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Sujet: Décider de son chemin | Winnifred Ven 29 Sep 2017, 08:31
L'aube était grise, pâle, froide. L'été avait bien rapidement laissé la place aux prémices de l'automne, apportant sur ce continent tout nouvellement dessiné la pluie, le brouillard, et la grisaille si triste qui caractérisait la fin de la belle saison. Ou peut-être ne voyait-il lui que cela car une sorte de pessimisme profond s'était emparé de lui. Esterno était mort. Sa famille, sa si belle famille, avait été brisée. Il lui était presque ironique de penser que certains devaient murmurer dans son dos qu'il était un privilégié des dieux car deux de ses enfants avaient été choisies à la tête des deux grandes meutes du continent. Ceux qui disaient de telles choses étaient sans nul doute ou bien dépourvus de famille, ou bien dépourvus d'amour. Il n'y avait pas de choix plus difficile pour un père que de devoir choisir entre deux de ses enfants. Diriger ses pas vers l'un signifierait renier le second. Ne rien choisir du tout était une option tentante bien qu'empoisonnée. Ne rien choisir du tout, c'était trahir les deux bords. Un soupir secoua son grand corps, et il fit rouler d'un mouvement un brusque de la patte une pierre parmi les gravats.
Peut-être était-il venu jusqu'aux Ruines Blanches car leur sort avait été celui de son existence. Brusquement, tout s'était effondré, et il ne restait que des miettes de sa grandeur passée. Il avait espéré parvenir à distinguer malgré les dégâts les contours des couloirs familiers qu'il avait tant arpenté, surtout aux côtés de son frère Agravain et de sa douce compagne Winnifred. Peut-être la teinte un peu décolorée par la poussière des salles où il s'entraînait, de celles qu'ils avaient explorées avec la belle louve dans leurs douces promenades à l'arrière-goût d'aventure. Mais non. Il ne reconnaissait plus rien dans le monticule de pierres brisées et de murs effondrés qui se dressaient désormais à l'endroit où, auparavant, se dessinaient les contours majestueux du plus beau de leurs territoires. Il marchait donc sans but, la gorge serrée et les cheveux un peu défaits. Cela faisait quelques jours qu'il n'avait pas rattaché son chignon, preuve de plus que quelque-chose n'allait clairement pas. Sa cape de Chevalier lui battait les flancs en silence, éternelle compagne de route qui avait elle-aussi mal vécu la dernière bataille. Certains de ses coins avaient été légèrement brûlés par la magie dont on les avait dotés pour combattre Cronos, l'effondrement l'avait tâchée de poussière, déchirée même à quelques endroits. Il ne se sentait plus aussi fort qu'auparavant. Il avait surmonté avec Agravain la première grande déchirure dans son existence et ils avaient trouvé la force de recommencer une nouvelle vie. Ils avaient rencontré des loups exceptionnels qui les avaient guidés sur le droit chemin.
Mais aujourd'hui, pour la première fois, il ignorait s'il aurait la force de recommencer de la sorte. Il avait vécu de si belles choses, des choses si fortes, à la tête des Brethens. Désormais, quel que soit le choix qu'il ferait, une part de lui-même s'en voudrait de ne pas avoir fait de choix différent. Cela sonnait de bien mauvais augure pour un nouveau départ. Ils n'avaient évoqué le sujet de leur prochaine allégeance que très vaguement avec Winnifred. Il aurait aimé que le temps s'arrête, qu'il n'y ait pas cet impératif divin de choisir au plus vite une meute à laquelle se raccrocher. La lueur rouge brillait toujours à son épaule, mais il savait que le temps en était compté. Il le sentait. S'il ne rejoignait pas la meute du Grizzli, un beau matin il s'éveillerait avec cette lumière éteinte, et son arc redevenu des plus communs. Il serra les dents, et lança un grognement rauque. Mélange de tristesse et de frustration, face à un destin qu'il ne maîtrisait plus du tout.
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Sujet: Re: Décider de son chemin | Winnifred Sam 30 Sep 2017, 15:07
Winnifred
Peu de temps après avoir rencontré le prêtre nommé par Yurai, Sarcan, Winnifred s'était enfermée dans un mutisme total, ponctué de quelques sanglots déchirants. Son visage, criblée de minuscules ridules, semblait constamment sur le point de se fendre en une grimace de désespoir. Elle ne ressemblait plus à la jeune Winnifred, bien que son âge n'était pas suffisant pour la classer parmi les doyennes. Sa douceur ne l'avait pas quitté, et c'était miraculeux, car sans cette tendresse caractéristique de Winnie, il deviendrait impossible de la supporter. Non seulement elle avait les méninges sans cesse tourmentés à cause de ce dilemme cornélien, mais en plus elle devait garder la tête froide pour ses enfants. Ils grandissaient, d'ailleurs, à une vitesse impressionnante. Ils n'étaient plus des enfants, et quand Winnifred se leva pour sortir de la tanière dans laquelle sa petite famille avait dormi, en terre libre, elle décida qu'elle devait couper peu à peu le cordon avec ses enfants. Elle embrassa chacun de ses petits sur le crâne, et ordonna, de façon douce, à Gloriel de veiller à ce qu'il n'arrive rien à Korra et à Alys. Elle ne l'ajouta pas, mais elle pensait à bien insister sur le fait de protéger Korra. Elle semblait si fragile, comme si une brise pouvait l'emporter, tandis que ses deux garçons étaient les dignes fils de leur père : robustes, grands et déjà bien courageux.
Elle sortit alors d'un pas traînant, humant l'odeur si familière de Méléagant, pour le retrouver. Il y avait fort longtemps qu'ils n'avaient pas passé un moment à deux et il lui manquait. Méléagant avait été son seul pilier, sa seule famille. Il représentait, à ses yeux, tout ce dont elle avait besoin. La force et le courage qui lui manquait, elle était frêle, une véritable proie dans le corps d'un prédateur. Elle revit alors le visage tendu de son père, lui répétant qu'elle n'était qu'une biche qui ne méritait que d'être chassée, qu'elle était, certes, belle mais c'était tout ce qu'il la sauverait, aux yeux paternels. Elle secoua la tête pour chasser ses idées, et ses longues mèches blanches fouettèrent son visage. S'ils n'avaient pas été blancs dès sa naissance, Winnifred se serait inquiétée de voir la blancheur s'installer dans sa crinière. Ses pas la menèrent aux Ruines Blanches, vestige d'un passé qui lui tenait tant à cœur. Le Palais avait été un abri, dans lequel Méléagant et elle s'étaient aventuré pendant leur jeunesse, à l'aube de leur amour. Elle aperçut sa silhouette musculeuse au loin, ses cheveux noirs lâchés. Depuis quelques temps, elle avait remarqué qu'il avait défait son chignon d'habitude si bien réalisé. Il semblait ne plus être le même et elle imagina avec douleur ce qu'il devait ressentir. Il avait perdu son statut de lieutenant, son ami et chef Esterno était mort, et Agravain ne donnait plus signe de vie, malgré leur fraternité. Elle se mit à sourire ironiquement, au moins, il lui restait sa compagne et ses enfants dont deux occupant de hauts postes. Mais sa propre vie ne tenait qu'à Méléagant et à leurs petits, alors elle haussa les épaules et s'avança vers son amant. Elle frôla son corps et leurs poils se mêlèrent ensemble. Sa douce odeur lui envahit les narines et elle se serra contre lui, tête baissée, le regard absent de toute joie. Elle resta ainsi un moment et releva la tête afin de regarder son gentilloup.
"Mon amour, vous m'avez tant manqué."
Elle s'assit, son regard couvant avec amertume les ruines qui s'étendaient devant eux. Le Palais n'avait de palais que le nom, le souvenir. Elle soupira, longuement, et son cœur se serra, les larmes lui montèrent aux yeux et elle ne put s'empêcher, une fois encore, de sangloter amèrement. Elle avait perdu sa stabilité, sa meute, ses amis, ses habitudes, ses terres et elle avait l'impression de perdre ses deux filles aînées en devant choisir l'une ou l'autre. Ou aucune en rejoignant les Nakhus ou en vivant en solitaire. Mais cette dernière idée la fit frissonner, elle n'était pas faite pour vivre comme une solitaire, elle avait besoin de la sécurité et du réconfort d'une meute, pour elle et pour ses petits. Alors qu'elle pleurait à chaudes larmes, elle bredouilla des paroles que seul Méléagant pouvait comprendre, grâce à leur complicité sans faille :
"Je ne sais choisir, je suis incapable de choisir. Anastasia, ou Élaine ? Comment les Dieux peuvent nous imposer un tel choix ? Trois choix s'offrent à nous, mon adoré, et dans tous les cas, je souffrirais."
Elle avait débité ses paroles avec une vitesse inhabituelle. Elle se sentait mal, elle sentait la nausée lui monter dans la gorge, elle était incapable de s'arrêter de penser à toutes ces souffrances à venir. Son mal-être recouvrait peu à peu la fierté qu'elle éprouvait pour ses filles. Si elle partait chez les Etelkrus, Anastasia verrait ceci comme un affront personnel. Si elle partait chez les Lazulis, Élaine interpréterait son choix comme une trahison, et Winnie ne pouvait imaginer leurs deux petits cœurs qu'elle avait entendu, senti battre dans son propre corps pendant sa grossesse se briser. Cascade intarissable, les yeux vairons de Winnifred étaient plissés et bordés de larmes. Son corps la faisait souffrir et son ventre semblait noué. Elle plongea son visage dans le cou de Méléagant. Ils devaient parler de ce problème, de ce choix cornélien pour que leur avenir soit commun. Et pourtant, elle appréhendait de lui parler de sa possibilité de rejoindre les Nakhus. Il ne pourrait pas la suivre, mais ils pourraient se voir, Sarcan lui en avait fait la promesse. Mais la simple idée de passer ses prochaines nuits seule dans une tanière l'effrayait. Elle renifla timidement, gênée par cet excès d'émotion, mais toutefois, elle savait qu'elle pouvait exploser de la sorte avec Méléagant. Il la connaissait, et il ne la jugerait jamais. Elle n'était plus sûre de rien, elle ne savait plus rien. Juste une seule chose, elle aimait de toute son âme Méléagant.
Ehnala » Coriace
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Sujet: Re: Décider de son chemin | Winnifred Mar 10 Oct 2017, 11:33
L'odeur douce de sa compagne et sa présence chaleureuse précéda le son de sa voix. Il releva la tête vers elle au bruit léger de ses pas et accueillit sans résister son étreinte. Malgré la situation qui lui pesait terriblement sur le coeur, il ne pouvait s'empêcher d'éprouver encore à chacun de leurs contacts ce léger frisson, ce battement de coeur un peu plus fort, cet amour qu'il n'avait jamais cessé d'éprouver pour elle. Maintenant qu'Agravain s'était fait plus distant et presque disparu, que leurs filles avaient été éloignées d'eux par la volonté divine, qu'Esterno avait rejoint leurs ancêtres, il réalisait d'autant plus combien elle était importante pour lui. Combien il avait besoin de sa présence au quotidien, même privé de ces moments uniquement à deux, de sa présence qui était comme un phare dans la nuit dans laquelle ils avançaient. Il posa le museau avec délicatesse sur les longues mèches blanches de sa dame, ressentant sa tristesse et son déchirement presque autant qu'il ressentait les siens.
"Vous aussi ma Dame." Répondit-il doucement, avant de la laisser s'échapper lorsqu'elle se décala pour s'asseoir.
Son coeur se fendit lorsqu'elle éclata en sanglots, exprimant tout haut le chagrin et le dilemme terrible qui les rongeait depuis la création des nouvelles meutes. Il baissa légèrement la tête, et finit par se rapprocher d'elle pour l'attirer contre lui. Dans une sorte de réflexe, une envie de la consoler et d'alléger le chagrin qui pesait sur ses frêles épaules. Ils avaient vécu l'immense bonheur d'une grande famille, et désormais il semblait que les dieux voulaient leur faire payer bien sévèrement la rançon de ces années heureuses. C'était sans doute très égoïste comme pensée, car le sacrifice de leur famille avait permis de ramener la paix et un semblant d'harmonie sur leurs terres rongées par le flou et la terreur. Mais il ne pouvait s'empêcher d'en vouloir au destin, d'en vouloir aux instances divines qui avaient choisi d'éclater leur petite harmonie à eux, de mettre leur bonheur sur l'autel noble de la paix universelle. Elle résuma admirablement ce qui se présentait à eux comme choix tiraillants. Aucun ne serait le bon, tous lui apparaissaient plus mauvais les uns que les autres. Il avait la sensation que plus il y songeait, plus il s'enlisait dans quelque-chose dont il ne sortirait jamais indemne. Lui qui avait toujours eu une sorte de maîtrise de ses choix et de son avenir, il était perdu au milieu de ce choix impossible aujourd'hui. Avec le maigre réconfort de se dire qu'il n'était pas seul dans cette situation.
"Je vous comprends.... J'ignore complètement quel chemin nous devons prendre." Souffla-t-il d'une voix blanche, les paupières serrées.
Alors qu'il prononçait ces mots, quelque-chose le fit tilter. Un détail insignifiant sur le coup, mais qui le frappa avec violence. Winnifred n'avait pas dit "nous". Il n'avait pas envisagé une seule seconde auparavant qu'ils prendraient des décisions différentes, qu'ils sépareraient le chemin qu'ils suivaient depuis de longues années désormais. Apparemment, elle y avait pensé. Et ce fut sans doute cette constatation qui le blessa le plus, tout au fond de lui-même. Un frémissement parcourut ses babines, et il serra plus fort les paupières pour ne pas céder à la vague de tristesse qui inondait son esprit. Il fallut quelques instants avant qu'elle ne passe, qu'elle ne vienne stagner dans ses pensées, et qu'il puisse de nouveau ouvrir ses prunelles claires et parler d'une voix qui ne trahirait pas ce qu'il venait de ressentir. Il avait la sensation que quelque-chose menaçait de se briser au fond de lui, à la simple pensée qu'elle songeait à partir seule. Mais pour une fois, il se garda bien d'exprimer sa pensée. Comme si le fait de le dire pourrait soudainement concrétiser cette pensée, mais que la taire en ferait à jamais une simple possibilité jamais réalisée.
"Maintenant que les Brethens ont disparu, je ne sais nous reconnaître tous deux dans ces nouveaux clans que nos filles guident désormais." Lui confia-t-il. "Je jetterais bien volontierz mon allégeance divine se cela permettait de ressouder notre famille. Mais c'est impossible, hélas."
Il eut une pensée pour Athelstan, qui avait dès le premier jour suivi Elaine. Une première trahison pour Anastasia, sans aucun doute. Il n'avait jamais vu sa fille comme une personnalité explosive, mais il redoutait presque ce qu'elle deviendrait si l'on provoquait sa rancune. Sa froideur cachait peut-être quelque-chose de bien venimeux, et même l'amour et la fierté qu'il éprouvait pour elle ne parvenaient pas à cacher cette réalité. Mais quel que soit le choix, il savait qu'il serait haï par l'une de ses filles. Peut-être renié par son fils aîné également, s'il choisissait de rejoindre Anastasia. Quel choix impossible on leur imposait là. Pour lui, la voie la plus logique était celle des Etelkrus. Il y rejoindrait à la fois une partie de sa famille, et garderait intacte la fidélité qu'il avait jurée à Aka. Les dieux qui veillaient sur les Lazulis prônaient des qualités tout à fait respectables, mais aucune ne saurait lui convenir. Cette triste réalité lui fit réaliser combien il serait compliqué pour lui de faire ce choix, malgré l'ombre d'Anastasia. Restait à choisir entre rejoindre Elaine ou ne rejoindre personne. Là encore, les enjeux restaient semblables. Peut-être pires mêmes, maintenant qu'il avait entamé une trahison en renonçant à l'un de ses enfants.
Oysteria » Habitué'
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Sujet: Re: Décider de son chemin | Winnifred Mer 18 Oct 2017, 22:14
Winnifred
Pendant une simple seconde, Winnifred avait cru apercevoir un frisson, peut-être de tristesse, passait sur le visage de son cher et tendre époux. Il avait refermé ses doux yeux bleus, sûrement pour mieux capituler la douleur d'être au milieu d'un dilemme cornélien. Il ne fallait surtout pas sombrer. Elle baissa la tête pour observer les Ruines sous leurs pattes. Tout ça était à cause de Cronos. Elle regarda vers le ciel, là où il se tenait il y a plusieurs lunes, et elle maudit intérieurement ce Dieu du chaos, qui avait séparé leur famille, sa famille par envie, par désir de vengeance, par rancœur. Tout l'amour que Winnifred s'était évertué à créer s'était dilapidé. Comble de tout, ses deux filles aînées s'étaient retrouvées arrachées au cocon familial. Aux yeux de Winnifred, Anastasia et Élaine étaient toujours ses filles, ses bébés qu'elle avait senti lors de leurs premiers mois de vie intra-utérine, elles étaient toujours les deux petites louvettes qui jouaient, galopaient, grognaient avec leur minuscule voix aiguë. Et pourtant, maintenant elles étaient toutes deux Alpha, presque reines d'un royaume hérité par les Dieux, la providence leur était apparue comme une évidence, et à présent, leurs parents, leurs frères et sœurs étaient divisés, mis devant le fait accompli avec seulement trois choix, tous plus durs les uns que les autres. Winnifred ferma les yeux pour laisser échapper une larme au creux de son œil. Elle songeait avec douleur que la solution qui lui plaisait le plus était de rejoindre les Nakhus, de se plonger corps et âme dans la religion et l'adoration de Yurai, son travail de mère et d'épouse accompli. Et si tous les loups étaient régis par une loi indicible, invisible ? Peut-être était-ce la clé de son bien-être, la vie dans la religion ne la rebutait guère, elle aimait Yurai comme une mère, comme une sœur qui comprenait tous ses maux, tous ses doutes et qui avait toujours su la conseiller au mieux. Mais à présent, Yurai avait apposé une condition : pas de mari, pas d'enfants non-porteurs de sa couleur fétiche. Elle fixa le bracelet où la pierre incrustée renfermait le précieux liquide violine. Elle pourrait le briser, et vivre comme solitaire, loin des conflits sororales, et observer tout ce petit monde avec du recul. Mais elle savait, au fond d'elle-même, qu'aucune de ses filles ne la laisserait dans l'inconfort et l'insécurité des solitaires. Elles finiraient par se battre pour récupérer leur pauvre mère, et les querelles commenceront.
Ses longs cheveux blancs tombant autour d'elle telle une cascade d'eau pure, elle redressa la tête, une lueur d'espoir dans les yeux. Elle se blottit contre Méléagant et l'embrassa tendrement, perdue dans ses pensées. Elle repensa à leur première rencontre, à ce froid innommable qu'ils avaient parvenus tous deux à braver avec la chaleur d'un amour naissant. Et puis la première grossesse, son regard brillant, fier d'être bientôt Père. La naissance de ces magnifiques enfants, la première portée, un mâle et deux petites femelles. Ils avaient tous deux éprouvé une immense fierté, un bonheur incommensurable, et toutes ces sensations merveilleuses redoublèrent à la naissance de ses trois derniers trésors. Ainsi que l'adoption de Mayuri, petite chose aveugle perdue dans ce monde de fou. La petite avait beau ne pas être biologiquement sienne, Winnifred la considérait comme une de ses filles à part entière, la dressant entre Anastasia, Korra et Élaine. Elle dressa ses oreilles sur son crâne en l'écoutant, il partageait son opinion, la religion était très importante à ses yeux également et il se voyait mal renier Aka pour sa famille. Elle frissonna, la pensée tournée dans ce sens faisait froid dans le dos. Elle leva des yeux amers vers Méléagant, son chevalier servant, tendre mari.
"Vous aimez monseigneur Aka comme j'aime dame Yurai, je ne saurais la renier... mais... Nos enfants, Méléagant, nos trésors, et puis... nous... Qu'adviendra-t-il de nous si nos chemins se séparent ? J'ignore encore comment j'ai pu respirer avant d'avoir croisé vos yeux plus bleus que l'azur des cieux. J'ignore comment j'ai pu vivre en votre absence. Je ne saurais vous perdre."
Sa voix était tremblante, elle parlait doucement, sur le ton de la confession. Elle jeta son regard vers l'horizon. Quelle tristesse. Quel dilemme. Elle ne savait quoi faire, qui suivre : Anastasia, qui avait la grâce de certains dieux qui auraient pu lui convenir, Élaine, dont les maîtres mots de la meute étaient force, détermination, agilité d'esprit et de corps, ou alors Sarcan, le prêtre des Nakhus qui lui avait tant apporté quand elle était allée prier. Elle remua la tête, les larmes s'écoulèrent une fois de plus, la tristesse redoublait, son pauvre cœur se serrait sans cesse.
"Rejoindre la déesse à laquelle j'ai prêté allégeance me tente grandement, nous pourrions nous voir, le prêtre m'a assuré que les terres Nakhus seraient libres si les visiteurs ne causent pas d'ennui. Nous pourrions nous voir, tous, sur un territoire neutre."
Elle s'étrangla en prononçant ces mots, chaque parole étant une blessure de plus, une griffure se formant avec lenteur. Elle se serra contre lui, et continua sa tirade sanglotante :
"J'aimerais vivre avec vous, mais je ne saurais renier dame Yurai. J'aimerais que tout soit simple, que nous puissions garder nos allégeances divines et vivre à nouveau tous ensemble. Au moins, vous et moi. Nos enfants grandissent, ils deviennent des adultes responsables, emplissant mon cœur de fierté jour après jour. Ils n'auront plus besoin de leur maman."
Une nouvelle tristesse l'affligea subitement : la peur de mourir. Elle se voyait déjà sur son lit de mort, ses enfants réunis -ses petits-enfants également, espéra-t-elle- pour la première fois depuis des lustres, elle s'imaginait rendre son dernier souffle, entourée de tous ceux qui avaient compté à ses yeux. Elle redoubla de larmes, le flot intarissable la faisait hoqueter, sa peau se contractant avec raideur, des spasmes agitant son corps maigre. Elle voulait dire quelque chose mais les mots restaient bloqués dans sa gorge, alors dans un ultime geste de réconfort, elle se mit à faire les cent pas, douloureuse et pensive, tentant de se calmer, en vain, afin de ne pas aggraver la douleur de son cher et tendre.
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Sujet: Re: Décider de son chemin | Winnifred Mer 25 Oct 2017, 17:20
La rupture du contact entre leurs fourrures lui sembla brutale, soudaine, intolérable prologue à ce qui semblait se dessiner comme avenir pour eux. Chaque sanglot qui s'échappait de la gorge de Winnifred était un coup de crocs dans son coeur. Il détourna le regard alors que ses dernières paroles résonnaient encore et encore, à l'infini, au creux de ses pensées. S'il y avait pu y avoir un doute sur ce qu'elle sous-entendait, désormais tout était clair. Plus qu'une simple idée, sa douce compagne avait visiblement déjà choisi sa voie. Son coeur s'était serré lorsqu'il avait noté qu'elle n'avait pas compris ce qu'il voulait dire - jamais pour lui sa dévotion à un dieu ne serait plus forte que celle qu'il portait à ceux de son sang, et il avait voulu exprimer que si jamais briser son glowstick avait été la solution pour sauver sa famille, il l'aurait fait. Cependant, à l'heure actuelle, cela ne changerait rien. Qu'il aille vers un dieu ou un autre, quelqu'un serait déçu, trahi. Il eut du mal à rassembler ses pensées pour prendre une décision lui aussi. Inutile de se leurrer, il n'était pas le genre de loup que la déesse Yurai accepterait parmi les siens. Il n'était pas sage, pas comme la si belle louve qui marchait devant lui en gestes saccadés, et que le destin avait décidé de lui arracher. Il se sentait si vulnérable face à l'inéluctable. Leurs chemins étaient sur le point de se séparer. Ils y étaient arrivés, à ce point de non retour qu'il redoutait tant.
Sa gorge se serra et il ne put se résoudre encore à laisser échapper les mots qui scelleraient son destin. Il se sentait égoïste, à vouloir tant que sa compagne reste auprès de lui. A quoi rimerait sa vie, une fois qu'elle serait partie ? Il aurait ses enfants, certes, perles de son existence, mais rien ne remplacerait jamais Winnifred à ses côtés. Tant qu'à choisir, il savait déjà quelle meute il choisirait. Il portait déjà le feu d'Aka sur son épaule, à quoi bon l'abandonner puisqu'il ferait partie des seules choses qu'il lui resteraient ? Saleté de destin, saletés de dieux et leurs choix terribles qui rongeaient son existence. A la tristesse se mêlait une amertume qui, il le savait, ne saurait que trop vite se changer en colère. Alors ressurgirait le loup qu'il avait été, impulsif, brûlant de rancoeur. Il préférait ne pas penser à ce qui arriverait ensuite. Tout s'arrêterait au moment où il accepterait la proposition de sa douce - il n'avait pas le coeur à lui refuser cette faveur. Elle y avait réfléchi déjà, de toute évidence. Chose qu'il n'avait pas faite, dans une sorte de faiblesse qui le dégoûtait. Il avait repoussé l'échéance avec une lâcheté qui ne lui ressemblait pas. Au moins demeurerait-il dans l'esprit de sa belle comme un loup un peu plus brave, s'il n'affichait pas l'acide mélange de déception et de chagrin qu'il ressentait soudainement à cette constatation. Et Agravain qui semblait l'abandonner au moment où il aurait eu le plus besoin d'une oreille amicale et d'un remontant bien trop chargé. Il comrpit enfin la nostalgie qui brillait dans les prunelles des anciens lorsqu'ils évoquaient le bon vieux temps. Bientôt, très bientôt, elle habiterait les siennes tout autant.
"Il s'agit sans doute du choix le plus raisonnable." Dit-il finalement d'une voix rauque, le regard toujours posé sur les ruines et sans chercher à croiser celui de Winnifred.
Il savait que ce qu'il y trouverait ne ferait qu'accentuer sa peine, que ce soit un chagrin terrible, ou une acceptation qui lui serait encore plus dure à voir en face. Il baissa légèrement la tête et un frémissement parcourut ses babines claires. Les promesses du prêtre qu'elle avait évoquées lui semblaient creuses. Ainsi donc était-ce là l'ultime sacrifice qu'on demandait à sa famille pour le bien du monde. Oublier les nuits passées aux côtés de la silhouette gracieuse de sa compagne, de son parfum délicat, du bruit rassurant de sa respiration. Au profit de rencontres fugaces, qui seraient peut-être mêmes prohibées par sa meute. Une part de lui même n'avait cure de s'afficher comme un traître si tel était le prix à payer pour pouvoir revoir sa compagne. Mais jusqu'où cela pourrait-il les mener ? Il cilla plusieurs fois, et repoussa les larmes qui menaçaient de pointer au coin de ses yeux clairs. Il s'éclaircit la voix avec difficultés, et se fit violence pour chercher le regard de sa compagne. Il dressa pour un instant une barrière épaisse, mais ô combien fragile, autour de son coeur, se refusant à laisser les sanglots le tirailler avec la violence qui ne manquerait pas de les accompagner s'il y cédait.
"Le temps est donc venu de leur annoncer notre choix." Souffla-t-il, sans réussir à retrouver un timbre normal. "Et de... faire nos adieux."
Prononcer ces mots déchira quelque-chose au fond de lui. Le premier pas était fait, ça y est. Désormais, il n'y avait plus de retour en arrière possible. Il se redressa et jeta un regard profond à sa compagne. Un regard dans lequel il ne pouvait masquer la peine profonde qu'il ressentait, cette tristesse plus grande que ce qu'il avait jamais ressenti dans son existence. Il savait que la colère la supplanterait un jour, mais pour le moment il n'y avait que cet immense océan de chagrin dans lequel se noyaient ses pensées et sa volonté. A partir d'un instant qui était bien trop proche, il serait un errant sur ce monde, décroché par la force divine de ce à quoi il tenait le plus sur la terre. Et il ignorait s'il serait de taille à l'affronter.
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Sujet: Re: Décider de son chemin | Winnifred Sam 28 Oct 2017, 16:46
Winnifred
Quand Méléagant approuva que le choix de Winnifred serait le plus raisonnable, la louve aux longs cheveux blancs se stoppa net. Elle resta là, au milieu des Ruines, le regard vissé sur une pierre blanche qui gisait paresseusement sur le sol. Alors que son souffle se faisait plus régulier, plus doux, elle se sentit d'un seul coup submergée par une vague de tristesse et de douleur. Elle voulait tant hurler sa peine, libérer son estomac noué par l'anxiété, mais rien n'y fit. Méléagant, le père de ses enfants, venait de capituler sa décision, et son cœur se brisa. Même si elle n'espérait pas grand chose, elle imaginait cette scène autrement, elle aurait aimé que Méléagant la prenne contre lui, et qu'il la supplie de ne pas partir, de ne pas le laisser seul. Mais là, devant elle, son beau mâle avait les yeux rivés sur le sol, elle essaya d'accrocher son regard, en vain. Elle sentit une boule remuer en elle, comme si la coque d'un marron, couverte d'épines, allait et venait dans sa gorge. Elle sentit sa respiration s'accélérer, et sa vision se troubla, les larmes constituant peu à peu un voile opaque entre elle et le monde. Elle ouvrit la gueule, et regretta si fort d'être aussi douce. Elle aurait aimé hurler, grogner, lui asséner des méchancetés gratuites mais qui auraient peut-être soulager son cœur douloureux. Mais ça n'aurait servi à rien à part creuser un peu plus le fossé qui s'approfondissait entre eux. Elle plongea son regard sur ce fossé imaginaire, au fond, le néant. Elle releva la tête et retourna sa tête violemment, n'osant pas regarder Méléagant. Et quand il reparla encore, la boule d'épines dans sa gorge explosa, et son ventre, déjà bien noué, semblait se recroqueviller pour ne ressembler qu'à un caillou. Notre choix ? répéta-t-elle dans son esprit tourmenté. Elle pleura, silencieusement, cette fois-ci, et resta dos à son mâle. Elle pleurait tant qu'elle avait l'impression que ses larmes devenaient des griffes acérées, ses yeux la brûlaient. Elle se tourna vers Méléagant après quelques instants, et elle sentit un liquide chaud couler le long de ses babines. Elle saignait de la truffe. Et son cerveau, compressé par l'étau divin et imaginaire, manquait d'oxygène. C'était trop.
C'était trop, de devoir imaginer vivre loin de Méléagant, et une once de rancune naquit en elle sans savoir où elle avait pu prendre racine. C'était si injuste. Lui allait vivre auprès de ses enfants, Élaine, Athelstan, Korra, Alys. Il allait voir grandir ses petits-enfants, il allait être là chaque jour pour eux. Alors qu'elle, elle allait finir seule chez Yurai ? Non. Elle remua la tête, les yeux écarquillés, le regard en détresse de sentir des sentiments pareils naître en elle. Elle n'était pas ce genre de louve, elle n'était qu'une biche, douce et tendre, à peine douée pour la chasse, murmura la voix de son père dans son crâne. Elle secoua la tête, sa gueule se déforma en une plaie béante, elle pleura à nouveau. Elle se tourna pour éviter que Méléagant voit ce navrant spectacle d'une mère déchirée. Elle ne bougeait pas, fébrile, le souffle court, le sang perlant à son museau, une petite tache rouge se formant sous elle. Elle avait l'impression de mourir à petit feu, la déchirure qu'elle avait ressenti lors de la nomination des différents alphas avait fissuré son petit cœur couleur vermeille, et aujourd'hui, la cicatrice à peine guérie se rouvrait en plus grand. Elle murmura, d'une voix d'outre-tombe :
"Non. Je ne peux pas... je ne peux pas vivre sans Vous..."
Elle se leva d'un bond sec et entama les cents pas, à nouveau. Incapable de réfléchir, elle sentait le combat intérieur en elle, la rancune qui venait d'apparaître tentait de mordre sa bienveillance et sa raison. Elle se sentait si mal qu'elle ne remarqua pas que le flot de sang sortant de son museau redoublait d'abondance. Elle s'arrêta un instant et avec une énorme surprise, elle hurla, pour la première fois de sa vie.
"JE NE PEUX PAS."
Une nuée d'oiseaux s'échappa des arbres à proximité, sa voix, d'habitude éternelle caresse ou douce berceuse, s'était mué en un cri de rage, de douleur extrême. Elle n'avait jamais élevé la voix, même auprès de ses enfants, leurs éducations s'étaient déroulées sans aucun accroc envers elle. Bien sûr, parfois, certains ou certaines se rebellaient contre une décision, elle se souvint d'Élaine qui avait provoqué son père en lui répondant clairement qu'elle s'en fichait qu'il lui interdise de sortir du Squat. Winnifred se souvenait parfaitement de la nuance de défi dans ses yeux, et elle se rappela avec douleur qu'elle n'avait été ni battue ni sévèrement engueulé, Méléagant et Winnifred s'étaient regardé et d'un commun accord, Méléagant l'avait puni de sortie. Mais jamais un éclat de voix, jamais un mot plus fort qu'un autre. Et Winnie se félicitait d'avoir donné une bonne éducation à ses petits, à présent, ils étaient adultes et avaient des responsabilités. Anastasia, Élaine étaient toutes deux Alpha, Alys était devenu Bêta, Korra allait devenir mère, et Athelstan et Gloriel devenaient plus forts chaque jour et de solides atouts pour une meute. Winnifred ne doutait pas une seule seconde qu'ils auront tous deux une place importante, un jour. Et puis, le Destin semblait bénir la progéniture du couple. Elle s'immobilisa, et les yeux rouges d'avoir pleuré, elle s'assit, plus calme, plus douce. Elle s'excusa, bredouillant pardon, pardon, pardon, pardon mille fois, au moins. L'eau de ses larmes se mêlèrent au sang de ses narines, et l'odeur âcre du fer lui donna une migraine puissante. Elle leva des yeux implorants vers Méléagant et sentit son cœur défaillir. Les peu de solutions qu'elle avait trouvé s'envolaient devant elle. Elle n'était plus sûre de rien.
"Par les Dieux, Méléagant, mon tendre amour, mon cher amant, je ne sais pas... Je ne sais plus."
Dans un geste las, elle baissa la tête et songea à Yurai. Une pensée aussi noire que les cheveux de Méléagant s'installa un instant devant ses yeux. La solution était peut-être de mourir ? Terrifiée, elle redoubla de pleurs, et Salazar, caché dans la chevelure, tremblant de toutes ses écailles, sentant son hôte défaillir, n'osait plus siffler pour exprimer son désaccord face à cette idée morbide.
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Sujet: Re: Décider de son chemin | Winnifred Lun 06 Nov 2017, 09:53
La louve eut beau se tourner, il eut le temps d'apercevoir le désespoir qui tordait son visage. Mais plus que ce qu'il vit ce fut ce qu'il entendit qui l'ébranla profondément. Il la connaissait depuis de nombreuses années déjà, et jamais encore il n'avait vu la belle louve dans cet état. Jamais il n'avait entendu cette pointe acide et colérique dans sa voix d'ordinaire sans sursauts, jamais il n'avait cru apercevoir dans ses prunelles brûler quelque-chose qui ressemblait à de la haine. La vie semblait s'être appliquée à la pousser dans ses derniers retranchement, pour dévoiler un visage qui lui était encore inconnu et qui lui déchira le coeur. Mais peu importe ce qu'elle avait dit ou paru décidé, le mâle brun ne pouvait la laisser seule ainsi. Il s'approcha d'elle et l'attira contre lui alors qu'elle bredouillait des excuses qu'il jugeait inutile. Elle n'avait pas à se faire pardonner de ne pas encaisser ce qui leur tombait dessus. Alors qu'il posait la tête sur la chevelure de sa compagne, après avoir essuyé d'un coup de lange le sang qui perlait à son museau délicat, il se sentit envahi d'un calme subi et inattendu. Il comprit que sa place ne serait jamais autre part que près de la louve qu'il aimait si passionnément. Les lunes passaient et leurs enfants grandissaient. Il trouvaient leur place, leur âme soeur, allaient leur chemin sans plus avoir besoin de la protection de leurs parents, aussi grand que soit leur amour pour eux. Et Méléagant ne supporterait pas de s'éloigner de sa belle. Il lui apparut que toutes les raisons qu'il avait trouvées pour tâcher de se dire qu'il s'agissait de la meilleure solution n'étaient que de futiles réconforts. Le destin lui demandait de choisir ce qu'il devait abandonner. Et ce choix, il l'avait déjà fait depuis longtemps.
"Tout ira bien, ma douce." Murmura-t-il. "Je ne souffrirais pas de vivre loin de vous si ce n'est ce que vous désirez. Si votre coeur vous commande de me faire rester, le mien me commande d'exaucer votre souhait."
Il fourragea du museau dans les blanches boucles de sa compagne.
"Demain à l'aube, je m'en irai au temple d'Aka pour rendre mon glowstick." Continua-t-il, toujours dans un murmure de sa voix grave. "Puis nous nous rendrons tout deux à la rencontre des disciples de Yurai. Je leur proposerai mes services en échange du droit de vivre auprès de vous. Nous savons tous les deux fort bien que je ne saurai porter avec raison la couleur de la sagesse."
Il eut un sourire triste à cette pensée. Mais le temps n'était pas à se montrer trop peiné. En un instant, il s'était vu redevenir le protecteur de la louve crème, et il s'efforçait de repousser les doutes qui l’assaillaient. Pour le moment, il devait faire retrouver à sa dame un sourire, un espoir, faire renaître dans son beau regard vairon la lumière douce qui lui était si caractéristique. Il lui fallait voir uniquement ce qui était reluisant dans le futur qui s'ouvrait. La possibilité que Sarcan accepte qu'il vive sur leurs terres et qu'il continue de voir sa compagne, en échange de chasses ou de patrouilles. Peut-être même pouvait-il devenir entraîneur pour les jeunes Nakhus qui désiraient être formés au combat, lui qui avait derrière lui une bonne expérience. Il savait que les visites aux Etelkrus et aux Lazulis lui seraient sans doute interdites, mais Winnie avait affirmé que la famille pourrait se rassembler en les terres neutres qu'étaient celles de la Corneille. Oui, il devait s'efforcer de ne voir que la lumière. Les ombres viendraient bien assez vite le moment venu.
"Acceptez, je vous en prie." Souffla-t-il en fermant les yeux. "Je ne saurai vous perdre sans me perdre à mon tour, dame de mon coeur."
Une partie de lui craignait les paroles qui allaient suivre. Pourtant, il avait le sentiment d'avoir trouvé enfin le chemin qui serait le sien. Le leur. Et à son épaule, la lueur rouge lui sembla bien moins brillante.
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Sujet: Re: Décider de son chemin | Winnifred Dim 12 Nov 2017, 22:19
Winnifred
Le calme envahit tout à coup le corps de Winnifred. La louve aux boucles blanches se sentit soudainement vide de toutes pensées, tout contre Méléagant, sentant son souffle court dans son cou. Elle ferma ses yeux vairons et posa sa tête contre la tête de Méléagant, le souffle encore saccadé d'avoir tant pleuré. Il essuya le sang de son museau et elle se rendit compte de son excès. Elle baissa la tête, honteuse et confuse, et lécha à son tour ses babines, nettoyant le sang qui teintait de rouge son poil beige. Elle se serra contre son adoré, et le silence qui régna l'apaisa grandement. Tout ceci était si dur, Winnifred ne savait comment elle pouvait gérer tout ceci, elle se sentait si désespérée que toute raison l'avait quitté, pendant un court moment. Quand sa voix tendre lui parvint aux oreilles, elle se détendit encore un peu, ses pattes tremblaient, elle se sentit lasse et épuisée, elle se coucha, posa sa tête contre les pattes de son aimé et l'écouta parler. C'était tout ce qu'elle aimait, l'écouter parler. Elle soupira de soulagement. Il n'allait pas l'abandonner, il n'allait pas la laisser seule, bien au contraire. Quand il proposa une solution, elle dressa ses oreilles sur son crâne, surprise. Bien que sa proposition semblait alléchante, Winnifred se sentait terriblement honteuse et égoïste. Il allait renoncer à son dieu pour elle, elle qui n'allait pas renoncer à sa croyance pour lui. Elle baissa les yeux, et l'envie de pleurer monta à son cerveau mais aucune larme ne souhaitait couler, elle se sentit comme dans un cocon, vide de sens. Elle bredouilla quelque chose quand il la pria d'accepter et ses phrases suivantes firent fondre son cœur. Elle releva les yeux et regarda ceux de Méléagant, bleu comme de la glace, si dur d'habitude, son regard était si doux que Winnifred comprit qu'il l'aimait d'un amour sincère et pur. Et sa renonciation à son glowstick le peinait visiblement, mais l'amour triomphait dans ses yeux. Elle se releva, faiblement et posa son museau contre celui de son époux, l'embrassant tendrement. Elle lécha sa truffe avec délicatesse et plongea sa tête contre son poitrail. Elle voulait s'excuser, elle aurait aimé s'excuser de le forcer à prendre cette décision mais à présent, c'était la seule qui lui paraissait possible pour qu'ils vivent ensemble.
"Je... Je vous aime, Méléagant et j'accepte votre proposition à condition que vous me certifiez être sûr."
Elle se retira de son étreinte et le fixa avec anxiété, elle désirait qu'il vive également sa vie comme il l'entendait, et son éducation lui avait pourtant appris à se soumettre au mâle, à sacrifier tout pour lui. Mais aujourd'hui, l'inverse se produisait. Winnifred ne se voyait pas rendre son glowstick, elle voyait en les Nakhus une chance pour eux deux de vivre côte à côte et sans prendre partie au sein de leurs enfants. Les disciples de Yurai représentaient la paix, le respect et la religion saine, elle savait que, malgré tout, sa place était là-bas, aux côtés du prêtre Sarcan qui l'avait si bien conseillé. Elle releva les yeux, une larme égarée coula le long de sa joue.
Elle l'embrassa à nouveau, tendrement, timidement comme le tout premier baiser qu'ils avaient échangé et la sensation de calme après la tempête l'enivra quelque peu. Il se sentait fatiguée, et une bonne sieste l'apaiserait sûrement. Elle retint ses larmes et murmura à son oreille :
"Je m'excuse de vous forcer à faire ce choix, je m'excuse tellement. Vous devez me trouver affreuse de vous imposer un tel choix. Votre Dieu ou votre Femelle, quel choix absurde. Oh, je suis tellement désolée, je m'excuse mille fois encore."
Elle plongea sa tête dans son cou à nouveau afin de cacher la douleur qui lui montait aux yeux, elle se sentait honteuse, terriblement narcissique. Elle se remit à bredouiller des excuses en boucle, sentant peu à peu les larmes lui revenir douloureusement. Le pire, à ses yeux, était que la solution proposée par Méléagant semblait être la meilleure, vivant ainsi parmi les Nakhus, ils n'avaient aucun choix à faire quant à la meute de leurs deux filles, ils ne favoriseraient aucune des deux, évitant un sentiment de haine ou de rancœur qui pouvait se muer en une douleur aveuglante et les monter l'une contre l'autre. Si leurs deux parents étaient dans un clan à part, peut-être qu'Anastasia et Élaine entretiendront des relations cordiales voire amicales. Winnifred soupira, si triste de devoir arracher son gentilloup à sa religion. Mais une chose était sûre, avec ou sans lui, elle irait parmi les Nakhusn préférant tout de même l'option comportant Méléagant à ses côtés. Elle imaginait que leurs filles les autoriseraient à venir les voir, mais une part d'elle renonçait à cette idée. Mère, père ou frère, un loup non-membre de leur meute n'était pas apprécié sur les terres. Elle baissa la tête, espérant que Yurai autorise le couple à voir leurs enfants sur ses terres libres et pures.