Mission Construction · Ptah

Dans les montagnes culminantes, Anette se plaisait à gravir.
Il y avait un sens de la hauteur qu'elle appréciait, qui l'approchait du ciel et donnait un point de vue imprenable sur les terres. Et il y avait la violence des roches, par leurs formes abruptes, tranchantes, et leurs textures parfois rugueuse. Surtout aux alentours du temple d'Aka, où la pierre était comme brisée, tranchée par le poing du dieu de la force qui l'aurait frappé pour s'y faire une place. Et la matière était noble ! Quand on la comprenait, la pierre pouvait être finement dessinée par l'eau ou un pieu, et former des choses solides, comme leurs grottes, ou des édifices. Oui, elle aimait ça.

Ils étaient proches de la frontière.
Elle, et celui qu'elle saurait avoir la maîtrise pour la pierre ; qu'elle avait donc convié pour accomplir cette mission qu'elle et Pepper avait donné. Anette savait que le duo qu'elle formait avec la bleu avait placé beaucoup d'attentes sur la meute, mais au même passage elle y poserait beaucoup d'attention : elle savait qui le loup était. Ptah, l'ancien bêta, peu assuré dans ses présentation lors des rassemblements, mal-à-l'aise et pourtant... Ptah l'architecte, dont le regard s'était illuminé quand Pepper et elle avaient parlé des vigies. Discret, mais doué.

Parmi les roches alors, elle avait voulu se dresser avec lui à ses côtés.

"Bonjour, Ptah, artisan nôtre." salua t-elle, en premier lieu. Elle eu un sourire bref et observa la montagne. "Aujourd'hui, tu seras l'expert, et je serais l'ouvrier, si cela te va. Nous aurons besoin de trouver le meilleur endroit, et de trouver les bons matériaux. Je t'écouterais, et transporterais ce que tu voudras. Je pourrais apporter mon opinion si cela est judicieux également."

Elle n'était pas stupide, évidemment, mais plus stratège que prône à savoir où, et comment construire la tour. Avoir l'idée avec Pepper du système était aisé, les détails pour les sortir du sol, beaucoup moins à sa portée.
Mais c'est en cela qu'elle saurait Ptah parfait pour cette tâche.
Et elle croyait en lui.

Le loup hybride était assis non loin du temple d'Aka, observant le sol, les menhirs crevant la terre et les grands pins qui semblaient vouloir atteindre les étoiles. Depuis longtemps déjà ses plans étaient prêt, vus, revus et corrigés dans sa boîte crânienne. En même temps, créer, inventer et construire étaient ce qui le faisait vibrer réellement. Par dessus tout, il vivait pour planifier. Il se remémora avec précision de chaque apport mécanique qu'il avait offert à la meute depuis son enfance. Il y avait eu tout d'abord un petit pont pour traverser une rivière peu profonde pour les adultes. Grimm à l'époque avait usé de sa télékinésie pour l'y aider, il n'était qu'un enfant alors. On s'était moqué de lui, l'enfant loup-crocodile, qui avait besoin d'une structure stable pour passer au delà d'un si petit courant. Ils n'avaient pas compris, les bougres, qu'il avait fait cela pour les autres louveteaux qui craignaient l'eau... D'un autre côté, discret et peu bavard, le gris ne l'avait jamais expliqué. Les prunelles de miel du mâle fouillèrent le paysage, son pont, peut-être, était encore ici, quelque part, trônant au dessus de son lit peu profond mais permettant à chaque louveteau même peu enhardi, de venir voir le temple du Grizzli sans encombre. Il y avait eu aussi, plus bas sur cette même rivière, un piège à poissons. Sorte de spirale en bois terminant avec un nouage de corde fines formant un filet de fortune où venaient se perdre quelques potentiels repas. Là encore il avait essuyé les critiques : comment un pseudo loup avec des gènes de prédateur des fleuves ou des marais pouvait ne pas savoir attraper quelques truites ? Le disciple de la Renarde avait gardé le silence, se renfermant plus encore dans sa bulle de solitude. Grimm l'avait remercié, ainsi qu'une ou deux nourrices n'ayant pas le temps de chasser et pouvant aisément et surtout rapidement récupérer quelques morceaux frais pour les petits qu'elles gardaient... Un vague sourire étira ses babines et découvrit ses affreux crocs de gavial.

Il n'avait jamais été considéré pour ce qu'il était capable de faire. Ou du moins par personne en dehors de ses formidables parents et de ses frères et soeurs. Alors forcément, quand Anette était venu le voir pour demander son aide, sans s'en cacher, sans dissimuler ses intentions vis à vis du reste de la meute, un feu inconnu avait commencé à brûler dans le torse du gris. Il s'était senti enfin utile. Il s'était enfin dit que finalement, il avait bien fait de ne pas fuir comme son aîné vers les terres libres. Il se rendait compte qu'il était plus heureux que jamais, qu'on fasse appel à lui. Cependant seul son regard d'or vibrait de plaisir et de malice, rien d'autre n'avait changer dans son comportement et donc peu de loup avait remarqué que son interêt pour les Etelkrus était revenu juste à temps pour qu'il ne soit pas, lui aussi, considéré comme un traître. Ce jour-là donc, il devait retrouver l'Alpha aux larges épaules aux Dents de Roc, cette belle forêt d'immense conifères et de roches. C'était, de la majorité de leur terre, l'endroit le plus pratique pour construire quelque chose, malgré le degré de la pente de la montagne. En effet, ici il y avait de la terre, de l'eau, forcément un peu de sable au fond de la rivière, du bois et de la pierre. Que des matériaux noble à la construction. Que des matériaux solides et durables. C'était presque trop facile, et Ptah s'était senti légèrement vexé d'avoir à agir sur un chantier qui ne nécessitait pas que les rouages de son esprit vif se lancent à plein régime. Enfin, c'était mieux que rien. Et puis, la Dominante beige était avec lui, sur le territoire de son Dieu rouge, alors c'était forcément une marque de confiance non ? Prompt à se laisser emporter dans son élan d'artisan, le gris à la longue queue reptilienne était arrivé tôt pour étudier le terrain et vérifier ses premiers calculs. Il fallait aussi trouver le meilleur emplacement, mais pour ça il attendrait la présence de la cheffe.

Louve qui ne tarda pas à arriver par le bas de la montagne, et qui le salua plutôt chaleureusement. C'était inhabituel, c'était étrangement agréable. Il baissa le museau, évitant tout contact visuel direct, par habitude, par timidité aussi et répondit sobrement de sa voix éraillée et rocailleuse :

" Bonjour Alpha. "

Il se releva, jetant ses yeux ambrés autour d'eux et déclara ensuite :

" J'ai trouvé quelques emplacements judicieux. Un plus haut, mais la pente est plus abrupte et donc les fondations seront un peu plus difficiles à construire, cependant la vue serait imprenable et la source de la rivière passerait juste à côté. Ce qui est bon pour les gardes en faction. Il y a un terrain proche du temple, c'est presque à plat, mais je crains qu'une tour trop prêt de la maison du Seigneur Aka ne soit pas très... Judicieux. Et puis la visibilité est moindre. Et il y a l'espèce de clairière à peine plus bas, qui serait un bon terrain, mais il faudra d'abord défricher et faire tomber quelques grands pins... Et si la vue est bonne, elle reste un peu en retrait de la frontière et donc nous indiquerait une présence une fois les ennemis sur la frontière et non plus avant en prévention. "

Ptah darda ses pupilles verticales sur la Meneuse. A elle de décider, forcément, de la meilleure option. Même si clairement, il pensait plus malin de fonder une tourelle de garde au plus haut et donc au plus prêt de la frontière. Il serait bien plus fatiguant de monter des matériaux, cela dit, il y en avait aussi un peu de gros cailloux encore plus haut et des arbres partout... Disons surtout que ce serait plus long et plus fastidieux d'assurer les fondations de la base de la tour puisque la pente serait plus franche, mais la positionnement était parfait. Après si l'Alpha désirait construire à côté de son temple, il ne dirait rien, mais ce n'était pas la meilleure option. La longue queue de crocodile du loup s'enroula entour de ses pattes alors qu'il attendait la décision de la cheffe. Il pouvait déjà lui montrer l'emplacement qu'il avait trouvé, peut-être voulait-elle voir avant de se décider. C'était plus réfléchi... Il s'ébroua vigoureusement et fit quelques pas vers le haut.

" Je vous montre ? "

Inexpressif, patient, seules ses prunelles d'or pétillaient d'ingéniosité et d'une certaine passion à l'ouvrage.

Le gavial n'amena aucune déception avec lui. En l'écoutant, Anette laissa fleurir sur ses traits un sourire, qui témoignait à la fois de satisfaction et de quelque chose de carnassier. Plus il parlait, plus son entrain grandissait ; elle savait qu'il avait été fait pour ça et que l'amener avait été une bonne idée. Elle ne l'interrompit sous aucun prétexte, et quand il demanda si elle voulait avoir un tour du propriétaire, elle garda son rictus.

"Bon travail." Puis elle releva un peu le menton. "Je vois tes arguments, merci. Je me demande si la tour, plus en contrebas, pourrait également moins être visible des autres. Voir est une bonne chose, mais être vu facilement pourrait conduire à leur repérage et destruction facilement."

Elle emboîta néanmoins son pas, donnant son accord silencieux pour le suivre. Elle gravit donc aux côtés de son architecte le chemin pour voir ces terres, ces lieux propices.

"Voyons quelle masse de travail il y a à abattre pour dégager la clairière, si c'est plus fastidieux que de monter le matériel, je pencherais pour le le terrain le plus haut, quitte à penser à un autre stratagème. Peut-être dans le design de la tour, pour mieux se fondre ?" Elle glissa un regard vers Ptah.

Cela serait encore plus de son domaine, elle avait eu envie de lancer cette friandise vers lui. Rien que pour le délice de revoir son regard s'allumer. Anette aimait déclencher les passions, parfois au sens tout à fait pur de l'expression. Le plaisir pur d'expliquer son hobby, d'exprimer son attrait pour un sujet.
Voir un membre de sa meute en joie.

Bien qu'il sut son avis fondé et ses explications parfaitement logiques, les voir validés par l'Alpha en personne lui firent l'effet d'une nuée d'acclamation dans son esprit différent. Peu à peu, il gagna en entrain, a la manière d'un louveteau ravi de montrer son travail bien fait. Mieux. Heureux de présenter un projet parfait. Ils firent le tour et Ptah évalua le terrain de son regard vif. Ici un gros rocher bloquait un passage sinon aisé. Là, de noueux conifères empêchaient un trajet rapide. Monter des matériaux seraient effectivement longs et fastidieux. Lorsqu'il parvinrent à la clairière précédemment présentée, l'artisan montra de sa longue queue reptilienne les cailloux de tailles diverses et les ronces qui s'entremêlaient de l'un à l'autre. Effectivement, ce serait moins difficile de nettoyer ce terrain, cependant certaines pierres seraient trop lourdes pour un loup lambda...

« Il est possible d'améliorer la vue en faisant tomber quelques arbres de ce côté ci sans trop s'exposer. Leur tronc pourraient servir de levier ou de chemin roulant pour ce roc trop imposant. Peut-être pour celui là aussi. Et l'autre derrière. Mais ce ne sera pas simple. Les autres devraient être maniables à pattes de loups, avec quelques d'efforts. »

Il marqua une pause. Se rappelant de la proposition de la meneuse aux larges épaules. Comme elle s'y était attendue, le bonheur de la mise à contribution se lisait dans les prunelles de miel du disciple de la Renarde. Tel un enfant récompensée, Ptah expirait le bonheur simple de faire ce qu'il aimait, soudain dépourvu de la peur d'un jugement quelconque. Lorsqu'il imaginait des plans ou commençait à créer quelque chose, il ne restait que la logique et la froide efficacité du travailleur aimant ce qu'il faisait.

« Nous pourrions également concevoir une façade... Verte ? Une sorte de mur végétalisé afin de fondre la tour dans le décor et la faire passer, au premier abord, pour un amas de grands pins ? En récupérant l'écorce de certains troncs abattus, et pourquoi pas même des demis troncs fixés au mur en couverture... Ici, ce sera le moins chronophage, tout en répondant à nos besoins principaux. »

C'était un grand chantier, sans doute le plus grand sur lequel il ai eu la chance et le bonheur de travailler. Et ça lui plaisait énormément.

Ses yeux découvrirent la clairière, qui était décidément bien placée. Moins d'arbres peuplaient l'endroit que ce à quoi elle se serait attendue, un très bon point. Que sembla partager Ptah, puis-ce qu'il conclut la même chose. Quand il enchaîna sur la suggestion d'un camouflage et offrit l'idée d'un mur végétal, deux notes d'un fredonnement approbateur s'échappèrent de l'Alpha. Elle ajouta en montrant un visage enjoué.

"Parfait."

Elle observa les arbres avec un regard inquisiteur ensuite. Toutes les informations engrangées, c'était désormais ses méninges qui tournaient à plein régime. Car maintenant que l'expertise était dressée, ils pourraient passer à l'action. Abattre des plans relèverait de son domaine à elle.

"Je vois le plan d'attaque comme ça : faire choir cinq arbres. En enlever les branches et les garder pour la partie végétale. Trois serviront à faire rouler les pierres, et deux plus grands que nous couperons pour l'idée des portions de troncs." Elle scruta en plissant les yeux, et un nouveau sourire étira ses babines. "Je vois un ruisseau là-bas, donc... Au lieu de s'enquiquiner à tout arracher, on va creuser directement en-dessous des ronces et des rochers pour les déloger plus facilement. Eau, argile, terre, herbe... Torchis pour aller autour des pierres."

Elle se remit à avancer, s'enfonçant dans cette clairière propice à leur projets.

"Bien, la chronologie... Première étape ; je peux abattre les arbres pendant que tu en défait les branches, si ça te va ? La seconde, creusons le sol sous les ronces et les rocs pour les pousser à deux, vu que ce sera le plus pénible. Troisième étape, on pourra se séparer, l'un rassemblera l'eau, terre, argile et herbe et l'autre acheminera les pierres plus petites."

Elle souffla un coup, et se planta devant un arbre. Elle coula ses yeux sur l'Architecte.

"Prêt ?"

Et avec entrain, elle s'attaqua à la base de l'arbre, arrachant petit à petit les fiches sur un côté en prenant attention à la direction dans laquelle il s'écroulerait. Mieux valait éviter qu'il ne s'échoue sur la tête de son camarade, ou dans les ronces. Il faudrait que tout soit accessible, pour défaire les branches. Plusieurs coups plus tard, et avec une belle poussée de sa part pour qu'il se plie... Le pin émit des craquements de plus en plus audibles, avant de lentement entamer sa course.
Puis dans un bruit effarant, devant une louve qui soufflait tout de même un peu mais essayant de se ménager, arriva au sol.

Un premier de fait.

Avec un hochement de tête, elle en sélectionna un autre, et commença à lui jeter le même sort.

< Ptah ;

L'Artisan acquiesça au discours de sa supérieure. Tout dans ses paroles étaient logiques et promettait un plan d'action efficace. De son côté, il étudia une nouvelle fois le terrain de son regard tranché verticalement afin de vérifier de quel côté aurait plutôt tendance à tomber les grands pins. Il la suivit sans broncher alors qu'elle exposa les étapes de leur travail a faire : défrichage léger, élagage, nettoyage, construction. La langue de l'hybride claqua contre son palais en signe d'approbation a la fin, et il s'arrêta à son côté alors qu'elle inspirait un grand bol d'air sain de la montagne. La question de l'Alpha interpella le mâle gris et ses iris de miel vinrent rencontrer ceux d'Anette. Il était né pour ça. Un sourire, timide mais bien franc, vint étirer ses babines. Il était heureux de pouvoir partager cela avec l'une de leurs meneuses. C'était un honneur et une grande joie que de partager un tel chantier. Sans un mot de plus, il opina du chef et aida la louve à abattre le premier arbre, ainsi elle prendrait de l'avance sur le second pendant qu'il casserait les branches du premier. Il commença à la cime, là où les bras du grand conifère était les plus fragiles et revint vers sa base plutôt rapidement. Les dernières branches cependant noueuses et épaisses, furent plus dur à briser et Ptah dû user de ses crocs pour entailler le bois avant de parvenir à le casser. Il lui fallu un moment pour que ne reste que le large tronc, si bien qu'il lui fût presque inutile d'aider l'Alpha pour le deuxième. Comme il avait entre temps trouver une technique de mâchoire efficace, il parvint à élaguer le second pin plus rapidement afin de donner un coup de patte à la louve beige aux yeux noirs.

La sueur collait les poils de l'hybride en paquet et son souffle se faisait plus court. Il n'était pas des plus aguerris, au contraire, plutôt doué dans l'agilité et la vitesse que dans la force brute, aussi tout cet effort lui donnait bien chaud. Néanmoins, parce qu'il avait un minimum de fierté, et parce qu'il voulait aussi prouver son utilité à l'Alpha, il s'efforça de ne pas faiblir et d'avancer le chantier à une vitesse acceptable. Lorsque le derniers des cinq troncs fût couché, il se permit un instant de repos pour observer le travail accompli. La taille du tas de branche était conséquente et la femelle avait vu juste en comptant cinq pins. Il acquiesça pour lui même, se félicitant d'avoir quand même de bonnes meneuses pour leur clan. Puis, il jeta un rapide coup d'oeil à la fille du Croquemort avant de pousser de toutes ses forces sur un tronc pour le positionner sur le côté d'un des grands menhirs des Dents de Roc. Il s'arc-bouta mais ce ne fût pas suffisant pour le faire rouler assez.

« Je crains qu'il ne faille être deux pour pousser correctement ces troncs. »

Lâcha t-il, les oreilles plaqués contre son crâne, comme un aveu difficile. Il était faible.

En tout honnêteté, malgré la force qu'elle avait, l'endurance lui était un peu moins atteignable que son père, alors elle finit à suer pareillement. Les cheveux pas bien mieux que son camarade, elle avait même finit par repousser sa crête en arrière derrière ses oreilles pour s'aider. Un troisième arbre par terre et la conclusion de Ptah se fit entendre.

Elle se stoppa donc et arriva près de lui, pas de commentaire, acceptant simplement le fait brut comme il était.
S'il fallait être deux, elle donnerait un coup de main, il n'y avait aucun soucis ! Elle commença à pousser après un regard vers le fils de Dairo et manœuvra pour l'amener vers les rocs. Quand ce fut chose faite, un autre regard et pointage de museau vers un autre tronc et elle parti en leur direction pour en amener un second, comme prévu ; et puis-ce que le troisième était par terre, elle s'attaqua aux branches pour qu'ils l'amènent ensuite.

Elle abandonné le troisième arbre pour coucher les deux derniers avec une détermination toujours flamboyante, la tâche ardue étant son sport, donc sa dose d'endorphine à elle.  Elle aimait ça, elle en vibrait. Une petite pause pour boire dans le ruisseau (important de s'hydrater !) et elle s'attaqua ensuite à creuser pour dégager les ronces. Sans aucun ménagement pour les plantes envahissantes (mais beaucoup pour son dos), elle défonça la terre machinalement. Elle se prit pour une taupe pendant un bon moment, laissant son esprit vaquer à comment pousser les grands rocs avec les larges arbres qu'ils avaient ramenés. Il faudrait placer, puis creuser dessous pour les sortir et les laisser tomber dessus, sans doutes ?

Elle remonta le museau dans une grimace, puis s'adressa à Ptah.

"Tout va bien, besoin d'une plus grande pause ?" S'enquit-elle, se sentant fatiguée un peu de tout leur labeur.

< Ptah ;


Le travail était conséquent, épuisant, éreintant, mais exquis et diablement intéressant. La réflexion pour mener à bien les diverses étapes menant du concept du projet à la réalisation du chantier et voir s'entasser les matériaux qui par la suite leur permettrait de construire de petits forts discrets aux façades vertes, l'utilisation des muscles qui épuisaient ensuite le corps autant que l'esprit, et finir par observer d'un œil satisfait tout ce qui avait été réalisé... La firté pétillait dans les prunelles dorés de l'Artisan. Il n'aurait pu rêver journée plus belle, en plus en compagnie d'une louve tout à fait respectable et peu bavarde. Rien n'aurait pu lui faire plus plaisir. Il se remémora alors les heures passés à jouer avec son frère aîné, à construire grâce au pouvoir télékinésique de Grimm des pièges à poissons ou petits animaux, un pont pour aider les Etelkrus à traverser une rivière, ou encore d'autres objets plus ou moins utiles à la majorité. L'absence de son frère était pesante chaque jour, mais il s'efforçait d'avancer continuellement dans l'idée que ce dernier serait content de son évolution. Il avait fini par s'ouvrir, un tout petit peu, aux autres et à parvenir à discuter de choses moins farfelues, un peu. Il ne réalisait seulement qu'aujourd'hui, le niveau de fatigue engendré par un travail manuel aussi gros et comprenait pourquoi le rat de Bibliothèque qu'était le fils aîné de Nout ai besoin de tant de repos après leurs constructions ! Même grâce à un pouvoir offert par les Dieux, cela n'empêchait pas le corps de ressentir les effets de plusieurs heures de travail consécutives.

Lorsqu'Anette proposa une plus grande pause, Ptah sentit la soif le prendre à la gorge et il acquiesça pour, à son tour, aller se désaltérer. Il finit même par se rouler complètement dans le ruisseau pour rafraîchir son organisme suant, et apporter un peu de clarté à son esprit par une fraîcheur revigorante. Il revint ensuite, dégoulinant d'eau mais souriant, fait assez rare pour être notable, vers la chef de meute pour continuer le chantier. Les troncs furent poussés au pied des grands rochers, et comme l'avait bien supposé la beige, ils creusèrent dessous pour déstabiliser la roche qui tomba sur les troncs, ils n'eurent plus qu'à pousser pour que cela agissent comme un tapis roulant et déplace les gros cailloux là où ils en avaient besoins pour les fondations stables de leur tourelle. Vinrent ensuite les roches moyennes, plus facile à déplacer sans artefacts. Cela dit, cela restait fort usant pour les corps qui, à la fin de la journée seraient forcément perclus de courbatures. Ce qui était sûr c'est que Ptah n'aurait jamais autant agit de ses propres pattes et que le sommeil serait comme une délivrance jusqu'aux crampes des jours suivants, c'était certain. Peu à peu l'édifice eut une base solide et les premières lignes de pierres annoncèrent l'emplacement des pans de murs. Ptah aurait bien eu envie de se transformer en un animal plus puissant, mais il ne connaissait pas suffisamment l'anatomie d'un ours ou rhinocéros pour se métamorphoser sans erreurs pouvant être fatales. Il devrait donc se contenter de son corps faillible de loup.

Encore quelques efforts, et il ne resterait que la façade de branches à accrocher pour dissimuler la tour aux yeux les moins attentifs...

« Nous progressons a allure correcte. C'est... Bien. »

C'était un compliment pour la louve massive, sous entendant qu'elle travaillait extrêmement bien et vite. Mais l'hybride n'aurait su le dire autrement.

Anette observa leur avancée, les rocs bien placés et la terre défoncée. Les arbres destinés à monter sur la façade étaient prêts et patientaient presque sagement qu'ils ne soient défaits pour que les portions de troncs servent. Elle agita une oreille vers Ptah quand il s'exprima encore une fois.

"On fait une bonne équipe," s'amusa l'Alpha avec un sourire.

Brawn and brains. Ils possédaient tous les deux les susnommés, Ptah plus d'esprit que de muscle, et elle plus de muscle que d'esprit, mais assez du moins développé pour se comprendre chacun. Ainsi, ils pouvaient collaborer efficacement. Elle l'aimait bien, il était rigoureux et concentré. Téméraire dans ses efforts. Un bon élément de la meute.

Elle hocha finalement la tête, signalant qu'elle allait reprendre le travail. Avec diligence, elle attrapa et rapporta tous les éléments pour faire le torchis ; des bacs furent façonnés pour porter l'argile, la terre et l'eau et en quelques voyages, il y eu bientôt assez pour faire le torchis. Elle s'attela à arracher l'herbe nécessaire pour mélanger au reste, se penchant quelques fois pour défaire de belles tiges qui consolideraient le mélange primaire mais ayant fait ses preuves. Quand tout fut rassemblé, tout put être lancé au même endroit et piétiné, tourné, retourné. Fraisé presque comme un pâte, un amalgame de la réussite !

La tâche continua dans l'apport des pierres pour terminer la construction, dont Ptah se chargea en partie. Anette aida à rapporter les dernières, puis à étaler le torchis et les placer. Elle finit les pattes rendues marron noires de tout le mélange mais ne s'en plaignit pas. Elle était de toute façon déjà pleine d'eau, de sueur, de poussières de bois sans doutes et de feuilles. Elle se laverait dans l'eau à proximité quand tout serait terminé.
Elle espérait juste ne pas empester trop la mort et détruire le nez de Ptah.

Quand l'ossature fut finie, Anne s'exclama.

"Bien, le dernier bout, et nous en auront terminé de ce titan d'observation ! À nous le sommeil et la gloire."

Elle ricana, sachant bien qu'il n'y aurait de gloire que pour la meute, mais elle s'imaginait quelque part faire tomber un peu les demoiselles avec ces prouesses de construction. Mais la seule façon dont elle tendit les muscles à ce moment là fut pour aller chercher les troncs et les branches. Elle tira avec une forme amenuisée, mais une détermination identique, intouchable. Encore quelques coups, quelques flexions de son corps entier et son dos, de leurs êtres tous deux, pour arracher les écorces et lever ces colossaux arbres. Mais ce serait la dernière tâche pour leur ouvrage, alors Anne continua d'y mettre du coeur. Elle grogna parfois, la douleur s'insinuant en elle, mais l'envie d'en venir à bout la surplombant.

Plus de râles plus tard, et deux troncs coupés se dressèrent sur la façade.
Anne attrapa les branches, de sa gueule les tira et grimpa dans l'intérieur de la structure pour les placer depuis le haut. Les laisser tomber promettait un petit coup de main de la gravité aussi ; cela ménagerait les dernières gouttes d'énergie. Gouttes qui s'évaporèrent encore dans la sueur car il y en eu maintes à placer et à arranger pour donner un effet le plus naturel possible. Elle ne fit pas trop d’exigence cependant non plus, plus assez de fiel à ce stade pour cela. Ils pourraient arranger cela un peu plus un autre jour, mais pas question de faire les choses mal non plus !

Une fois que ce fut fait ; la tour put leur sourire en retour.
Elle se dressa face à eux, enfin assemblée. Complète.

Anette, avec plaisir, inspira de l'air et expira fort.

"Bien joué. Maintenant la récompense. Un bain, et dodo."

Elle tapota l'épaule de Ptah, enjouée avec une lueur de fierté dans le regard, aussi bien de lui que d'elle-même et du devoir accompli. Puis elle trottina doucement vers le ruisseau et s'écroula sans cérémonie dedans, lâchant un long soupir exagéré de plaisir et douloureux. Une dernière action un peu moins sérieuse pour la beauté de la chose, et pour relâcher un peu les responsabilités.

C'était fait.

[Fin pour moi ! ]