Ehnala » Coriace
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| Sujet: The last Goodbye | Mort d'Athelstan | Libre Lun 19 Avr 2021, 21:21 | |
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I saw the light fade from the sky On the wind I heard a sigh
Est-il possible de résumer - de bien résumer - en quelques pensées une longue histoire ? De réduire à quelques phrases traversant l’esprit, à quelques images, un vécu si long que le début paraît bien lointain, et pourtant passé si rapidement comme en un battement de coeur ? De trouver des mots exprimant avec exactitude les milliers d’émotions qui habitent un esprit qui a tant arpenté ce monde ? Il n’y a pas de réponse à cette question, parce qu’elle ne se pose pas vraiment. Elle est nécessité. Tous les récits, et surtout ceux qui auront la prétention de s’espérer bons, doivent s’achever. En une conclusion qui est à la fois pincement au coeur, sourire triste et reconnaissance. Un adieu.
As the snowflakes cover My fallen brothers I will say this last goodbye
La nuit était finalement tombée. Un peu à l’écart du Grand Castel, la silhouette d’Athelstan se découpait sur le ciel encore teinté de pastel. Il avait eu la force de marcher doucement jusque-là, quittant l’agitation familière du camp, croisant à peine quelques regards tant sa présence était une habitude. Il avait toujours habité le Grand Castel. Il était là depuis sa création, depuis que les dieux l’avaient extirpé du coeur des montagnes pour en faire la demeure des Etelkrus. Il faisait un peu partie du décors, et c’était un peu à regrets qu’il quittait ce soir-là ce beau tableau. Tout tâché de tragédie qu’il fût, c’était là qu’il avait trouvé sa véritable place, sa véritable vocation.
Night is now falling So ends this day
Il s’était installé sur un rocher plat, couché, la tête posée sur ses pattes avant. Les cheveux poivre et sel dans lesquels se noyaient ses épaules amaigries inondaient le sol autour de lui. Lorsqu’il s’était couché, sa chaîne avait cliqueté doucement, comme pour lui signifier sa présence. Elle portait avec elle tant de souvenirs, elle avait vécu avec lui toute son existence. Il était conscient que cet instant, il devait le vivre intensément. Il le sentait tout au fond de lui, que la fin approchait. Que la mort qui l’avait laissé tranquille tant d’années l’attendait, lui faisait signe. Il était temps de prendre la route cette fois-ci. De laisser derrière lui cette vie qu’il avait vécu du mieux qu’il pouvait. D’entamer le dernier des voyages.
The road is now calling And I must away
Ses yeux vairons à la lueur fatiguée étaient levés vers le ciel. Une à une, les étoiles s’allumaient au-dessus de lui. Il se demanda si tous ceux qui l’avaient quitté se trouvaient quelque-part là-haut, dans un monde différent du leur et qui était éternel. Un monde que le soleil des mortels ne toucherait jamais, mais qui brillerait pour toujours de l’esprit des disparus. C’était l’histoire que l’on racontait aux jeunes loups, peut-être pour qu’ils n’aient pas peur lorsque viendrait leur dernier jour. Pour guérir la blessure que créent malgré eux ceux qui s’en vont lorsque leur destin s’écourte. Y avait-il là-haut ses parents ? Son oncle ? Ses frères et soeurs ? La douce Brienna, et la fière Lucie, et l’acide Nachos ? Les verrait-il lorsqu’il franchirait à son tour la frontière ?
Over hill and under tree Through lands where never light has shone By silver streams that run down to the sea
Le vent qui soufflait par bourrasque lui apportait, semblait-il, l’air légèrement salé de la mer. De là où il se trouvait, il apercevait la Rougelande, que l’hiver avait teintée d’un vert presque gris, mais que les beaux jours redoreraient, repeindraient de ce rouge-vif qui lui avait donné son nom. Il ne voyait pas l’océan, caché par quelques nuages bas qui masquaient l’horizon et créaient une frontière vaporeuse entre le ciel noir et les prairies qui retenaient les dernières couleur du couchant. Et les étoiles s’allumaient, une par une, en silence.
Under cloud, beneath the stars Over snow on winter's morn
Il était à la fois rassurant et vertigineux de songer que, lorsqu’il ne serait plus, toutes ces choses continueraient de vivre, d’avoir lieu. Le soleil se lèverait à nouveau dans une aube grise et rose, éteignant les étoiles. Puis un nouveau soir viendrait, chaleureux, plus printanier que le précédent. Le monde entier continuerait sa course méticuleuse, dans la plus grande indifférence. L’ombre d’un sourire étira les babines du vieux loup à cette pensée, alors qu’il inspirait profondément. Il savait qu’il ne devait pas être effrayé, il avait vécu suffisamment longtemps pour se préparer à cet instant. Il avait largement eu sa part de vie. Son corps était fatigué, après l’avoir si loyalement servi, sans jamais lui faire défaut.
I turn at last to paths that lead home
Il soupira, et ses paupières se fermèrent brièvement. Avant de se rouvrir une fois encore, pour laisser ses iris bicolores parcourir le paysage devant lui. Etait-ce égoïste de sa part de d’être isolé ainsi en silence, discrètement, alors même qu’il y avait peu de doute sur l’issue de cette expédition ? Il espérait que non. Que ceux qu’il aimait et qui comptaient pour lui comprendraient qu’il n’aie pas voulu les chagriner encore plus qu’ils ne le seraient ensuite. C’était sans doute un peu prétentieux de sa part, que de songer être suffisamment apprécié pour qu’on le pleure. Mais il n’avait plus l’âge de jouer à la fausse modestie, ou à se préoccuper de ce que l’on pourrait penser de lui. Où qu’il aille, ces loups lui manqueraient.
And though where the road then takes me I cannot tell We came all this way
Ses pensées allèrent à ses enfants. Pepper, Helga, Solelio et Elvazio. Trouverait-il en s’en allant ceux qui n’étaient plus parmi eux ? Il espérait que non, que leurs pas les avaient conduits en des terres lointaines, mais qu’ils vivraient encore de longues et belles années, comme celles que la vie lui avait accordées. Quant à ceux qui étaient toujours en vie… Il était fier de chacun d’entre eux. Ils étaient des membres précieux de la meute, en tout cas le pensait-il. Même si parmi eux, la louve bleue avait déjà marqué l’histoire et les esprits, il ne doutait pas que ce soit un jour le cas de ceux de son sang. Ils avaient leur voie à trouver, et désormais sans lui. Sans ses conseils et sa présence, mais surtout sans son ombre sur leur existence. Et il les laissait le coeur serein, persuadé qu’ils feraient le meilleur du temps qu’il leur restait à vivre.
But now comes the day To bid you farewell
Il referma les yeux, envahi peu à peu par une sorte de fatigue, de torpeur qui alourdissait ses membres et ses paupières. Son souffle se fit plus lent, tout comme la chamade de son coeur. Ses pensées s’effilochèrent doucement en simples émotions, en éclats d’amour, d’espoir et de fierté. Le vent souffla une dernière fois, une bourrasque plus forte que les autres, auréolant la silhouette du Chevalier de ses longues mèches, faisant renaître un instant l’image du fier jeune loup qu’il avait été.
Many places I have been Many sorrows I have seen But I don't regret Nor will I forget All who took that road with me
La brise se calma ensuite et, lorsque son souffle cessa, le coeur d’Athelstan eut un ultime battement. Lent, profond, avant cesser cette chanson qui ne pouvait être éternelle. Et dans les premières lueurs de la lune qui se levait mourut le Chevalier. Veillant comme il l’avait fait toute sa vie durant sur les terres qui avaient si longtemps été les siennes.
Night is now falling So ends this day The road is now calling And I must away Over hill and under tree Through lands where never light has shone By silver streams that run down to the sea
To these memories I will hold With your blessing I will go To turn at last to paths that lead home
And though where the road then takes me I cannot tell We came all this way But now comes the day To bid you farewell
I bid you all a very fond farewell
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