In my Blood || PV Edrakan

In my Blood

PV Eva

La sécurité.

C'était devenu un concept abstrait, mais d'une importance vitale.
Il lui fallait protéger, il lui fallait prendre soin. Il lui fallait survivre. Pas pour elle, mais pour eux. Et pour lui.

Vydar.

Le soleil se levait à peine sur l'océan, sa lumière commençait à poindre dans la caverne, mais la louve était éveillée depuis longtemps. Son coeur se brisait chaque fois qu'elle pensait à lui. Elle n'arrivait pas encore à accepter, à comprendre.
Il était parti. À jamais. Il avait disparu. Il ne reviendrait pas. On ne revient pas du royaume des morts.

Un bruit discret la tira de ses pensées.
La louve sursauta et gronda bassement, déterminer à protéger, comme lui l'avait fait avec elle.
Une feuille morte vola devant l'entrée de la tanière, source du bruit qu'elle avait entendu. Elle se détendit, un peu.

L'anxiété était devenu sa nouvelle nature. Elle posa un regard inquiet sur eux.
Ses bébés, ses trésors, le seul souvenir laissé par son Viking. Elle devait s'assurer qu'ils survivent, qu'ils deviennent forts et fiers, comme leur père. Rien ne devait leur arriver. Personne ne devait les toucher, ou leur faire de mal. Ce serait ternir la mémoire de Vydar sinon.

Elle leur donna quelque coups de langue, leur susurrant des mots doux. Ils n'étaient pas bien vieux encore, mais elle voyait déjà quelques ressemblances avec elle, mais surtout, à ses yeux, avec leur paternel.

Elle appréhendait la prochaine étape de sa journée. Voilà deux jours qu'elle n'était pas sortie de la grotte, mais elle allait devoir manger, et récolter à manger pour les petits. Elle allait devoir sortir. Ce qui voulait dire qu'elle allait devoir abandonner ses petits l'espace d'un instant. Elle frissonnait d'horreur à l'idée de tout ce qui pouvait se passer durant son absence. Un prédateur pouvait trouver leur cachette et manger ses enfants. Ils pouvaient ramper hors de la caverne et se blesser sur les rochers, ou, pire encore, se noyer dans la mer. Et si sa caverne s'effondrait et écrasait ses bébés ? Son pouls s'affolait et sa cage thoracique compressait ses poumons à la seule idée de sortir. Mais elle n'avait pas le choix.

Alors que les louveteaux sombraient de nouveau dans le sommeil, elle entrepris de se lever et d'examiner la sortie de sa caverne depuis l'extérieur. Elle avait choisie la moins visible depuis la plage, l'entrée étant à moitié dissimulée derrière un buisson, mais les petits pourraient quand même en sortir... Elle commença donc a aligner des roches de taille moyenne devant la sortie, assez petites pour qu'elle puisse facilement passer par-dessus, mais assez grosses pour que les louveteaux ne puissent pas encore les escalader. Il ne lui restait plus qu'à s'assurer de rester assez près pour entendre les cris de ses enfants si jamais quelque chose arrivait.

Avant de se diriger vers les cuvettes où elle chassait, en général, poissons et crustacé, elle s'acharna à écumer les alentours, reniflant chaque centimètre carré, afin de s'assurer qu'il n'y avait pas âme qui vive dans les environs. Les odeurs qu'elle sentit étaient soit vieilles, soit elles appartenaient à quelques lièvres ou mulots. Pas de quoi s'inquiéter donc. Elle n'en fut pourtant pas plus détendue.

S'aventurant un peu plus loin, regardant en direction de sa caverne à chaque quatre ou cinq pas, elle finit par trouver les cuvettes, petites parts d'océan oubliés par la marée basse. Elle commença donc sa chasse, dévorant un, deux, puis trois poissons. Elle en tua deux de plus, qu'elle planifiait ramener à la grotte pour les enfants. Pour faire bonne mesure, elle se déplaça vers une autre cuvette, pour y pêcher d'autres poissons, ou peut-être un crabe, afin de compléter son dîner du lendemain, quand, soudain, un frisson lui parcouru l'échine. Y avait-il quelqu'un d'autre sur la plage ?

Il ne fallut qu'une vingtaine de minutes à Eva pour rejoindre la grève où s'échouait sans relâche les eaux agitées de l'océan. Mais durant ce laps de temps elle ne put empêcher son esprit de vagabonder et tourner et retourner les souvenirs de sa brève visite à l'Île des Pirates. Comment, que, quoi, pourquoi ? Elle avait déjà entendu parler des pouvoirs des loups du continent - elle avait déjà même une fois ou deux assisté à ces merveilles, mais se retrouver à des dizaines de kilomètres de son lieu d'origine, ça, c'était inattendu. Et outre le retournement de ventre qui en découlait, l'ensemble de la situation avait été plutôt...

Elle hésitait.

Cocasse ? Effrayante ? Déplacée ? Enrichissante ?

Un peu tout à la fois, probablement. Curieuse, dans tous les cas. Eva agita doucement ses pattes dans le vide, pour gouter le flot du vent contre ses membres engourdis par le froid. Elle tournoya plusieurs fois au dessus des larges langues de sable, tel un rapace à l'affut. Elle sentait durement ses ailes la tirer, le voyage, bien que rapide, s'ajoutait au passage dans la tempête et la laissait fatiguée, fourbue. Elle plana jusqu'au sol, ouvrant largement ses rémiges pour ralentir un maximum sa course avant de se poser sans un bruit, ses pattes s'enfonçant dans le sable fin et nacré. Elle baissa la truffe pour le humer, étonnée de ses propriétés de réfraction, avant de se rendre compte que ce qu'elle avait pris pour du sable était en fait de la poudre de coquillage. Elle agita les oreilles. Curieux ! Mais joli ! Elle fit quelques pas, et secoua très doucement ses ailes. Ca faisait un mal de chien, mieux valait se reposer un peu avant de partir à la recherche de son territoire. Elle avait pu repérer un minimum, mais dans le soleil tout neuf et les restes de brumes aux alentours de l'île maudite, difficile d'avoir une trajectoire de retour précise.

Elle tourna sur elle-même. Elle avait un peu faim, peut-être en profiterait-elle pour faire le plein ? C'était plus sûr, vu qu'elle savait à peine où elle était. Au moins, ils étaient en été : elle ne devrait pas avoir de problèmes même si elle se retrouvait à chasser sur des terres d'autres clans, même si son odeur corporelle s'était imprégnée de celle, évasive, des Nakhus. On ne sait jamais. Sa décision prise, elle se mit truffe au vent, pour gouter les environs. Mmh- pas grand chose. Jusqu'à ce qu'une odeur musquée et, brûlée ?, lui parvienne. Elle tourna la tête, trotta quelques pas, pour finalement apercevoir une grande louve d'un rouge de feu qui... Brûlait littéralement ?

Allons, quelle est encore cette sorcellerie ? Décidément, ces loups-sans-ailes la surprendraient toujours. Elle s'approcha en trottinant, curieuse et joviale, dans l'intention manifeste d'initier le contact et sans attitude belliqueuse.

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