elle trouvait, ayant une collection plus impressionnante que la sienne. Malheureusement, son trésors le plus précieux n'allait pas rester éternellement entre ses pattes.

Elle lui donna un câlin, un câlin rempli de chaleurs que seule les mères savaient faire, avant de le voir s'éloigner à la mer, en compagnie du Capitaine. Elle fut assez forte pour ne pas se mettre à pleurer devant eux, même si son regard était humide. Une fois incernables par son regard bicolore, elle laissa l'eau quitter ses yeux, telle la cascade d'Ao.

Elle entend le frottement d'ailes non loin, sa chouette semblant lui dire qu'elle était là pour rester, elle.

Ne voulant pas rester là à s'attarder sur son sort - et puis, de toute manière, l'enfant n'était plus si jeune, ce moment devait certainement arrivé un jour ou l'autre, elle reprit ses esprits et décida de partir pour une longue marche, changer d'air.

Jamais ne se serait-elle crût aussi pathétique, de se sentir perdue, incomplète sans son enfant sous le museau. Au début de son cheminement de mère, elle ne savait honnêtement pas toujours quoi faire d'ellui. Lea trainer partout, lea laisser explorer ? Lui donner des ordres, ou bien aucuns ? Encore aujourd'hui, il semblait qu'elle avait l'impression d'avoir tout fait et rien à la fois, mais voilà que Mimë semblait bien s'en avoir tiré, ayant rarement été une plaie lors de son enfance. Elle se souvenait que des vieillards venait parfois la voir pour lui dire de ramener son enfant de la bibliothèque - iel était parfois un peu trop énergique à leur goût, courant dans les allées une fois ses lectures terminées, mais sinon rien de grave. Iel était sage - ou peut-être était-iel assez malin pour ne pas se faire prendre. Peu importait, car iel restait une part d'elle et de Chimaera, une perfection qui était née de leur affection sous un ciel étoilée.

Une feuille craque sous sa patte, la faisant revenir à une réalité toute blanche de neige, silencieuse.

Tellement perdue dans la rétrospective d'elle et de son enfant unique, elle n'avait même pas pu profiter de ce magnifique paysage glacial jusqu'à maintenant. Elle frissonna, comme si son corps venait lui aussi de réaliser où il s'était mis les pattes.

Un silence lourd, mais énorme de sens.

Voilà ce qui l'attendait pour les mois à venir probablement, parfois brisé par des visites d'Astrid et de Chimaera, et s'iel le voulait bien, de Mimë aussi. Un silence occupant son quotidien, de par sa malédiction qui lui avait fait couper les ponts avec son clan, ne s'attardant qu'à faire son travail de croque-mort, évitant les conversations sur la pluie et le beau temps. Elle voyait l'effet repoussant qu'avait la marque de Moiro chez les autres loups, et elle ne leur en voulait pas.

Son enfant avait été sa béquille trop longtemps, son seul lien de communication avec le monde extérieur. Il fallait à présent réapprendre à marcher seule.

Alors elle avança dans les champs, le regard incertain et le cœur nerveux.



645 mots

Echos

Echos allait se faire disputer, c'était sûr, pour s'être enfuie comme ça sans prévenir personne. Mais aujourd'hui, sans vraiment trop avoir pourquoi, sans véritable raison particulière, son cœur était un peu lourd. Au lieu de pleurer cependant, elle se sentait simplement furieuse, s'agaçant pour tout et sur tout le monde alors elle s'était simplement enfuie.
Elle aurait pu accusé le dragon, à cause de lui, les Nakhus vivaient désormais autour d'un lac qui s'il était très joli certes, était bien différent du Dédale. Echos ne voulait pas vivre là bas. Elle aurait pu accusé ces adultes qui n'étaient pas des parents, qui étaient gentils avec elle un peu par obligation. Ce n'était pas vraiment de leur faute mais à chaque fois, cette affection presque artificielle la blessait un peu.

Dans cette plaine, il y avait quelque part la pierre auprès de laquelle Echos était apparu. En ce jour où ça n'allait pas très fort, elle aurait voulu la voir mais ces champs étaient trop vaste. Il n'y avait qu'herbe gelée à perte de vue qui n'allait cependant pas bien loin, la brume dévorant le paysage. Oreilles attentives à chaque bruit, il fallait bien avouer qu'il y en avait beaucoup d'inconnus, d'effrayants et Echos finit par se rendre compte qu'elle s'était perdue.
Au fil des pas, la jeune louve commença à avoir sacrément froid, son pelage certes assez fournis et sa petite cape n'étant pas des barrières suffisantes pour le corps frêle d'une enfant alors que le chemin ne se fit pas plus reconnaissable. Echos pouvait affronter beaucoup de chose, la pluie qui éclatait sans aucun nuage, le sol qui tremblait, les apparitions qui n'avaient rien à faire là mais à cet instant, la panique commença à lui faire monter les larmes aux yeux.

Autour d'Echos, souvent des choses étranges se passait, absurdité du monde qui ne parvenait pas à l'intégrer convenablement. La jeune louve ne sut pas si c'était ce hasard provoqué par les petites choses de sa présence ou si le chemin de cette louve avait été établi bien au delà de ça mais lorsqu'une silhouette canine se détacha de la brume, elle se précipita vers elle.

« Madame, madame s'il vous plaît. »

Oreilles en arrière, yeux humides et air penaud, Echos renifla un instant.

« Je me suis perdue. »

Sa voix était un peu tremblante mais Echos était une petite louve courageuse, elle prenait sur elle pour ne pas pleurer franchement.

Umaïma se retourne vers le bruit des petits pas - croyant presque un instant qu'il s'agissait d'un renard, mais voilà qui était en fait un autre loup, suivie par une trainée de lucioles.

Elle reconnait l'odeur particulière des siens et ressent instantanément la petite panique dans sa voix. Sans trop y penser, elle passe ses doigts délicats sous ses yeux gris - comme si elle effaçait les larmes qu'elle gardait d'une caresse. La pauvre, ce n'était jamais un sentiment sympa que de se sentir loin de chez soi, Uma le savait plus que quiconque.

« Comment t'appelles-tu ? », lui demanda t-elle d'une voix douce.

Allons allons, une chose à la fois mon enfant, tu es en sécurité avec moi, aurait-elle voulu dire.

Elle la savait nakhu, mais ne vivait pas assez à proximité des siens pour en savoir plus que cela. Pourtant il y avait quelque chose - dans son regard, ou bien ses manières, qui faisait d'elle une louve qui lui était familière d'une certaine façon, mais peut-être qu'Uma se faisait des idées. Ce n'était pas le temps de l'interroger du pourquoi du comment, car elle était décidément pas dans le bon état d'esprit - perdue même, comme elle venait de lui partager.

Elle commença à faire quelques part vers la direction où elle savait le nouveau refuge des nakhus, ne la lâchant pas du regard.

Suis-moi.

Echos

Nouveau reniflement alors qu'une patte rassurante vint essuyer ses joues.

« Echos. »

Les paroles de la louve blanche ne furent que pour lui demander son nom, elle n'exprima rien de plus de vive voix. Elle semblait pourtant plutôt gentille, peut-être que ce n'était que l'avis d'une enfant, mais Echos avait envie, besoin surtout de lui faire confiance afin de pouvoir sortir de cette situation d'enfant perdue. La louvette ne connaissait pas cet adulte, elle ne se rappelait pas de l'avoir déjà croisé au sein du camp Nakhu mais peut-être qu'elle n'avait simplement pas fait attention. Il y avait tout de même dans son odeur, des parfums familiers qui lui disait qu'elle était au moins proche de sa meute alors lorsqu'elle lui intima par un message muet de la suivre, Echos s'exécuta sagement de ses petits pas fatigués.

Echos.

Deux syllabes, un mot définissant le son qui se perdait et rebondissait sur des surfaces, ou alors une répétition. Elle ne semblait pourtant pas très bruyante, ou peut-être que ses parents aimaient tout simplement la sonorité, qui sait ?

« Umaïma, enchantée. », répondit-elle en posant sa patte sur son propre portail.

Le « enchantée » avait été de trop, mais c’était par habitude. Peut-être allait-elle la craindre un peu à présent, la malédiction de Moiro prenant effet sur ses paroles, ou allait-elle faire comme si rien était : elle était perdue, après tout. Mais comment pouvait-elle la rassurer, sans paroles, sans explications ? Le silence était lourd, mais la croque-mort tenta de garder bonne mine.

« Joli, n’est-ce pas ? », dit-elle finalement, pointant les alentours.

En attendant sa réponse, elle souffle un nuage avec son haleine, tel un dragon.

Hm, peut-être que cette dernière action était de mauvais goût vu les circonstances.

Echos

Echos ne réagit pas trop à la présentation, se contentant de suivre sagement la louve blanche en essayant de ne pas trop traîner, faisant de grands pas l'obligeant un peu à sauter pour que les siens collent aux trous que formaient le passage de la louve. A l'invitation d'admirer le paysage, la jeune louve y perdit son regard gris sans être véritablement convaincue.

« Hm. »

Il y avait beaucoup de brume qui avalait l'herbe gelée en suspensions, comme un arrêt du monde sur un paysage d'hiver. Echos n'avait pas vraiment d'avis à cet instant, ces brumes  l'avaient perdu et cachaient des bêtes bien effrayante, elle le savait. Mais, dans ces landes cachées, dans ce paysage à découvrir, elle savait que quelque part il y avait cette pierre où commençaient ses premiers souvenirs. Son existence était née ici, quelque part et un jour, lorsqu'elle le pourrait, elle y retournerait sans doute pour comprendre un peu mieux ce qu'elle était. En attendant, elle se pressa un peu plus contre les pattes de la louve blanche, la queue basse et les yeux fatigués.

Un simple son de contentement sorti de sa bouche.

Elle sourit face à l'air neutre de l'enfant, se demandant pourquoi les enfants nakhus étaient toujours aussi... matures pour leur âge. Ils semblaient tous déjà avoir un objectif en tête, s'amusaient certes, mais semblaient cacher derrière leurs regard des notions qu'Uma avait encore peine à comprendre. En était-il de même chez les jeunes etelkrus ?

Peu importait, tant que la nouvelle génération était meilleure que la précédente, c'était tout ce qui comptait pour faire avancer le monde.

« Le truc c'est de mémoriser des éléments clés, et ainsi créer ses propres repères. »

Elle pointe du museau un grand rocher percé qu'elles venaient de dépasser en guise d'exemple. Parler de façon vague et plus ou moins en contexte était son seul moyen qu'elle avait trouver pour déjouer la marque de Moiro, alors elle espérait que la jeune loupiotte pouvait suivre cette logique.

Si non, ce n'était pas plus grave, elle avait l'habitude depuis le temps.

Echos

Le regard gris d'Echos se posa sur les rochers pointés à la forme suffisamment particulière pour être retenus. C'était pour ne pas se perdre sans doute, pour réussir à revenir sur ses pas et rentrer à la maison ou au moins à son point de départ. Ce fut ensuite vers la louve blanche que la petite louve releva les yeux.

« Et si on est déjà perdu ou qu'on les rates ? »

Echos n'avait pas trouve le rocher qu'elle cherchait après tout et dans cet immense champ de brume, elle avait l'impression que le paysage lui même était prêt à vous avaler. D'autant plus qu'elle n'était pas très chanceuse Echos et elle savait que sa seule présence aurait été capable de faire venir des choses qu'elle n'avait pas spécialement envie de rencontrer par surprise.

Encore des doutes.

« Ne pas rester en place, trouver de l'aide. On est jamais complètement seul »

Disait celle qui se mettait à l'écart depuis quelques années déjà, ce qu'elle pouvait être hypocrite.

Elle remarquait cependant le caractère réaliste de la loupiotte, et tentait de se rassurer en disant que plus tard elle n'allait probablement pas se mettre dans le même type de pétrin qu'elle. Elle semblait déjà avoir sa propre opinion des choses, et une grande ouverture à apprendre. Il allait être intéressant de la voir évoluer au sein du clan, pas de doute.

Le reste de la promenade fut agréable, bien qu'Uma fut parfois perdu dans ses pensées, elle n'oubliait pas de poser un regard de temps en temps vers l'enfant pour voir si tout allait.

« Regarde. »

Elle pointe du museau deux silhouettes au loin, probablement Nocera ou sa fille, et celle de Cheza un peu plus à l'écart. Signe qu'elles étaient proche du refuge nakhus. La croque-mort allait devoir aussi s'habituer au nouvel emplacement de la place, elle qui vivait sur l'île voisine.

Echos

On est jamais totalement seul.

Cette phrase résonna étrangement dans l'esprit d'Echos, elle lui semblait particulièrement importante mais sonnait comme faux. Peut-être parce que la louve blanche n'y croyait pas elle même bien que Echos n'aurait pas remis en doute les paroles d'un adulte ou peut-être parce que elle même ne voulait pas trop y croire. Il était plus simple de trouver une raison au vide que l'on ressentait au fond de son cœur.

Lorsque la louve blanche loin pointa deux silhouettes familière, les oreilles d'Echos se redressèrent et la petite louve trotta dans leur direction. Elle s'arrêta cependant à quelques pas de sa guide, se retourna vers elle.

« Merci madame. Au revoir. »

Et elle disparut rejoindre les silhouettes, laissant la louve blanche derrière elle.

La loupiotte s'élança dans la direction des membres de son clan, probablement fort soulagée.

Uma sourit, contente d'avoir pu guider l'enfant vers le droit chemin. Car qui sait ce qu'il aurait pu se produire si elle se serait perdu ? Il valait mieux ne pas y penser, surtout qu'à présent son remerciement atteint ses oreilles et lui fait chaud au cœur.

« Au revoir. », répondit-elle gentiment.

Elle attend un peu, question que les autres loups remarquent l'arrivée d'Echoes, sans toutefois se faire repérer de son côté. Elle n'avait pas particulièrement le goût de socialiser plus que cela, déjà que sa rencontre d'aujourd'hui c'était bien passé, elle voulait garder cela comme ça.

Puis elle rebrousse chemin, le cœur un peu plus léger par cette rencontre.

Car la vie continuait.