Un fils revenu [Libre]

Invité

Loin dans le Sud il avait été et proche du Nord il était revenu. Le coeur serré, le visage tiré, il était assis devant ce qui restait de sa Mère. Elle n'était plus. Il l'avait su quelques jours plutôt. Un pressentiment de mort, un présage envoyé par son Aimée la Mort. Il avait abandonné ses recherches, il avait arrêté son voyage pour remonter. Il avait usé son corps en franchissement des monts. Il avait affamé estomac en se refusant des pauses pour bien le nourrir. Il avait rendu son esprit malade en repoussant le sommeil. Il était semblable à un des spectres qu'il voyait. Ses yeux étaient rouges, ses babines pincées en une grimace et bravement la météo, il avait fini par y arriver, guidé par les Errants qui l'avaient emmené sur le lieu où se dressait un nouveau mort.

« Je sais que vous êtes là, Mère.

Le cognassier sembla s'agiter et Elle était devant lui, souriante. Maintenue dans ce monde par un regret, elle l'avait attendu, lui, son fils. Il esquiva un sourire. S'il pouvait la voir, étreinte n'était possible. Il ne dit rien de plus et fouillant dans ses sacoches, il sortit une magnifique fleur bleue séchée. Il l'avait récupéré par-delà l'imagination de sa Mère, là où elle n'avait pu se rendre de par son corps et sa santé. Il déposa son présent auprès d'elle, le glissant dans le collier pour que Vent ne puisse dérober la fleur.

« Comment peux-tu ...
« Je vois les Défunts tout comme je les entends depuis quelques mois déjà sans en connaître la raison.

Lui espérait que Mort l'avait récompensé de son Amour par ce don.

« Oh ... Je suis heureuse de te voir. Une dernière fois.

Elle lui accorda l'un de ses sourires les plus radieux. Elle s'approcha de lui et même si cela était impossible, elle mima de l'étreindre. Si chaleur elle ressentait lui se percutait au froid. Son coeur était rempli de tristesse mais nulle larme ne coula. Sa Mère avait rejoint son Amante et aujourd'hui, elles étaient réunies. Heinly trouvait cela magnifique.

« Je vous aime. Reposez en paix.

La louve se détacha de lui et dans un dernier sourire, elle s'évapora. Son temps d'errance était révolu. Son plus grand regret balayé par les paroles de son fils. Elle aurait voulu rester plus longtemps mais ça en était fini. Il fallait qu'elle aille retrouver les siens défunts quand lui restait là, vérifiant qu'elle ne revienne pas Damnée en ce monde de Vie. Il ne pleurait toujours pas. Il gardait ce sourire tiré entre joie et peine.

Le bambou ? Check. Les épines rocheuses ? Check. Un marteau beaucoup trop gros pour lui ? Check. Les lianes, la boue, et un tas visqueux de mucus et d'ichor ? Check.
Il passa une patte noircie de son travail sur sa barbiche, contemplant d'un regard évasif le potager. La chaleur arrivait, paisiblement ; et si tout ce soleil était un pur plaisir pour la photosynthèse, nul doute qu'il ne tarderait pas à assécher, comme chaque année, la terre. Un drame qui condamnait bien des plantes et donc des récoltes.

Certes les loups n'avaient pas besoin de végétaux. Mais quand même. Merde. On pouvait faire tellement de choses avec un peu d'idée et d'ingéniosité. Perdre d'avantage de produits était juste une purge mentale pour Apocryphos ; et dans un élan d'énergie, il s'était empressé d'aller récolter avec l'aide de son -vieux- père de quoi résoudre le problème.

Il ne restait plus qu'à creuser la terre. Et déesse Yurai, qu'il était mauvais à cela. Pas que le travail salissant était un soucis, il avait fait bien pire ; mais c'était si épuisant de retourner la terre. Si long. Si... peu gratifiant mentalement. Le peu qu'il avait réalisé l'ennuyait déjà, et il n'était passé qu'entre deux pieds de tomates. Approximativement deux minutes et trente six secondes de travail acharné ; ce qui pouvait se convertir en deux vers de terre et trente six soupirs.

Il soupira, balbutiant quelques noms d'oiseaux à sa propre faiblesse.

Qu'il allait devoir compenser par un peu de gentillesse.
Faire les yeux doux à un quelconque maraud musclé. En tout cas plus que lui. Non parce que, dans les Nahkus, a part Ajani, on se plaçait au même niveau que sa digue question force physique. C'était navrant. Après tout, a quoi bon avoir des tas d'idées si la bande de crevettes était incapable de les réaliser.

Quelques mots le sortirent de ses pensées.
Relevant la tête, il chercha du regard le perturbateur de créativité, le trouvant, non loin, assis et le visage emplit d'émotions à la forte teneur négative. Il s'approche, curieux, mais surtout ravi de trouver quelqu'un qui pourrait potentiellement l'aider.

- Salut ★

Il se planta à ses cotés, tout sourire.

- T'as l'air super triste c'est cool dis tu veux bien m'aider avec le potager avant que les plantes meurent steuplé merci ?

Il prit une respiration soudaine, simple ponctuation dans cette phrase bien longue.

- T'as pleuré ? T'as des allergies ? Tu veux un remède ? Ou un câlin ? Je suis pas doué en câlin mais ma sœur l'est alors si tu veux je peux lui dire de venir t'en faire un tu verras elle est grosse et toute douce.

Nouvelle inspiration, bruyante.

- T'es qui au fait moi c'est Apocryphos j't'ai jamais vu mais en même temps je vois jamais personne les gens viennent jamais me parler je sais pas pourquoi et du coup tu fais quoi toi ?

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