Seul dans la brume - Libre

Daez

Savait-il pourquoi il était ici, au pied du labyrinthe ? Daez ne l'avait pas décidé, il avait simplement laissé ses pattes le guider. Il voyait en cela une intervention de la Corneille qui désirait lui montrer quelque chose. Attentif au moindre son, attentif à la moindre vibration, il savait qu'il était seul en ce lieu. Pas un battement d'ailes, pas un souffle, juste le silence d'une matinée baignée dans l'obscurité.
Il n'y avait pas de vent, mais pourtant un frisson parcourut son corps. Était-il vraiment seul finalement ? Quelques instants plus tard plusieurs oiseaux prirent leur envol. Un envol paniqué, comme s'ils avaient été surpris. Surpris par quoi ? Il doutait qu'il s'agisse là d'un Nakhu. En fait, il doutait même qu'il s'agisse d'un loup. Dans tous les cas, il y avait là un autre animal, sans doute un chasseur. Un renard ? Fort probable. Pourtant, aucune odeur ne lui parvint.
Daez s'approcha lentement des deux statues d'améthyste qu'il caressa du bout des pattes. Il devinait leur silhouette grâce au toucher et se remémora la dernière fois qu'il les avait vraiment vues. Depuis combien de temps portait-il ce bandeau ?
Depuis combien de temps était-il en paix ?
Depuis combien de temps n'était-il pu corrompu par une vision biaisée du monde ?
Le mâle respira profondément et posa de nouveau ses pattes sur le sol. Le temps n'était rien pour lui. Chaque jour se ressemble, chaque jour se suit et se répète inlassablement.

Il fit un pas, puis un second, et s'arrêta en sentant les premières marches. Le territoire Nakhu lui était si familier qu'il n'avait pas besoin de la vue pour s'y repérer. C'est alors qu'il réalisa qu'il ne savait pas ce qu'il y avait, au-delà de son territoire. Les Etelkrus, les Lazulis, les Raeders, et quoi d'autre ? Le monde était si vaste, et lui n'était qu'un grain de sable dans cette immensité.

Le mâle était une âme solitaire, et, seul dans la brume, il se mit à fredonner un air qu'il avait déjà entendu. Entendu où ? Il n'en savait rien. Pourtant l'air était bien présent dans sa tête, presque instinctif. Il l'entendait alors qu'il était seul, et le répétait sans difficulté.

Et c'est ainsi qu'il s'engouffra dans le Dédale.