Nécromancien débutant [Neisseria + libre]

Asaravos

Les loups avaient une tradition qu'Asaravos jugeait – pour le moment, il aviserait lorsque lui même se retrouverait face à situation identique – comme fortement stupide. Ils enterraient leurs morts, mettait un vieux caillou gravé d'un nom au dessus et revenait de temps en temps pour y déposer des plantes. Et comme on ne faisait pas ce genre de chose n'importe où, il y avait un lieu spécialement réservé pour ça, qu'importe son origine – de ce qu'on lui avait dit. Cela voulait aussi dire qu'il y avait un endroit où sous une pierre et quelques centimètres de terre, reposaient les corps de dizaines de loups qui ne servaient plus à personne et l'information n'était pas tombée dans l'oreille d'un sourd. Les grenouilles et les salamandres ça allait bien cinq minutes mais Asaravos avait de l' A M B I T I O N.
Le jeune mâle ne savait plus exactement quel démon de Morbus ou de Drippir avait évoqué une magie qui relevait les morts, à moins que ce soit carrément sa mère mais Asaravos s'était mis en tête de la maîtriser. Ce n'était pas tant des résurrections qui l'intéressait, loin de là, aucune envie de faire revenir des tocards mais l'idée d'avoir une petite armée de zombis à son service le tentait plutôt pas mal. Évidemment, lorsqu'il avait exposé son idée à Neisseria, elle s'était révélée enthousiaste. Asaravos n'en aurait pas douté, il avait toujours les meilleurs idées et puis sa sœur n'était pas vraiment le champignon le moins pourri de la forêt, ça la rendait parfois agaçante mais faisait également d'elle une bonne assistante.

Alors à deux, trois avec Aconit parce qu'il fallait pas se mentir, le trajet avait été trop long pour lui seul – et Asaravos était presque certains que ses sœurs avaient pris des détours inutiles – le frère et la sœur finirent par arriver sur cette île presque aussi embrumée que leur forêt. Ombres parmi les ombres, silhouettes sombres dans la nuit tombantes, ils entrèrent sur les lieus où s'élevaient les pierres.

« Je te laisse choisir laquelle on creuse en premier »

Quel généreux frère il faisait.

Une autre journée comme les autres, ou du moins, c'était ce que la croque-mort anticipait.

Umaïma était dans sa tanière, située au fond du cimetière, pas trop à la vue, mais les innombrables babioles qui la décorait laissaient savoir sans aucun doute qu'une personne matérialiste habitait les lieux. Elle confectionnait en silence des bouquets, ayant toujours eu un faible pour cette activité. Parfois, lorsqu'elle se rendait compte qu'une tombe n'avait pas été visité depuis longtemps, elle se sentait obliger de ne pas laisser la pierre en abandon. Elle enlevait les mauvaises herbes, nettoyait la pierre et posait un bouquet, ravie de son attention aux détails. De plus, de voir ainsi ce cimetière autrefois laissé à dépérir d'une propreté insolite la rendait particulièrement heureuse : ce lieu était le sien.

Elle entendit quelqu'un crier, non pas d'une façon négative, mais plutôt comme si c'était en réponse à quelque chose. Elle s'extirpa donc de ses rêveries, car rarement le cimetière était habité de cris. Uma arrêta son projet de fleuriste amateur afin d'aller jeter un oeil dehors. Elle sourit en voyant au loin des petites silhouettes, le coeur plus calme.

De invités hors de l'ordinaire, peut-être encore trop jeunes pour comprendre le passage de l'autre côté, ou le fait de vouloir laisser sa trace, de ne pas être oublié.

Loin d'être pessimiste à l'idée de voir des jeunes sans parents zigzaguer dans le cimetière - Mim avait grandit ici après tout, c'était plutôt leurs intentions qu'elle tentait de décerner. Parfois c'était pour explorer, parfois pour jouer à cache-cache, ou encore... semer la zizanie.

Elle avança, sans bruits, ne voulant pas avoir l'air trop sévère, mais en même temps ne voulant pas se faire remarquer tout de suite, question de voir de plus près ce qu'ils faisaient.

Asaravos

Sa sœur choisit une grosse tombe dont la pierre gravée affichait une liste de noms, parfois effacés par le temps. Asaravos essaye de lire mais rapidement Morbus et Neisseria le dérangent, éclatant la pierre avec fracas, soulevant un épais nuage de poussière. Tant pis, de toute façon s'ils étaient morts, c'était que ce n'était qu'une bande de tocards qui n'étaient pas parvenu à demeurer éternel et si cette tombe contenait une famille complète, c'est qu'ils n'avaient plus qui que ce soit pour pleurer leur médiocre disparition de toute façon. Alors l'adolescent sombre s'enthousiasme de la destruction provoquée par sa tout aussi sombre mais plus nauséabonde sœur.
Il aide à retirer les pierres pour ne laisser dans le trou que le cercueil de bois. Le couvercle a déjà été un peu abîmé par Nei et Morbus, rien d'étonnant, brutaux et maladroit qu'ils étaient mais fort pratique pour ne pas avoir à passer des heures entières à déterrer la dernière demeure.

« Après c'est comme les grenouilles, tu ouvres aux bons endroits et ça te permet d'accéder à l'intérieur sans tout abîmé. »

Il relève ses quatre yeux bleus, son regard sur sa sœur se fait sévère, il insiste sur ce dernier point.

« J'ai besoin que ça reste intacte au maximum, je ne veux pas d'une bouillie d'os ou de momie. »

Il trace des petites croix aux endroits stratégiques, là où ils pourront desceller le cercueil.

« Percez sur les croix. »

La croque-mort regardait en silence les jeunes, dissimulées entre deux tombes.

L'espionnage fut de très courte durée cependant, car voilà qu'ils étaient en train de démolir le travail de sa vie.

Elle n'en croyait pas ses yeux.

Umaïma s'avance en panique, les yeux bien ronds, le poils hérissés. Une part d'elle était en furie, mais c'était tout de même des enfants. Étaient-ils sauvages de la sorte de nos jours ?! Son coeur bat la chamade, elle a chaud, sentant sa cape ce couleurs absorber sa sueur.

« Puis-je... vous aider ? », dégluti t-elle le plus calmement possible.

Elle regarda les deux enfants, ne reconnaissant pas leurs bouilles.

Et quelle était cette odeur ignoble ? Ses morts ne sentait pas de la sorte...

Asaravos

Bien sûre, Neisseria, comme d'habitude, fait un peu n'importe quoi. Elle s'excite, s’enthousiasme plus que nécessaire, fait glousser Morbus et il lui faut du temps pour se rendre compte qu'elle ne soulèvera pas le couvercle si elle restait dessus, galère à ressortir du trou par la suite également. Asaravos lève les yeux au ciel mais ne fait aucun commentaire. Sa sœur avait beau être désespérante, il était quand même bien content qu'elle soit là et n'aurait pas voulu faire sa première excavation sans elle. Et malgré toute sa maladresse, Nei et Morbus étaient quand même très utiles, réduisant drastiquement les efforts nécessaire à produire. Il ne leur faut que quelques minutes pour qu'ils dégondent le couvercle du cercueil et ne dévoile la vieille momie desséchée qui avait été ensevelie ici depuis au moins des années.

« Ah ! La tronche ! »

C'était bien utile de garder ses morts précieusement dans une boîte et sous terre si c'était pour qu'ils finissent avec une gueule pareil. Se penchant au dessus du trou, l’adolescent remua son arrière train, la queue redressée pour prendre son élan avant de sauter à l'intérieur, faisant attention de ne pas marcher sur le cadavre tout de même, il voulait le garder au maximum en bon état. Il ne releva la tête hors du trou que lorsqu'une voix étrangère vint les déranger.

Ses quatre yeux se posèrent alors sur une louve inconnue, au pelage blanc contrasté de marquages noirs. Les oreilles du jeune mâle pivotèrent en arrière, il ne la connaissait pas et elle ne portait aucune flagrance qui rappelait leur mère, la sylve ou encore ce gros relou de Garbann.

« Vous êtes qui vous ? »

Elle semblait vieille, avec son maquillage débile de grand-mère et son œil rose brillant. Etait-ce les lueurs dont leur mère leur disait de se méfier ? Asaravos n'avait pas envie de s'embêter avec elle.

« Peu importe, on est très occupé. Alors allez décrépir autre part. Nei, aide moi à le sortir du trou ! »

Ses yeux bicolore rencontra les quatre yeux du jeune inconnu, et elle avala sa salive, un peu prise au dépourvu.

Le compliment de l'autre enfant passa un peu dans le vide, alors qu'elle prit un moment pour la reluquer aussi. Elle semblait... malade, se faisant manger par des ronces et de la saleté. Juste à la regarder, Uma voulait se gratter partout. Reprenant son sang froid du mieux qu'elle pouvait - elle qui était si calme de nature, ces inconnus étaient bien loin d'être des loups ordinaires, elle reprit parole, ferme.

« Je m'occup- », commença t-elle.

« La croque-mort de ces lieux. », coupa la chouette, agrippant ses griffes sur son épaule, tentant de calmer sa maitresse.

La nakhu se mordit la lèvre, contrariée. Elle s'approche de plus belle - retenant son souffle du mieux qu'elle pouvait, se mettant entre les deux enfants.

« Laissez les. Dans leurs repos. »

Les corps n'étaient pas des jouets, et qui sait ce qu'il pouvait se passer si on osait interrompre leur long sommeil. La croque-mort avait lu des tas de livres à ce sujet, et elle avait toute ses raisons de vouloir éviter une malédiction de plus. Elle proposa sa patte au mâle, voulant qu'il sorte de là au plus vite.

« Qui êtes-vous ? »

Elle avait besoin de mettre au moins des noms sur leurs visages, afin de rendre la situation plus concrète, moins chaotique.

Dans la mesure du possible.

Asaravos

Neisseria n'est pas concentrée, Asaravos ne la sent pas concentrée. Évidemment, pourquoi elle le serait ? Il y avait une personne inconnue alors forcément que ça occuperait toute l'attention de sa sœur, de son démon aussi. Le jeune mâle perd toute sa bonne humeur et commence à grommeler au fond de son trou alors que Neisseria et Morbus s'intéressent à la si belle inconnue et son piaf. Ils ne font tellement pas attention que lorsqu'ils daignent à l'aider, ils cassent tout, ce qui fit lever d'une manière bien forcée les yeux d'Asaravos au ciel.

« ça servait bien de faire attention en ouvrant le cercueil. 'Fin bon, ça doit pouvoir se recoudre. »

Ce n'était qu'une patte détachée.
Le plus gros problème actuelle ce n'était pas tant Neisseria qui faisait des siennes, c'était la louve blanche, celle-là même qui sépara leur unité fraternelle pour se mettre entre eux deux. Rien que pour ça, Asaravos lui lança un regard noir plein de mépris, fronçant les sourcils et plissant les babines. Ouh il sentait qu'elle allait être reloue celle là.

« Sont morts, ils se reposent pas. C'est pas comme s'ils allaient encore servir à quelqu'un d'autre dans cet état. »

Refusant la patte tendue, l'ignorant avec dédain, l'adolescent sortit tout seul du trou d'un bond et d'un peu d'escalade. Il se redressa, droit, fier et petit air hautain, tenant sa tête haute tout comme sa queue, poitrail bombé.

« On est des excavateurs. »

Ça sentait peut-être un peu trop la provoc mais qui ils étaient, ça la regardait pas la vieille.

Le jeune mâle détenait une aura mauvaise.

Tout ce qui sortait de sa bouche n'était que pour faire réagir, pour obstiner ses dires. Il ne semblait pas comprendre le respect envers les morts, et encore moins à ne pas toucher aux affaires des autres. Uma était dans une fâcheuse position où elle se devait d'être accueillante et bienveillante - autant dans son rôle de croque-mort et de nakhu, mais cet inconnu lui faisait tout remettre en question. Il jouait avec un cadavre comme si c'était une poupée, putain.

Tant son intérieur était bouillant, que la louve se rendit compte un peu trop tard que quelque chose s'agrippait à sa patte. Elle glapit malgré elle, se remuant afin de sortir de son étreinte pourrie de cette... chose. À l'alarme du cri de sa maîtresse, la chouette s'envola et se mit à violemment griffer les épaules de la femelle.

« Ce lieu a toujours été ouvert à tous- », dit-elle en avalant sa salive, tentant de se reprendre en main.

Ses yeux bouillonnaient de rage, et elle frissonnait un peu, peu habituée à ressentir la colère.

« C'est un privilège de poser ses pattes ici, et vous vous permettez d'agir en- en sauvage ?! »

Allait-elle devoir attaquer, crier au meurtre ? Ce lieu était toujours si peu fréquenter, et aujourd'hui, c'était un sacré désavantage.

Elle ne priait jamais aux dieux, mais cette fois-ci, Yurai était dans ses pensées.

Asaravos

Le piaf, agressif, vint heurter l'épaule de sa sœur, de sa très chère soeur de ses serres et cela tend Asaravos. Son pelage s’ébouriffe et son museau se plisse de colère mais l'adolescent ne peut vraiment agir, étant plus en arrière et avouons le, plus faible que le duo Neisseria Morbus. Il risquait fort bien de se ridiculiser quand ces deux là pouvaient chasser l'oiseau d'une patte pourrie de démon.
Au sermon de la louve, la grimace d'Asaravos se tord un peu plus, ses babines frémissantes dévoilent la pointe de ses crocs blancs. Elle l'agaçait la vieille, terriblement. Elle lui avait gâché son petit atelier pillage de tombe, ruinait ses expérience future de nécromancie, volait ce précieux temps qu'il avait avant de devoir changer avec Aconit, s'accaparait toute l'attention de sa sœur que l'adolescent sentait jubiler à quelque pas, osait envoyer son oiseau griffer cette dernière. Il saute par dessus la tombe.

« Un privilège ? On vous en accorde un nous de privilège à s'intéresser à vos morts décomposés pour leur redonner une utilité. On en accorde un autre à vous écouter parler alors que de toute évidence il n'y a absolument rien qui relève de la médiocrité chez vous. Mon temps est limité et vous me l'empoisonnez. »

Son expression se mua dans un rictus mauvais.

« Mais vous semblez impressionner ma sœur. »

ça le rendait jaloux, un peu mais lui, il la connaissait Neisseria, bien qu'elle n'était pas compliquée à déchiffrer. Asaravos vint glisser son museau à son oreille, gardant deux yeux braqués sur la louve blanche.

« Toi et Morbus, vous avez envie de la toucher partout n'est-ce pas ? A ton avis, elle est de bonne ou de mauvaise constitution face aux maladies ? Ça se tenterait de vérifier.»

M-morbus ?

Les paroles du mâle bleuté lui faisait un effet de rasoir, tandis que la femelle semblait éprouvée une euphorie des plus étranges. Même après l'attaque pathétique du piaf, une certaine lueur dans son regard affichait une curiosité morbide.

Son instinct lui disait qu'ils n'allaient pas lâcher le morceau, mais aucunement avait-elle l'intention de s'enfuir. Ce lieu était le travail de sa vie, elle y avait mit toute sa sueur et son âme. Elle était son protecteur, à la vie et à la mort. Et s'il y avait bien un endroit pour mourir... c'était un peu trop convenient même.

De par sa dextérité hors norme des antérieurs, elle avait pu éviter un peu ce Morbus, ayant le temps de signer à sa chouette d'aller chercher de l'aide, mais fut rapidement piégé de nouveau. L'oiseau s'envola sans hésitation, son instinct de survie bien plus fort que celui de sa maîtresse. Son simple travail de traducteur allait peut-être changer pour celui de sauveur, et seul le temps allait pouvoir le prouver.

Elle remit son attention sur les deux autres, faisant de son mieux pour ne pas vomir.

« P-pourquoi v- Que cherchez vous à accomplir ici ?! »

Elle devait savoir ce qui se tramait dans leurs cervelles, et peut-être marchander afin d'éviter le plus de dégâts possibles.

[Jet ING pour savoir si la chouette réussit à trouver quelqu'un dans les environs.]

Asaravos

L'oiseau s'envole, abandonnant la louve. Comme quoi, avoir un familier aussi stupide qu'un piaf n'était qu'une perte de temps. Elle se retrouve donc seule, la vieille, et face à eux également complètement démunie, surtout après que la patte malléable de Morbus -et par extension de Neisseria- l'ait étreinte avec plus de conviction dans ses miasmes. Qu'il était bon de se sentir si supérieur à un être faible, surtout lorsque celui-ci était un loup et pas juste un rat, une grenouille ou une fée. Le sourire d'Asaravos s'éteint tellement qu'il dévoile ses crocs dans une expression franchement mauvaise. Il se rapproche la queue redressée, la posture droite pour se grandir un peu malgré la taille adolescente, ses quatre yeux bleus braqués sur elle avec mépris.

« Même si on vous le disait, vos petits cerveaux débiles de simples loups ne comprendraient pas. »

Le jeune mâle souffla de sa truffe et avec mépris sur la femelle blanche avant de revenir à nouveau sur sa sœur.

« On s'amuse bien mais j'ai as confiance au fait que son piaf soit parti. Son œil gauche brille, faut se méfier des Porteurs de Lumière. » Un sage conseil que leur mère leur répétait presque quotidiennement. « On va pas s'éterniser pendant trop longtemps. Laisses lui un souvenir lui un souvenir si tu veux et on rentre. »

De biais, c'est avec dédain que son regard retomba sur la blanche.

« On reviendra de toute façon. »

On reviendra.

C'est en voyant son regarde dédaigneux s'attarder sur son œil maudit par la déesse qu'Uma comprit que les deux la pensait bénite par cette dernière, et non pas le contraire. Pour une fois que cette marque lui donnait avantage... une partie d'elle lui en était redevable, même si cela lui donnait la nausée.

La créature se retira d'elle, non pas s'en lui laisser une étrange sensation. La louve allait devoir se désinfecter, et pas par une simple toilette, mais quelque chose de plus fort, comme un rituel. Astrid saurait surement lui venir en aide... et l'aider pour la prochaine fois. Car quelque chose lui disait que ces deux là allaient garder leur parole.

Alors qu'ils s'éloignèrent pour de bon, la croque-mort succomba à la nausée, laissant sortir tout ce qu'elle avait dans l'estomac. Elle fut prise d'une sueur froide, et sa mâchoire claquait un peu.

Elle retourna avec faiblesse vers sa tanière, ne voulant plus croiser qui que ce soit pour aujourd'hui, complètement sous le choc de cette mésaventure.