De nouvelles têtes (Olis, Désastre)

Ses routines se font plus lentes.
Ces pas plus lents.
L'hiver s'achève et lui avec.
Et pourtant ne sont négligés ses créneaux, qui se chevauchent un peu les uns les autres sans qu'un ne se retrouve pourtant négligé. Il accepte aussi l'imprévu.
Comme un mot adressé.

C'est le panseur qu'on appelle.
Celui qu'il reste et ne se destine pas à devenir maillon.
Celui qui vient, vite, après que furent récupérés trousse de soin et tout ce dont il aurait eu besoin.

Il sait.

Comme il fut présent pour sa première mise-bas, Sakura le demande à nouveau.
Personne ne peut mourir, avec lui.
C'est une promesse faite et une vérité.

Lorsqu'il survint dans sa tanière, elle est déjà en train de pousser. Il y a l'odeur des eaux perdus et un peu du sang. Cette âpreté ne le fait pas sourciller : elle est une habitude, dans son quotidien.
Il ne dit pas un mot et s'approche, jusqu'à s'arrêter à sa proximité et déjà porter ses pattes à son ventre. Là où il tâte, ausculte, prend connaissance de cet état qu'il connait bien.
Par ses acquis et son expérience, c'est sur son bassin que finirent ses deux pattes, pour le manipuler et faciliter son travail.

« Tout ira bien. »

Il rassure, d'une voix égale.
A sa façon.
Il apprit à le faire.
C'est l’enseignement des panseurs déjà morts.

« Continue à pousser. »

Tout est efficace.

Il sent sous ses pattes, les deux poches immenses. Celles qu'il avait perçu tôt, et qui n'avaient cessés d'être au-dessus des courbes de croissances. Plus grands que ses premiers enfants. Il l'avait su. Elle aussi.
Les mères ont des connaissances que même les panseurs n'ont pas.
Comme un instinct. Il croit.
Son instinct à elle lui dit qu'elle ne les sortira pas sans sacrifice.
Lui ne sait pas, s'il nommerait cela des sacrifices. Un peu plus de mal ? Un peu plus de mal. Des blessures inévitables.

« Mmh. Vrai. »

Il reprend. Tout de suite.

« Une incision pour faciliter leur sortie, s'ils s'engagent assez dans ton bassin... Je vais manipuler ton bassin, pour détendre tes ligaments.
Il faut que tu sacrifie ta position assise, aussi... Met-toi accroupie, quand j'en aurais fini. Pour que les os du bassin s'écartent, et que la gravité t'aide. »

Il explique, de sa voix égale. Tourne autour d'elle. Sort de son sac les plantes qu'il lui faut, lui donne à mâcher du calauphyllum. Puis ses pattes pressent son bassin, le fait tourner, doucement, lentement. Il doit les aider à s'engager. Accélérer le travail.
Et lorsqu'il cesse
Il se recule pour la laisser se replacer.

Il reste dans son dos, pour mieux sentir, pour mieux toucher.
Pour mieux assister.
Il l'accompagne dans ce qui peut être suffisant. Sinon, il l'accoucherait comme il accoucha Tawana.

C'est une naissance moins évidente que la première.
Celle-ci est plus difficile.
Celle-ci est plus longue.
Mmh.
Le panseur réfléchit. Il ne veut rien précipiter.

« Olis dit vrai. »

Il ne faut pas qu'elle abandonne tout de suite.

« Je vais te donner du caulophyllum, pour t'aider à reprendre le travail. Si dans une heure, le premier enfant n'est pas sorti, alors je pratiquerais une intervention. D'accord ? »

Il avait fait mettre bas Tawana alors qu'il était mâle, par l'usage du Docteur. Il l'aiderait elle-aussi par cette ultime recours, s'il le fallait, situation critique que cela deviendrait alors lorsqu'il tracerait dans le bas de son ventre une plaie, pour en sortir ainsi les enfants qui ne parvenaient à s'engager. Une césarienne en urgence.
...
Dans l'attente de cette ultime recours, il lui fit manger la plante évoquée.

Il a fait tout ce qui était conventionnel, Désastre.
Tout ce qui était à la portée de tout penseur assez intéressé par le sujet pour disposer de ces savoirs.
Finalement
Finalement Sakura s'écroule de fatigue.
Son corps est à bout, son souffle faiblit. C'est les petits eux-même, alors, qui risquent de finir par manquer d'air, de subir des séquelles, de voir leur rythme cardiaque faiblir et-

C'est l'ultime recours, qui est décidé.
La décision est prise.
Le choix n'est plus.

« Je vais t'opérer. »

Il ne lui laisse pas le choix, lorsqu'il retire d'un flacon une solution odorante qu'il plaque contre son museau, pour l'endormir sans perdre davantage de temps.
C'est ensuite lui. Celui venu à deux instants de sa vie ; pour Cendres, Nakhus mortellement touché. Pour Tawana, qui n'aurait pu accoucher sans.

C'est le tatouage de serpent qui quitte son oreille pour s'enrouler autour de l’œil qui se trouve en-dessous, traçant comme un monocle sur sa peau par la forme qu'il prend.
Comme une lunette, pour mieux voir.
Pour repousser la mort que d'autres auraient inévitablement causés.
A Olis, père de ces enfants, il redit et puis dit :

« Je vais l'opérer. Avec moi, personne ne meurt. »

Lors du premier long cauchemar, il avait pactisé avec la mort.
Plus qu'une promesse, c'est une réalité.
Qu'il ait confiance, quand le bistouri tenu entre ses doigts trace dans la chaire une plaie profonde. Situation critique, pour le conduire à devenir Le Docteur
Dans le sillage de sa lame, son don opère et ne fait trop se verser son sang. C'est une situation sous contrôle.
Il s'applique, dans cette césarienne décidée en urgence.
Quand de ses entrailles, il extirpe un nouveau né en l'arrachant de son enveloppe fœtale. Ils ont le crâne trop volumineux pour pouvoir se frayer passage, il le constate d'autant mieux maintenant.
Ils sont bien plus grands que leurs premiers enfants.

Le premier est donné à Olis, directement.

« Un mâle. Lèche-lui le museau et nettoie le vigoureusement, pour l'aider à respirer. »

C'est un ordre. S'il sauve de la mort, il ne peut pas s'occuper de tous.
Derrière sa lame, se limite les plaies. Les organes se ressoudent, se réparent, la lésion disparait. Il procède à l'extraction du second, plus engagé.

« Un second mâle. Il faut faire pareil. »

Le temps qu'il achève cette opération, sous la particularité de son don qui soigne et qui sauve.
Qu'il referme alors cette fois-ci lui, la plaie qui couture le bas du ventre de l'amie guerrière.

Il cligne des yeux.
Le serpent reprend sa place, remontant vers l'oreille sourde pour s'y enrouler.
Il n'y a que lui, apte à s'y faire entendre.

C'est vrai.
La seconde fois déjà, qu'il lui vient pour tel soin.

Il n'y réfléchit pas plus, quand il se tourne vers Olis pour prendre avec lui la charge d'un petit, passant sa langue sur son poil pour achever de le nettoyer et vérifier tant son état que sa bonne prise d'air.
Les deux respirent.
Ce sont deux petits en pleine forme, comme les premiers.

« Félicitations.
...
Garde les bien au chaud, en attendant le réveil de Sakura. »

Est ce qui se dit à la fin, il croit.
Alors qu'il surveille qu'Olis, et l'état de Sakura ; il s'en ira lorsqu'il aura donné des derniers anti-douleurs à celle-ci, promettant de revenir prendre soin d'elle et de ses petits au cours de la matinée.

Ils avaient tous besoin de repos, en attendant.