Couleur. • Both.

Sekmêt regardait l'aube avec mélancolie et amertume. Encore un jour se levait. Encore un matin difficile dans une journée execrable dans une période inquiètante dans un monde déplorable. Le museau de la femelle se fronça. Entre ses déboires familiaux et la monstruosité de ces plantes carnivores qui innondait les terres, franchement, la nouvelle séide ne voyait pas où était l'interêt de rester dans ce bas-monde. Mais bon, elle avait trop de fierté pour s'abandonner à la merci de la mort. Khal ne l'avait pas détruite en l'attaquant, ni ensuite en la quittant alors que le géant était devenu son monde. Mâat ne l'avait pas détruite lorsqu'elle était partie lâchement. Alors rien ne pourrait jamais plus l'atteindre. Il n'y avait plus de faiblesse dans le coeur de Sekmêt. Il n'y avait que l'orage grondant d'une colère bouillonnante. De toute façon, il ne lui restait rien ni personne. Son amour de jeunesse était parti. Sa mère était parti. Son demi-frère ne lui avait jamais pardonné son égarement, et elle n'avait aucun lien avec son grand-frère. Ni avec la petite dernière, enfin, les petits derniers. Parce que Sekmêt les avait repéré tout de suite, ces autres enfants de sa mère. Ils avaient une odeur et un look trop explicite. Là encore, la brune avait eu une once d'espoir de ressentir à nouveau autre chose que de la rancune, mais non. Découvrir une énième branche de son sang n'avait fait qu'accroître cette rage sourde qui dictait désormais ses journées. Maussade, elle grogna lorsque le soleil dépassa des montagnes et vint se planter dans ses yeux. Eblouie, aveuglée, Sekmêt refusa pourtant de fermer les yeux. Ses pupilles s'étrécirent en une très fine ligne dans un océan tropicale. Ce raz de marée lumineux eut pourtant raison d'elle : un mal de tête pointa le bout de la truffe et la louve dû détourner le museau de l'astre diurne. Sekmêt ne trouvait même plus de joie dans un levé de soleil. C'était si inutile au fond... L'ancienne Brethen se releva et reprit sa petite balade en solitaire. Il n'y avait vrament plus rien pour émouvoir son coeur sec comme la pierre.

Elle s'était cru seule, tranquille. C'est avec frustration qu'elle comprit que non. Evidemment. C'était ça aussi vivre en meute, ne jamais pouvoir être complètement, totalement isolée. Elle soupira ouvertement, ce qui eu pour effet de dévoilé son regard turquoise, autrefois aussi chaleureux et rêveur que les mers tropicales, désormais aussi glaciale que la banquise. Agacée avant même qu'il n'arrive à sa hauteur, Sekmêt hésita à faire demi-tour, sans demander son reste. Mais une étincelle l'intrigua. Quelque chose dans l'attitude générale de ce loup, dans sa voix, dans ses yeux. La curiosité l'emporta et elle redressa la tête, oreilles frémissantes. Elle le détailla. Blanc. Grand. Plutôt viril. Profil intéressant.

« Ptetre bien. »

Sûr de lui, fin, probablement plus agile que fort. Touffu aussi, en cette saison froide. Il en avait bien de la chance tiens. La femelle chocolat fixa son glowstick un instant avant de revenir ancrer ses prunelles claires dans celle du mâle où elle décela un brin de... tentation ? Evidemment, il fallait en plus qu'elle tombe sur le Séide gourmand de la bande, qu'il la lorgnait comme une friandise. Soit. Ce n'était en soit pas si désagréable. De toute façon, l'ex-Brethen ne portait pas réellement d'importance à ce que pouvait bien penser ses congénères. Elle se suffisait d'être pour les Séides un parasite à peine utile, aider de temps en temps les soigneurs à s'occuper des vieux ou des malades. Quand elle ne disparaissait pas comme aujourd'hui pour aller prendre l'air. Cela dit, elle avait donc un avantage. Elle comprenait l’intérêt du mâle, et pourrait s'en servir. Un sourire narquois étira les fils au coin du museau de la louve aux pupilles fendues. Elle agita les oreilles. On lui prêtait un caractère détestable, moqueur, aigrie mais approchable. Elle allait lui montrer que non. Elle jouerait avec le beau monsieur que voilà, puisqu'il semblait prêt à un brin de causette. Puis elle le jetterait avec haine. Oui, faire retomber sur les autres ce que la vie lui avait donné lui semblait une bonne occupation.

« Et tu es un ardent croyant, qui sacrifie son temps pour invoquer la pitié des Dieux pour les pauvres pêcheurs que nous sommes, si je ne me trompe pas. »

Histoire de dire que je sais qui tu es et quelle place est la tienne mais que ton nom je m'en tamponne un peu. Elle lui offrit tout de même un simulacre de sourire plus accueillant. Un truc du genre je suis contente de voir quelqu'un d'aussi charmant !

« Tu es là pour m'aider à expier mes erreurs ? »

Les prunelles turquoise de Sekmêt se réchauffèrent, mutines. Allier l'ironie à la taquinerie lui réussissait plutôt bien, en général. Cela fonctionnait bien pour intriguer les autres, surtout ces messieurs déjà émoustillés par les fragrances alléchantes de ces damoiselles. Il suffisait ensuite d'ajouter un soupçon de rire, quelques mouvements fluides et félins, et c'en était fait de ces mâles sans cervelle. Trop facile.

L'échange avait été court finalement, puisqu'il repartait sans plus de cérémonie. Sekmêt s'en trouva presque un peu déçue. Elle aurait pu s'amuser un peu, le divertissement manquait cruellement a son planning quotidien. Haussant les épaules, elle se redressa pour repartir aussi, dans la direction inverse du coup, avant de se rendre compte qu'il la frôlait presque pour la contourner. Ou plutôt... Il l'encerclait. Enfin... Il lui tournait autour quoi. Des picotements accueillir ce que l'Ex-Brethen cru sentir comme un contact furtif du mâle qui continuait son tour de manège. Puis le Zélote répondit d'un naturel presque désarmant. Finalement cette entrevue pouvait se révéler plus intéressante, plus amusante surtout. Un petit sourire en coin de Sekmêt répondit à celui, ravageur, du loup blanc. Un léger frisson parcourut l'échine de la femelle en chaleur. C'était tout aussi plaisait de sentir cette tension brute et sauvage qui semblait s'élever entre eux, qu’inquiétant, son corps n'avait jamais réagit de la sorte malgré ses hormones en ébullition. Ce n'était pourtant pas sa première période de chaleur... Khal avait eu un effet similaire sur elle quoi que mélangé à un filet de peur qui avait entravé sa tendresse et ébréché sa confiance jusqu'à ce qu'il l'abandonne sans hésitation, alors qu'elle lui était totalement acquise. Un éclair de rage passa dans les prunelles turquoises de la louve acerbe. D'un bond elle fit face au blanc et bleu alors que lui même s'écartait pour lui rendre son espace vital. La tension s'envola et Sekmêt inspira. Elle s'efforça de reléguer son traître de premier amour au placard alors que l'autre la reluquait, en attente d'une potentielle réponse.

Khal avait gâchée sa vie, et continuait encore, même en étant absent, à lui causer du tort. Elle devait se débarrasser de tout ça, elle devait se venger de lui et de ce qu'il lui avait fait. Retrouver le bonheur était une idée, après tout, lui l'avait bien fait puisqu'il avait procréer à tout va. D'abord chez les Séides, où Sekmêt avait découvert l'existence d'une louvette dont le géniteur était évident pour elle, et puis avec l'autre blanc après, qu'elle avait croisé sur la banquise. Malheureusement, Sekmêt était trop en colère, trop aigrie pour parvenir à retrouver l'envie de vivre heureuse. Elle voulait faire souffrir ceux qui croisaient sa route pour leur apprendre que la vie était une salope, et que par conséquent, elle aussi. Tant de haine bouillait en elle. Et sous le regard de ce loup pervers elle sentait ce feu se changer en un brasier plus bestial et lascif. Vraiment perturbant. La louve se découvrait grivoise. Comme l'autre jouait son jeu, la brune aux yeux turquoises fit un pas de plus au sens littéral comme figuré. Elle réduisit l'espace entre eux pour venir presque coller sa truffe sous le menton du séduisant mâle -il était quand même bien plus grand-, et grimpa une marche dans la compétition sensuelle qu'elle avait lancé sans vraiment y faire attention. La façon qu'il avait de se mordiller la babine en laissant glisser son regard perçant sur elle provoqua d'autres picotements dans sa nuque. Heureusement pour elle, son épaisse tignasse de jais barrés de neige cachait cette petite preuve de faiblesse. Elle ne lui laisserait pas le loisir de comprendre qu'elle n'avait pas l'habitude et donc pas l'assurance qu'elle avait cherché à montrer. Ce serait le laisser gagner, et ça, il n'en était pas question. Alors, il fallait sur-enchérir.

« Quels principes ? »

Souffla t-elle en étirant les babines dans un rictus joueur. Non, elle ne serait pas la docile petite louve qui se laisse submerger par la manque de confiance en elle. Elle serait celle qui écrase par son culot.

Le mâle blanc posa sa truffe sous son menton dans un contact qu'elle sentit plus... Doux ? Une vague impression que la lutte entre eux venait de changer de dimension fit tiquer les oreilles de Sekmêt, qui s'agitèrent. Ils étaient monté d'un niveau. La rivalité s'était approfondie, comme muée en un véritable challenge de domination. Outre l'attirance charnelle, la femelle chocolat voulait lui imposait du respect. Pour continuer le jeu, il devait se montrer méritant. C'est l'idée que traduisirent les prunelles bleues comme les mers exotiques de l'Ex-Brethen lorsque le prêcheur ancra ses iris aux siennes. Etait-elle prête à la suivre ? A sacrifier sa routine morbide pour continuer cette partie d'échec ? Elle se sentait reine et le voyait comme un fou. Rieur, sarcastique mais diablement malin. Sekmêt pencha la tête sur le côté, de longues mèches de cheveux barrèrent fugacement son regard avant de couler vers son épaule en une cascade sombre. Il semblait retrouver son sérieux en l'invitant à le rejoindre. Mais que proposait-il au juste ? Voulait-elle réellement s'élancer dans une danse aussi ironique que voluptueuse ? Elle n'était même pas sûre de comprendre réellement les enjeux de la sollicitation du Zélote. Ou bien refusait-elle de l'assimiler ? Elle était adulte, elle était en chaleur, et surtout, elle avait lancé la machine de la séduction. Elle avait accepté de parier avec lui, frivole. Elle avait répondu à la joute pour se distraire. Pour se sentir vibrer quelques instants. Oui. Jusque là tout ceci était délicieusement captivant. Le mâle était attirant, attachant aussi d'une certaine manière, parce que même si elle cherchait à se voiler la face, elle ne pourrait pas nier qu'elle avait été loin d'être indifférente.

« Essaye. »

Les coins des babines de la brune se soulevèrent en un sourire railleur, elle le mettait au défi tandis qu'elle avançait d'un petit pas vers lui. Pour répondre à son attente sans toutefois le satisfaire pleinement. C'était un peu comme si elle avait fait la moitié du chemin vers lui, et qu'elle lui laissait encore le choix de renoncer, de se soumettre et de s'avouer vaincu. Le tensiomètre était monté d'un cran supplémentaire. Le pelage marron de la femelle frémissait, ses oreilles pointaient le mâle. Sekmêt le fixait, incapable de détacher ses yeux de ceux de son adversaire. L'atmosphère s'en trouvait électrifiée, vibrante de désir et de ce duel d'esprit dans lequel ils s'étaient jetés tout deux sans réfléchir.

C'était... Décevant. Il se détournait d'elle, la délaissait après avoir allumé un feu dans son ventre. C'était une sacré douche froide. Le museau de Sekmêt se plissa alors qu'elle découvrait les dents lentement, réellement vexée. Il lui tournait le dos, tant mieux, il ne la verra pas se jeter contre lui pour le renverser. A peine eut-elle cette idée que surpriiiiise ! Le blanc la prit de court et bondit dans sa direction, la poussa au sol en se positionnant au dessus d'elle. Il n'était pas brutal. La brune n'avait émit aucune résistance. Lorsqu'il s'auto-félicita de sa petite victoire, un léger rire secoua les cordes vocales de la femelle aux yeux clairs. Il donna un coup de langue délicat sur la joue de la louve chocolat, presque affectueux. Elle sentait sa respiration, chaude et humide dans l'air glacé de l'hiver, caresser son cou. Comme un souffle sur des braises encore rouges, l'incendie reprit dans tout son être et d'un coup de rein elle se redressa pour exercer une forte pression sur le poitrail du mâle pour le renverser à son tour. Une fois les rôles inversé, elle s'allongea sur lui, un sourcil haussé et un petit sourire au coin, tout en mimant la femelle naïve et outrée.

« Je ne suis pas une proie facile~ »

Puis elle posa sa truffe turquoise sur celle, bleu glacé, du mâle blanc. Contre son buste, elle sentait le rythme cardiaque de son prisonnier. Nouveau duel de regard avant que la femelle n'aille lentement mordiller l'oreille du Zélote. Elle en profita aussi pour expirer dans son cou, juste en dessous de l'oreille et croiser une dernière fois son regard avant de se relever, de sauter et de faire quelques pas de courses, un rictus moquer et paillard à la fois. Viens me chercher, ardent fils des Dieux.

Une pointe de satisfaction égaya ses prunelles claires quand il la rejoignit pour barrer sa retraite. Plus de détour, plus de fuite. Ils étaient désormais l'un face à l'autre, silencieux et bouillant à l'unisson d'un même sentiment dévorant. Le coeur de Sekmêt battait la chamade. Lorsqu'il effaça une dernière fois la bulle d'espace vital pour venir se coller contre elle, pour la serrer avec envie, la louve laissa échapper un grondement léger semblable à un ronronnement de félin. Elle s'appuya contre le poitrail du mâle et glissa le museau dans l'échine blanche du Zélote. Joueuse, toujours, tentée aussi, elle pinça légèrement la peau du cou entre ses crocs et mordilla. La présence du bicolore s'estompa contre son dos et elle se retourna pour enracinées ses prunelles turquoises, scintillantes de convoitise. Elle se consumait de tentation. Désormais la partie était terminée. Et clairement, elle ne pouvait pas gagner. Son corps exigeait l'étreinte viril et sauvage que le loup suggérait. Le compliment qu'il lui fit acheva toute résistance qu'elle aurait pu encore soumettre. Peut-être parce qu'elle avait trop peu l'habitude de se sentir ainsi valorisée. Ses joues chauffaient comme une adolescente qui découvrait ses hormones en ébullition pour la première fois, totalement exaltée.

« Et toi diaboliquement séduisant. »

Elle ne put qu'avouer son trouble, sa faiblesse face à lui, dans un regard fiévreux, presque passionné. Mais elle ne s'avouait pas vaincue pour autant, et avant de le laisser savourer son triomphe, lorsqu'il posa sa truffe contre la sienne, elle se coula sous lui, prenant les devants pour attiser le feu une dernière fois. Une seconde fois, elle monta le museau vers sa gorge et mordit sans trop serré. Elle voulait qu'il accepte de ne pas être complètement maître, qu'il accepte de ne pas être l'absolu dominant, qu'il accepte de se laisser aller le plus simplement du monde à son instinct naturel.

L'étreinte était douce, vibrante, et apaisa toute cette tension retenue dans les muscles de la femelle chocolat. Finalement, il s'avéra que la mère indigne qu'il l'avait lâchement abandonné sans un mot après l'avoir traitée toute sa jeunesse comme un trésor avait raison. Cet acte pouvait être quelque chose suave et délicieux. Réconfortant aussi. Autant que fatiguant en fait. Tant d'énergie dépensée dans une union pourtant si calme. Un vague sourire étirait les babines de Sekmêt. Elle apprécia que le mâle blanc reste auprès d'elle, elle savoura qu'il s'allonge tout contre elle et qu'ensemble ils reprennent leur souffle. Ses prunelles turquoises suivirent les nuages de vapeur produit par leurs expirations qui s’élevèrent vers la voûte céleste. Et puis alors qu'elle fixait ce plafond infini, le menton posé sur les pattes du Zélote, de petits flocons vinrent virevolter autour d'eux et elle réalisa. Ce moment passé avec lui, à le chercher, à le séduire, à s'échapper pour mieux revenir vers lui, et surtout, à se laisser captiver, enjôler, envoûter par lui... Ces instants précieux à l'écart du monde lui avait aussi permis de lâcher prise, de libérer toute la rancoeur et la haine qui tourbillonnaient en elle depuis tant d'années ! L'orage qui grondait continuellement dans l'esprit de la louve aux cheveux de jais méchés de blanc s'était éloigné pour la laisser tranquille. Cet inconnu avec qui elle venait de partager un acte probablement inconsidéré avait eu la capacité de faire taire la colère enfouit au plus profond d'elle. Et pour ça, elle devait se montrer reconnaissante, même s'il ne pouvait pas imaginer l'ampleur de cette gratitude.

« Merci, mon ardent zélote. »

Parce qu'il avait accepté son jeu sans forcément en contrôler chaque étape, il était sien désormais. Tout comme elle acceptait de lui appartenir le temps d'une journée qui se finit. Elle n'était pas docile, elle ne se laisserait pas museler pour un mâle. Par contre, elle ne niait pas le fait qu'elle avait désormais une réelle intrigue et une certaine attirance pour lui, et que cela induisait qu'il pouvait se satisfaire d'avoir fait une conquête de plus -après tout, elle le savait égrillard et coureur de jupons, alors même qu'elle n'était pas sûre de son nom-, elle espérait pouvoir garder sur le prêcheur des Dieux une certaine ascendance. Ils s'appartenaient mutuellement tout les deux. Et même si elle ne comptait pas le laisser en profiter, Sekmêt n'allait pas hésiter à le revendiquer jalousement comme lui appartenant. Pas vraiment comme un compagnon, l'idée même de rester proche de lui ne lui effleurait pas l'esprit, plus comme... Une possession, simplement. Elle n'imaginait pas son quotidien bouleversé. Certes il lui avait offert du très bon temps, une certaine rédemption aussi, puisqu'elle parvenait à reléguer les mauvaises choses de sa vie à un second plan, mais elle supposait que chacun retournerait à sa petite vie tranquille sans trop tarder. Elle le croiserait sûrement de temps en temps, après tout, il vivait dans la même meute, peut-être même qu'elle irait le saluer, ou pourquoi pas, plus sournoisement, elle irait le chatouiller de son ironie avant de repartir dans l'ombre de son existence morne et sombre qui lui convenait parfaitement. Il avait été, serait peut-être encore, une distraction. Très douce, très passionnée, très captivante.

Trop pour être sain, trop pour ne pas être risqué, trop pour ne pas l’anéantir si comme tout les autres il venait à soudainement la rejeter. Alors elle garderait ses distances, la tête haute, sans se laisser embarquer dans un voyage tumultueux. Elle avait trop souffert pour lui laisser une place autre que celle de distraction, de jouet. Pourtant le coeur de pierre que la louve chocolat aux yeux couleur mers du sud était forgé semblait fragilisé, attendri. Un peu. Sekmêt serra les crocs et inspira. Non. Il n'y aurait rien de plus. Elle acceptait de passer quelques instants encore, collée à lui pour se délecter du contact rassurant et réchauffant du mâle. Elle finit par baisser les yeux vers lui, sans redresser la tête. Elle l'avait pris pour un dragueur misogyne et dominateur, elle s'était un peu trompé. Sekmêt lui sourit. Profitant encore un tout petit peu ce qu'elle se refusait d'ordinaire. Grâce au ciel, le nom de son bel inconnu lui revint enfin en mémoire. Ça aurait été un comble quand même, de se taper un charmant couillon sans connaître son patronyme, non ? Sans y faire attention, sa voix suivit le fils de ses pensées et elle murmura d'un ton lointain et presque... rêveur :

« Both... »

Surprise d'avoir laissée échappé cela, elle se redressa et le fixa, dans un mélange de curiosité et de crainte, qu'elle masqua comme elle pu par un minois plus sérieux. S'il se permettait le moindre commentaires déplacé, elle le mordrait, pour de vrai cette fois.

Heureusement pour lui, il n'y eu pas de sourire taquin ou de blague inappropriée sur la réflexion qu'elle avait eu. Il semblait n'avoir même pas remarqué le ton presque émotif de Sekmêt. Bien. Tant mieux. Mais du coup, il fallait trouver quelque chose à répondre, il lui fallait une idée vite. Et la première chose qui lui passait par la tête fût une question aussi banale que :

« T'as dja une famille ? »

Non pas qu'elle avait un réel intérêt pour une hypothétique compagne. Quoi que. Savoir qu'elle pouvait être un instrument de destruction de foyer lui procura une espèce de satisfaction malsaine. Oh oui, elle pourrait s'échiner à ça, à réduire son couple -si toutefois il en avait un- à néant. Juste histoire de la garder pour elle, pour son petit confort personnel. Pour son plaisir à elle. Parce que sans parler sentiment, la compagnie du Zélote était vraiment appréciable. Puis, son cerveau commença a enchaîner les idées tels que couple - compagne - famille - morveux - chaleurs - catastrophe. Les yeux turquoises de la louve chocolat s'arrondirent alors qu'elle fixait ses pattes. Une moue vint plisser son museau couturé. Elle ne voulait pas de chiards. Pas de lardons à s'occuper. Elle n'avait pas l'étoffe d'être mère. Elle n'avait pas la carrure pour ça et ne le voulait pas, pas avec le modèle chaotique de sa génitrice. Dès que possible elle irait voir un guérisseur pour régler le soucis. Oui. Et puis si ça se trouvait, elle s’inquiétait pour rien. Ptetre bien que les moutards n'existeraient pas. Oui, c'était plus logique. De toute façon c'était sa première fois. Ca ne pouvait pas arriver la première fois... Bien sûr que si. La naissance de ses frères aînés en étaient le parfait exemple ! AH MAIS OUI. Ether avait eu des mioches y e quelques semaines. Au pire, Sekmêt lui refourguerait sans hésitations. Clairement, non, elle ne pouvait pas être mère, de toute façon. Il n'y avait aucune raison que Both lui ai filé des gamins, après tout, il était quasi-hermaphrodite non ?

« Tu vas devoir me supporter maintenant. »

Un rictus goguenard étira les babines de l'Ex-Brethen. C'était une constation qui sonnait presque comme une gentille menace. La louve tourna le museau vers le blanc et lui donna une lèche sur le museau.

Il évitait son regard. Les oreilles de Sekmêt s'affaissèrent en arrière, disparaissant sous une montagne de cheveux noir zébré de neige. Le poil de son échine gonfla un peu. Both n'était-il donc qu'un lâche pour ainsi regarder obstinément ailleurs ? La réponse tardait, laissant à la louve le temps d'imaginer pourquoi un tel malaise... Il avait donc potentiellement une femelle, une pauvre et fragile compagne qu'il ne souhaitait pas blesser peut-être ?! Alors pourquoi fôlatrer ailleurs ? Les mâles étaient tous des pourris. Tous. Tout son corps soudain, voulait rejeter ce contact, mais avant que la brune n'esquisse un mouvement, le Zélote retrouva ses prunelles bleues comme l'océan tropical et se détacha d'elle. Etait-il... Gêné ? Sekmêt retint un grondement dans sa gorge. En l'espace d'une fraction de seconde, son instinct de conservation, ou du moins celui qu'il restait à son coeur en miette, lui intimait de partir, loin. Très loin, avant que ce loup blanc qui était parvenu à ébrécher son armure de haine ne réduise poussière ce rempart qu'elle avait mis tant de temps à ériger autour de ses émotions. C'était dommage, elle avait été si bien avec lui. Calme et apaisée. Il avait tout gâché ! Il s'offrit le luxe d'une seconde chance, pourtant. Il avouait ne pas être libre. Ou du moins, pas complètement. Il ne s'agissait que d'une copine, pas d'une compagne. Bien. Tant mieux d'ailleurs. Ascenseur émotionnel bonjour. Rez-de-chaussez je vous prie.

Les oreilles de la louve couleur terre inspira, forçant son cerveau en ébullition à se reprendre, à retrouver un semblant de sérénité. Une question en suspens, suivit d'une autre. Elle l'aurait volontiers prit comme un signe de faiblesse, mais il s'avérait que cette requête là lui faisait plaisir. Et comme Sekmêt ne se considérait plus comme faible, forcément, Both ne pouvait pas l'être pour cela. Le regard de l'Ex-Brethen se fronça. N'empêche qu'il s'était retenu de poser la question qui lui brûlait les babines ! Que n'avait-il pas osé lui dire ? Sa mine renfrogné, ou du moins sa façon de souffler bruyamment décocha tout de même un petit rire à la femelle. On aurait dit un enfant mécontent et boudeur. Finalement la colère habituelle qui avait inondé son être disparue aussi vite qu'elle était revenue. L'effet tranquillisant que le disciple des Dieux avait sur elle était inattendue mais positivement surprenait. Etait-elle encore capable de tisser des liens affectifs ? Ne serait-ce qu'amicaux ? Non. Elle s'y refusait. La proximité sentimentale ou amicale n'apportait que les ennuis et la souffrance. Elle n'en voulait plus. Jamais. Et pourtant...

« C'est de l'ordre du réalisable... »

Le sourire de la louve couturée s'effaça a demi.

« Si tu finis ta question. »

Both provoquait en elle de l'agacement, des doutes, du désir évidemment -quoi qu'en veille pour l'heure-, mais aussi une certaine forme de tendresse qu'elle se refusait à voir et accepter. Sa vie était un champ de bataille qu'elle avait laissé en état, ignorant volontairement les pattes tendues qui aurait pu lui permettre d'y mettre de l'ordre... Trop de chutes, parfois, ne permettent plus de se redresser correctement...

Sekmêt sentit le compliment glisser avec délice le long de son épine dorsal sous la forme d'un léger frisson. Elle ne retint pas le sourire a la fois satisfait et joueur qui en découla. Alors il comptait la revoir, il espérait passer du temps en sa compagnie, il souhaitait qu'ils n'en reste pas là... Si la demande était plaisante, rassurante aussi dans un sens, la louve chocolat ne sut trop que répondre. Il n'était pas du tout dans ses prochains de s'attacher ou de sympathiser avec qui que ce soit. D'autant plus qu'elle faisait tout pour éviter de se lier à d'autres loups. Both avait un certain ascendant sur elle. Il la mettait dans un état instable, il la faisait se sentir plus vivante, il provoquait chez elle un séisme de remise en question et lui faisait, l'espace de quelques minutes, friser le bonheur simple d'une compagnie agréable. C'est finalement en haussant les épaules, jouant les femelles indomptables, que la brune répondit :

« Peut-être que je pourrais t'accorder du temps. Oui... J'imagine que oui. »

Sekmêt se redressa après avoir donner une lèche sur le museau du blanc.

« Il faudra déjà que tu me retrouves. »

L'Ex-Brethen offrit un sourire, réel et sincère cette fois-ci, au mâle Zélote. Puis, sans un mot de plus, elle fit quelques bonds pour s'enfuir dans le soleil couchant. Elle voulait se retrouver seule, avec elle-même pour réfléchir, analyser et comprendre ce qu'il s'était passé avec le disciple de Mido, ou d'Ao, elle n'en était pas sûre... Elle avait besoin d'imprimer les dernières heures pour assumer ou non la possibilité de recommencer une vie sociale. Elle avait juré pourtant qu'on ne l'y reprendrait plus... La vie donnait tant d'opportunité finalement, que peut-être Sekmêt pouvait imaginer trouver la paix intérieure. la louve ricana. Ouais non. Elle n'y croyait pas trop. Mais en tout cas elle croyait en Both et en la sensation de quiétude qu'il avait apporté avec lui. Sekmêt s'arrêta et regarda en arrière, son épaisse tignasse voletant autour de sa tête à cause de la brise hivernale. Elle chercha Both dans la paysage et sourit quand elle trouva sa silhouette masculine. Et disparue pour le reste de la journée.