Je dois te parler... (Désastre)

Apprendre.
C'est un mot qui l'a surpris, dans la gueule de la disciple d'Aka. Un mot qu'il n'attendait pas, dans une pensée un peu honteuse qu'est celle que c'est le combat, qu'elle aurait désiré trouver dans le Grand Nord. Pour y suivre sa prêtresse, dans sa quête de trophées, de victoires contre les monstres des temps anciens...
Elle veut apprendre.
Il y a souvent repensé, depuis ce jour où il fut soumis à la licorne. Celle dont les renseignements acquis dans les livres lui conférait encore ce titre, quand bien même subsistait le doute de l'apparence lupine. Il n'avait pas lu, qu'elles étaient métamorphes.
A y repenser (encore), cela lui faisait deux choses à demander à Sakura.

Si ce qui semblait être son amie (il possédait beaucoup de liens d'amitiés et les avait tout autant étudiés, il savait qu'elles l'étaient) était une véritable licorne ou bien une louve solitaire à l'apprence de celles-ci (ou encore, une hybride ?).
Puis...
Si, dans le Grand Nord, elle voulait venir apprendre avec lui.

Elle en était disposée, lui semblait-il.
Apte à l'accompagner retrouver ceux qu'il partait chercher, Désastre.

Otis, Odon, et l'art de ne pas défier le monstre mais de leur permettre d'en échapper.
Il se souvient, l’œil encore unique avait enregistré la façon dont l'un deux se précipita au devant, pour gagner toute attention quand ailleurs, ils étaient plus et plus intéressants.
Il veut apprendre les gestes et la façon dont on les mets en fuite, il veut gagner cette efficacité pour mieux défendre la meute.
Pour ne pas qu'une vie soit un jour prise, et que le docteur seul ne suffise pas.
Pour ne plus, aussi, que les mâchoires se referme sur son dos, et qu'une queue n'explose une moitié de visage.

Ainsi, un nouvel objectif.
Il en demanderait toutefois accord à ses Alphas, si intéressée la louve se trouvait être.

*****

Il fut convenu qu'il lui parle lorsqu'il la croiserait au Castel, pour ne pas interférer dans ses rondes.
Ses pas le menèrent sur l'île Abysse, non dans cet optique qu'était celui de la trouver puisque de piste il ne suivait pas, mais pour partir cueillir quelques plantes nécessaires.
Tout comme les proies, celles-ci y étaient foison, et la diversité de l'endroit où se mêlait forêt et littoral faisait naître bien des végétaux médicinaux.
A cette tâche il s’attela, prenant entre ses crocs ce dont il avait besoin avec précision, pour n'abimer ni tige, ni feuilles, ni fleurs.
Il fut cependant contraint de s'arrêter, quand les allergies se rappelèrent à lui.
Et de se rendre plus proche de l'eau, aux abords de la tour, pour rincer à l'eau salée son museau prit par le pollen des plantes, reniflant puis séchant ce qu'il coulait de celui-ci.
Pour ça, le Nord l'épargnerait. Il aurait froid, mais respirerait mieux...

Mmh.

Il a redressé la tête, prend désormais une bouffée d'air.
C'est à cet instant seulement qu'il sait qu'elle est là. En regardant le haut de la tour.

« Oh. »

Vague surprise.
Il comptait la chercher plus tard et non la trouver maintenant.
Désormais...
Doit-il l'y rejoindre ou l'inciter à descendre, c'est la question qu'il se pose.
...
Il doit lui parler.
Ne sait pourtant comment l'aborder.

Reste donc ainsi. Figé et silencieux.

« Salut. »

...
Il se demande si la louve est aussi surpris que lui. C'est ce que lui laisse penser la façon dont elle s'exprime, cette façon non habituelle de hacher ses mots, de ne pas les trouver. Il se rappelle du bégaiement de TeHari, se demande si elle en est aussi atteinte, parfois.
Il plisse les yeux, Désastre.
Il réfléchit, laissant à la louve le temps de descendre de l'échelle. Elle manque de tomber, une fois puis d'autres.

Un état de faiblesse.
Cela doit être ça. Sans doute n'avait-elle pas mangé assez, et son tour de garde l'avait suffisamment épuisé pour qu'elle ne parvienne à aligner les mots avec sa fluidité usuelle. Plus, que son corps lui-même soit pris de tremblements.
Il s'approche un peu plus. S'apprête à lui porter assistance, voir lui donner quelques plantes. Il en dispose, dans ses billes d'argiles conservés dans les bandages et le bandeau de sa patte ; cela n'aurait que pu lui faire du bien.
...
Il croit.

Elle semble regagner des forces, ainsi devant lui. Communique à nouveau avec constance.

Vertige. Autre constat qui s'érige. Elle n'aime la hauteur de la tour, s'y contraint pourtant en membre loyale et fidèle. Oui. Cela doit être ça.
Les analyses s'enchainent mais ne se finalisent pas, sa méconnaissance de la louve induisant cette incapacité à correctement la comprendre. Un tort qu'il se devrait de réparer, un tort qui se réparerait de lui-même une fois que-

La licorne.

Cette mention couche ses oreilles en arrière. Il fut dans une position de soumission, il fit une erreur en la pensant réelle licorne (il n'était toujours pas certain du contraire). Ses babines frémissent, alors qu'il ne sait par quels mots faire comprendre son erreur.

« Oui.
Ça va.
...
Ton amie. Ce n'était pas une vraie licorne, c'est ça..?
J'ai rencontré beaucoup de monstres. »

Ainsi de s'en persuader.
Les oreilles se redressent alors, quand le regard lui reste toujours d'une morne neutralité.

« Je dois te parler aussi. »

Puisqu'elle avait initié en premier cet objectif, Désastre ne dit rien de plus. Se contentant d'attendre, maladroit dans ses conversations, ne sachant encore quel était la façon de bien faire avec elle.
Devait-il lui dire de commencer ?

« Commence. »

...Sans doute que oui.

« Mmh. »

Ainsi de ne plus savoir quoi penser, de la Licorne amie de la louve.
Il ne perçoit que trop peu l'humour, il ne perçoit que trop peu le second degré ; il le sait et il y pense, Désastre, à ce moment précis où le doute s'installe en lui. Mais il ne peut s'en défaire, persiste avec ce besoin de ne pas plus s'approcher des bêtes et des monstres que personne ne saurait lui apprendre à maîtriser. Parce qu'il avait vu la corne, oui. Parce que sa beauté... Il en avait été indifférent, ne trouvant chez elle aucune grâce ni finesse reptilienne, ou ressemblance quelconque avec une petite louve bleue. Du reste, il n'en savait rien.
Ni se battre, ni manger de viande...
Il n'y avait rien de naturel, pour un loup.

Elle était donc belle et bien licorne, tel était là la conclusion finale.

Et voilà que déjà il ne s'en embarrassait plus, ferait simplement plus attention quand il la recroisera, la Licorne.
Parce qu'elle lui demander de commencer, ah, par le droit de l'ainé. Il ne le connaissait pas, s'en souviendrait désormais : s'il était plus âgé que le loup en face de lui, il se permettrait prise de parole en premier.

« D'accord. »

Les hésitations étaient levés. De sa voix grave, aux mots qui presque se confondaient les uns aux autres, Désastre prit la parole et enchaina sans interruption.

La mise en contexte initiale, en premier.
« J'ai vu dans le Nord beaucoup de blanc, des monstres des temps anciens et des loups de trois fois notre taille. Surtout, j'ai vu Otis au cœur rouge, et Odon au cœur orange, nous permettre de prendre la fuite quand de combat nous aurions sans doute pensé devoir mené. Odon, seul face au dinosaure, pour l'emmener bien plus loin. »
Puis ce pourquoi il venait vers elle. Il avait travaillé son discours.
« Tu as dis vouloir apprendre. Tu portes la lumière rouge, la même que Otis même s'ils n'ont pas de vrais lumières, eux. Tu es connecté à Aka et tu pourras le lui présenter, en échange de cet apprentissage. »
Finalement, la raison d'un départ vers le froid.
« Je veux apprendre à éloigner les monstres des temps anciens sans avoir à les combattre. Parce que le risque est trop grand, parce qu'il faut protéger la meute.
...
Je veux que tu viennes avec moi.
Toi, et une disciple orange.

Nous irons apprendre auprès d'eux. »

Tout n'est qu'une suite logique et évidente, tout est dévoilé et maintenant il se tait, Désastre.
Attend sa réponse, autant que ce qu'elle voulait lui dire.

Entre ses paroles, elle aurait eu le temps de placer les siennes. Pourtant elle respecte la lenteur de son discours et c'est l'attention et la concentration qu'il peut lire sur son visage.
A certains mots, précisément ceux concernant le fait de présenter le loup du froid à son dieu... Il vit bien disparaitre le sourire, trouvant en même temps que la suite réflexion sur ce changement.

Cette idée ne lui convenait pas.
Il acceptait d'être dans l'erreur et d'écouter autre solution.

Celle perceptible dans son prénom qu'elle prononce, d'une façon qui presque la fait s'excuser. Sur elle, toute l'attention : il guette ses réactions.
Celles qui tombent, en même temps que c'est à son tour, de dressé si droites ses oreilles.

Il avait bien commit une erreur.
Celle évitable, celle survenue car il n'avait pas été assez précis dans son discours. Il avait oublié ce détail, celui qui bien sûr, ne pouvait que tenir à une louve fidèle et loyale.
Il n'avait pas douté de ce fait, Désastre. Mais si tel aurait été le cas, il aurait eu assurance en cet instant que Sakura, à ses alphas, était toute dévolue.

Un peu, le gris s'agite.

« A-ah !
...
Oui, une alpha sera prévenue de tout.
Rien n'est fait sans ordre ou accord. »

Il ne peut pas. Il en est incapable. C'est ce qu'en premier, lui apprit la Petite Reine. A obéir.

« Holly l'a rencontré, le cœur rouge. Et le cœur orange, aussi. Elle était là, Anita saura mais elle d'abord. »

Il hoche la tête, réfléchit à ce qu'il peut ajouter. Du reste des mots, il sait qu'elle n'est pas contre cette expédition, plus, s'en enthousiasme et s'éveille face aux projets. Il se redresse, Désastre, à nouveau la regarde.

« Si elle est d'accord, je reviendrais te le dire. Pour te préparer, aussi.
...Il fait très froid, là-bas. »

Il insiste sur le très, c'est important. N'allait pas là-bas qui n'était pas bien préparé.
Il connaissait les dangers, ferait en sorte qu'elle ne soit exposé à rien. C'est sans blessure qu'elle se devrait de revenir parmi les leurs, triomphante et plus expérimentée qu'elle ne le fut en partant.
Et puisque clos se voulait être ce sujet...

« Mmh. A ton tour.
De parler. »

Elle en avait émit l'intention, il n'avait pas oublié.

La situation se régula et la louve accepta participation de façon plus assurée. Certaines de ses paroles, pourtant, firent réagir le mâle. Les oreilles avancées, le buste redressé.
Il doit presque couper la parole, tant il est nécessaire qu'il le dise ; elle lui laisse cependant occasion de parler par la question qu'elle pose.

« Tu reviendras en vie. Personne ne meurt, avec moi. »

Parce que j'ai pactisé avec la Mort, dans un cauchemar trop réaliste.
Parce que ceux que je soigne ne perde rien. Ni un membre, ni la vie. Parce que je guéris.
Je suis Docteur.
Et qu'en l'absence de ce don, il sait aussi Désastre. Qu'en vie, elle serait quand même revenue : c'était la condition d'un tel départ, une promesse tenue au silence. Il veillerait, à ce qu'il ne leur arrive rien.
Plus.
A Pepper, il avait promis que ses apprentis resteraient en vie. A Kiro, il avait promis que tous disciples de jaunes lui reviendraient.
Renouvelé sous des noms différents, ces promesses persisteraient.

Il hoche la tête, à l'évocation de la cape, il lui fait confiance. Du reste...

Ce qu'il attend ne viendra pas. Son attitude soudain s'embrouille et devient flou, lui observe et agite ses oreilles sans comprendre.
N'y réfléchit pourtant pas plus, car elle dit que ça n'est important. Elle saurait où le trouver, si un jour cela lui reviendrait.
Le contact qu'elle initia avec lui le surprit et le figea sur place, imprévisible action qui fit suspendre sa respiration et ses réactions. Il la laissa faire, pourtant, comme il le faisait avec d'autres.
Puis...

« Merci à toi. »

...Chacun, sans doute, de reprendre sa fonction.