Don't blame up — Libre

Cela avait assez duré. Beaucoup de choses avaient commencé à la lagune, l’un de ses endroits tant chéri. L’apparence de sirène laisse progressivement place à l’apparence terrestre à chaque pas effectué. La broche à son harnais brille, de la même lueur que celle du glowstick.
Les autres ne devaient pas la voir.
Les disciples de Dairo ne devaient pas savoir.
Un sourire qui étire ses babines, alors qu’elle observe la brume qui se forme au creux de sa patte.

« — Tu m’as aidé, maintenant, je dois te sortir. »

Nirvana se concentra, pour relâcher l’emprise de la brume sur son esprit. Une emprise devenue forte au fil des semaines, car le pouvoir avait pris à résister aux luttes. Le corps de la sirène se contracte, alors qu’elle entrouvre sa gueule.
La brume doit ressortir, coûte que coûte.
Utilisée pour ne plus se détourner de Dairo.
Je n'ai jamais cessé de la servir.
Pour oublier l’amertume.
Je peux lutter contre cela.
Pour oublier le chagrin.
Cela doit faire partir de moi.
Pour oublier l’amour ?

Un spasme qui la secoue, alors que de la salive s’écoule de sa gueule. La louvette ne doit surtout pas relâchée son emprise sur la brume, jusqu’à l’avoir complètement recraché. Dairo ne voulait pas que ce pouvoir soit utilisé à ces fins, il ne fallait pas la décevoir.
Pour oublier l’amour ?
J’apprendrai à vivre avec.

Un gémissement qui s’échappe de sa gueule, alors que son estomac se contracte. Le mal de tête s’intensifie, l’obligeant à poser ses pattes sur ses tempes. Nirvana avait envie d’hurler.
Au lieu de ça, elle vomit. Un nuage vert parcourut de petits éclairs. Une matière visqueuse qui se dissipe en touchant le sol, ne laissant qu’une trace noire. Un sifflement qui s’en échappe, alors que la prêtresse continue, d’en ôter la moindre parcelle.
Cela lui semble interminable, la vide de toutes ses forces. Fébrile, elle a un mouvement de recule, ses pattes tremblantes ne lui permettent pas d’avancer, alors elle s’assoit, lutte pour rester un minimum débout. La brume n’est plus à l’intérieur. Sa truffe est humide, ses joues aussi.
Pas que de larmes.
Les coussinets se lèvent, pour tenter d’essuyer le sang. Plusieurs fois elle cligne des yeux, laisse échapper un soupir. Le mal de tête était toujours là. Si douloureux. L’Etelkrus ferma ses paupières, trouvant assez de forces pour poser sa patte sur sa broche. La couronne orangée disparaît, les cheveux blancs restent pour le moment.

C’est ce que tu voulais Dairo.

Samaël

Samaël comprenait un peu plus l'intérêt du glowstick au delà de la marque de sa réussite sociale au sein des Etelkrus, il permettait également de faire parti d'un groupe plus restreint qui n'était pas forcément celui de son rang. La prêtresse de Dairo avait la qualité de n'être pas aussi simple que les autres, du moins évoquait des idées qui pouvaient élever un peu le clan. Alors Samaël se laissait guider par le fil orange qui le liait à la petite tachetée et à ces lieux. Ces derniers temps, ses patrouilles quotidienne étaient nettement plus orientées vers les falaises. Alors ces traces à l'odeur connues qui s'éloignaient des frontières, il n'aurait pu les rater.
Le bouclier les aurait ignoré en temps normal, même si Nirvana était prêtresse, elle n'était pas obligé d'avoir un guerrier qui lui colle toujours au train et pouvait bien s'accorder quelques sorties, nombre d'Etelkrus ne s'en privaient pas. Il tilta cependant sur l'aspect irrégulier des empruntes laissées. Samaël occupait ce rend de guerrier et de chasseur du clan, on aurait dit les traces d'un animal blessé. Alors, au delà de la vie privée et des frontières, son rang imposait tout de même que le mâle brun s'assure que tout aille bien.

Nirvana n'avait pas été bien loin, à peine à une plage plus loin, Samaël retrouva la piste assez rapidement bien qu'elle s'était perdu dans l'océan à un moment donné. Au delà de l'odeur de la prêtresse, celle de la bile, du sang et de la sueur qui l'alerte un peu plus et lui fait accélérer le pas, son origine passée lui permettant d’appréhender le sol sablonneux efficacement.
Lorsqu'il repère enfin sa silhouette, il la devine presque tremblante. Il redresse ses oreilles en avant, perçoit la respiration rapide et sifflante le laisse en alerte.

« Prêtresse Nirvana ? »

Il ralentit à son approche, pour qu'elle ne soit pas brusquée, lui laisse une certaine distance pour la laisser respirer ou se reprendre. Ayant apprit à garder des expressions de façade, chose bien plus simple lorsqu'on était pas directement impliqué, il afficha un visage neutre pour ne pas accabler la petite tachetée de quoi que ce soit venant de sa part.

« Est-ce que tout va bien ? »

Il se devait d'avoir cette intrusion, parce qu'elle était prêtresse et lui bouclier, le soldat au service d'un haut rang dont le rôle imposait d'en assurer la sécurité.

Les paupières sont à moitié clauses, quand la voix lui parvient. Difficilement, son museau se tourne vers Samaël. L’avait-il suivi ? Avec une patrouille ? Une grimace qui déforme ses babines, trop de pensées, cela intensifiait son mal de crâne.
Qu’importe.
Nirvana observa un instant le loup sable. L’était-il vraiment, préoccupé ? Jugeait-il ce moment de faiblesse ? Les coussinets viennent maladroitement essuyer le sang qui goutte de sa truffe. Fébrile, elle s’approcha de l’Etelkrus, posant son front sur son poitrail. Les paupières se ferment, alors qu’elle tente d’oublier la douleur.
Inspires.

« — C’est Nirvana. »

Appelles moi juste Nirvana s’il te plaît.
La prêtresse a besoin de faire une pause pour le moment.
Appuyée ainsi contre Samaël, elle aurait probablement pu s’endormir, avant que la voix d’Iberis ne se fasse entendre.
Le frère, l’ami.
Qui défia mère pour porter le rose.
Qui s’y opposa ?
Qui le retint quand il partit rejoindre la rose ?
Quand il abandonna sa famille ?
Que devint le frère, quand il fut rejeté en essayant de renouer leur lien ?
La respiration s’accélère, face à ce flux d’émotions. Joie, tristesse, regret, colère, tout se mélangeait. Son corps est parcourut d’un éclair bleu. Les larmes rouges viennent creuser des sillons dans ses poils. Elle devait dormir. Dormir pour ne plus penser, le temps que tout se calme. Les yeux pâles fixent Iberis. Il a changé, Puceron. En mieux.
C'est bien.

« — Puceron. »

Nirvana l'observa un instant, se laissant bercé par la respiration de Samaël. Doucement, elle ferma ses paupières.
Elle devait dormir.

Samaël

Lorsqu'elle se retourne vers lui, il peut voir le sang qui tâche le pelage de son visage, sa truffe. Samaël avait eu raison de s'alerter sur ce qui lui avait semblé anormal. Nirvana était dans un état de grande faiblesse et le mâle brun put sentir toute sa fragilité lorsqu'elle s'approcha pour venir faire tomber sa tête sur son poitrail. Le contact le surprit de prime abord, le prince déchu ayant perdu l'habitude mais la sensation fut rapidement balayer par le constat de l'immense fatigue du corps qu'il pouvait ressentir contre lui, la prêtresse lui semblait à cet instant bien plus petite que ce qu'elle n'était déjà. Il ne lui pose pas de question sur ce qu'il lui arrive, ne souhaite pas l'épuiser plus que ce qu'elle ne l'était déjà mais la maintient d'une patte, pour qu'elle ne glisse et ne chute pas. L'oeil doré de Samaël se releva ensutie vers la silhouette du mâle bleu sombre qui arrivait.

« Ibéris. »

Hochement de tête sobre en guise se salutation polie. Samaël ne l'avait pas revu depuis son bannissement de la meute, il n'y avait pas vraiment de raison pour qu'il le revoit après tout. C'était étonnant de le trouver à cet instant cependant, embêtant également, Ibéris et l'inquiétude légitime qu'il avait pour sa soeur risquaient d'être une gêne pour la bonne gestion de la situation.
Samaël sentit le corps de la prêtresse gagner en mollesse.

« Je vais la ramener au Castel afin que les panseurs puissent l'examiner. »

Ici, c'était trop exposé, aux vents, aux prédateurs, aux loups extérieurs.
Le mâle brun enleva sa longue étoffe rouge avant de délicatement faire passer la petite louve tachetée sur son dos, enroulant ensuite son étoffe autour d'elle pour la maintenir et la protéger de la météo.
Il se redresse, si Samaël n'était pas un loup bien épais, il lui semblait que la petite prêtresse lui semblait tout de même bien légère. Un regard poser sur le frère, cette expression neutre et presque froide toujours sur le visage, calme dans la situation quand le mâle bleu exprimait toute son inquiétude.

« Elle est faible, ici on ne pourra rien faire pour elle. »

Samaël

« Je vais être dans l'obligation de te refuser ce droit Ibéris. »

La posture droite et autoritaire, le mâle brun s'oppose au bleuté. Il n'a pas tant la posture Etelkru, fière et arrogante mais celle du soldat à l'éducation militaire évidente. Ce n'est pas par plaisir ou intérêt personnel qu'il pose cette interdiction au solitaire qu'était devenu Ibéris mais par respect et obligation de son rang.

« Pour le moment. »

Samaël pouvait comprendre l'inquiétude que ressentait à cet instant le mâle bleu, la nécessité d'accompagner pour veiller sur ça sœur, mais ce n'était pas possible.

« Tu n'es pas un simple individu extérieur, tu es un banni. Ta présence non consentie par les alphas va créer de l'agitation inutile qui ne fera que l'affaiblir davantage. »

Un stress non nécessaire qui viendrait compromettre le rétablissement. Holly était une louve fière, Samaël n'était pas certain qu'elle autorise le retour d'un loup qu'elle avait banni sans y être prévenue préalablement et simplement par inquiétude.

« Mais je peux demander une autorisation exceptionnelle à ton nom, il faut simplement qu'elle soit faite en amont. Et si elle est refusé, si cela peut t'apaiser, je peux me porter garant pour te transmettre l'évolution de sa santé. Tu n'auras qu'à attendre aux frontières des falaises. »

Samaël

Il voit l'expression du mâle bleu se crisper, il met par ailleurs un peu de temps avant de répondre. C'était légitime, il était difficile d'être contraint de rester à l'écart quand un proche était dans la souffrance. Mais Ibéris a au moins la sagesse d'accepter la contrainte sans opposer plus de résistance, il aurait été difficile de Samaël d'avoir à gérer un refus dans cette situation.
Un dernier hochement de tête en guise de remerciement, de salutation également.

« Je le ferais. »

Et il se détourna du loup bleu pour regagner les terres Etelkrus.