La liberté est un choix ▒ Abysse - fini

▒ 4 ans ▒
F A E I

La liberté est un choix. L'envol, une conséquence.

Parce que Ann aimait le théâtral et les formes, elle avait tout préparé pour rendre cette soirée magique. Elle avait croisé le Second Raeder au matin, et lui avait demandé de la rejoindre sur une plage du continent un peu avant la nuit. Son choix était motivé non pas par la beauté du lieu lors de la fin du jour -ce qui était tout de même un bon point de plus-, mais surtout pour les énergies positives qui inondait l'endroit lorsque le crépuscule se reflétait à la fois sur l'Océan et sur les milliards de milles éclats de nacre répandus en long et en travers de la rive. Des miettes de coquillages de toutes tailles et formes qui étincelaient sous le soleil couchant. Cela donna une aura à la fois merveilleuse et mystique qui plaisait tout particulièrement à la petite sorcière. Pour le reste, elle avait simplement apporté avec elle son petit coffret cadeau, quelques bouteilles, pots, fioles et autres objets en tout genre dans son sac ainsi que des morceaux de poissons séchés au sel de mer. Elle avait donc de quoi préparer un petit dîner aux chandelles pas piqué des hannetons. La noiraude étala sur le sable un vieux drap récupéré dans l'épave pour servir de couverture de pic-nique, puis elle avait cherché un peu de brindilles, des écorces et des branches bien sèches, puis des pierres pour entourer son feu de camp avant de l'allumer avec quelques gouttes d'huile de graisse de poisson.

Une fois sa mise en place terminée, la Maitresse des Rituels s'installa au milieu de la couverture et sorti un petit paquet de tissu de son sac. Elle déballa le dit paquet et en sorti une bougie en cire d'abeille. Elle en avait fondu plusieurs quelques jours plus tôt dans l'optique de s'en servir dans ses prochains rituels. Mais allumer des petites flammes n'étaient pas utiles en soit, ce qui l'était c'était tout ce que représentait la bougie. Aussi fallait-il l'oindre et l'ouvrager pour qu'elle ai la magie nécessaire ancrée en elle. Ann habilla sa bougie d'huile de poisson afin de l'alliée à l'Océan et de lui donner le sens du sort à venir : la prospérité pour les Raeders. Il suffisait de badigeonner la bougie d’huile du haut vers le bas si l'on souhaitait que le rituel apporte quelque chose ou du bas vers le haut si l'on voulait se débarrasser de quelques chose. Il s'agissait ici de la première option donc. Au moment de l’onction, la pirate visualisa ce qu'elle voulait, elle fixa son esprit sur l'intention de bienveillance, de fortune et de chance pour les forbans de Morne-Oeil. Pour tirer encore plus de puissance, Ann ajouta quelques herbes fraîchement coupées de basilic qui symbolisait la prospérité, le succès, la paix, la protection, le bonheur, la purification, la tranquillité et l'amour. Que du bon en somme ! Pour un avenir radieux pour les Damnés.

Une fois la bougie enduite, elle commença à la décorer de gravures minutieuse à l'aide de ses griffes. Ça n’était pas qu'une question d'esthétisme : en sculptant certains mots et symboles sur la cire, la sorcière au poil de charbon voulait renforcer ses pouvoirs. Les inscriptions choisies étaient évidemment en phase avec son objectif prochain : la bonne fortune pour ses compatriotes, mais aussi, un peu, pour elle. Alors qu'elle terminait d'apporter des détails à sa sculpture dans la bougie, un mouvement attira son attention et elle releva la truffe, intriguée.

▒ 4 ans ▒
F A E I

Un large sourire étira les babines de la femelle à l'arrivée du tant attendu Second Raeder. Elle souffla sur la cire pour faire s'envoler les copeaux grattés par ses griffes, et la rangea soigneusement dans son étoffe de transport pendant qu'Abysse la rejoignait sur le drap. Elle était vraiment contente -et soulagée- qu'il soit venu ! La noiraude avait craint un peu, que Naïade ne s'interpose et l'empêche de venir, si elle avait apprit la proposition de sa rivale. Apparemment ce n'était pas le cas. Bon, tant mieux. La pirate s'était préparé même, à devoir se battre contre la Médecin pour les beaux yeux malvoyants du mâle. La chaleur inonda ses joues tout de suite alors qu'elle entendait le pronom possessif utilisé pour la saluer. Ce n'était peut-être rien, mais pour elle, cela ressemblait à une fenêtre ouverte où elle s'engouffrerait avec joie.

« Abysse ! Je suis ravie de te voir ! »

La louve répondit avec enthousiasme. Elle voulait qu'il ressente, au travers de sa voix, à quel point cela lui faisait réellement plaisir qu'il soit là. C'était une tout autre forme de communication, un peu plus compliquée et moins naturelle que celle de la gestuelle, mais elle faisait l'effort pour lui rendre la tâche plus facile à lui. Ajoutant l'action à la parole, elle se redressa pour frotter furtivement son museau contre l'épaule du loup abyssal avant d'aller farfouiller dans ses affaires. Elle récupéra une bouteille de rhum arrangé, ainsi que sa potion conçue lors de la pleine lune et déposa le poisson séché sur une écorce qu'elle posa a proximité des deux.

« Je voulais fêter quelque chose avec toi, alors j'ai préparé un apéro ! »

Tous forban qui se respecte aimait festoyer en se remplissant la panse et le gosier. Elle espérait donc que son compagnon de meute apprécie le moment. Ann déboucha le rhum, et y versa son philtre d'amour avant de mélanger le tout vigoureusement. Ainsi elle créait pour l'occasion un cocktail un peu spécial dédié au mâle. Un rhum épicé de romarin, de rose, de lavande et d'un peu de miel. Cela promettait d'être bon ! Elle s'en pourlécha les babines mais se retint d'y goûter la première. Elle voulait que le mâle de son cœur soit le premier à porter aux babines ce délicieux breuvage. Après tout, elle l'avait fait pour lui. Il faudrait -si le cocktail se trouvait être bon- qu'elle lui trouve un nom aussi sucrée que diabolique ! En attendant, elle en proposa donc à son comparse.

« Trinquons au futur ! »

La petite sorcière sourit, son regard sanguin plissé, où brillait résolution et désir. Peut-être que si elle l'enivrait...

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F A E I

Ann observa les minuscules contractions des muscles du museau du loup abyssal, signe que sa truffe étudiait ce qu'il y avait devant lui. Elle posait un regard doux et attendri sur le Second Raeder, et se laissa aller à quelques rêveries fugaces. Tout chez lui l'attirait. La petite sorcière avait envie de se lover contre la peau du mâle, elle avait envie de glisser son museau dans son cou, de poser son oreille contre son thorax pour y écouter le battement de son cœur. Elle avait envie de sentir le frisson qui lui parcourait l'épine dorsale s'il venait à rapprocher son souffle dans un instant complice qui n'appartiendrait qu'à eux. Elle avait envie de se faufiler tout contre lui et de... La Maitresse des Rituels se mordit la langue pour cesser de divaguer. Pour arriver à un tel résultat, elle devait fournir plus d'efforts qu'une boisson sucrée et du poisson séché à grignoter. Bien que cela avait plutôt bien fonctionner pour ses parents, elle doutait parvenir à conquérir le beau Abysse grâce à son estomac.

« Oh un apéro ? C'est un... Mini-repas où on boit souvent plus qu'on ne mange pour s'amuser. »

Le sourire du pirate était si franc, si chaleureux et adorable qu'Ann eu un léger scrupule à continuer sur sa lancée. Elle ne voulait pas profiter de la naïveté de l'hybride. Et pourtant une voix moqueuse s'insinua dans son esprit de Damnée, l'a poussant à ne pas rebrousser chemin, à ne pas écouter la raison et à simplement lâcher prise pour son propre bien en dépit de celui de certaines -ou certaine- autres. A son tour, elle se délecta de quelques gorgées de boisson qui réchauffèrent son palais, son gosier et son abdomen. Les oreilles de la noiraude se redressèrent à la question du loup des profondeurs et ses yeux étincelèrent. Elle sentit ses joues et son ventre brûler comme si l'alcool envahissait déjà son corps, bien qu'il soit trop tôt pour que le breuvage ne vienne déjà mélanger ses sens.

« Il y a tellement de choses que j'aimerais faire avec toi, Abysse. »

Répondit-elle en se penchant vers l'avant, étirant son cou et ses épaules jusqu'à avoir le museau en dessous du Second. Des promenades, des caresses, des chasses aux crabes, des câlins, des enfants, des soirées lectures, des étreintes, des découvertes, des enfants, des vieux jours à deux, des... Non peut-être pas des marmots. Ne seraient-ils pas bien juste tous les deux pour l'éternité ? On verra bien le reste plus tard. Ann plissa les yeux et soupira sans cesser de fixer celui pour qui, sans hésiter, elle se damnerait si elle ne l'avait pas déjà été. Etait-elle allé trop loin déjà, en une seule phrase ? Elle hésita à poursuivre, préféra finalement ne rien ajouter et laissa planer un rire discret. Peut-être comprendrait-il où elle venait en venir, peut-être que non. Au pire, il penserait à une simple plaisanterie, non ?

« Trinquons, c'est buvons pour se donner de la chance. »

Lentement, la petite sorcière se redressa et attendit de voir quelle réaction aurait l'hybride, espérant évidemment, que rien, ni personne, ne vienne gâcher ce moment.

▒ 4 ans ▒
F A E I

Naturellement, elle versa une nouvelle rasade au mâle abyssal. Qui était-elle pour priver son supérieur et ami de se désaltérer et de réchauffer son âme de quelques gorgées d'alcool arrangé ? Les oreilles de la petite sorcière continuaient de s'agiter, attentives aux mouvements du pirate. Elle lapa quelques gorgées à son tour, appréciant la descente du liquide sucré jusqu'à son estomac. Lorsqu'Abysse lança avec conviction qu'il voulait s'amuser... Elle n'en cru pas ses tympans tout de suite. L'Océan avait-il remplit ses oreilles de ressac et d'écumes pour qu'elle imagine avoir entendu ce qu'elle désirait entendre ? Le soupir de son comparse l'attira à nouveau à la réalité, et elle le vit défaire la tension de ses épaules. Comme en réponse instinctive, tout le corps de la femelle se détendit également, comme une réponse tacite à cet instant qui n'appartenait qu'à eux, à... Ann tourna le museau vivement, sidérée aux derniers mots de l'hybride. Elle en avait rêvé des milliers de fois, oui, mais n'avait jamais cru possible, qu'une fois, il l'autoriserait à faire réellement tout ce qu'elle voulait. Et quelque chose au plus profond de ses tripes lui dicta que ce soir, ce n'était pas l'adorable loup candide qui l'invitait à tant de légèreté. Sans doute son désir qui s'embrasa.

« Mille sardines, Abysse, ne dis pas des choses comme ça... »

Murmura la Maitresse des Rituels en s'approchant du mâle à petits pas. La noiraude glissa son museau dans le cou du Second, et sans la moindre hésitation, parce que c'était maintenant ou jamais, elle souffla à son oreille :

« Parce que ce que je veux faire avec toi, loup des profondeurs, c'est t'aimer de toute les manières possibles. Tous les jours et pour toujours. »

C'était dit. C'était avoué. L'alcool ayant aidé par sa simple présence, comme un placebo de confiance alors même qu'il n'inondait pas encore l'orgasnisme de la louve aux cheveux blonds, elle avait finalement lâcher ses sentiments hors de leur prison rouillée. Elle inspira l'odeur musquée et salée du Raeder, se rassasia de son contact aussi longtemps qu'il ne la repousse pas maintenant qu'il ne pouvait plus ne pas comprendre ce qu'elle voulait de lui, avec lui plutôt. Elle se gorgea du moindre frisson que provoquait la peau lisse de son comparse pirate contre la sienne. Elle savait que cela ne durerait que quelques secondes avant qu'il ne la rejette, avant peut-être même, qu'il ne la repousse et qu'il ne veuille plus jamais la croiser. Mais elle était prête maintenant à prendre ce risque, car l'Océan savait qu'elle était seule à maitriser sa vie et son bonheur, et maintenant qu'elle l'avait compris, elle n'avait plus rien à perdre. Ou presque.

...

▒ 4 ans ▒
F A E I

Il ne la repoussa pas. Bien au contraire. La sorcière sentit le poids de sa tête sur elle, sentit l'appui caractéristique d'une étreinte partagée. Son cœur tambourinait si fort dans sa poitrine, embrasant son thorax d'une chaleur qui irradia jusqu'à son cou, ses joues, le bout de ses oreilles même. Ann ferma également les yeux, appréciant la moindre étincelle de plaisir que provoquait en elle ce câlin tant désiré. Elle frotta son museau dans le cou du mâle, dans un soupir de bien-être. La Maitresse des Rituels, qui jusqu'alors avait toujours mit un frein à son envie d'Abysse par respect pour lui et sa famille, laissa tomber sa dernière retenue. Lorsque le Second Raeder la lâcha pour aller boire, elle sentit une brise glacée lui hérisser le poil. Etait-ce déjà fini ? Non, elle ne le permettrait pas. Alors elle le rejoignit, s'allongea à son tour le plus prêt possible de lui. Elle voulait que ce moment dure toujours. N'était-ce pas le plus beau cadeau que l'Océan, et Abysse surtout, pouvait lui faire ? Elle émit une sorte de ronronnement à la question du forban, et la chaleur de son cœur se propagea dans ses entrailles. Désormais, son corps réclamait tout autant d'attention.

« Serre-moi. »

Murmura t-elle dans un sourire heureux, alors qu'elle venait souffler dans le cou du mâle, puis mordiller son oreille, mutine. S'il voulait jouer, elle était prête à le suivre jusqu'au bout du monde.

▒ 4 ans ▒
F A E I

Ann sentit les pattes d'Abysse se resserrer autour d'elle, exactement comme elle l'avait imaginé en le lui demandant. La pression du mâle autour d'elle était réconfortante et enivrante. Il y avait dans sa façon de la tenir quelque chose de... Nécessaire ? Comme si par ce contact qu'elle demandait, le mâle vert-bleu comblait un manque en lui répondant favorablement. La sorcière frissonna, laissant le silence s'installa entre eux deux. Chacun dérivant dans son esprit, chacun s'abimant dans ses lointaines pensées. L'étreinte se radoucit progressivement, naturellement. La noiraude ne demandait rien de plus, elle avait déjà eu ce soir, bien plus qu’elle n'osait imaginer jusqu'alors. Le Second répondait à son affection, tout simplement. La langue du mâle vint caresser la tête de la louve, qui sourit devant un geste aussi... affectueux. Le tout accompagné de mots doux. Elle doutait toutefois qu'il ne l'aime comme il aimait Naïade, mais elle s'en contenterait. Elle n'avait pas besoin de plus. Doucement elle se retourna pour lui faire face et lui lécher la truffe, joueuse.

« Ah oui ? Prouve-le et rattrape moi ! »

Elle souffla avant de rire en le repoussant. D'un bond elle fût debout, et aboya comme pour mettre au défi Abysse de la rejoindre. Il avait dit vouloir s'amuser ? Alors elle le ferait courir un peu dans la danse du chat et de la souris.

▒ 4 ans ▒
F A E I

Au jeu du chat et du rat, Abysse était un as. Elle eu du mal à fuir et se sentit vite forcée dans ses directions. Elle évitait le mâle de justesse grâce à son agilité légendaire. Elle n'était pas contre le laisser l'attraper... A vrai dire elle en avait même terriblement envie, mais elle savait aussi que demander trop d'un coup risquait de briser ce qu'elle venait de gagner ce soir. Il lui faudrait donc se contenter de cette étreinte, de ce moment à deux, et continuer d’espérer que par la suite, ils puissent se rapprocher davantage jusqu'à ce qu'elle évince complètement Naïade. Souriant dans l'ombre, elle s'arrêta, le souffle court pour voir que le Second aussi avait fait une pause. Il semblait aux aguets, alerte. Il l'a cherchait. Amusée, elle plissa le regard et s'approcha à tout petit pas silencieux pour aller chuchoter tout prêt de lui :

« Le chasseur à perdu sa proie ? »

Dans un rire elle bondit en arrière et attendit qu'il revienne vers elle. Il ne fallait pas lui rendre la tâche trop facile ! Pas ce soir en tout cas ! L'alcool chauffait enfin son ventre et ses veines, son esprit s'embrumait doucement, la laissant ivre de joie, de bonne humeur et de désirs refoulés.

▒ 4 ans ▒
F A E I

Ils jouèrent un moment ainsi, à se courir après, à rire. Ann roula dans le sable plusieurs fois en essayant d'éviter le mâle, et s'amusait d'autant plus de sa maladresse. Il y avait si longtemps qu'elle n'avait pas passé un moment aussi simple et serein. Loin des tracas du quotidien, loin des habitudes, loin de tout et de tout le monde. L'espace d'un soir il n'y avait plus qu'eux deux, et pour la première fois depuis longtemps, la sorcière était heureuse, complètement. Elle finie par se faire attraper et entre les pattes de celui qu'elle aimait, elle explosa de rire. Elle mordilla la mâchoire du loup vert, puis son oreille. Bien sûr, entre le jeu, l'alcool et ses sentiments, elle avait envie de bien plus que de séduction et de contact doux. Elle calma ses ardeurs pourtant et n'insista pas. Pas ce soir. Si quelque chose devait arriver, elle désirait que rien n'entrave la réflexion des esprits et ne rendent les mouvements incertains et flous. Elle espérait ainsi que le Second la choisisse réellement, pour elle, et pas sous emprise quelconque d'une boisson ou d'un charme. Elle s'immobilisa finalement, le cœur battant et le souffle court.

« Je t'aime Abysse. Je t'aimerais toujours. »

La noiraude observa le loup vert. Elle détailla son visage, son sourire plein de crocs effilés, ses longues oreilles et son corps fin mais musclé. Il était beau, Abysse. Si beau et si gentil.

« Il est tard, et si on rentrais se reposer maintenant ? »

Elle ne voulait pas que finisse la soirée. Mais il le fallait, ils en avaient besoin. Surtout elle, pour ne pas gâcher les pas en avant d'aujoud'hui.

▒ 4 ans ▒
F A E I

Abysse éteignit le feu pendant que la noiraude rangea les quelques restes dans son sac. Elle était essoufflée, avait les joues en feu et le regard brillant, mais elle n'aurait pu rêver mieux pour cette soirée particulière au clair de lune. Ou bien ?
Ann, ma soeur Ann, écoute bien.

Le mâle vert eu une demande à laquelle la sorcière ne s'attendait pas, à laquelle elle resta tout d'abord sans voix. Pas parce qu'elle ne voulait pas, au contraire, mais parce qu'elle était réellement surprise. Elle eu chaud d'un coup, à la fois ravie et inquiète. Puis elle se rappela qu'elle avait décidé de fabriquer son bonheur, et de travailler à gagner les sentiments du loup abyssal. Et puis qu'avait-elle à perdre en acceptant ? Rien. Alors que si elle refusait...

« Bien sûr. Il y aura toujours de la place pour toi dans ma cabine. »

Elle rit doucement, tout en sachant que le vert ne comprendrait sans doute pas le sous-entendu. Elle alla lui donner un coup de museau affectueux avant d’attraper son sac et de la passer sur son dos.

« Il va sûrement pleuvoir pendant la nuit, vu les nuages. On se tiendra chaud. »

Elle parlait beaucoup, comme pour normaliser la situation, comme pour simplement penser que tout était normal. Elle ne se sentait, elle, coupable de rien du tout -bien au contraire !- mais elle ne souhaitait pas qu'Abysse se réveille au petit matin avec sa compagne énervée pour lui souffler entre les deux écoutilles. S'il fallait, Ann était prête à se battre contre Naïade pour qu'elle lâche ce pauvre Abysse qu’elle traitait si mal alors qu'il était si doux et affectueux.

« Je te dis tout de suite, je dors du côté de la porte ! »

Et en riant, elle avança sur la route du retour, vers Morne-Oeil.

▒ 4 ans ▒
F A E I

Ann était née sur Morne-Oeil et avait grandie et évoluée sous son climat peu confortable. Elle, de son côté, souffrait d'un autre type de dérangement la nuit : la solitude. Il y avait bien longtemps que l'obscurité ne lui faisait plus peur, bien longtemps que plus rien ne l'effrayait à vrai, hormis cette idée fixe de n'avoir personne avec qui partager sa cabine. Depuis peu, Ariitaimai apportait un poil de présence dans la grotte de la Maitresse des Rituels, mais ce n'était pas suffisant. Ce n'était pas ce qu'elle recherchait pour briser ce sentiment de n'appartenir à personne en particulier. Alors ce soir, recevoir la visite du loup abyssal dans son espace personnel, pouvoir dormir auprès de lui, même pour cette seule nuit, elle se sentait chanceuse, heureuse, comme dans un rêve dont elle ne voulait pas se réveiller.
Comme il était tard et que le cocktail préparé pour l'occasion avait agrippé les corps de nos deux compères pirates, la léthargie caractéristique offerte après un léger surplus d'alcool ne tarda pas à venir les chercher. Ils s'endormirent rapidement, sereinement, d'un sommeil parcouru de rêves joyeux, pour la noiraude du moins. Lovée contre le Second Raeder, rien ne lui semblait plus important que d'être à cette place, à cet instant.