Ensemble [PV Nirvana]

L’esprit était plus léger, plus apaisé. Nirvana avait quitté le temple, réfléchissant aux mots de Samaël. Réunir les Etelkrus, en y faisant naître davantage de cohésion autour des dieux.
Seule Dairo l’intéressait.
Aussi, la présence de son frère ne fit naître ni joie, ni rancoeur. Simplement de l’indifférence. Nul orange sur lui, il n’était pas intéressant.
Et la brume en elle faisait suffisamment effet pour lui faire oublier ses sentiments. Un simple sourire qui étire ses babines.

« — Bonjour Iris ! »

Simple salutation. Moins joyeux que si il avait été disciple de Dairo.
Ses cheveux devenus blancs à présents sont soulevés par le vent des falaises, alors que la prêtresse attends de voir ce que lui voulait le loup.

L’attente d’une réponse, sans aucune analyse. Une oreille attentive, quand il dit la chercher. Une affaire urgente ? Visiblement de simples banalités.

« — Ici est le territoire de Dairo. »

La crypte. Les falaises.
Tout ceci appartenait à la Renarde.

« — Je me dois d’en connaître chaque détails. »

Même sous les eaux de ces terres, je peux les guider, nos disciples.
Les yeux pâles fixent Iris, sans que Nirvana n’esquisse le moindre mouvement.

« — Souhaitais-tu m’entretenir d’une affaire en lien avec Dairo ? »

Lui ne l’a vu qu’une seule fois, ce pouvoir. Pauvre Iris. En avait-il peur comme Sakura à l’époque ? Pour quelle raison après tout, ce n’était pas sur les autres que Nirvana l’utilisait.
Plus maintenant.

« — Pour Dairo. »

Cela sonne comme une évidence.
Un sourire.

« — Grâce à toi, aux autres, j’ai compris.
Vous n’avez fait que me distraire.
À présent, je ferais ce qu’il faut pour la représenter, au sein du clan Etelkrus, auprès de ses disciples. »

Une pause.

« — Parce que je suis sa prêtresse. »

Nirvana ferait ce qu’il faut, penserait comme la digne disciple de la Renarde, comme elle l’avait jusqu’ici.
Juste en laissant ses sentiments envers les autres de côtés.
Chaque décision, chaque avis serait ainsi rendu avec la neutralité adéquate.

Nirvana lui avait demandé d’arrêter, d’essayer de la comprendre. À chaque fois, chaque tentative, il n’avait fait que la détruire un peu plus. Jusqu’à ce qu’elle en ait assez, de supporter tout ça. À la question, il y a comme une brève hésitation qui passe dans son regard. Heureuse ?
C’est à cause de toi.
Un battement de cils.
C’est grâce à toi.

« — Être heureux. Ça n’a pas plus d’importance aujourd’hui que ça n’en avait avant. »

Nirvana n’avait jamais aspiré à cette forme de bonheur que tous convoitaient.
Se l’était toujours interdit.
L’une des griffes retourne un coquillage, alors que Nirvana observe l’océan, un sourire aux babines.

« — Tant que je peux servir Dairo, cela me suffit.
Tout comme être disciple d’Aka te suffit à toi. »

Nous ne sommes que des serviteurs des dieux après tout.

L’était-il, désolé ? Comme à chaque fois. Nirvana, n’y accordait même plus d’importance, ne cherchant pas la sincérité dans ces mots.
Le ton est sur, sans hésitation.

« — Ça n’arrivera plus.
Ça n’a plus lieu d’arriver. »

C’est terminé à présent.
À la question, un froncement de sourcil. Pourquoi ces questions ? Toujours ces questions…

« — Pourquoi t’en soucier, Iris ? » La sirène marqua une pause, la lumière de son glowstick se reflétant dans ses yeux pâles. « C’est trop tard tu ne penses pas ? »

Le ton est sans reproche, le sourire un peu plus timide.
Je suis allée trop loin maintenant.

Encore une fois, elle ne cherche pas à estimer la sincérité de ses mots. Cela n’avait plus d’importance à présent, comme elle le lui répétait depuis le début. Lui comme les autres, avait eu sa chance.
Il semble triste.
Aurait-elle du l’être, elle aussi ?
Le museau qui se penche sur le côté, aucune expression.

« — Fais comme bon te semble, mais arrêtes de chercher Nirvana. »

Un haussement d’épaules.

« — La prêtresse, elle, ne ressent plus rien pour vous autres.
Tant que vous n’avez rien à voir avec Dairo. »

C’était dit sans méchanceté.
Simplement la vérité.

Lui s’obstine, comme toujours. La prêtresse ne s’en offusqua pas. Cela ne l’énerve pas pas plus que cela ne la touche.
Il ne porte pas l’orange.

« — Si borné, fils d’Aka.
Encore une fois, tu ne vois pas ce qu’il faut.
Alors que pourtant, je te donne toutes les cartes en mains.
Si je te laisse me parler, m’atteindre, je serais encore brisée.
Ce chemin que j’emprunte, jamais nul autre, ne l’a emprunté jusque-là. »

Nul dans l’histoire.
La sirène décrocha le masque d’Emilitia, le levant au-dessus de sa tête pour en observer l’intérieur. L’esprit semble ailleurs, un bref instant.

« — Parfois, pour le bien commun, il faut renoncer à ce qu’on a de plus cher.
Se sacrifier. »

Elle se tourne vers lui, sourire mystérieux.
Mot pour mot, Nirvana lui répète les paroles prononcées à leur précédente rencontre. Plus que jamais, elles prenaient leur sens. La disciple de la renarde rompit la distance d’un bond, sa mâchoire venant claquer joyeusement.

« — Allons, Iris, souris. Ce que j’éprouvais pour toi, les autres, cela n’a plus aucune importance.
Tu ne seras ni aimé, ni détesté.
Je continuerai de me pencher sur tes petits problèmes si c’est ce que tu souhaites.
Comme je l’ai fait avec Désiré.
Je resterai une bonne Etelkrus, tant que Dairo y sera rattachée.
En bonne prêtresse. »

C’était ce qui attendu par son rôle, non ?
La louvette se recula, son regard se tournant vers les falaises.

Les questions, font naître une certaine hésitation. Pourquoi en perdre un autre ? Pourquoi forcément perdre ? L’expression redevient sans émotion. Iris cherchait-il à faire naître quelque chose chez la sirène ?
Ou étais-ce simplement habituel ?

« — Perdre ? »

Un pas.

« — Je me voue corps et âme à ma déesse, à mon clan… et tu me considères comme morte ? »

Un autre pas, Nirvana capte le regard du loup.
Une prêtresse parfaite contre une vie de regrets et d’hésitations.

« — Ainsi soit-il, fils d’Aka.
Considères Nirvana comme morte, si tu le souhaites.
Mais n’oublies pas que la prêtresse de Dairo, demeure.
Et qu’elle, il serait bien regrettable de la considérer comme morte. »

Cela pourrait sonner comme un avertissement.
Cela pourrait sonner comme une menace.
À toi de l’interpréter comme bon te semble.
Nirvana se détourna du disciple d’Aka pour rejoindre le temple de Dairo. Aucune pensée qui ne venait obscurcir son esprit, ni réflexion.