Désiré n'avait jamais été aussi anxieux de toute sa vie.
S'il était encore capable d'apprécier les moments de purs plaisirs, le loup jaune réalisait bien que le stress prenait de plus en plus de place dans son quotidien. Lui qui avait toujours tout raconté à son père craignait maintenant d'attiser sa haine de l'étranger. Lui qui avait toujours savourer la moindre miette du présent se perdait parfois dans des ruminations sans fin. Lui qui avait toujours dormi d'un sommeil profond ne trouvait que difficilement le repos.
Bref, lui qui avait longtemps gardé sa jeune âme se voyait devenir un véritable adulte, rongé par la haine de sa meute envers celle de son aimée.
Et puisque la-dite aimée avait été présentée à sa famille, il était bien temps qu'elle rencontre le Dieu qui avait toute sa Foi.

Astrid et Désiré avaient passé une partie du jour et de la nuit ensemble, en terres libres, avant de mettre leur plan à exécution. La Raeder avait été saluée d'un tendre baiser au plus près de l'Arbre au Serpent, sans pour autant enfreindre les frontières. C'est alors seul, et avec son glowstick pour seul éclairage, que le disciple avait fait route, d'un pas assuré.
Au fil de sa marche, il sentit son estomac se dénouer et ses muscles se décrisper. Le Marais lui était tellement familier qu'il ne pouvait l'imaginer lui fermer les bras.
Une fois qu'il eut pénétré le Temple, c'est donc fièrement qu'il se présenta. Un peu trop sérieux, sans doute, aux yeux de l'Anaconda.
Mais il comprendrait, n'est-ce pas ?
Au moins, personne n'était là pour entendre ce qu'il avait à dire.

- Bonjour, Kiro.
Le mâle sourit comme sa queue s'agita. Trottinant gaiement, il déposa offrande au pied de la statue : une couronne. Certes, le Dieu Jaune en avait déjà reçu des tas et des tas, venant de ce loup-là. Mais celle-ci était différente.
Faite de bois flotté et de morceaux de filets usés, d'étoiles de mer séchées, de coquillages et de cordages.
Dans le thème de l'annonce du jour, en quelques sortes.
Enfin, annonce... L'Omniscient le savait déjà, hein ? Mais disons qu'il tenait à cœur des tourtereaux d’officialiser la chose.
- Je viens vous présenter ma compagne, Astrid. Enfin... Je ne voulais pas prendre le risque de la conduire jusqu'ici. Je ne voulais pas la voir blessée par les nôtres...
Il soupire.
- Enfin... Elle aimerait vous rencontrer, et vous attends, à la limite du Marais. Si vous vouliez bien lui rendre visite, j'en serai le plus heureux des loups.
Il rit.
- Et elle de même, bien sûr.
Il était important d'avoir, au moins, cette bénédiction-ci.

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Si Désiré avait été gonflé d'espoir, le changement d'ambiance en fit disparaître jusqu'à la moindre trace. Convaincu que l'une de ses plus grandes peurs était en train de se jouer, convaincu qu'il ressortirait banni voire maudit de ce temple, l'adulte se tassa au sol, les yeux levés vers cette animation de mauvais augures.
Arrogant. Il avait été arrogant.
Un qualificatif qui lui fendit tout simplement le cœur autant que la peur tordait ses entrailles.
Devait-il s'excuser ? Au moins, l'Anaconda ne lui reprochait pas d'être tombé amoureux. Plutôt, d'avoir sollicité un effort de la part de la créature divine.
C'était sans doute un blasphème de le penser, mais n'était-il pas omnipotent ?
Désiré chassa cette mauvaise pensée de son crâne d'un mouvement de tête, revenant aux paroles de celui qui avait toute sa foi.
À la question, il bégaya des mots inintelligibles. S'il était prêt à défendre Astrid contre vents et marées, il ne s'était pas attendu à devoir se justifier ici.
Mais au fond... N'était-ce pas prévisible ? Au fond, n'avait-il pas été mis en garde ?
Peut-être avait-il été idiot, ou trop naïf...

Puis, la tension redescent.
C'est un rire nerveux que le Corps laisse échapper comme il se redresse, un peu.

Avant de se trouver complètent électrisé.
Comme à son habitude, Désiré se remit à s'agiter, se dandiner et faire des tours sur lui-même, ses frayeurs déjà oubliées. Il allait avoir l'honneur de voyager avec Kiro ! Rien que l'idée de porter la Divinité ainsi couronnée était exaltante en soi !
Le mâle n'avait pas de mot, il se contenta donc de japper de joie et d'entamer sa course nocturne.
Il aurait aimé que son père voit ça.

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C'est essoufflé, mais toujours aussi excité, que Désiré se présente à sa belle. La queue battant l'air dans son dos, il se met de profil pour laisser à la Raeder le loisir d'observer le reptile. Il sourit de tous ses crocs à sa femelle, son souffle saccadé par la course folle au travers du marais.

« Astrid ! Je te présente Kiro, mon Dieu, qui nous fait l'immense honneur de sa présence ! Kiro, voici donc la sirène qui a su enchanter mon cœur ! »
Le Corps est on ne peut plus ravi, doit se retenir de ne pas japper de joie de nouveau pour célébrer cette rencontre.

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Comme il présente son dos à son aimée, Désiré doit tourner la tête pour pouvoir l'observer. Mais entendre sa voix lui suffit pour remarquer, une fois de plus, le charisme de celle-ci. Mais face à un Dieu, elle n'en perdait pas de sa superbe !

Quand la voix de Kiro s'élève, Désiré est surpris. Il s'attendait à ce que ce soit le serpent qu'il porte qui le fasse, mais il n'en est rien ! Voyant l'Anaconda apparaître, son disciple comprend qu'il s'agit là d'une plaisanterie, et rit ! Elle était bien bonne, celle-là ! Et le pire, c'est qu'il n'avait jamais rien soupçonné !

Mais Kiro se fait plus sérieux. Le Corps l'écoute, venant instinctivement rejoindre le côté d'Astrid. Et, avec ce petit discours, le loup jaune réalise que cette union est peut-être une opportunité. Car, s'il savait jusque-là qu'il ne laisserait rien le séparer de sa douce, il n'avait pas envisagé qu'il puisse avoir un impact si important : permettre à deux clans en guerre froide de se réconcilier.
Le mâle se tourne alors vers la Raeder, l'air réfléchi à son tour.
« Astrid… Je n'avais pas vraiment prévu de faire cela maintenant, mais je pense que le moment est opportun. »
Il prend une grande inspiration, solennel.
« Cela fait maintenant un an que tu as accepté que je te courtise. Depuis, j'ai eu le temps de réaliser une chose : chaque instant passé avec toi n'est que pur bonheur, et je m'aperçois que j'ai besoin de plus que ça. Alors, Astrid, accepterais-tu de devenir ma femme ? »

Il est un peu anxieux, Désiré. Cela bouleverse tous ses plans. Il comptait demander l'autorisation au père de la Raeder, et lui trouver un bijou, mais… Recevoir la bénédiction de Kiro, n'était-ce pas un moment suffisamment magique, suffisamment déterminant en soi ?

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Après sa proposition, le silence règne subitement, seulement entrecoupé des bruits de la faune locale. Désiré ne se dégonfle pas, pour autant : la Raeder aurait tout le droit de refuser. Et pourtant… Et pourtant… Elle accepte ! L'Etelkru se jette au cou de sa dulcinée, la noyant de baiser !
Il était le plus heureux des loups.

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De part la disance prise, Désiré du calmer ses ardeurs. Mais la nuit n'était pas finie, loin de là !
« Je suis tout à toi jusqu'au lever du soleil ! »
Et il vient se frotter tendrement dans l'encolure de sa chère et tendre.

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