You see that open road and never know which way to go - Libre.

• Instant Timeline : se passe après l'event Halloween, le lendemain du début de la reconstruction en cours du temple de Moiro,juste avant l'entrée de Yersine dans le dôme pour aller voir Mido •


Soulevées par un vent faible, les feuilles d'automne menaçaient de tomber sur le chemin de la petite louve qui serpentait entre les arbres.

Souple et discrète, Mildred se faufilait à travers les troncs imposants du Bois de l'Oubli, prenant garde à ne pas s'enfoncer trop loin sans connaître le chemin du retour. On entendait suffisamment de rumeurs au sujet de ce bois et de ceux qui avaient tenté de l'explorer en profondeur sans prendre garde à marquer le chemin du retour. De toute manière, ce n'étaient pas les proies réputées nombreuses en ce lieu qui guidaient le pas régulier et déterminé de l'adolescente. Une flamme vivace brillait dans ses yeux vairons et la fougue ambitieuse de la jeunesse annihilait la peur des battements un peu trop rapides de son cœur pour la remplacer par de la curiosité et de l'impétuosité.
Elle quittait de plus en plus souvent le confort rassurant de l'Île aux Roses, s'extrayant du giron sécuritaire de ses parents -de sa mère, plus particulièrement- bien que ses pas finissent toujours par la ramener sur leur havre de beauté le crépuscule venu.

Elle ne s'embêtait nullement aux côtés de sa fratrie qui faisait de chaque jour une épreuve mouvementée, pourtant elle s'était éprise d'envies de libertés et de découverte. Et elle avait besoin de tracer son propre chemin, à sa manière. De se démarquer des autres. Elle n'était pas la plus robuste de sa portée, et de plus en plus elle sentait peser sur ses épaules le poids des responsabilités que l'on attendait d'elle. Le doux regard ambré d'Anianka ne se contentait plus de leur bonheur puéril à chasser les criquets et les papillons dans l'herbe grasse, simplement heureuse que le reste de ses enfants aille bien. Ils devenaient adultes.

Donc ils devaient devenir forts.

Et Mildred rendrait sa mère fière, car lorsqu'elle s'approchait d'elle le monde entier s'éclipsait et seule la prêtresse comptait alors, astre de beauté et de grandeur dont les rayons l'enveloppaient toute entière. Un sourire fleurit doucement sur ses lèvres en percevant l'image du visage d'Anianka qui s'imprima dans son esprit.

Non loin de là, un voile discret mais tangible semblait onduler dans l'air, miroitant d'un doux reflet vert. La lisière de leur territoire était proche, la course du Fleuve Chantant se faisait entendre et on en distinguait les eaux claires et scintillantes à travers les rangées de troncs d'arbres. Mais la fine barrière magique scindait en deux la large rivière, matérialisant une frontière qui n'existait jusque-là que dans les esprits des loups et les odeurs qu'ils y laissaient.

Perchée sur un rocher surplombant les abords du fleuve, Mildred tentait de transpercer le dôme du regard, fixant à travers ses paupières plissées les terres adverses qui s'étendaient au-delà de la limite infranchissable.

Les Etelkrus.

Elle renifla avec dédain, sa langue passant sur ses crocs. Anianka leur avait parlé de cette meute, celle dont elle venait, celle dont il fallait se méfier car leurs membres étaient corrompus et mauvais. Elle avait souvent tenté de voir se dessiner la silhouette de l'un de ces rivaux, quelque peu fascinée par cette menace dont elle entendait parler à la manière d'une légende sans jamais avoir pu les rencontrer. Mais il y avait son père Gloriel, aussi. Lui aussi avait une famille originaire de cette meute et loin de persifler les mêmes paroles il encensait au contraire une partie de ses membres. D’après ce qu’il avait dit, il partageait le sang d’une famille de chefs, nobles et courageux, lui-même et le reste de sa fratrie ayant été Alphas ou membres considérés de leur meute. Du sang puissant coulaient dans leurs veines. Malgré tout, c’était la présence enveloppante de sa mère qui le plus souvent essuyait ces paroles et les remplaçaient par ses propres vérités – et Mildred ne pouvait que ressentir de la hargne envers une meute qui avait blessé sa mère. Les mots de Gloriel restaient flottant, cependant, logés dans un coin de son cœur, portant la fierté discrète de ses ancêtres.
Tout comme son grand frère Rhaegar, l'adolescente arpentait la barrière magique de plus en plus fréquemment, soucieuse de ne jamais la voir faiblir. Si seulement elle trouvait un moyen de s'en échapper... Elle pourrait montrer à sa famille que lointain était le temps où elle craignait de se faire mal dans des jeux un peu trop brutaux, plus intéressée par l'idée de rester proche du flanc chaud de sa mère.
Elle pourrait montrer à Anianka qu'elle était courageuse, et qu'elle pouvait être fière d'elle car elle avait tout fait pour dépasser les autres. Elle voulait la faire sourire. Elle voulait voir s'allumer cette flamme dans ses yeux.

Un bruit sec la fit sursauter, son cœur ratant un battement avant de se calmer rapidement, rattrapée par le rationnel.

De l'autre côté se cachaient peut-être des êtres peu recommandables, mais de ce côté-ci de la frontière, seuls ses confrères et consœurs de meutes ne circulaient. Personne ne pouvait la surprendre.
Ses oreilles se redressèrent, oubliant l'instant d'effroi qui les avait aplaties sur son crâne, et elle se mit à fouiller les bois silencieux du regard, ses iris pétillants de malice.

C'était probablement Rhaegar qui a son tour l'aurait surprise près de la frontière et tentait de faire le même petit jeu avec elle. Mais lui non plus n'avait pas réussi ! Elle l'avait entendu, ses pas lourds écrasaient bien trop de branches mortes.

— Je sais que t'es là, Rhaegar !

Ses mots lâchés d'une voix forte résonnèrent quelques secondes durant, se répercutant entre les troncs imposants de la forêt. Mais seule la brise lui répondit.
Elle sauta à bas de son rocher, atterrissant sur un tapis de mousse épaisse. Fallait-il qu'elle vienne le chercher ? Soupirant d'impatience, Mildred s'enfonça vers l'origine du son, attentive à sonder chaque recoin dans l'obscurité du sous-bois.
Mais cela faisait déjà quelques minutes qu'elle cherchait sans se rendre compte du temps qui filait, et seul le mutisme de la forêt dense lui répondait. Pas de traces de l'un de ses congénères. Elle fit une halte, levant le nez du sol humide pour regarder autour d'elle, son excitation retombée. Elle ne reconnaissait pas les arbres qui semblaient vouloir se refermer autour d'elle pour lui boucher la vue vers les endroits qui lui étaient familiers.

Sa bravoure laissa place à l'angoisse.

— Rhaegar ?

Sa voix n'était plus qu'un glapissement qui s'étrangla dans sa gorge serrée.

S'était-elle réellement laissée prendre au piège ? Venait-elle de se perdre dans ces Bois réputés pour faire perdre la tête aux imprudents ?

À tout jamais ?

Tournant sur elle-même avec nervosité, elle fit de son mieux pour ne pas céder à la panique. Il y avait forcément un moyen...

C'est un éclat lumineux qui accrocha son regard, attirant son attention avec la force du désespoir.

Elle trottina avec prudence vers le buisson qui semblait cacher son secret, dévoilant parfois la lueur mystérieuse, l'occultant à d'autres moments. Sa truffe s’approcha des feuilles orangées en les effleurant doucement de son souffle saccadé, se concentrant uniquement sur sa trouvaille pour ne pas penser au reste.
Luisant faiblement d’une lumière bleutée qui semblait presque l’animer de l’intérieur, c’était une bien étrange pierre qu’elle vit reposer parmi les tiges des plantes grimpantes. Si elle n’avait pas été au fait des conditions liées à un glowstick, que ses parents lui avaient expliquées, elle aurait presque pu croire qu’il s’agissait là d’un des artefacts donnés par les Dieux qui gisait ici, nimbé d’une faible lumière, abandonné. Fascinée par sa découverte, Mildred laissa ses prunelles se perdre à la contemplation de la pierre. C’était beau et elle n’avait jamais rien vu de semblable.

Elle voulait la toucher, et elle voulait la garder. Elle rentrerait chez elle avec cette pierre et elle serait fière de dire à tout le monde qu’elle avait bravé les chemins obscurs du Bois pour y découvrir cet artefact unique, d’elle-même, et qu’elle aurait désormais pour elle toute seule.

Mildred se pencha vers l’avant, ouvrant la gueule pour délicatement saisir la pierre plate dont les angles taillés avec brutalité rappelaient un peu le crystal.

Une lumière éclatante l’envahit dès que ses lèvres effleurèrent la surface froide et lisse et le monde autour d’elle disparut.

• • •

Il n’y eut presque aucun moment de flottement entre le moment où elle était sur le point de se saisir de la pierre et celui où elle se retrouva sur une grande plage, penchée dans la même position que celle qu’elle avait eu pour plonger au cœur du buisson.
L’intensité lumineuse que lui offrait le ciel bleu la fit plisser des yeux, temporairement aveuglée par ce brusque changement entre la pénombre des bois et l’atmosphère paradisiaque qui régnait sur les côtes.

Quelles. Fucking. Côtes ?

Sa mâchoire tomba légèrement et resta ainsi ouverte.
Les arbres denses et étouffants avaient été remplacés par une grande étendue de sable, le ressac des vagues venait se perdre non loin de ses pattes ; et les effluves de feuilles mortes, mousses, humus, humidité des sous-bois faisaient place aux embruns picotant sa truffe.
Elle était sorti. Elle avait réussi. Elle ne comprenait pas comment, mais ces plages ne ressemblaient à aucune des côtes du territoire Lazulis. L’odeur de l’air apportait un fond de nouveauté, une multitude d’odeurs qu’elle ne reconnaissait pas et venaient emplir sa gorge. Son rythme cardiaque commença à s’accélérer au même moment où la réalisation de ce qui venait de se produire commençait à imprégner son être, bien qu’elle ne comprenne rien à ce qui avait bien pu se passer. La barrière était divine, non ?
Elle avait tant de fois pensé à la traverser, s’était tant de fois imaginée ce qu’elle ferait quand elle en sortirait, tout ce qu’elle accomplirait pendant que les autres restaient bloqués derrière.

L’occasion était là, à portée de pattes.

Et pourtant la sensation qui s’emparait d’elle était loin de l’exaltation qu’elle s’était attendue à ressentir en traversant la barrière.

Même si une brève et intense excitation avait fait frissonner la jeune louve, c’était surtout le doute et la naissance d’une peur nouvelle qui remontait depuis ses entrailles tandis qu’elle se mettait à tournoyer sur elle-même en effectuant quelques foulées sur la plage, désorientée, cherchant un repère du regard.
Plus loin à sa droite, elle distingua des étendues d’une herbe rousse qui par endroits reprenait des teintes plus vertes. C’était les terres qu’elle avait vu de l’autre côté du fleuve. Elle fit volte-face vers la mer, suivant l’horizon du regard, ses yeux glissant le long de l’eau jusqu’à remonter vers la direction où elle s’attendait à distinguer une masse familière se dresser hors des récifs.
L’Île aux Roses resplendissait de loin, nimbée d’un voile vert qui semblait la recouvrir, déformée par la distance, plus loin et inaccessible qu’elle ne l’avait jamais été.

Un cri s’étrangla dans sa gorge, et cédant bel et bien à la panique qui avait failli l’envahir dans le Bois, Mildred se mit à courir vers la frontière de toute la force de ses fines pattes.

Haletante, sa chevelure carmin en pagaille, le sable humide collant à ses pattes et à son poil en paquets, Mildred n’avait plus grand-chose de la petite princesse guerrière qu’elle pensait être lorsqu’elle arriva face au dôme. Se dressant sur ses postérieurs, la jeune louve prit appui sur la barrière magique, désirant de toutes ses forces le traverser à nouveau –que tout redevienne à la normale, même si elle était coincée à l’intérieur comme les autres.
Elle ne voulait pas se retrouver toute seule sans la moindre possibilité de revenir. Le monde extérieur était bien plus vaste qu’elle ne l’avait cru. Elle ne connaissait personne, et les solitaires, les pirates et les Etelkrus mauvais rôdaient non loin de cette plage accessible à tous.
Elle n’était même pas adulte.

Ses pattes se pressèrent avec insistance sur le mur divin, si fin et si transparent et pourtant si intransigeant. Mido comptait-il réellement laisser une enfant comme elle, seule dehors ?
Elle avait beau en griffer la surface, il ne cédait pas.

Tentant de calmer son affolement, elle prit une grande inspiration et après un brève coup d’œil aux environs pour vérifier qu’elle était seule, elle commença à s’époumoner.

— Rhaegar !! Elely, Maxim ! Venez !! Je suis dehors !

Elle cria tous les noms des membres de sa famille, et quelques autres qu’elle connaissait, faiblissant à chaque mot, sa voix s’éraillant sous l’effort. Elle faisait de son mieux pour se faire entendre, pourtant aucun son ne semblait traverser le dôme qui n’acceptait pas plus les interactions vocales que celles qui étaient physiques. Elle sentait presque les vibrations de sa voix rebondir sur la surface de la barrière pour revenir sur son visage.
Soufflant bruyamment, elle se laissa lentement glisser le long du dôme, sentant ses forces s’éparpiller et sa volonté faillir devant ses tentatives infructueuses et vaines. Le désespoir la gagnait peu à peu, force invisible et sournoise, remontant le long de ses entrailles et serrant sa gorge.

Une patte restée posée sur le dôme effleura une dernière fois la surface solide, tandis que sa voix brisée appelait une dernière fois.

— M.. Maman…

Anianka les laissait l’appeler Maman, dans le cadre familial. Surtout quand ils étaient enfants. Mais on leur avait appris qu’il fallait s’adresser à ses parents par leur nom complet, maintenant qu’ils grandissaient, si d’autres loups étaient présents. Elle n’avait pas le droit de l’appeler maman dans des circonstances aussi incertaines, pourtant son cœur d’enfant persistant reprenait en ce moment même le dessus sur celui de l’adulte qui avait voulu s’imposer, mais était trop friable encore.
Demeurant sans réponse autre que le son du vent de l’océan venant emmêler ses mèches, Mildred se laissa complètement tomber au sol, s’effondrant contre le mur impitoyable et sourd, tremblotante et s’enroulant tant bien que mal autour de cette entité qui la séparait de sa famille et représentait le dernier élément touchant à ses territoires. Se pressant au maximum contre le sol et la barrière pour ne pas se faire remarquer, attendant qu’un de ses parents vienne la chercher, comme lorsqu’ils étaient de tout jeunes louveteaux.
Elle fit de son mieux pour retenir les larmes qui picotaient sa truffe et ses yeux, passant une patte sale qui n’améliora en rien sa situation.

Que sa mère aurait eu honte, de la voir ainsi à son âge.

Mais en cet instant, peu lui importait. Mildred voulait juste retrouver sa famille et rentrer chez elle.

< Queen ; un peu avant 1 an et demi


Comme à son habitude, tous les jours que faisaient ces Dieux ignobles, la femelle blanche faisait le tour du dôme vert au aps de course. Et chaque jour elle gagnait en vélocité, en souplesse, lorsqu'il fallait bondir sur un roc ou éviter un tronc. Le même chemin, le même tour, s'imprimait dans son crâne avec une netteté agaçante. Rien en changeait, rien ne bougeait. Queen ne supportait plus cet enfermement, telle une lionne en cage, elle grondait derrière cette barrière magique et espérait entrapercevoir son père, quelque part, là dehors, qui les chercherait elle, ses frères ou sa mère. Régulièrement, pour ne pas se prélasser dans un exercice trop facile et trop habituel, la louve se rajoutait du poids sur le dos, ou aux pattes à l'aide de quelques sacs trouvés -ou plutôt empruntés à long terme- à la Prêtresse de Mido. Elle les ganrissait alors de pierres ou de petites bûches. L'enfermement ne devait pas être synonyme d'oisiveté. Elle avait un monde à conquérir dès que la liberté leur serait rendue. Et un père à retrouver, et à impressionner bien sûr, par ses progrès ! Mozarthamès l'aidait bien également, et elle commençait à vraiment apprécier son apprentissage alors que quelques semaines plus tôt, il n'avait s'agit pour elle que d'une formalité. La compagnie du paria de la meute lui apportait bien plus qu'espéré. La truffe en l'air, Queen observa le ciel verdâtre qui caractérisait leurs mornes existences depuis des lustres. Enfin, presque. La colère surgit à nouveau dans le coeur de la jeune louve qui se jeta contre le mur du Raptor qu'elle méprisait toujours un peu plus pour cette prison de verre.

Emportée par son élan et le poids conséquent sur son dos, et sans doute par un coup de pouce divin qui voulait lui rappeler sa place de mortel -du moins c'est ce que la blanche s'imagina-, elle trébucha, perdit l'équilibre et roula sur elle-même pour se cogner la truffe la première contre la paroi. Et comme si cela ne suffisait pas, il fallait qu'exactement à cet endroit, de l'autre côté, soit roulé en boule une petite forme lupine qu'elle ne connaissait que trop bien.

« »

De une : Pourquoi Mildred était là ? De deux : Pourquoi Mildred était de l'autre côté de cette foutue cage ? De trois : Pourquoi Mildred ??? Queen aboya, le museau écrasé contre le dôme pour attirer l'attention de l'autre louvette. C'était impossible. Improbable. Impensable. INJUSTE. Pourquoi cette sale gosse et pas elle ? Peu importait comment elle avait fait, la brune avait interêt à montrer son passage secret ! Et fissa ! Regarde par ici, hé ho ! Saloperie


< Joy ; 4 ans et demi

Dough était parti quelques minutes avant sans l'attendre. Si Joy ne supportait pas le père devenue mère, elle commençait tout doucement aussi a avoir du mal à apprécier le rejeton. Il était fidèle à l'Alpha bleue et toujours prêt à mettre la patte à la pâte, mais il avait aussi cette supériorité dans le ton et se voyait plus fort que beaucoup dans la meute. Et bien que cela ne soit pas complètement faux, il fallait dire que le demi petit frère de Pepper était costaud, il n'avait pas le cerveau toujours à l'endroit. Il en oubliait parfois la prudence et les règles communes qu'ils se devaient pourtant tous de respecter. Elle savait de quoi elle parlait, elle en avait fait les frais en se retrouvant seule face à Jaxx et sa mère, il y avait plusieurs lunes maintenant. On l'avait retrouvé dans un sale état. La Patrouille de Cookie et Sokaris aussi avait mangé cher contre un seul solitaire. Donc partir seul en terre libre avec un gamin était stupide et contre productif s'ils venaient à croiser des ennemis. Mais l'Epée était pressé et n'avait pas voulu attendre quelques instants que la louve sablée n'apporte sa pitance à leur(s) prisonnier(s). Chose pourtant rapide et expéditive, tant la disciple du Grizzli répugnait de retourner dans cette grotte humide et sombre pour voir ce(s) solitaire(s) enfermé(s). Dans un grognement rageur, la louve prit la suite du duo, truffe au sol et ses prunelles d'or déjà étincelantes de colère. Si Joy avait en majorité retrouvé son sourire, sa joie de vivre et son optimisme légendaire, la stabilité de son humeur restait... rapidement friable. Elle pouvait donc passer du rire à la hargne très vite. Surtout contre les abrutis imbus d'eux-même. Surtout contre les mâles en fait.

La disciple d'Aka rejoignit rapidement le guerrier et le jeune louveteau à l'aile unique. Le fils de Lucie et Athelstan grandissait bien. Godric deviendrait bientôt un fier Etelkru, dès lors qu'il aurait trouver un tuteur pour lui apprendre à devenir fort et malin. Un fin sourire étira les babines de la femelle qui pensa à son propre apprenti, Raven. Un petit pas trop taillé pour suivre sa voie et devenir fils du Grizzli, mais néanmoins un jeune prometteur pour la meute. Bon, elle allait devoir l'entraîner avec sérieux et trouver comment lui apprendre à se servir de ses points forts pour contrer ses faiblesses, et ça, c'était pas le plus simple, mais cet exercice lui plaisait bien plus qu'elle ne l'aurait cru. Et ça tombait à pattes nommées, puisque la saison des chaleurs touchant à sa fin, il lui faudrait bientôt s'unir à Thalion pour procréer et offrir à ses Alphas de dignes petits Etelkrus. S'entraîner à éduquer un louvard ne lui serait que plus utile pour son proche avenir. L'humeur de la beige eu regard de miel s'adoucit à cette nouvelle pensée. Si l'idée de se laisser grimper par un mâle ne l'enchantait guère, celle de donner la vie pour son clan la rendait fière. Elle ne savait pas trop s'y prendre avec les tous petits mais elle ne s’inquiétait pas plus que ça, au pire, les nourrices étaient là pour pallier aux questions des jeunes parents. Et puis Thalion, quoi que pas le plus futé des fils d'Aka, avait grandit entouré de marmots, entre les louveteaux dont s'occupait Korra et ceux qu'elle avait encore eu après sa première portée. Non, Joy était confiante en l'avenir proche, et c'est sans doute pour ça qu'elle laissa passer, pour cette fois, l'incivilité de Dough.

La voix de Godric l'interpella. Relevant le museau et le cherchant des yeux, elle le découvrit -où plutôt le haut de son crâne- derrière des rochers. Le ton lui indiqua que quelque chose n'était pas normal et qu'il ne s'agissait a priori pas d'une lubie de jeune adolescent qui voudrait montrer un beau caillou. La beige échangea un regard avec son compagnon de patrouille et se dirigea vers le brun à l'aile unique. Elle contourna l'amas de roche pour rejoindre l'autre Etelkru et laissa, pour une fois, la surprise envahir son museau. Il y avait là deux jeunes femelles inconnues. L'une couchée et pleurnicheuse contre le dôme, et l'autre visiblement mécontente, de l'autre côté de cette prison magique qui enfermait tous les Lazulis sur leurs terres. Ce qui, selon Joy, était une merveilleuse opportunité pour ne pas être embêter par l'autre meute. Elle savait que ses demies-soeurs y vivaient mais aucunes d'entre elles n'avaient jamais fait l'effort de revenir voir leur mère après leur départ. Sans doute n'étaient-elles même pas au courant de son existence. Noroi lui avait glissé un jour que l'une d'elle était même devenue Prêtresse de Moiro, rendant très fière l'ancienne porte parole de l'Anaconda. Face à cette potentielle partie de la famille, Joy restait donc assez méfiante quoi que curieuse. En même temps, vu le demi-frère qu'elle s'était découvert, y avait de quoi rester sur ses gardes ! Les deux louves devaient avoir a peu près l'âge de Godric, vu leur taille. Cela dit, le mâle était lpus large d'épaule et grand pour son âge, alors difficile de bien juger. Mais elles n'étaient pas adultes, la Bouclier en était sûre, donc la pleureuse ne serait pas une menace pour leur patrouille.

Même s'il s'agissait d'une solitaire vicieuse. Et l'autre, de toute façon, était coincée derrière sa barrière verte.

« Eh bien... On est triste d'avoir perdu sa copine ? »

Aboya Joy avec un certain cynisme. Elle n'aimait pas tout ce qui n'était pas Etelkru. En même temps, elle avait eu peu d'exemple pour lui prouver le contraire. Peut-être cette louve rouge, une fois à la plage, relativement sympa. En même temps, si elle avait su que c'était justement l'une de ses demies-soeurs, peut-être Joy aurait ouvert son champ des possibles.

C'est une vibration contre le dôme qui la sortit en premier lieu de sa position prostrée.
Tournant vivement la tête pour voir ce qui avait pu provoquer le tremblement diffus mais bien réel, elle put voir en gros plan la truffe humide d'un de ses congénères, planté et collé de l'autre côté de la barrière magique.
Enfin, plutôt une congénère.
Mildred ne mit pas beaucoup de temps à reconnaître Queen, qui avait l'air sacrément enragée de la voir de l'autre côté de la prison de Mido tandis qu'elle pouvait continuer à croupir à l'intérieur du dôme, elle, la fille de la Prêtresse du Raptor. Quelle ironie. Mildred se redressa légèrement pour concentrer son attention sur la jeune louve blanche et bariolée de couleurs, l'air outré de la bâtarde lui rappelant un instant à quel point sa situation était exceptionnelle. Elle oublia momentanément sa tristesse, poussée de côté par le pic de fierté et de défi qui fusa en elle qui lui rappela à quel point elle avait voulu être à sa place actuelle, face à l'infinité des autres terres. Elle avait contourné un châtiment divin. Elle était dehors, et pas les autres. Et cette chance exceptionnelle faisait baver de jalousie cette louve qui avait des ambitions bien trop élevées par rapport à ses capacités réelles.

Une grimace narquoise étira ses babines dans un long sourire moqueur, chassant sa mine peinée, dévoilant la pointe de ses crocs au moment même où sa langue rose transperçait la barrière de ses incisives pour la tirer devant Queen. Elle exaltait de la voir ainsi fulminer - mais ne pouvant rien faire. Elle aurait beau aboyer, Mildred ne l'entendrait pas. Ses yeux vairons se plantèrent dans les iris limpides de sa rivale, provocateurs.
Eh bien, qu'attends-tu pour me rejoindre, toi qui te trouve si maline ?

Elle entendit un éclat de voix, et elle tenta de comprendre ce que Queen lui disait avant de réaliser bien vite que cela ne pouvait pas venir de la louve prisonnière. Le dôme ne laissait passer aucun son.
Son cœur manqua un battement et ses oreilles pivotèrent vivement à l'unisson, une fraction de seconde avant que son corps tout entier ne fasse volteface pour se détourner du dôme et des terres qu'elle connaissait pour faire face à l'inconnu et à cette plage qui s'étendait à perte de vue.
A quelques dizaines de mètres d'elle se tenait un loup dont la silhouette était rehaussée d'une aile unique, bientôt rejoint par un autre individu qui émergea de derrière des rochers.
Elle se pressa encore un peu plus contre le dôme, ses oreilles s'aplatissant sur son crâne, espérant qu'ils ne l'avaient pas repérée.

Mais bien évidemment qu'ils l'avaient vue. Leurs yeux étaient rivés sur elle, et c'était droit vers elle que leur démarche assurée les portait.
Etaient-ils des solitaires ? Mais comment avaient-ils fait pour la trouver aussi vite ?! Etaient-ils réellement à l'affût de tout louveteau esseulé pour venir le dévorer, passaient-ils leur temps à longer le dôme dans l'espoir d'y trouver une victime ? Rhaegar avait peut-être eu raison de dire qu'il fallait continuer de patrouiller malgré la présence de la barrière.
Au fur et à mesure qu'ils s'approchaient et que son rythme cardiaque s'accélérait sous l'angoisse de la rencontre, elle put les détailler davantage, s'accrochant au moindre détail qui pourrait lui donner plus d'informations.
Le premier loup qu'elle avait vu, celui qui avait donné l'alerte mais s'était finalement rangé derrière son congénère, lui semblait finalement bien jeune de visage malgré sa carrure déjà terriblement imposante. Son regard qu'elle pouvait désormais distinguer était rempli de candeur et ne présentait pas la moindre once de méchanceté.
Quant à l'individu qui marchait en tête, c'était finalement une louve, dont le regard jaune étincelait de méfiance et dé mépris. La différence entre les deux était flagrante, et Mildred se sentit légèrement ployer sous les iris foudroyant de cette louve qui marchait sur elle en ligne droite d'un air plutôt impitoyable.
Il y avait cependant un léger détail, qu'elle avait manqué jusque-là, qui la fit légèrement souffler. Il ne s'agissait pas de solitaires. Se balançant depuis un bracelet à la patte de la louve beige, une petite lueur rouge attira son regard. Un Glowstick d'Aka.
Ces loups étaient des Etelkrus.

Cette information ne relâcha pas tout à fait la pression, étant donné qu'elle se trouvait désormais confrontée à un tout autre type de menace qu'elle avait encore plus de mal à appréhender, prise en étau entre les informations différentes distillées par son père et à sa mère à leur sujet. Tout le monde semblait s'accorder sur les solitaires et les pirates, au moins.
La louve adulte n'était plus très loin quand elle s'immobilisa, droite sur le sable, pour lui aboyer quelque chose d'une voix railleuse.

— Eh bien... On est triste d'avoir perdu sa copine ?

D'abord bouche bée et toujours déstabilisée par l'apparition de ces inconnus imposants, Mildred ne traita pas tout de suite l'information, laissant un moment de flottement.
Puis les mots s'imprégnèrent en elle, et leur signification la frappa de plein fouet.
Il y eut une montée brutale d'indignation qui envahit son petit corps. Elle se redressa de toute sa hauteur, une colère enfantine chassant les tremblements d'angoisse de ses pattes et retroussant ses babines au moment même où sa voix aiguë éclatait avec ferveur, protestant contre l'Etelkru.

— C'est pas ma copine !

Cette information n'était probablement pas la plus capitale, et ce n'était sûrement pas non plus la première chose à laquelle elle aurait dû réagir. Mais Mildred restait une jeune adolescente du haut de ses huit mois tout juste atteints, avec ces émotions vives et instables communes à tout louveteau, et que l'on puisse l'associer avec Queen en tant que copine lui paraissait d'une insoutenable injustice -il était donc primordial de rétablir la vérité.
Sa bravade avait eu le mérite de la sortir de sa position ramassée, se montrant plus droite et plus vaillante, comme ses parents l'auraient voulu. Anianka n'aurait pas voulu qu'elle courbe l'échine. Mais maintenant que sa réplique avait fusé et que son élan d'assurance était retombé, seule demeurait la confrontation silencieuse face à ces deux inconnus.

Un léger tremblement revint agiter ses muscles, et elle se sentit un peu plus faible sur ses pattes campées dans le sable ; un peu plus lourde sous le regard inquisiteur de cette adulte qui ne semblait pas très commode.
Elle s'efforça cependant à maintenir la tête haute, serrant les mâchoires pour ne plus laisser ses émotions la trahir. Il ne fallait jamais montrer signe de faiblesse face à l'adversaire.
D'autant plus que le regard de cette saleté de Queen traînait probablement toujours derrière son dos, et qu'il était hors de question de se ridiculiser face à elle.

Ses yeux brillants de hardiesse maintinrent le contact visuel, et elle glissait de temps à autres de très rapides regards vers ce jeune loup brun qui semblait être à peu près de son âge. Il l'aiderait si la beige devenait folle, n'est-ce pas ?

< Queen ; un peu avant 1 an et demi


Enfin, l'autre fille de Prêtresse l'a vit. Enfin, elle réagit à sa présence. Et ça ne plû pas du tout à Queen. L'adolescente brune et noire lui renvoya un sourire mesquin. Comme au ralenti, la jeune louve au regard de givre vit les commissures des babines de sa rivale se relever en un rictus qui laissa entrevoir crocs et langue. Vipère. Mildred n'était qu'une vipère. A son tour les dents de la blanche se dévoilèrent, tandis que son encolure s'épaississait. Elle osait se moquer ? Elle osait faire sa fière ? Si la vague idée d'appeler un adulte pour trouver la faille et sortir pour aller botter les fesses de la louvette de l'autre côté du Dôme lui avait traversé l'esprit, celle-ci fût aussitôt chasser par l'élan narquois de la fille d'Anianka. Fais toi donc bouffer par ces loups qui arrivent à l'horizon. Ce fût au tour de Queen de sourire cette fois, avec toute la supériorité dont elle était capable et bien sûr, la complaisance d'être en parfaite sécurité, elle, de son côté de la barrière magique. Elle se permit même d'hausser un sourcil, goguenarde à l'intention de l'autre adolescente. Elle allait se faire boulotter par des solitaires. Ou pas. Parce qu'ils s'agissait de loup de clan. Même à travers cette vitre verdâtre, elle sût reconnaître la lueur caractéristique d'un glowstick. Probablement du rouge ou de l'orange vu la teinte assombrie par la couleur de Mido... Des Etelkrus. C'était si injuste ! Mildred n'avait rien à faire avec eux, alors qu'elle ! Elle, elle avait son père a retrouver !! Queen se mit donc à aboyer derrière sa cage divine, griffant la barrière magique à sa base avec rage, comme si cela lui permettrait de creuser et de l'abîmer assez pour se faufiler dessous.

( dé réussite - 1 PC FOR )

La colère ne suffit pas, bien souvent, à réussir. Le regard très pâle de Queen rencontra celui du mâle ailée, bien qu'imposant, qui semblait, à sa position face aux deux adultes, être le plus jeune et inexpérimenté. Elle y lu une haine à son encontre sortie de nulle part alors qu'il ne la connaissait même pas. Qu'il était présomptueux et idiot ce loup. La blanche pariait aisément que malgré sa carrure, si elle n'avait pas été retenue par ce Dôme maudit, elle l'aurait écrasé sans une once de difficulté. Sa hargne face à ce museau Etelkru méprisant, face à la louve qui la fixait trop intensément et face à la situation injuste de voir l'autre dehors à sa place, ne fût qu'erreur, car la jeune louve se brisa deux griffes dans son impétuosité et retint un couinement de douleur. Elle ne pouvait entendre les paroles au dehors, mais devinait que Mildred n'était pas en bonne position face à ces deux adultes aux airs mécontents. C'était bien fait pour elle. Au moins. Queen lécha ses griffes et longea cette vitre verte sur quelques mètres avant de faire demi tour et de tourner en rond ainsi plusieurs, comme une bête féroce en cage, fixant les ennemis du dehors tout en focalisant son cerveau sur l'observation pour chercher un moyen de sortie auquel personne jusque là n'aurait pensé...




< Joy ; 4 ans et demi

C'est avec une certaine surprise que Joy vit la gamine se redresser fièrement, la défiant dans une réaction tout à fait instinctive d'enfant outrée. Ainsi les deux jeunes se connaissait assez bien pour n'être surtout pas des amies. Un sourire jobard tira les babines de la Bouclier. Elle se remémorait, au même âge, sa rivalité avec Pepper. Quoi que les deux avaient fait de leur compétition une forte complicité et donc une base solide d'amitié pour la suite, ces deux là semblaient être des ennemies naturelles. D'ailleurs la colère de la jeune derrière le Dôme touchait plus de la jalousie que de la panique à vouloir aider sa pote. Quoi qu'il en soit, loin de se formaliser des penchants de gamines d'une autre meute, cela lui confirmait donc que celle-ci, bien que libre actuellement, était bien une Lazuli. Et de ce fait, forcément, vu son âge et le temps depuis lequel cet étrange prison verte s'était posée sur le territoire de leurs ennemis, la brunette venait forcément de là dessous. Il y avait donc un mystère ici. Pourquoi une adolescente avait été capable de sortir de là, alors qu'aucun Lazuli n'avait pu jusque là ? Autre question. Était-elle seule à être passée ou bien y avait-il une brèche ou une porte ou quoi que ce soit qui aurait permis a une escouade de traverser ? L'autre meute majoritaire du continent pouvait-elle se libérer de leur entrave divine ? Reviendraient-ils en épines dans leurs coussinets ? Leurs absences en terres libres avaient drôlement facilité la chasse des Solitaires et Raeders car les Etelkrus n'avaient que eux sur qui se concentrer...  

Bien que potentielle future mère, la louve au pelage de sable n'avait aucune once de compassion pour ces adolescentes intrépides et hargneuses qui ne respectaient visiblement pas les adultes. Ou du moins les Etelkrus. Et ça, ça ne lui plaisait pas du tout à Joy. Lentement, ses babines se soulevèrent sur un grondement sourd. Godric prit la parole, sans doute plus concerné par le sort de loups de son âge, malgré leur appartenance certaine à l'ennemi. La disciple d'Aka se promit d'en toucher quelques mots à la mentor du jeune loup ailé. Il fricotait trop avec l'adversaire. Était-ce à cause de la disparition chez les Solitaires et du retour de sa soeur ? La femelle fronça donc le museau et plissa le regard, se forçant à la patience et à l'observation. En y réfléchissant, les adolescents avaient tendance à être dans la révolte et les prendre de front n'aiderait pas à glaner des infos. Peut-être la sympathie du jeune fils d'Athelstan leur ferait gagner un peu de confiance chez la gamine brune ? Ça se tentait. Les prunelles dorés de la louve se permirent donc une inspection en règle du corps de la jeune louve se tenant droite, quoi qu'un peu moins fièrement maintenant. Joy haussa un sourcil surpris à la question de Godric. Elle ne voyait pas de ressemblance assez frappante pour imaginer ce genre de lien avec la petite dehors. Par contre... Celle de l'intérieur... Il y avait trop de point communs avec l'un de leur puissant guerrier pour que ce soit une coïncidence. Et puis des rumeurs avaient circulées, bien que jamais corroborer par l’intéressé...

Les rayures de la queue, les cheveux qu'elle devinait multicolores mais pas trop vives, et les prunelles supposées blanche ou presque, comme l'un des yeux de Sly. Forcément, cette gamine enfermée était liée à lui, d'une manière ou d'une autre. Hors vu l'âge et la position, la seule explication claire qui apparaissait à son esprit était un lien de parenté aussi directe que celui d'un père et sa fille. De fait, le disciple gris de la Renarde était un traître à la meute, et ça, c'était impardonnable. Une colère brûlante vint chatouiller les tripes de la femelle beige, qui finalement atteignit son seuil d'impatience rapidement. Elle gronda :

« Par où es-tu passée pour sortir de chez toi ? »

Peu importait les raisons de Godric à croire qu'elle pouvait être de son sang, sans doute la perte de l'une de ses sœurs l'avait rendu imaginatif sur ce point, elle restait une Lazuli. On ne pouvait avoir confiance en eux. Ils étaient l'ennemis.

Rhaegar

C'était un jour comme les autres, un de plus à compter sur la calendrier de sa vie devenue un peu trop calme. Il n'était pas du genre à rester assis lui, il était constamment en mouvement. Il s'agissait de sa ronde habituelle, celle qui consistait à longer le dôme en quête d'un regard étranger, d'un espoir de liberté. Comme un garde posté aux frontières, il surveillait, trottant chaque jour sur de longues distances sans s’essouffler. Son allure massive se mouvait comme un ours dans les fourrées, il était la bête protégeant le territoire Lazuli désormais.
Les oreilles pointées vers l'avant, un vacarme inhabituel l'obligea à s'arrêter. Il se concentra pour découvrir l'origine de ces bruits lointains, puis il s'élança à grandes foulées jusqu'à ce que ses yeux puissent éclaircir ce mystère. Là, il vit la jeune Queen collée contre le dôme, s'acharnant comme une hystérique pour tenter ne serait-ce que de l’égratigner. Il l'observa d'un air étonné, un sourcil relevé.

Qu'est-ce que tu ..

Sa voix rauque se stoppa net lorsque ses yeux se posèrent sur d'étranges silhouettes de l'autre côté de la barrière. Il s'approcha aux côtés de la jeune Queen et dévisagea les inconnus d'un air grave. Depuis des lunes, c'était la première fois qu'il voyait d'autres loups s'approcher du dôme. Et.. Qu'est-ce que.. Ses fines prunelles s'arrondirent sur son visage large et sa mâchoire inférieure se décrocha doucement. Mildred ?!

Mildred ?! S'exclama-t-il d'une voix portante.

Son cœur s'affola sous son poil épais, sa poitrine se gonflait à vue d'oeil.

MILDRED !!!!

Il hurla si fort qu'une vibration parcourut le sol sous ses pattes, comme un coup de tonnerre.

Mais comment.. Qu'est-ce que tu as fait ?! Mildred !!

Il avait beau aboyer derrière ce dôme, elle ne devait sûrement pas l'entendre. Pas plus que lui ne les entendait dialoguer, d'ailleurs. Un grondement parcourut sa gorge, sourd et profondément grave. Des étrangers s'en prenaient à elle et il était impuissant, il était enfermé dans une cage, témoin de son enlèvement. Il était désarmé.

D'un coup, il se mit à cogner son corps de toutes ses forces contre la barrière. Il sentait ses muscles s'écraser contre cette couche épaisse, ses os craquaient tant la pression était violente. Ses chaînes tintaient contre la paroi semi-transparente au rythme de ses coups. Il était enragé, il était déchaîné. Et tant pis si il se brisait le corps contre cette foutue cage, tant qu'il pouvait rejoindre sa sœur. Mais c'était en vain.. Rien de ce qu'il faisait n'avait d'impact sur le sort du dieu vert. Cette malédiction prenait beaucoup trop d'ampleur, il était condamné à souffrir et à devenir faible pour des actes passés.

AAAAH MIDOOOO !! Hurla-t-il avec fureur, claquant des mâchoires. D'un coup de patte, il se griffa l'oeil maudit par le dieu vert. Du sang coula le long de son visage.

Akira et maintenant Mildred ? Il ne s'en remettrait pas si cela devait se reproduire. Et Anianka.. Rien que d'y penser, un frisson parcourut tout son corps. Sa mère détruirait tout pour venger ses filles, déjà qu'elle était effrayante, elle deviendrait folle si son cœur devait être brisé à nouveau. Le souffle court, la gueule basse, il respirait comme un buffle. Il releva les yeux vers sa sœur, à la fois sévère et attristé.

Tu vas devoir t'en sortir seule maintenant.
S-o-i-s   f-o-r-t-e. Articula-t-il pour qu'elle comprenne. Elle voulait sortir et elle avait réussi, désormais elle devait survivre et revenir plus endurcie que jamais. Là était l'expérience de sa vie.

Ses yeux clairs et ronds la fixant d’une intense curiosité, la tête du jeune loup brun dépassait de derrière l’Etelkru adulte, se penchant vers elle. Mildred était incapable de dire ce qui semblait tant le captiver chez elle, et elle avait du mal à maintenir son attention à la fois sur la guerrière et sur lui. Surtout que la porteuse du pouvoir d’Aka ne semblait pas s’attendrir devant sa situation, ses babines se soulevant lentement sur ses crocs. Mildred frissonna, gardant sa posture, cette fois davantage par une paralysie qui anticipait la suite avec crainte que par conviction.
Mais il y avait du mouvement de la part du jeune de son âge. Il s’avançait de derrière la beige, émergeant de son ombre, jetant un regard derrière elle- vers le dôme. Elle vit une étincelle passer dans son regard turquoise et l’adolescent découvrit brièvement ses crocs blancs et jeunes.

Mildred imagina que cette marque soudaine d’hostilité était dirigée vers Queen, pour une raison qu’elle ignorait, mais elle ne se retourna pas pour observer sa réaction bien que la tentation fut grande. L’urgence de garder ses deux yeux rivés sur le danger était bien plus imprimée dans son cerveau pour qu’elle ne prenne la peine de s’inquiéter du sort de la blanche. Après tout, ce n’était pas elle qui affrontait deux adversaires féroces en même temps et qui leur tenait tête ! Queen préférait rester bien à l’abri du dôme, elle. Mildred avait beau être plus jeune, elle se montrait déjà digne de son ascendance tandis que la bariolée de sang mêlé ne pouvait que se contenter d’attendre.
Ces brèves pensées donnèrent un léger regain d’énergie à la jeune adolescente, et elle fixa le brun qui s’approchait avec une moue déterminée.
Si elle s’était retournée, pourtant, elle aurait eu le plaisir de voir les griffes de Queen voler en éclats dans sa frénésie à vouloir creuser le dôme. Et elle aurait également pu voir approcher, encore floue et indistincte, la lourde silhouette rouge et noire de son frère qui se frayait un chemin vers la scène.

Mais elle était pour le moment insensible et sourde aux cris qui se déclenchaient tout juste dans son dos, à l’abri de la barrière de Mido. Au moment où la rage de Rhaegar était sur le point d’exploser, c’est le jeune Etelkru dont elle entendit les paroles.

— Tu ressembles un peu à mon père Athelstan, tu ne serais pas de sa famille ? Celle de … Elaine, Korra, Alys, Anastasia … Gloriel …

Son cœur manqua un battement, puis se mit à battre un peu plus fort.
Une liste de noms inconnus avait défilé, la laissant de marbre et seulement suspicieuse face aux allégations du mâle qui lui paraissaient bien infondées –après tout, il y avait certes des ressemblances entre eux qu’elle ne pouvait nier, notamment cette allure chevaleresque qu’elle savait venir du côté de son paternel. Mais elle, elle ressemblait bien plus à Anianka qu’à Gloriel. Alors que cet Etelkru puisse s’associer aussi directement à elle lui avait seulement paru absurde.
Puis il avait cité son nom.
Elle avait tenté de ne pas changer d’expression, mais ses yeux plissés s’étaient arrondis malgré elle sous la surprise.

Elle put cependant le mettre sur le compte d’un autre élément – puisqu’en même temps venait d’apparaître un autre loup de leur clan, encore, se rapprochant sans un mot et lui aussi porteur de la flamme d’Aka. Les oreilles de Mildred tombèrent peu à peu en arrière face à cette menace qui n’en finissait de s’accroître. Que faisaient autant de membres de leur clan si proches de leurs frontières, d’ailleurs ?

— Ils sont où, ta famille ?

Ses yeux vairons filèrent à nouveau vers l’adolescent de son âge, essayant de canaliser ses pensées.

— Par où es-tu passée pour sortir de chez toi ?

Et ils filèrent dans l’autre sens, encore une fois, sur la louve grondante. Si elle avait eu le temps d’analyser ses émotions, elle se serait peut-être sentie paniquer un petit peu. Elle sentait s’abattre sur elle l’impatience vibrante de la guerrière, la curiosité invasive de l’adolescent, la méfiance silencieuse de l’autre mâle adulte et tout cela s’accumulait sur ses fragiles épaules. Elle s’était imaginée faire face à un inconnu, en sortant de leur prison dorée ; c’était naturel.

Pas à trois d’un coup dont la majorité semblait hostile à sa présence, elle qui pourtant n’était pas loin de chez elle et pouvait sentir la présence légèrement électrique du dôme divin dans son dos.

Et elle ne savait pas comment réagir, car les enseignements de ses parents ne mentionnaient pas la conduite à tenir dans une situation qu’elle n’était pas censée rencontrer.
Derrière elle, la faible pulsation familière émise par le dôme s’intensifia soudainement et hérissa son échine. Cette fois-ci elle ne put s’empêcher d’amorcer un demi-tour à moitié avorté, tentant maladroitement de tourner son corps à la fois vers le tumulte qui s’était réveillé dans son dos tout en préservant sa garde face aux inconnus.

S’écrasant violemment contre la paroi immuable, le corps massif de son demi-frère s’abattait de toutes ses forces contre le mur translucide. Son corps fut parcouru d’un frisson à chaque nouvel assaut, sa queue se cachant instinctivement chaque fois un peu plus entre ses jambes devant un tel déferlement de colère. Son cœur sombra dans sa poitrine et elle ouvrit la gueule pour lui dire de cesser, mais elle sut qu’elle ne serait de toute manière pas entendue – et ce savoir mêlé au choc qu’elle ressentait ne laissa aucun son sortir de ses mâchoires entrouvertes.
Mais comme s’il avait entendu sa plainte silencieuse, Rhaegar cessa de projeter ses muscles contre la barrière. Il hurla vers le ciel à la place, claqua ses lourdes mâchoires, et de rage ses griffes déchirèrent la peau autour de son œil maudit. Mildred frissonna, encore. Elle n’avait jamais vu son frère dans cet état. Il lui faisait peur. Et au même instant elle prenait conscience de la puissance renfermée dans ce corps, du pouvoir de destruction qu’amenait le désespoir et le désir de venger et protéger. La démonstration de force était terrifiante et avait de nouveau lancé une série de tremblement dans ses membres.
Une force pourtant si facilement brisée et muselée par le pouvoir des Dieux.

Il y eut un léger moment de flottement, Rhaegar semblait s’être calmé, gagné par l’impuissance de son physique contre la fine mais impénétrable barrière et il la fixait désormais d’un regard résigné et lourd de fatigue. Elle pouvait y lire l’attachement et l’inquiétude, la dureté et l’encouragement. Et sa gueule épaisse se mit à se mouvoir, détachant les syllabes à son attention. Elle ne parvint pas à saisir l’intégralité de ce qu’il prononça car son esprit brouillé et dissipé ne s’était pas concentré à temps pour pouvoir enchaîner les maillons, mais elle n’en eut pas besoin. Elle en comprit l’essence, elle comprit le message de Rhaegar et il insuffla une nouvelle chaleur dans son torse qui chassa son choc et sa peine à voir son frère ainsi.
Elle redressa les oreilles, lui adressa un hochement de tête discret mais ferme et afficha un large sourire déterminé, autant pour le rassurer et lui promettre de s’en sortir que pour se ragaillardir elle-même. Elle ne ferait pas honte à sa famille.

La décision de se détacher du dôme fut difficile, un nouveau petit déchirement. Pourtant elle retourna son corps vers les trois Etelkrus de l’autre côté –du côté du nouveau monde. Une nouvelle flamme brillait dans son regard, vacillante mais résolue à ne pas s’éteindre.

Elle aurait voulu ne pas avoir à révéler immédiatement sa famille et les liens qui l’unissait profondément aux Lazulis, car elle y voyait là une carte à double tranchant –ainsi qu’une échappatoire un peu trop directe en misant sur autre chose que ses propres capacités pour se sortir d’une situation délicate.
Révéler sa famille allait révéler sa valeur – et par conséquent ces Etelkrus n’oseraient probablement pas lui faire de mal, mais elle n’aurait aucun mérite à s’être sortie seule de sa première altercation directe avec l’extérieur. Et il y avait toujours un risque de chantage pour la rendre à ses parents, après. Pourtant, quelque chose lui disait que la sincérité dans les yeux de l’adolescent de son âge lorsqu’il avait cité Gloriel ne pouvait qu’être bon signe pour elle. S’ils étaient réellement de proche famille… Rien ne pourrait mal se passer, n’est-ce pas ?

Mildred déglutit, puis prit une grande inspiration, ses yeux vairons passant sur chacun des Etelkrus. Une petite partie d’elle avait honte, d’une certaine manière, de ce qu’elle s’apprêtait à faire. Mais elle devait bien répondre à ses interlocuteurs, n’est-ce pas ?
Et puis, le dôme éteindrait sa voix qui jamais ne porterait ses paroles en territoires Lazulis. C’était entre elle et eux.

Relevant le cou et le poitrail pour se hisser de toute sa hauteur, Mildred clama sa tirade d’une voix claire dont elle maîtrisa la plupart des tremblements.

— Je suis la fille de l’Alpha Gloriel et de la Prêtresse de Moiro, Anianka, fille de l’Alpha Morrow !

Et si vous me faites du mal, vous devrez rendre des comptes à ma famille.
Elle ne l’ajouta pas, cependant, car cela pousserait trop loin l’utilisation de sa carte magique de petite princesse Lazulis. Et Rhaegar avait de toute manière fait une démonstration suffisamment précise de ce qu'il se passerait si un seul de ses cheveux venait à manquer.

D’une voix plus basse et renfrognée et baissant les yeux sur ses pattes, elle ajouta quelques mots en réponse à la guerrière beige.

— Et j’ai pas le droit de dire comment je suis sortie.

La vérité, c’était surtout qu’elle n’y pouvait rien. Mais laisser planer le doute sur un passage éventuel possible par quelques heureux élus détenant l’information offrait bien plus d’avantages dans sa présente situation.