Le Roi du monde - Nirvana

Maman était o-ccu-pée.
C'était ce qu'elle lui avait dit, quand il était venu la voir pour.. Pour il savait même plus quoi. Probablement pour avoir de son attention.
Pire encore, elle lui avait demandé d'aller jouer ailleurs, qu'elle viendra après, et ça, ça le rendait vraiment pas content ! Il avait un peu boudé, un peu chouiné, sans bouger.
Mais bon, Maman avait pas plus réagi, elle lui avait même pas accordé un regard, alors il en avait eu marre de rester là, à bouder.

- Je vais jouer !
- Bien ! Je viens vous chercher dès que j'ai terminé, et on jouera ensemble.

Le louveteau bleu hocha la tête et partit au petit trot trouver sa sœur, la grande.

- Viens, on va jouer dans la chambre des trônes !

Lui, il voulait jouer aux Etelkrus !

Châtaigne était de bonne compagnie. Quand bien même c’était pas celui/celle qui parlait le plus à moins de le lui demander, Nirvana aimait bien échanger avec lui/elle, observer ce qui se passait, voir tous les autres en activités. Encore légèrement enrhumée, la louvette avait encore des maux de tête, mais se rafraichir avec de l’eau semblait apaiser le tout.
Et puis y’a Puceron.
Nirvana pose ses yeux pâles sur lui, l’observant un instant avant d’hausser un sourcil. Jouer dans la chambre des trônes ? Elle sent le regard de Chay, alors qu’un léger silence s’installe (faire patienter le p’tit Puceron, c’était la moindre des choses quand on était la plus grande non ?).

« — D’accord. »

D’un clin d’oeil elle salut l’enfant de Perrine, bombant fièrement le torse alors qu’un sourire malicieux étire ses babines.

« — Mais c’est moi qui monte sur le trône de Maman, Puceron ! »

Il voulait commander, Nirvana ne se laisserait pas faire.
Sans un avertissement elle s’élance jusqu’aux trônes - attendant quand même son « petit, très petite » frère - et de prendre de l’élan pour monter sur le trône de sa mère. Bon c’était pas très gracieux, seul l’avant de son corps se retrouva sur le siège et elle du s’aider maladroitement de ses pattes arrières. Tant bien que mal elle parvint à s’asseoir.

Ah, elle était même pas toute seule, sa sœur.
Y'avait un des enfants de Perrine, avec elle, l'un des petits-grands-pas-tout-à-fait-grands-mais-plus-grand-que-lui-quand-même. Mais bon, elle voulait bien jouer avec lui quand même et ça c'était cool.
Même si elle l'avait fait attendre, un peu, et qu'il avait pas trop apprécié ça.

Enfin, il y aurait bien d'autres choses, qu'il n'apprécierait pas, à lui en faire froncer un peu les sourcils.

- Mais je suis pas un Puceron d'abord !! Sinon toi t'es... t'es euh... Un gros caca boudin !

Voilà ! Ca, c'était de l'insulte !

- Puis d'abord Maman elle monte même pas sur le trône avec Anita ! Elle commande par terre alors moi aussi je peux commander par terre !

Même si il aurait bien aimé monter sur le trône. Mais bon, il était encore trop petit pour ça, même en sautillant, si Maman le portait pas.

- Du coup je suis l'Alpha Iberis et toi t'es euh... Une épée ! Allez, va tuer les méchants loups poissons, épée Nirvana c'est un ordre !!

Bon, ok, elle parlait pas comme ça, Maman (heureusement) mais lui, si !

Nirvana s’apprêta à tendre la patte à son frère pour l’aider à grimper, mais voilà que la p’tite larve lui répond. La louvette bomba le torse.

« — C’est ton max là ? Nul. »

Digne des bébés.
Nirvana aimait bien le trône de pierre, on était bien installé dessus, ce serait encore mieux avec sa couverture. Peut-être que Chay ou Melon seraient partant pour une sieste ici ?

« — T’as raison les pucerons c’est mieux par terre. »

Un frisson parcourt le corps de Nirvana dont les oreilles se couchent sur le crâne. À Moustique et Puceron elle n’avait pas montré son autre apparence… Sur son corps elle avait quelques écailles, mais c’était caché par les poils. Son apparence aquatique…
Va tuer les méchants loups poissons.

« — Laisses-les tranquilles, les loups poissons. »

L’enfant montre ses crocs alors qu’elle se penche par-dessus le trône.

Ne jamais leur montrer.

- Mais j'suis pas un Puceroooon !!

Il sentit quelque chose qui avait changé, chez Nirvana, sans trop comprendre pourquoi, depuis qu'il lui avait parlé d'aller attaquer les loups poisson.
Ben quoi ?
Le louveteau apposa ses deux pattes avant contre le trône, tentant maladroitement d'y monter, malgré l'expression menaçante de sa sœur : De toutes manières, il avait même pas peur d'elle !

- Bah ils sont méchants les loups poissons, ils viennent chez nous et y' nous piquent notre manger. Ils ont pas le droit d'être là, Maman elle a dit.

Ceux qui rôdaient près du Castel et, surtout, ceux qui s'approchaient trop d'eux, Maman elle les tuait sans hésiter, de toutes manières. Alors, pourquoi pas eux ?

- Potêtre ils veulent nous manger aussi.

Puceron proteste encore contre son surnom. Voilà même qu’il cherche à la rejoindre sur le trône. Le sol ne lui convenait plus ?
Nirvana affiche une expression particulièrement contrariée, bien sûr elle avait entendu dire que des poissons étranges foulaient leurs terres, mais ils étaient apparus après la tempête… en même temps qu’elle s’était retrouvée sur la plage. Maman avait déjà dit à la louvette qu’elle avait été trouvée là-bas… si ça se trouve elle avait un lien avec ses loups poissons ?
Ça la mettait un peu mal à l’aise.

« — … et alors ? Ils t’ont rien fait à toi que je sache ? Ils t’empêchent pas de manger tes crottes de nez, si ? Bon alors laisses-les tranquille. »

Il disait n’importe quoi, Puceron.
Pas très futé.

« — Tss, qu’est-ce que t’en sais, t’es allé leur demander ? »

Bien sur que non, trouillard.

Il fronça les sourcils et gonfla les joues, offusqué.

- Je mange pas mes crottes de nez ! C'est caca ce que tu dis !

Mais ça ne lui disait toujours pas pourquoi sa soeur défendait à ce point les loups poissons.
Lui, il s'en fichait bien, qu'ils meurent : Ca faisait un moment qu'il voyait un peu tout le monde leur taper dessus et ce serait sûrement quelque chose qu'il ferait aussi, si il était en âge de se battre. Ce qui n'était pas le cas, au contraire, puisqu'il était encore, bien malgré lui, encore un petit être vulnérable qui se devait d'être protégé par les adultes.
Il cessa d'essayer de monter sur le trône.

- Bah non, ils sont bêtes, ils parlent pas, c'est de la verm...

ine.
Iberis ouvrit la gueule.

- Oh mais j'ai compriiiiis ! C'est tes copains les loups poissons ? Prrrr t'es amie avec la vermine ! Quand Maman et Iris elles vont savoir ça

Ptet qu'elles rigoleraient bien avec lui !

Elle sent ses pattes trembler aux mots de son frère.

« — ...t’es si bête... »

Si stupide, avec ton petit cerveau, c’est pathétique.
Nirvana se redressa détournant le museau d’Iberis pour ne plus le voir.

« — … va t’en. »

Et sans qu’elle ne puisse les retenir, les larmes coulent sur les joues de Nirvana, alors qu’avec colère elle fixe un point fixe derrière le bleu, pour ne pas le voir lui.
Retournes donc jouer avec tes amis imaginaires, ce sont les seuls que tu auras avec pareil caractère, puceron.

Il comprenait pas.
Il comprenait vraiment pas pourquoi elle était triste, Nirvana, quand il parlait des méchants loups poissons qui envahissaient leurs terres et qu'ils devaient éliminer.
Mais avant toute chose...

- Je suis pas bête !

Si sa soeur avait détourné la tête, lui, l'observait toujours.
C'était... dérangeant, cette sensation dans son ventre, dans sa gorge et dans son coeur, ça faisait briller ses yeux comme si... Comme si il allait pleurer ?
Mais il était pas triste, lui !

Mais elle, si.
Il fronça les sourcils et revint poser ses pattes avant contre la pierre du trône.
...
Il était censé faire quoi, là ?

- Je vais chercher Maman !

Elle est obligée de reposer les yeux sur lui.

« — J’ai pas besoin de maman. »

Nirvana avait pas envie qu’on vienne l’aider. Elle voulait pas que Puceron se fasse gronder à cause d’elle, c’était pas une balance. Il avait beau être bête et méchant… il…
La sirène se coucha sur le trône, posant la tête sur ses pattes.

« — Je veux juste que tu me laisses tranquille, Iberis. »

Pourquoi les autres ils n’aiment pas les poissons… pourquoi même son frère il voulait absolument tuer les loups poissons alors qu’ils avaient rien fait de méchant ? D’accord ils venaient sur les terres… mais est-ce que ça en faisait des vilains pour autant ?
Est-ce que si je me transforme en poisson devant eux ils me chasseront ?

Bah oui mais elle était triste.
Du coup, il irait quand même chercher Maman pour lui dire que Nirvana elle pleurait. Mhh, elle allait peut-être le gronder, d'ailleurs, si c'était sa faute à lui qu'elle était comme ça ? Mais il avait rien dit de mal, pourtant... Bon d'accord, il s'était moqué d'elle par ce qu'elle voulait être amie avec les loups poissons vermine.
Mais Maman elle serait sûrement d'accord avec lui, que c'était bizarre. Elle non plus elle les aimait pas, les loups poissons.
Iberis fit la moue.

Elle voulait plus jouer, alors.
Pire, elle voulait être tranquille. Sans lui, donc.

- D'accord.

...
Pas de bisou, pas de câlin.
Elle voulait être tranquille.

Un dernier regard et Iberis partit de son côté, prêt à retrouver sa Maman et à tout lui raconter.

Au moins ça, il semble écouter, exhausse son souhait et la laisse seule sur le trône. Nirvana se moque bien de l’endroit où Iberis se rendait ou ce qu’il faisait. Ça lui paraît ridicule de rester là, elle veut retrouver sa couverture de bébé, être dans un endroit plus chaud ou elle attrapera encore un rhume… mais si elle va voir Perrine cette dernière posera des questions… si elle rentrait à la tanière… maman la verrait et poserait aussi des questions.
La louvette resta donc immobile sur la pierre.

Ils ne doivent pas savoir. Personne d’autre ne doit savoir.
Je ne veux pas être chassée comme les autres loups poissons.

Profitant d'avoir les enfants occupés, Holly rangeait la tanière familiale. C'est qu'ils en mettaient, du bazar, les petits monstres, entre tout ce qu'ils pouvaient ramener de l'extérieur et ce qu'ils éparpillaient un peu partout, lorsqu'ils jouaient à l'intérieur. Et puisqu'elle était une louve ordonnée, elle se sentait obligée de remédier à cela, que personne ne trébuche sur quelque chose au milieu du passage et qu'ils puissent tous se reposer, ce soir, sur des couvertures bien pliées.

- Mamaaaan !

La louve bleue se tourna vers son tout jeune fils, Iberis, qui vint s'écraser contre ses antérieurs.

- Qu'est ce qu'il se passe, Iberis ?

Elle se coucha à sa hauteur -du moins, du mieux qu'elle pouvait, il était encore vraiment petite- et plongea son regard dans le sien. Il semblait un peu perturbé.

- Nirvana elle pleure par ce que j'ai parlé des méchants poissons loups !

Oh.
Holly se redressa subitement.

- Mais je voulais pas la faire pleurer !
- Je sais. Je vais aller la voir.

Ah, les gosses.
Elle avait beau les avoir voulu et les aimer de tout son cœur, la louve devait bien avouer qu'il n'était pas aisé de concilier l'éducation de ces trois petits êtres avec son travail d'Alpha et qu'elle était, bien souvent, un peu fatiguée.
Parfois, aussi, elle se sentait un peu dépassée par la situation mais essayait, toujours, de faire de son mieux, par ce qu'elle n'avait pas le droit de renoncer, lorsqu'ils avaient tous besoin d'elle.
De sa patte, elle ébouriffa affectueusement les cheveux d'Iberis et quitta sa tanière pour se rendre dans la salle des trônes.

Sa fille ainée s'y trouvait toujours.
Holly s'approcha d'elle et vint la prendre contre elle.

- Dis moi tout, ma puce.

Puceron c’est une balance en fait. Nirvana a eu le temps d’essuyer ses larmes, reniflant juste un peu. Elle ne bouge pas quand sa mère approche, se contentant de poser ses yeux sur elle.

« — Je ne veux pas qu’ils sachent. »

Une pause.

« — Ni eux, ni les autres. Je ne veux pas qu’ils sachent à quoi je ressemble dans l’eau. »

Parce qu’elle ne voulait pas être chassée et mangée. Nirvana voulait pas qu’on la traite de vermine et qu’on la compare aux autres.
Puis elle veut changer de conversation.

« — Puceron t’a dérangé pour rien, je fais une micro sieste. »

C’était ça que faisaient les sages louveteaux après tout non ?

Les doigts de ses pattes vinrent se glisser dans les cheveux de sa fille, alors qu'elle lui caressait doucement le crâne, tout en la serrant contre elle.
Son pauvre bébé était en proie à bien des préoccupations.

- C'est à cause des poissons-loups, c'est ça ?

Bien évidemment, que c'était de leur faute.
Ou plutôt, par ce qu'ils étaient hostiles envers ces créatures, à cause du danger qu'elles représentaient, par ce que sa fille était-elle même une sorte de poisson-loup, à sa manière.
Cependant...

- Ils n'ont rien à voir avec toi, tu sais, mon trésor. Eux, sont arrivée par nuée après que l'un des nôtres ai déclenché, je crois, la colère d'Aka et que celui ci soit parti affronter... quelque chose. Ils ont envahi nos terres et ont bien vite représenté un danger pour notre faune, pour nos proies, pour les vies des plus jeunes. Ils se dévorent entre eux et ne parlent pas. Nous ne pouvons cohabiter avec eux en toute sérénité. D'ailleurs, Iberis et Iris les appellent poissons-loups mais... Ils n'ont pas grand chose, de notre espèce, si ce n'est leurs quatre pattes.

Ne serait-ce que leur tête.

- Toi, tu es une petite louve formidable : Jamais tu ne ferais du mal à l'un des tiens, je le sais. Tu es comme nous, avec des facultés en plus pour la nage que beaucoup pourront t'envier. Tu n'as pas a avoir honte de ce que tu es, ma fille. Moi je suis fière de toi, et je serai toujours fière de toi.

C’était pas à cause des loups-poissons.

« — C’est juste Puceron qui est un idiot. »

Pour ne pas dire quelque chose de plus méchant. Pourquoi ils pouvaient pas le donner à quelqu’un cet idiot ? Un loup d’un autre clan ou quelque chose dans ce genre. Peut-être même aux loups-poissons, ça lui ferait peut-être les pieds…
Nirvana écoute les arguments de sa mère… mais…

« — … ça reste des « poissons-loups » … Ça ne change rien. »

Un petit soupir.

« — Toi je sais ce que tu penses, mais les autres… »

Puceron. Moustique.
Les autres ils chassaient les loups-poissons, ceux qui étaient plus poissons que loups, ceux de l’île qui venaient jusqu’ici. Nirvana avait entendu les grands en parler, des maudits… ils étaient pas aimés. La louvette s’assit face à sa mère.

« — Je veux que tu me promettes que tu le diras à personne, s’il te plaît. »

Elle tend une griffe, comme pour la promesse du petit doigt.

La louve bleue plissa les yeux.

- Il est petit, surtout, il a encore beaucoup à apprendre. Il faut seulement lui expliquer, pourquoi l'on ne doit pas dire certaines choses, pourquoi ça fait mal.

Elle devait bien avouer, oui, que son fils n'était pas un enfant des plus facile. Mais Holly préférait rester confiante : Il finirait bien par s'assagir, si on lui expliquait et si l'on ne cédait pas à ses caprices.
Il n'était pas foncièrement méchant, après tout.

- Je suis certaine qu'Iris et Iberis t'aiment beaucoup. Quand aux autres... qu'ils fassent une remarque à ton sujet, et ils le regretteront.

L'Alpha eut un sourire amusé.
Elle plaisantait à peine, cependant. Gare à ceux qui pourraient blesser ses trésors, la Maman lionne rôdait toujours.

- Comme tu veux, ma puce, c'est promis. Je pense cependant que tu n'as pas à avoir honte de ce que tu es.

Sa griffe vint accrocher celle de sa fille, c'était une promesse, qu'elle lui faisait.

Expliquer encore et toujours. Tss, de toute façon ça servait à rien de perdre son temps avec le Puceron, il comprenait jamais rien à rien. Un vrai idiot. Déjà lui demander de compter ses griffes ça l’occupait une journée… (ceci dit ce serait intéressant de le voir essayer, Nirvana devrait tenter un de ces quatre).

« — Je lui expliquerai pas. Il est trop bête pour comprendre de toute façon… »

Avec son p’tit cerveau de la taille d’un grain de riz là.
La promesse fut scellée. Satisfaite, Nirvana se dégagea, sa petite queue courte remuant.

« — On va manger ? »

Holly hocha la tête. Elle pouvait comprendre, que sa fille n'ait pas envie d'expliquer ce genre de choses à son petit frère.
Même si cette situation commençait, dors et déjà, à la fatiguer un peu plus : ils n'étaient que des enfants, encore susceptibles.

- D'accord, allons manger.

Elle se leva et partit en direction de sa tanière, incitant sa fille à la suivre.