La luciole - Nirvana

Nirvana renifla, mâchant quelques plantes pour faire passer ses maux de tête. Plus le temps se rafraîchissait, plus ses allergies devenaient embêtantes. Autour d’elle, un renard était en train de rassembler de rouler sur le dos, une couronne orangée entourant sa tête.
Savoir parfaitement utiliser son pouvoir, était une des missions qu’elle s’était donnée, mais elle ne pouvait pas trop s’entraîner sur des loups.
Après un énième reniflement, elle libéra l’animal de son emprise qui après quelques secondes de perplexité, s’enfuit dans les buissons. La sirène s’apprêtait à rejoindre la tanière familiale, avant de sentir l’odeur d’une de ses soeurs adoptives. Les prunelles pales se posent sur un buisson.

« — Pourquoi tu te caches, Pomelo ? »

La sirène haussa un sourcil, fixant le buisson qui luisait. Ayant grandi aux côtés de Pomelo et sa famille, Nirvana connaissait la « particularité » de la louve. Cela ne l’avait pour autant jamais dérangé.
Elle aurait été bien mal placée pour juger après tout.

« — Tu te cachais. »

Ce n’est pas une question, ni un jugement, simplement une constatation.
À la demande, la prêtresse conserva le silence un moment, retenant un commentaire. Vêtue de morceaux d’armure, mais inquiète à cause d’un cafard… Tout en soupirant, Nirvana vint passer une patte dans les longs cheveux à la recherche de l’insecte qu’elle finit par trouver. L’insecte se débattit entre ses griffes alors qu’elle l’observa un instant, le tenant par une patte, avant de le lancer au loin.

« — Tu as peur des cafards maintenant ? »

C’est sur que cela ne devait pas être particulièrement agréable… Nirvana essaya d’imaginer ce que cela lui ferait si les poissons et mammifères marins passaient leur temps à la suivre lorsqu’elle était sous sa forme de sirène.
Cela serait plus agaçant qu’autre chose.
À la mention de son rôle, Nirvana eu un sourire et une expression ravie. Ce lien avec Dairo était ce qu’elle chérissait plus que tout.

« — Je suis très heureuse que Dairo m’ait nommé prêtresse, je compte bien tout faire pour que nul ne vienne tacher sa couleur. »

Les écarts des oranges n’arriveront plus.
La louvette fixa la fée.

« — Et toi, aucun dieu ne t'intéresse ? »

Oui, il était clair que Dairo ne lui aurait pas convenu. Une grimace qui vient déformer les babines de Nirvana en entendant la mention d’Aka. Un dieu qu’elle n’appréciait guère, à cause de sa prêtresse qui en donna une bien piètre image… et probablement parce que la majorité de ses disciples n’étaient que des brutes sans cervelles.

« — Il y a plus de combattants que de réels conflits. »

Les raeders ne représentaient plus de réelle menace et quand aux solitaires… aucun ne sortait du lot.
Un sourire mystérieux vint étirer les babines de la sirène.

« — Tu crois que je ne peux pas me défendre toute seule ? »

Je n’ai pas besoin de verser le sang pour gagner.

Non, le nombre de guerriers n’expliquait pas cette situation. Les Etelkrus avaient un passé, ils avaient su imposé le respect, mais ils n’avaient surtout rien à offrir.

« — Je pense que nous n’avons rien qui intéresse ceux de l’extérieur. Pour le moment. »

Cela changerait-il peut-être avec le temps.
Les disciples d’Aka ou du moins ceux aspirant à sa couleur étaient bien différents de ceux que Nirvana avait connu enfant. Peut-être moins impulsif… moins idiots. Mais ils restaient encore naïfs. La prêtresse pencha son museau, son regard ne trahissant aucun doute.

« — Je le ferais, si c’est pour protéger ce à quoi je tiens. »

Et je n’aurais aucun regret.

« — Une princesse guerrière. »

Plus bavarde que charmante.

Nirvana observa sa soeur adoptive. Les autres n’étaient pas habitués, à ce qu’on parle de mort aussi aisément… est-ce que ça les effraient ? La prêtresse haussa les épaules, qu’importe. Le jugement des autres… ne l’intéressaient plus depuis longtemps. Elle ferait ce qu’elle aurait à faire. Éliminer un ennemi de Dairo ou quelqu’un s’en prenant à sa famille.
Faire preuve d’intelligence, c’est aussi savoir quand il faut recourir à un acte ultime.

« — Les autres ne feront pas preuve de pitié. »

Le monde en dehors des frontières Etelkrus est bien cruels. Certaines louves sont enlevées pour servir une entité sans que leur clan ne s’en soucient, les solitaires de livrent à leurs pratiques étranges et ceux du Nord… passent la brèche avec leurs monstres.
La louvette sourie, oui Pomelo semblait plutôt enthousiaste à l’idée de contribuer aux Etelkrus. C’était une bonne chose, leur clan en avait besoin.

« — Ça s’est fait naturellement. »

Pas d’occasion particulière.
Elle l’a su c’est tout.

Se préoccuper des autres. C’était à cause de cela que Nirvana avait complexé sur son apparence de sirène, c’était pour cela que seulement trois Etelkrus étaient au courant.
Parce qu’elle s’était préoccupée de l’avis des autres.
Avant de comprendre, qu’ils n’avaient aucune importance. Seul le regard de Dairo lui importait. Elle haussa les épaules.

« — Quelle importance ? Si ce sont les autres, alors c’est qu’ils ne m’intéressent pas. Qu’importe leurs intentions. »

Bonnes ou mauvaises.
Du bout de la griffe, Nirvana repoussa une petite luciole qui volait près de sa truffe. À la proposition de sa soeur adoptive, un sourire qui vint étirer ses babines. Ramasser des coquillages était quelque chose qui l’avait toujours détendue !

« — Après l’heure de Dairo, oui, nous pourrons ramasser des coquillages ! »

Il y en a de très jolis à la plage !

L’ignorance, ce n’était pas une si mauvaise choses. Nirvana savait que certains solitaires aspiraient à un glowstick, que d’autres à l’inverse s’en moquaient complètement. Qu’importe. Elle fixa dans les yeux sa soeur, l’air sérieux.

« — Regardes-les, les meutes. »

Regardes-les vraiment.

« — Les raeders, détestés de quasiment tous les autres, pour les crimes de leurs ancêtres.
Les Nakhus qui ne voient pas le mal.
Nous, entravés par d’anciennes coutumes qui font naître le doute chez nos membres. »

Une brève pause.

« — Ne pas faire parti d’une meute, c’est faire preuve d’une certaine lucidité. Je les comprends. »

Mais je ne les envie pas.
Parce que sans meute, je serais incomplète.
Sans Dairo je ne serais rien.
Au geste de sa soeur adoptive, Nirvana leva la patte. Pourquoi étais-ce plus facile avec Pomelo et les autres, qu’avec Iris et Iberis ?
Qu’est-ce qui faisait que ça ne fonctionnait pas ?

« — Oui, nous ferrons ça ! »

Demain, après-demain, qu’importe.

Une pause surprise ? La sirène haussa un sourcil, sans relever pour autant. L’amour qu’elle destinait à sa déesse, était différent du lien habituel disciple et dieu. Pourquoi avoir besoin d’une pause quand chaque seconde passée aux côtés de la renarde était un bonheur absolu ?
À la place de cette réponse, une simple acquisition du museau.

« — À plus tard, Pomelo. »

Du regard, elle suit sa soeur adoptive regagner le castel. Soeur qui n’avait jamais vraiment apprécié cette apparence adoptée la nuit.
Comment Nirvana aurait-elle pu dévoiler son apparence aquatique aux autres ?
Celle qui faisait penser aux Raeders plus qu’aux Etelkrus.
Le secret, était bien mieux ainsi.
Car ils ne comprenaient pas.