La casse patte et la terreur (Makuro / Chima)

Encore une fois, Chimaera venait de se faire mettre dehors par son père qui en avait assez de l'entendre râler. Le voilà qu'il était en train de grogner, assis sur le sable en fixant d'un œil mauvais ceux qui passait trop près de lui. Bon sang, pourquoi ici tout le monde l'énervait à ce point.. Quand ils n'étaient pas barbants, ils étaient ennuyants, chiant, ou trop sérieux ou trop agressif. LE jeune loup n'en pouvait plus de ce monde tordu selon lui. Dans un dernier grognement de haine intérieur, voilà qu'il se lève en tapant ses pattes dans tout ce qu'il pouvait trouver.


Pourquoi c'était toujours lui que son père mettait dehors? Pourquoi c'était toujours lui qu'il engueulait? Il ne l'aimait pas ou quoi? Frustré, il se met à trotter sur le sable, slalomant entre les loups, les objets, les dunes. Parfois il coursait les oiseaux qui osait se mettre sur son chemin en claquant des mâchoires avec un infime espoir de leur prendre les ailes ou les pattes. Mais comme chaque fois, il se mélangeait les pattes et se pétait la tronche dans le sable fin.


Sérieux, il en avait marre de ne pas savoir tenir parfois.


Le petit mâle se mit finalement assit sur une dune plus haute que les autres et observe. Il s'ennuyait, voilà pourquoi il faisait que des bêtises aussi, il s'ennuyait. Sa poitrine gonfla, inspirant une grande bouffée d'air avant de relâcher bruyamment. Sa vue, perçu même grâce à ce petit moment calme, une masse. Elle était plus ou moins sombre, mauve? Noir? Pensant l'avoir déjà vu, Chima eu une petite idée. Il allait tenter de l'ennuyer bien sûr. Tel le démon qu'il était, il se mit à courir vers la louve, sa tête penchée en avant pour mieux frapper et...une fois proche, sautait pour la renverser.


Et ce fut loupé. Au lieu de lui bourrer dans le lard, son corps percuta les fesses de la jeune louve et il retombait sur le sable comme une crotte. Honteux, il grogne en se mettant assit, crachant le sable en râlant que c'était immonde.

Du haut de ses huit mois, Makuro ne voyait pas le monde de beaucoup plus haut : elle avait gagné en âge mais si peu en taille, restant ce petit puceron qui s'agitait dans le sable et que tous les louveteaux, même les plus tardifs, avaient rattrapé en taille ! Mais pas en fourberie, non non. Si son frère s'entraînait sans relâche à polir ses griffes contre le bois des arbres et à nager à contre courant, elle se concentrait sur des savoirs qu'elle jugeait bien plus utiles. Savoir se fondre dans les ombres et en sortir comme un diable de sa boite, par exemple. Réussir à suivre un adulte sans se faire prendre, et lui faire peur au moment où il s'y attend le moins. Plonger dans l'encre de seiche pour devenir invisible... Sauf à l'heure du repas. Et là, c'était le moment où généralement elle se faisait engueuler ! En théorie. Parce qu'elle parvenait souvent à y échapper. Des fois c'était Eros qui l'avait poussé dans l'eau (non). Des fois elle pleurnichait simplement un peu pour que ça passe.

Bref.

Ce genre de choses.

Elle était en train de réfléchir à sa prochaine bêtise lorsque quelque chose déboula à toute allure et lui percuta les fesses, lui faisant décrire une pirouette et demi qui l'amena face au curieux phénomène qui mangeait présentement du sable. Makuro cligna des yeux, surprise.

Bah.

Il s'agissait d'un gamin déjà aussi grand qu'elle bien que plus jeune, un des gosses de la portée d'Abysse (ça c'était facile à voir) et l'autre là avec les dreads. Naïade.

Bah qu'est-ce tu fous ?

C'est vrai ça. A foncer dans les gens comme ça ! Oreilles pointées en avant et ne tenant pas rigueur de l'attitude de son camarade, elle fit un petit bond vers lui, lapin curieux.

Chimaera recracha les derniers grains de sable de sa gueule, toujours en grimaçant comme s'il venait de goûter une algue bien salée et tournait la tête vers la femelle. Ce qu'il foutait? Elle était sérieuse là? Le jeune mâle se relevait finalement pour se secouer, ôtant les grains de sa fourrure et pointa son museau vers elle. Sa petite lampe, retombant en avant, fixant cette idiote.



"-Ce que je fais? J'étais en train de goûter le sable, tranquille!" Fit le jeune mousse comme si tout allait bien avant de se mettre à grogner. "T'es bête ou quoi? Je viens de me planter parce que...parce que tu possèdes de trop grosses fesses!! J'ai rebondis et tu m'as fais valser pauvre idiote!" Et voilà, elle venait de l'énerver. Il venait aussi de s'énerver tout seul ce n'était pas très compliqué. Son postérieur vint heurter le sol lourdement.



"-Je voulais te bourrer dedans pour te mettre à terre! Mais tu es trop grosse, ça a fais mur!" Un sourire en coin, une babine retroussée par l'amusement mesquin. Il la regarde du coin de l'oeil.

Tant d'agressivité dans un si petit corps ! Il râlait et râlait, tournait et tournait, brayait comme un poulpe en colère tout en crachant son sable. Elle éclata d'un petit rire cristallin, un peu éraillé sur la fin, et agita son long plumeau blanc.

D'accord !

D'accord. Tout simplement. Elle prit quand même le temps de regarder son corps minuscule, presque entièrement caché de sa cape noire aggraffée d'une araignée d'argent.

Mais je ne suis pas si grosse. Et je ne suis pas idiote non plus.

Ca, elle le savait. Eros, il était idiot. Il faisait des câlins à tout le monde. Et il tombait toujours dans tous ses pièges. Non, elle n'était pas idiote, loin de là. Et pour être grosse... Elle perdait de plus en plus les rondeurs de l'enfance, et était minuscule. Est-ce qu'il disait ça parce qu'elle était minuscule ? Il avait du se tromper de mot.

Tu devrais être plus gentil. Si tu es plus gentil, je te montrerai des secrets.

L'île, après tout, en était remplie. Et elle en était la grande chasseresse !

Chimaera fut plus que surpris de la voir se moquer de lui. Sinon pourquoi elle rirait au juste? Il n'avait rien dis de drôle. Rien que cette idée lui donnait envie de la mordre pour la faire taire, mais il put se contenir, quand même un peu. Il n'aimait pas qu'on se moque de lui. Mais il aimait encore moins se faire engueuler.



Alors il prit sur lui en écoutant la femelle blalblater. De toute façon quoi qu'elle dise, lui restait campé sur ses positions, et comme il aimait ses positions, et bien, il se fichait de ce qu'elle disait, ça lui passait au-dessus de la tête. D'ailleurs, il voulut se lever et tourner les talons pour partir loin de cette énergumène, mais sa phrase le bloqua. Chima coula des yeux intéressé vers elle en lâchant un petit mh.



"-Des secrets??" Il se remit face à elle, plongeant son regard clair dans celui de la louve, au fond cela l'intéressait énormément, vu qu'il voulait devenir aventurier, explorateur. "Jure que tu ne me mens pas sinon tu goûteras de mes crocs! Je n'aime pas les menteurs! Et encore moins quand on se moque de ma poire!" C'était clair, s'il apprenait qu'elle s'était ouvertement foutu de lui, il ne se retiendrait pas pour lui foutre une raclée, et ce même si il avait sans doute aucune chance. Rien ne pourrait retenir un Chimaera énervé pour de bons.

Décidément, il ne savait pas rester calme. Makuro le fixait droit dans les yeux, amusée, ses oreilles s'agitant de tous côtés avec une flexibilité dérangeante. Elle agita ses pattes pour les enfouir dans le sable et les en ressortir. Elle bondit et aspergea les environs de grains désagréables.

J'ai dit que je montrais aux gentils seulement, les secrets que je promets posséder.

Elle attendait, museau en direction de son interlocuteur, la façon dont il allait bien pouvoir prouver sa gentillesse.

Chima soupirait. Il pensait sincèrement qu'elle allait se moquer de lui, et pour être franc, il n'était pas un ange pur. Pourquoi il irait mentir après tout? C'était les faux cul qui faisait ça.



"-Si je dis être un loup sage je ne ferais que mentir! Hors, je ne suis pas un menteur! Alors si tu ne veux pas me montrer les secrets ou je ne sais pas quoi tant pis, mais mentir non!" Il souffla par la truffe. "Tout les loups font des bêtises! Toi même je suis certain que tu en fais! Alors? Tu veux bien me les montrer? Et je serais gentil un peu plus que la normal!"

Elle éclata de rire de nouveau, tournant sur elle-même dans le sable.

Je n'ai pas dit un loup sage ! J'ai dit un loup gentil, c'est différent.

Elle lui fit un petit signe de patte et détala vers les rochers.

Mais viens ! Je vais te montrer. Je vais t'en montrer un !

Elle fouina entre les rochers, à la recherche semblait-il de quelque chose. Elle finit par trouver. La cachant de la vue du loup bleu, elle jeta un regard par dessus son épaule.

Je l'ai ! Donne moi ton nom, et je te la montre.

Et elle était de belle taille.

Différent? Chimaera trouvait que cela se ressemblait fortement, car un loup sage, forcément il sera gentil. Non? Comme les lèches pattes. Un frisson parcourut son échine à cette idée et il reposait son regard sur la louve mauve. Quand elle l'invitait à la suivre, le mâle se mit à l'accompagner pour voir ce fameux secret. Le petit mâle gardait en tête que si elle lui faisait un sale coup il lui mordrait bien profond la cuisse pour lui faire payer. Qu'elle prenne garde, quand il dit quelque chose il y tien.


Pendant qu'elle cherchait entre les rochers, Chima tentait de regarder en douce pour voir avant ce qu'elle allait sortir. Son cou grimpait et grimpait avant de se remettre à sa place quand elle tournait la tête. Ce n'était pas trop tôt.


Quand Makuro se mit à parler lui se mit assit en fermant sa bouche. Son nom?


"-Mon nom est Chimaera!" Fit-il en souriant. Impatient de voir son dit secret.

TW ATTENTION GROSSE ARAIGNEE !:

Chimaera...

D'une pirouette souple et délicate, elle dévoila une énorme araignée. En fait, elle devait tenir son corps à deux pattes et la porter haut pour qu'elle ne racle pas le sol, tant elle était imposante : de la même taille que Makuro et Chimaera.

Je te présente Doudou.

Oui, Doudou c'était un bon prénom. Ledit Doudou tricota de ses pattes en direction du mâle.

C'est une araignée Spa-Ra-Ssi-Da-é. Je l'ai lu dans un livre.

Elle avait du embêter beaucoup de monde, pour apprendre à lire, mais elle avait besoin de comprendre ce qu'il y avait dans ces livres avec mille dessins d'araignées. Surtout que, si ces bêtes lui étaient toujours sympathiques, certaines n'aimaient pas qu'on envahisse leur territoire.

Elle peut mordre si on l'embête, mais elle est très gentille. Regarde, touche !

Elle la posa entre eux, tapotant l'abdomen de la bête.

Makuro fronça les sourcils. Elle ne loupait jamais rien, dans ce qu'on lui disait, même lorsqu'elle donnait l'impression de ne pas écouter. C'était très important, d'écouter ce que les gens disaient. Parce que des fois, ils parlaient trop, les gens.

C'est quoi, ta peluche ?

C'était important, comme question. Une peluche, c'est doux, et c'est rigolo.

Elle s'appelle comment ?

Elle était curieuse, Makuro. C'était probablement son plus gros défaut - avec sa propension à toujours vouloir rouler son monde dans la farine. La louvette laissa échapper son doux rire tintinnabulant, avant de frotter les pattes de l'araignée qui se laissa faire, statique.

Mais c'est pas une tueuse ! A la limite, TisseToiles ou TricotePattes. Mais Doudou, c'est bien. On peut lui faire des câlins comme à un Doudou.

Mais la louve violette n'était pas du genre à garder une question sans réponse. Elle voulait savoir, et c'était très important. Sentant qu'avec l'araignée elle disposait d'un levier intéressant sur le louveteau bleu, elle fit claquer sa langue contre son palais :

Je te répondrai, si tu me parles de ta peluche. C'est ça, être gentil !

On lui faisait pas, à elle !

En plus, c'est ce qu'il y a de plus intéressant chez les araignées.

Crois le.

Tant et si peu d'informations à la fois ! Il lui offrait de quoi se mettre sous la dent et toute la frustration de vouloir en savoir plus. Elle piailla un peu plus fort :

Oui mais ! C'est quoi ! Un requin ? Une baleine ? Une raie manta ?

Elle agita sa longue queue immaculée.

J'ai pas besoin d'une peluche. Eros il fait plein de câlins, déjà. Si il fallait rajouter une peluche, ce serait compliqué. Pourquoi tu la caches, si tu l'aimes ?

Elle observa l'endroit désigné par Chim' et cligna des yeux :

Ca, c'est pour faire sa toile !

Elle se décala sur le côté et pointa la grotte d'où elle avait tiré l'araignée du doigt, pour qu'il puisse observer le résultat.

Et elle mange des petits mammifères et des insectes, tout ce que peut prendre sa toile ! Je pense qu'elle pourrait manger un tout bébé loup, si elle le voulait. Mais bon, on la laissera pas, quand même !

Elle gloussa.

Il haussait les épaules. Jamais il ne lui avait dit qu'elle devait prendre une peluche aussi. Au contraire, c'était le genre de chose qu'il ne fallait pas avoir si on voulait être assuré d'une certaine crédibilité. Et puis, si elle voulait qu'il parle encore plus, il fallait à présent qu'elle, elle parle. Alors il ignora sa question sur la forme de son doudou.

Et écoutait tout souriant ses informations qu'elle lui donnait.

"-Si jamais j'apprends qu'elle mange des bébés loup, ton amie ou pas je la mange! Ainsi je lui montre qui est le patron!"

Chima fini par se coucher. La tête vers le ciel et ses rayons.

"-Finalement, il est nul ton secret! Une stupide araignée qui ne tue même pas! Je m'attendais à beaucoup mieux que ça!" Pour accompagner ses mots, voilà qu'il fixe l'araignée en tapant ses pattes avant dans les siennes. Peut-être qu'elle pouvait se montrer effrayante? Ainsi on pourrait l'utiliser pour les étrangers à l'ile? Qui sait.

Elle fit claquer sa langue contre son palais et tourna sur elle-même avant de reprendre l'araignée et de la ranger délicatement dans son trou. Là, elle serait mieux qu'avec le gros hargneux râleur ! Makuro gloussa :

C'est toujours un meilleur secret que ta peluche, tu ne trouves pas ?

Ca n'était pas très gentil. Mais même si elle ne le montrait pas, au travers de ses sourires et de ses petits crocs blancs dévoilés, elle n'appréciait pas trop son petit manège à Chim. Un peu comme s'il pensait être le patron.

J'ai d'autres secrets. Mais ça n'est pas comme ça que tu les découvriras !

Elle sourit toujours, de toutes ses petites dents, et sa queue s'agite à côté d'elle.

Joviale et souriante.

Chima grogna de plus belle. Elle se croyait elle aussi mieux c'était ça ? Pourquoi elle serait mieux que lui au juste ? Si elle n'aimait pas qu'on lui confie des choses qu'elle le dise, clairement ça lui éviterait de gaspiller de la salive pour rien.

"-Bah écoute, si tu n'aimes pas les secrets, bah, je n'en dirais plus!" Puis il la fixe, elle essayait vraiment de le coincer en fait, de lui faire tenir les ficelles comme l'araignée. Elle tente de le piéger en lui mettant des choix de si tu fais pas ça tu n'auras pas.

"-Bah écoute aussi, tant pis? Je n'ai pas envie que tu me prennes pour un pantin! Je ne suis pas idiot!" Il lui tira la langue. Après tout ce n'était encore qu'un louveteau.

Elle gloussa de plus belle en le voyant vexé comme un pou. Vraiment, c'était trop facile ! Il suffisait de dire un peu n'importe quoi, et voilà qu'il prenait la mouche ! Makuro piailla :

D'accord. Tu pourras revenir quand tu veux ! Si tu veux échanger tes secrets contre mes secrets.

Une multitude de petites araignées qui semblaient venir de partout et nulle part à la fois virent entourer Chima à la façon d'une armée miniature.

C'est si excitant, de connaître de nouveaux secrets tu ne trouves pas ?

Elle souriait, les petites bêtes à huit pattes courant sur son corps comme sur la terre, sans se soucier de ses mouvements.