Patte morte et âme fatiguée (feat Uma)

La montagne était plus bruyante qu’à l’habitude, des cailloux plus ou moins grands faisaient la course jusqu’au pied de celle-ci. Prise au dépourvu, la louve avait retenu un cri dans sa gorge. Elle préférait bien mieux entendre des bruits le soleil levé, où l’horizon était facilement perceptible… le cœur battant, elle s’approcha néanmoins de la source du bruit.

Pas qu’elle était la reine de cette montagne, mais la blanche avait installé sa tanière non loin d’ici. Elle ne démontra aucune once d’agressivité, offrant un regard curieux à l’inconnu qu’elle commençait à apercevoir. Elle ne cherchait cependant pas la bagarre, surtout qu’elle ne voulait pas partir d’ici… elle commençait à avoir sa routine. En faisant comme si rien n’était, la solitaire s’assit tranquillement, comme pour dire qu’elle n’était pas de passage… la louve beige allait peut-être partir face à cette action, désireuse d’être seule ?

Parlant de la nouvelle venue, Uma prit le temps de la reluquer de haut en bas, à présent plus calme. Sa chevelure était magnifique, tout comme la façon dont elle avait choisi de porter ses accessoires. Umaïma prit mentalement en ordre ses couleurs arborés, peut-être pouvait-elle créer un nouveau look avec ces couleurs de pastels ?

Elle ne dit rien, mais stoppa quand même de la regarder aussi intensément, car c’était impoli. Il ne restait qu’à attendre la prochaine action de l’autre, dépendamment de la direction que l’inconnue allait choisir, l’odeur de la tanière d’Uma allait probablement chatouiller ses narines. C’était pas si malin que ça d’avoir cueillit des fleurs pour son petit nid, bien que jolies…

Oui, comment s'appellait-elle ? Pour un moment, elle avait trouvé ça marrant de s'inventer un nouveau nom... après tout, personne ne la connaissait ici, elle pouvait repartir à zéro ! Elle n'avait cependant aucun problème avec son nom de naissance, alors elle allait le garder jusqu'à la fin. Plutôt ennuyeuse comme louve…

" Je suis Uma." dit-elle doucement en se pointant de la patte. Il était inutile de dire son nom au complet, elle n’allait surement pas le retenir...

La louve blanche relâcha un faible rire après coup, nerveuse d'entendre sa propre voix. Cela faisait un moment qu'elle ne s'était pas adressée verbalement à quelqu'un en y pensant bien. En solitaire, elle réfléchissait dans sa tête, ne sentait pas le besoin de parler à vive voix et encore moins de chanter. Le silence lui était familier, confortable. Avec sa mère, elle n'avait jamais eu à lui parler, les signes et les regards étaient leur seul moyen de se comprendre. C'était l’unique chose qui lui manquait de sa terre d'origine, quelqu'un qui savait tout d'elle déjà.

" Et toi ? "

Allez, il fallait bien faire un effort ! Au moins, l'inconnue ne montrait aucuns signes d'agressivités, donc ce n’était pas comme si Uma était dans le pétrin de faire de même ! Sauf qu’il y avait toujours une petite partie dans sa tête qui ne faisais jamais cent pour cent confiance aux gens, proches ou étrangés. La louve garda ses distances, patiente.

(C'est parfait t'inquiètes !)

Bien que l’air d’Uma fut le plus neutre possible, le poil de ses épaules se redressa malgré elle en réponse à la louve beige. Un endroit où dormir ? Uma savait alors que sa cachette n’était pas si subtile en fin de compte, comme elle était sotte. Sa décoration valait-elle autant la peine du coup ? Elle vivait une vie de solitaire à présent, elle se devait d’être plus subtile vis-à-vie de son territoire, car quelqu’un pouvait lui arracher si facilement...

Uma n’était pas du tout dotée d’une force physique quelconque, elle était plutôt du genre à s’enfuir au moindre danger de violence. Mais ici, elle perdrait plus gros : un abri, des environs un peu plus familiers, une routine, des réserves... décidément elle était dans une situation inconfortable. Fallait-il qu’elle s’attende au pire ? Ce qui était certain, c’était qu’elle était loin de faire confiance à cette dénommée Tris, bien que présentement, aucun signe autre que sa volonté de se trouver un abri rapidement ne démontrait de l’agressivité. C’était en fait assez compréhensible de vouloir trouver un toit où se loger, surtout sur cette vaste montagne... mais Uma ne se sentait pas particulièrement d’une humeur chaleureuse.

En “quelque sorte” ?

Allez, autant la faire parler un peu plus, voir s’il y avait vraiment une raison de s’inquiéter ou pas.

Si la louve pensait être plus convaincante, ce n'était pas vraiment le cas. Bien qu'Uma ne sentait pas que l'inconnu était totalement sincère, elle ne la voyait pas comme quelqu'un d'agressif. Elle avait été patiente avec l'hésitation d'Umaïma, ne semblait pas la regarder avec un air de défi. Elles étaient tout simplement au mauvais endroit au mauvais moment. La louve blanche regarda ailleurs un moment, comme pour montrer qu'elle réfléchissait plus longtemps à la décision qu'elle allait prendre, elle soupira.

" Tu peux venir... mais ne touches à rien. "

En fin de compte, Uma préférait l'avoir à l'oeil que savoir que Tris trainait dans les parages. Puis qui sait, peut-être qu'un jour elle allait avoir besoin d'un abris à son tour, et Tris pourrait l'aider ? Cet événement avait vraiment de faible chance de se produire, mais la solitaire ne pouvait pas négliger ses affiliations avec les loups de ce territoire. Valait mieux ne pas se faire d'ennemis inutilement, au risque d'y laisser sa peau... peut-être réfléchissait-elle trop aussi.

Elle se dirigea vers sa tanière, une petite marche de quelques minutes au menu. Elle regardait par-dessus son épaule de temps en temps, pour voir si Tris avait changé d'avis. Arrivées à l'entrée, elle fit signe à la solitaire de rentrer en premier. Les fleurs décoraient l'intérieur, une proie à demi enterrée au fond. Peut-être que Tris avait faim aussi, alors si elle voulait se servir de ce restant de lapin douteux, pourquoi pas.

" C'est ici... "

La socialisation n'était pas son point fort, encore moins pour cette soirée de dernière minute, mais elle faisait de son mieux.

" T'as jamais peur que quelqu'un te pique tes affaires ? "

Uma regarda autour d'elle, cette crevasse ressemblant à une boutique d'un fleuriste. Mis à part quelques concoctions de couleurs qu'elle avait récemment créé pour du maquillage qui trainaient ici et là, il n'y avait rien de précieux à ses yeux. Du moins, ça l'étonnerait qu'un loup veuille de ses babioles inutiles, bien que jolies.

" Je n'ai rien de bien important. " répondit-elle.

Était-ce triste ? Peut-être pas, qui voulait être esclave de ses objets et risquer de tout perdre à tout moment ? Elle savait bien que ce n'était pas tout les loups qui menaient leur vie avec de bonnes intentions, mais il n'y avait rien ici de concrètement utile à la survie ou au combat. Elle évitait de rapporter des trop grosses proies dans son terrier, de peur qu'un autre prédateur pointe le bout de son nez. Seulement une carcasse de secours, une petite collation si on voulait être moins morbide, était là lorsque la météo n'était pas clémente pour la chasse.

" En ces terres, les loups sont-ils matérialistes et protecteurs de leurs territoires ? " demanda t-elle timidement.

C'était une généralisation certes, mais si la blanche pouvait récolter quelques informations sur les loups de clans demeurant proche d'ici, elle en serait reconnaissante de savoir à quoi s'attendre dans les mois à venir...

Elle vînt se coucher, à une distance raisonnable de la louve, elle allait probablement dormir d'un œil ce soir.

Tris lui donna une réponse plus ou moins claire, la louve comprenant qu'il ne fallait pas généraliser non plus.

Etelkrus, un nom d'un clan qui était tout nouveau aux oreilles d'Uma, ne sachant pas quoi penser de son ignorance face à cette meute. Leur territoire était-il proche d'ici ? En avait-elle rencontrer sans s'en rendre compte ? Avait-elle naïvement entrer dans leur territoire ? Qu'elle sotte qu'Uma pouvait être !

" Non, mais j'ai pu discuter avec quelques Nakhus. Ils sont accueillants. "

Des images de Junlahdwiin, le petit Cheza et de la douce Crystal lui vînt en tête. Il n'avait pas eu une once de méchanceté dans ces regards, seulement une curiosité réciproque, un intérêt à comprendre d'où elle venait. Les Etelkrus étaient-ils de même ? Il ne fallait pas qu'Uma se laisse emballer par la peur de ses inconnus, de prendre cette nouvelle information comme négative.

Qui sait si la solitaire racontait la vérité ?

La louve bicolore ne dit rien de plus, ne s'attendant pas nécessairement à une conversation plus longue avec l'autre. Elle déposa sa tête au sol, ferma les yeux lentement.