Chez nous - Proches / habitants de l’Atoll

La Sylve n’a toujours été qu’une étape de sa vie : Un instant pour accepter, pour se reconstruire et permettre à Sajda de grandir.
Il est grand, désormais, et elle n’aura pas à supporter plus l’humidité désagréable, et l’odeur de mort, qui flotte dans cette forêt qu’elle n’a jamais vraiment aimée, de même que ses habitants.
Ici, c’est chez elle.
Nour inspire profondément ce parfum salin qui lui est si familier et qui, pendant près d’un an, lui a tant manqué. Elle aime également sentir sous les doigts de ses pattes le sable fin, qu’elle sait magnifiquement blanc.
Il n’y a pas d’endroit plus merveilleux que son si cher Atoll, malgré tout ce qu’il a pu se passer ici.

Elle choisit d’oublier tout ce qu’elle possède de mauvais et d’effacer de sa langue le goût amer de la trahison. Il n’y a plus de palais somptueux pour imposer son règne mais cela lui importe peu.
Ici, elle ne doit rien à personne.

Les choses iront comme elle le décidera, elle, et Sajda. Et ce qu’il leur reste de famille, quand bien même ils n’en partagent pas le sang.
La louve rouge sourit, enchantée.

- La voici, notre demeure.

Et ce n’est pas de cette paillotte dans laquelle Mère séjourna, dont elle parle, mais de tout ce qu’ils bâtiront.

Elle hoche la tête.
Lui, y est né. Pour elle, c’est bien plus que ça : Elle a grandi ici et il reste sur cette terre des traces de son enfance révolue, peut-être.
Des souvenirs, sans aucun doute.
Nour s’appuie un peu contre l’épaule de son frère, le temps de retrouver ses repères qui, évidemment, ne sont plus aussi frais après une année passée loin d’ici. Elle inspire, touche, reconnait les objets laissés derrière comme les couronnes de Mère. Le vent et le sable y ont fait des dégats, elle peut sentir des aspérités peu rassurantes quant à leur état, et une odeur de rouille.

Ici, c’est chez eux, mais il n’est pas question de refaire tout exactement comme leurs parents.

- Tu es intelligent, tu sauras trouver l’endroit ou nous serons les mieux établis. Peut-être à l’abri du vent ? Oh, mais restons proches de l’océan, j’aime tant entendre le bruit des vagues et emplir mes poumons de son air !

Quoique dangereux en pleine tempête, elle perçoit cet élément comme un ami rassurant qui chante à intervalle régulier des mélodies qui l’apaisent.
C’est comme si il faisait partie d’elle et que leurs coeurs battaient à l’unissons. Une vague, qui vient lécher le sable. Un battement de son coeur.

- Créons quelque chose qui nous appartienne.

Nouveau hochement de tête : Elle n’a rien à redire sur ce que propose son brillant jeune frère.
Elle n’est pas contre l’inconfort de quelques nuits passées à différents endroits : Ils ont connu pire, dans la Sylve et le bonheur de retrouver son Atoll, sa plage, son ile qui empêche les allées et venues autrement que par la nage qu’elle accepterait, il lui semble, n’importe quoi.
Quand aux vestiges du passé… Elle fait rouler entre ses pattes la couronne abîmée et un sourire amer étire ses babines. Puisqu’il n’est pas question de tout refaire comme leurs parents, Sajda a également raison sur ce point là.
Eux n’ont pas besoin de couronnes et de dorures pour savoir qui ils sont.

- C’est une excellente idée, mon cher frère.

La couronne rejoint l’épaulière dans l’océan : Puis d’autres. Elle n’a guère d’égards pour ces ornements qui furent confectionnés avec soin, pas même pour sa propre petite couronne d’enfant.
Tous, quittèrent leur Atoll et elle espère qu’ils ne reviendront pas.

- N’y a t-il plus rien pour évoquer leur souvenir ?

Elle veut s’en assurer.
Et pourtant, paradoxalement, c’est sur cette plage ou ils vécurent que ses pas la ramenèrent.