[Antidaté à juste après le punktober, on est en retard oups]
L’épée transperce le monstre d’un coup précis. Ses yeux s’accrochent à ceux de Dysis.
Elle pouvait presque voir son ame se délier sous ses yeux.
Son corps s’éffrite autour de l’arme bénie. Mais ses yeux restent. Son ame, jusqu’au dernier moment, reste.
Comme le souvenir d’un échec. De ne pas avoir su le libérer.
Dysis s’éveille en sursaut. Sa gueule est sèche. Sa voix, rauque. Dans le noir, elle croit encore les voir. Les yeux qui l’observent. Les cris. Les chuchotements. Les raclement rauques.
Le crépuscule comme une fournaise.
L’intérieur de la lavuu est surchauffé. Elle se lève, muscles douloureux comme si elle avait effectué une grande chasse. Tête basse, ses pattes la guident vers l’entrée qu’elle écarte brièvement pour pouvoir sortir. Air frais. Lune en croissant. Lumière froide et claire. Elle ferme les yeux et inspire.
Calme.
Les yeux barrés d’une croix verte se posent sur l’astre. Son cauchemar, déjà, s'effrite entre ses pattes. Elle n’avait jamais rêvé si fort, il lui semble. Elle serre les crocs. Elle a encore la sensation de l’épée dans sa gueule. Elle se souvient de ses découvertes, pensive. La secte de Mido. Des loups poussés par la connaissance.
Par la maitrise des ames.
Un frisson lui parcours l’échine. Elle repense à Aiiro. Elle repense à la puissance que renfermait les ames lupines. Elle repense au Bien, au Mal. A la Nature, et au Chaos. Où se plaçait-elle, elle ? Avait-elle fait le bon choix en prenant l’épée, en chassant ce monstre qui était une victime ? Aurait-elle pu libérer son ame, ainsi que celle du champion de Mido ?
Surement.
Elle baisse le museau. Dans le cauchemar, elle avait protégé les siens. Les autres. Ces formes floues qui l’accompagnaient, cette louve aux plumes bleutées. Elle se souvenait de ça, surtout.
Le désir de protéger flambe dans son coeur. Elle l’observe, comme étrangère. Etait-ce une émtion bénéfique ? Dans son rêve, elle l’avait amené à sauver les autres. Mais à rater quelque chose d’important. Une ame … Non. Deux. Elle inspire, et baille. Les détails lui échappaient déjà. Les émotions, elles, restaient. Elle avait lu une fois à leurs propos. Que la mémoire se basait sur les émotions, plus que la connaissances. Alors, cette envie de protéger, et la honte de l’erreur pouvait lui servir à se souvenir mieux de cette expérience. En cela, elles étaient utiles.
Mais pas moins fortes.
Les yeux barrés d’une croix vertes regardent le soleil se lever. La lumière efface les rêves, les cauchemars, les erreurs. Pourtant, ce qui a flambé en elle pulse encore.
L’appelle. Elle a une hésitation. Tension subtile, qui se répercute le long de son pelage.
Un instinct.Elle les a souvent suivis. Mais celui-ci est plus fort. Plus pressant. En silence, elle l’évalue. Que risquait-elle à le suivre ? Sans un mot, elle se lève. Le mouvement bat dans ses muscles qui s’éveillent. Ils étaient prêts. Peut-être qu’elle, non. Elle n’appréciait pas l’incertitude. Aimait la jauger, pour la contrôler. L’incertitude liée à des sentiments internes étaient toujours difficile à évaluer.
Mais elle suivrait cet instinct.
Comme suivant une odeur, elle se met en piste. Quelque chose la titille, dans sa poitrine. Elle hésite, prend un chemin descendant du Plateau. La neige laisse place aux hautes herbes couchées par le vent. Le soleil du matin les illuminent. Le vent les caressent. Ca sera une belle journée. Elle ne s’attarde pas. Continue vers l’ouest. Là, repère une sorte de masse rocheuse mordant le ciel clair. Il y avait une grotte. Son coeur bat un peu plus fort. Ses pattes s’accélèrent. Elle mange les kilomètres qui la séparaient de la roche sombre. Courant d’air frai. Humide. Odeur de mousse.
Eclat d’argent.
Aubéclat était là.
La frisée se fige. Cille. Illusion ? Elle s’approche. Odeur métallique. L’éffleure. Elle sent la garde sous sa truffe. Ecarte les lèvres pour s’en saisir. Se ravise. Son corps semble se souvenir de l’arme. Comme si sa présence était naturelle. Comme si le rêve lui avait permis de la manier.
Mais il n’était qu’un rêve, non ?
Elle fronce le museau. Quelque chose était étrange. Pourtant, l’épée était bien là. Avait-elle eu une intuition ?
…
Le rêve était-il bribe de réalité ?
Elle se décide d’un coup. Ouvre la gueule et se saisit du manche. Il y entre et se loge derrière ses dents. A sa place. Elle soulève l’épée avec lenteur. Un éclat de soleil passe sur la lame vieillit. Toujours éffilée. Un mouvement de tête lent l’expose au jour. Un autre, au souvenir de la mort d’une ame.
Une danse lente et précise s’entame. Dysis manie l’épée comme elle l’avait fait dans le cauchemar. Là, elle se dresse face au monstre. Derrière elle, les autres. Ici, elle bondit pour déchirer sa chaire. Appelle ses alliés pour attaquer ensemble. Elle s’était faite égide de Mido.
Avait emprunté l’ame de l’épée pour protéger les siens.
La danse se fait plus saccadée. Douloureuse. Il y a dysharmonie. Lentement, le fil s’abaisse. Dysis relâche la poignée. L’épée s’affaisse dans les hautes herbes. Silence. Sa truffe s’avance, pour effleurer la pierre. La pierre d’ame.
Etait-ce vrai, ca aussi ?Il lui prend le besoin intense de le savoir. Une curiosité mêlée à d’autres émotions. Une colère, peut-être. Envers ceux ayant joué avec les âmes. Une tristesse, aussi.
Elle ne voulait pas user de la puissance de l’ame de quelqu’un.
Ses crocs retrouvent la garde, pour l’attacher à son armure. Ce n’était pas très pratique. Elle y penserait. Pour l’instant, l’urgence était autre. Elle devait savoir. Elle devait comprendre. Tête basse, elle se remet en mouvement. S’absorbe de nouveau dans le matin. Oiseaux qui piaillent leur vitalité. Vent chuchotant dans son poil. Sol humide sous ses coussinets. Le temps était calme. Elle le redevient vite aussi.
Ses pas l’amènent jusqu’à la bibliothèque. Traverser avec l’épée avait été difficile. Son pelage épais avait pris l’eau, et elle avait du retirer son armure. Mais finalement, elle avait séché. Rayon de soleil sur son pelage. Elle s’était reposée. Puis, avait serré de nouveau ses crocs sur Aubéclat. Son coeur s’était serré en même temps. Elle était entrée dans la bibliothèque.
Elle avait marqué une hésitation. Puis, s’était dirigée vers le rayon histoire. Là, elle avait posé Aubéclat en silence. Puis, s’était plongée dans les rayons. Elle y avait cherché les mentions de Mido. Beaucoup de livres traitaient des Dieux. Fallait-il encore trouver les bons. Elle n’avait eu qu’une vague idée de ce qui s’était passé.
Une secte abandonné du Dieu.
Des pierres d’âmes.La lame est abandonnée. A la place, ses griffes raclent les pages. Ses yeux chasseurs se replongent dans ses lectures.