cette couleur (Wasabi)

Elle s’était réveillée au bord d’une plage. Avec le souvenir lointain qu’il ne s’agissait pas de la première fois. Un peu désorienté, elle avait longé la rive de long en large, mais n’avait su trouver aucune issue autre que celle d’emprunter la mer. L’évidence était qu’elle ne se trouvait pas sur le continent, mais bien sur une parcelle de terre émergeant des eaux.

Un endroit qu’elle ne connaît pas,
ou du moins dont elle ne conserve que
quelques souvenirs d’enfance périssable.
Ceux des quels on ne conservent que les bribes,
les plus importants.

Chavirant de gauche à droit, elle avait fini par prendre la décision de se jeter à l’eau et malgré quelques difficultés, était parvenue à se hisser sur l’autre rive. Fatiguée et fragile, mais tenant toujours debout, elle entama une marche le long des rives, espérant ne pas former une nouvelle boucle cette fois-ci. Désordonnée, ne sachant où se rendre, c’est par automatisme qu’elle longeait les flots découverts et l’Océan qui lui semblait plus favorable que l’obscurité de la forêt.

Un grondement lugubre…

Était-ce l’orage qui gronde au loin ?

Elle continue d’avancer les museaux en l’air, recroquevillée, ses oreilles déchirées plaquées contre son crâne. Peut-être ne s’était-elle pas rendu compte que la pluie avait commencé à tomber, peut-être qu’elle allait devoir trouver un abri et vite.

Quand …

Une silhouette subitement menaçante. La maintient en alerte, ses vibrisses frémissent alors que son souffle s’étouffe, le pelage épais suturé de blanc se gonfle sous l’effet de la tension. Excitation ou crainte. Aucune des deux n’était dissociable. Son cœur battant la chamade rappelait à son souvenir les quelques rudes batailles menées ou celle imaginée. C’est l’amertume qui se déversa en flot lui brûlant la gorge.

Une nouvelle vague de souvenir. Elle était prête à se défendre ou à fuir.

"Le plus beau poisson aux yeux d'un Etelkru"

Si certains mots portaient encore un semblant de vérité, d'autres n'étaient plus que des souvenirs.
Ses yeux s'ouvrent plus larges alors qu'elle s'immobilise comme happée par la réminiscence.

Lorsque la crête se relève, un frisson la parcoure de la nuque jusqu’à la base de sa queue désormais absente. Elle s’écrase un peu plus à l’apparition des crocs et sursauta lorsque la queue reptilienne frappa le sol en un dernier avertissement, restant bouche bée un instant de plus avant de faire la moue. Il lui semblait le reconnaître malgré ses traits marqués par les batailles et le temps qui passe. Il semblait changer, méconnaissable. Pourtant son odeur était en tout point comparable, elle ne pouvait se tromper. Le pelage retombe petit à petit malgré la menace apparente.

Si la menace lui intimait de cesser d’agir ainsi et de dévoiler son identité et de cesser d’agir en prédatrice ou en menace. La curiosité la poussait à aller au plus près, décrivant un arc de cercle à bonne distance, elle observe, fixe, interroge.

Le rouge lui monte aux joues jusqu’aux oreilles. Sa gueule s’entrouvre, elle devait agir prudemment tout de même, il n’était pas temps de prendre un mauvais coup par mégarde. Lorsqu’elle tente de prendre la parole à son tour, les mots se bloquent dans sa gorge, s’agglomèrent comme autant de petit caillou. C’était un peu comme essayer de parler avec de la terre dans la bouche, sa voix était enraillée et malgré aucun mot ne parvint à franchir ses babines les premières fois.

"…."

S’agaçant, elle du articuler exagérément afin de contraindre ses propres paroles à lui obéir. D'une patte, elle désigne la large entaille dont elle n'avait de souvenir. Elle plisse un peu plus les sourcils.

"Cap'tain Chimaera ?! Que vous est-il arrivé ? Vous semblez comme changer ?"

Des questions qu'il était légitime de se poser.
Quant bien même elle aurait pu se les adresser à elle-même.
Chercher elle-même quelques semblants de réponse.

Jusqu'à ce qu'elle réalise. Elle resta interdite, sous le choc. Il n'était le seul à avoir changé. Surprise par ses intonations et ce timbre nouveau. Certainement autant que lui de cette voix nouvelle qui s’était faite sienne. Celle dont elle n’avait su faire usage plus tôt, s’harmonisant de féminité, mais à des lieux des ce à quoi elle se serait attendu d'ordinaire. Elle effectua une rotation sur elle-même cette fois-ci. Dans la confusion la plus totale, elle pencha la tête sur le côté en fronçant les sourcils, tout ceci commençait à lui donner sérieusement la migraine.

J'ai l'impression de rêver.
Trop plein de confusion,
pour bien trop de conclusion.
à moins que ce ne soit le début d'un cauchemar...

Elle s'observa elle-même. D'abord une patte avant qu'elle lève, puis une autre qu'elle examine. Elle s'agite, fait un nouveau tour sur elle même. Sa queue est absente, c'est vrai, qu'elle l'a perdu face au monstre tricéphale, un frisson la parcours de nouveau en repensant à la bête qu'Aka avait jeté contre elle.

Plutôt flattée cependant d'être comparée à une demoiselle, elle rit jaune, les oreilles basses. Ne comprenant toujours pas comment il pouvait se tromper à ce point alors qu'il lui semblait qu'ils s'étaient quitté quelques jours plus tôt. De plus qu'elle ne comprenait pas non plus, cette étrange changement de voix... après avoir fait un énième tour sur elle-même à la recherche de réponse. Elle avoua.

Je ne comprends pas...

Rien ne lui semblait clair, d'abord elle se réveillait sur une plage inconnue, ensuite, Chimaera la regardait comme s'il avait vu un fantôme. Elle fronça les sourcils une nouvelle fois. Réfléchit, tenta de faire du tri dans les divers souvenirs qu'il lui revenait en mémoire.

J'ai été absente

Ne sachant pas s'il lui sera permis de revenir,
ou si elle serait traitée en paria,
elle avait décidé d'en finir et
de confier sa vie à l’Océan.

Il semblerai que j'ai échoué,
Même ça, je n'ai pas réussi.

Les cartes se mettent en place, elle ne pouvait décidément pas tout lui avouer, comment elle s'était sentie acculée, comment elle avait pris la décision d'abandonner
Le souvenir lui revient soudain.

C'est moi... Nous avions rendez vous sur la plage, mais ...

Elle se fige, tout croc dehors avant de crier. Son échine dorsale se mue en crête de fourrure.

Aka, ce fils de chienne. Il m'en aura bien fait bavé, l'enflure.

Elle secoue la tête de gauche à droite, marque par la négation la question que lui pose le capitaine. Ce n’était pas tout à fait exact. L’histoire se voulait beaucoup plus complexe. Face à sa figure interloquée, elle se devait de lui apporter quelques explications.

Je devais me joindre à vous plus tard, venir visiter l’île avec toi.

Elle l'aurait souhaité, elle était restée fidèle à sa promesse.

Ann m’a fait répondre à une énigme, elle semblait satisfaite de ma réponse.

Elle se souvenait de lui avoir apporté une belle aiguille à cheveux en or. Un objet qui lui était précieux. Elle se souvient de la surprise de la louve en voyant l'objet. Ce n'était certainement pas ce à quoi elle s'attendait et pourtant, elle avait accepté cette réponse. son regard s'assombrit soudainement, elle prend une bouffée d'air salin avant de raconter la suite.

Elle m’a raconter une histoire à propos d’un ruban rouge symbole en l’honneur d’Aka. L’histoire de votre passé, celui de votre avenir sombre. Mais elle avait une autre requête avant que je me joigne à vous, elle voulait me mettre à l’épreuve. Elle voulait que j’aille porter une offrande à Aka en l’échange de laquelle elle pensait pouvoir obtenir de l’aide contre la murène géante.

Surprise par son égarement, il ne devait pas être au courant. Elle en avait conclus que la louve avait fait le bon choix, celui de ne pas aviser ses proches de leur marché. Elle saluait cette sage décision, même si elle avait donné à sa vie un tournant funeste.

Elle ne t'as rien dit ? Ne sois pas trop sévère avec elle, je lui avais fait promettre de ne pas venir me chercher dans le cas où les choses tournerai mal, c'était trop dangereux pour vous de venir sur ces terres.

Elle couche les oreilles un peu plus, s'avance après de Chimaera. Elle ne voulait qu'il y ait méprise.

De plus je pense qu'elle attendait des petits.

Elle avait toujours eu l’œil pour ce genre de détails insignifiant, une silhouette plus arrondie, des courbes plus nettes. C'était autant de tracé qu'elle savait reconnaitre grâce à son œil de dessinatrice.

Je me suis mis en route le soir-même, je me suis rendu au temple rouge.

Le souvenir des pins vint la tourmenter. Des souvenirs d'enfances, qui se voulaient joyeux.

Je ne pensais pas prendre un si grand risque, en franchissant les portes du temple.

Je me voyais encore enfant du prêtre.
L'enfant de deux rouges.

Aka est devenu fou de rage, il a déversé un flot d’insulte à mon égard. Il a déchainé un monstre tricéphale contre moi, je ne pouvais me résigner à fuir comme un lâche. Les portes se sont refermés derrière moi. Il a chercher à m’anéantir.

Il a échoué.
L'océan lui avait accordé sa faveur semblait-il.

Tout est devenu flou. Je me suis réveillé dans la tanière des guérisseurs. Je n’arrivais plus à parler, mon corps était en charpie. Ils commençaient à me poser des questions. Ils voulaient savoir, ils voulaient comprendre pourquoi Aka s’est mis dans une telle colère. J’ai pris peur, ils auraient fini par savoir. Connaissant le destin que l’on réserve aux traites et certainement perçu comme tel au près d’eux.

Ses oreilles déchirées se couchent sur son crâne, c'est honteuse qu'elle avoue ce qu'elle a osé faire.

J’ai voulu sombré en emportant le secret. C’était préférable.

Il pensait que la belladone suffirait,
et s'était jeté dans l'océan par précaution.
Pourtant, il lui semblait avoir échoué.
Car il était toujours en vie.

C’était la seule possibilité.

J'étais condamnée,
d'une façon ou d'une autre.
Mon destin était scellé.

Même si j’avais réussi à fuir, ils m'auraient pourchassé.
Et si j'avais réussi à me joindre à vous. J'aurai été en retard, sans compter qu'ils auraient fini par me retrouver.

Elle souhaitait mourir pour ne pas les mettre en danger, elle souhaitait mourir pour tous les protéger, elle souhaitait mourir pour ne plus sentir le poids de leurs questions.

Et ils vous auraient tous exterminés. Toi, et tout ce qui t’es précieux. Aucun de vous n'aurait pu me sauver.

Une évidence que Chimaera ne pouvait ignorer. Les etelkrus n'avaient jamais été des enfants de cœur, surtout lorsque cela concernait les pirates et ils étaient d'impitoyables guerriers lorsqu'ils se mettaient à faire la guerre.

Mais je ne suis pas mort ? Qu'est-ce que tu fais sur les terres des Etelkrus ? ça pourrait être dangereux pour nous deux.

Angoisse et inquiétude, elle regarde autour d'elle, aucune trace de l'odeur des etelkrus, la piste semblait s'être éventée. Les patrouilles loin du rivage. Confuse, elle pense être encore près des côtes qui l'avait vu naitre, avoir plongé quelques instants plus tôt. Elle ne sait à quel point elle se fourvoie.

Le capitaine s’agace, il fulmine silencieux d’abord, avant d’exploser.

Je n’aurai pas du en parler
J’aurai du simplement cacher la vérité.

Lorsqu’il se tourne brusquement vers elle, elle recule précipitamment, rentre sa tête dans ses épaules et trébuche. Et les regrets et les remords fusent en son esprit. Elle apparaît déçue et effrayée. Même ce qui lui semblait connu, lui semble désormais inconnu. Les lieux, les odeurs, la mer.

Je ne comprend plus rien.

Soupire. Elle ne sait plus quoi faire, quoi penser. Et plus le temps passait, plus elle se sentait perdue, submergée par une vague d’angoisses. Ses oreilles restent plaquées contre sa nuque. Elle se sent vide, éteinte. Pourtant, elle ne pouvait se risquer à poser plus de question encore au risque d’attiser d’avantage sa colère envers elle. Elle le laisse partir, s’éloigner, tente de retrouver son calme quant bien même elle avait envie de pleurer ou de hurler.

Mais lorsque la distance fut telle qu'elle eu crainte de le perdre, elle finit par le rattraper en quelques foulés de trot bondissantes, plaquant son pelage émeraude contre le sien par mégarde. Et ose glisser son museau contre la nuque du capitaine.

Je suis désolé.

J’ai toujours été un idiot.
Et il y a des choses qui ne changent pas.

Elle savait que tout était de sa faute, qu’elle n’aurait pas du s’entêter. Qu’elle aurait du refuser, mais elle pensait sincèrement que l’épreuve était nécessaire pour se joindre à eux. Piégée, elle savait qu’elle n’aurait pu faire d’autre choix. Elle savait qu’elle était parti avec la volonté de ne pas les décevoir et pourtant, c’était l’échec qui l’attendait au bout du chemin.

Je voulais seulement être courageux.

Courageux, non, entêté et stupide à l’image de l’etelkrus qu’il aurait du être s’il avait choisi une autre voie, certainement. Honteuse. Le rouge lui monte aux joues une nouvelle fois. Elle devait bien l'avouer, cela avait mal tourné. Mais pouvait s’estimer chanceuse, du dénouement tout de même. même si sa part de responsabilité là dedans restait à prouver.

Il l’observe, la juge, ça ne la met pas très à l’aise. Était-elle responsable de quoi que ce soit ? Devait-elle se sentir coupable alors qu’elle ne sait ce qu’il lui reproche à présent? Génant, dérangé par ce regard qui la défigure, comme pointée du doigt. Habituellement, elle se serait ravie d’être observé ainsi, d’être le centre de l’attention, mais pas aujourd’hui.

« Pourquoi tu me regardes comme ça ? Il y a un problème ? »

S’inquiète-elle.

Cela ne se fait pas de dévisager les gens comme ça. Et surtout, elle ne sait pas à quoi il pense. Quelles idées le traversent actuellement.

Elle fronce les sourcils, s'immobilise dans un mouvement de recule, avant de faire la moue.

Oh non.
J'ai une poussière dans l'oeil,
ou quoi ?
Un truc entre les dents peut-être ?
Ou PIRE,
Une crotte de mouette dans les cheveux

Un drame. Non non non ... ce n'est pas possible.
Elle espère du moins, tout de même, elle soignait son image. Un frisson de dégout la traverse. De ses pattes, elle replace ses cheveux, les arrange, s'assure que rien ne soit noué entre eux.

Rien alors elle décide de tourner son attention vers quelques choses de plus plaisant. L'occasion de prendre un bain et de dissiper ses propres doutes quant à son image.

«Tu ne voudrais pas qu'on aille pêcher tous les deux ? »

Une invitation pour un tête à tête impromptu. cela valait toujours mieux que de se regarder en chiens de faïence et marcher la mettrait moins mal à l'aise.

« Nous pouvons continuer de parler en chemin. »

Marcher nous détendra un peu. songe-t-elle. Et elle avait faim un peu. Elle s'avance, le dépasse, s'arrête à quelques pas pour l'attendre.

« Que deviennent les Raeders ? Tout le monde va bien ? Vous avez réglé votre problème de gros poisson ? »

Elle n'ose lui poser la question. Pas tout de suite, pourtant, elle lui brûle les lèvres.

Suis-je des vôtres ?

S'il disait que tout le monde allait bien, alors elle était rassurée. C'était tout ce qui importait.

« ça va ? Tu ne t’es pas fais mal ? »

Elle aurait aimer l'aider à se mettre sur ses pattes, lui tendre la patte, mais le capitaine avait l'air chafouin et elle ne voulait risquer un mauvais coup. Alors elle hoquète, les oreilles légèrement plaquées sur son crâne chevelu.

« Oh ! Regardes, quelqu'un à laissé des fruits ici ? »

Elle s'agite, remue son popotin dépourvu de queue joyeusement. Pour une surprise, c'était une surprise et une bonne en plus.

En bord de Mer, peut-être avaient-ils été porté ici par la marée. Les oreilles s'agitent dans la direction des graines, et aux quatre points cardinaux, personne à l'horizon, ils étaient abandonnés. Alors la louve ne nourrirait d'aucun scrupule pour s'en être emparé.

« Les fruits peuvent être consommés, mais les graines pourraient peut-être prendre racine sur Morne-oeil ? »

Peut-être, peut-être pas, elle n'en avait aucune idée. Ce n'était que proposition, peut-être même qu'il était possible de faire pousser des fruits sur un navire,elle n'en savait rien. C'était une initiative dont elle se chargerai, si tant est que le capitaine ne s'y oppose pas.

« J'aimais beaucoup faire pousser des fleurs avant, ça ne doit pas être si compliqué ! »

Mais c'était avant.

Un large sourire s'ouvre sur des canines parfaitement blanches. L'idée semble lui plaire.

« Tu savais que les oranges permettent d'éviter certaines maladies telles que la maladie des Marins ? »

Elle continue d'avancer, les yeux clos, sans faire attention. Son sourire monte jusqu'aux oreilles.
Puis elle ralentit l'allure, jusqu'à presque s'arrêter, puis :

« Dis-moi, qu'est-ce que tu penses de moi ? Est-ce que je suis toujours bienvenu sur Morne-oeil ? »

Elle n'ose se retourner, n'ose affronter son regard. Elle reste dans l'attente.

À sa façon d’éluder les questions posées, à sa façon d’éviter la confrontation, elle perd son sourire, noyé dans le désarroi. Elle compris. Puis d’un haussement d’épaule, chasse la tristesse, était-ce vraiment important. Ces sentiments qui ne faisaient que les tourmenter. Un nouveau sourire se dessine sur ses babines, lorsque le capitaine évoque les graines trouvées plus tôt. Elle avait toujours eu de l'intérêt pour les plantes, surtout les fleurs, le peu de connaissance qu'elle possédait en médication provenait de ses échanges avec les panseurs etelkrus, il y a bien longtemps, tout ceci n'appartenait désormais plus qu'au passé.

Pourtant, il devait bien l’avouer, même si elle avait toujours apprécié les compositions florales, elle n’était pas une spécialiste.

« Je n’en ai pas la moindre idée, tu sais les fruits et les plantes, c’est un peu comme les enfants, on ne sait jamais vraiment à quoi s’attendre. »

Une opinion tout à fait personnelle.

« Les plantes, c’est un peu comme les loups. Elles changent, évoluent, parfois choisissent de se développer malgré les milieux difficiles et parfois meurent malgré des conditions favorables à leur croissance. »

C'est aussi ce qui l'avait fascinée, elle qui n'avait jamais été si courageuse, elle qui avait toujours vécu prés du castel.

« J’ai pourtant l’impression que c’était hier que l'on s'est quitté sur la plage. Mais je comprends ... »

Pour elle, des années s'étaient évaporées en un instant, pour lui, toute une vie s'était écoulée.


Les oreilles se dressent dans un tintement, l’interroge de nouveau.

« ça veut dire que tu vas me laisser seule une nouvelle fois ? »

Elle juge presque, fait une moue à peine dissimulée cette fois. Les paroles sonnent comme un reproche. Puis lui tourne le dos, prend de l'avance tandis que quelques larmes salines viennent humidifier ses yeux. Puis fièrement, elle clame tout haut.

« Je saurais me débrouiller, je suppose. »

Il n'avait pas à s’inquiéter, elle se débrouillerait. Pour la suite, l'invite à la suivre avec une pointe d'agacement.

« Tu viens capt'aine, le poisson va pas se pêcher tout seul. »

Lorsque les reproches fusent réponse à sa propre tirade, elle se fige de nouveau à quelques pas de lui, la fourrure hirsute et les oreilles plaquées en arrière.

« Je ne te reproche rien. »

Ce n’était que les conclusions s’imposaient, elle serait seule bientôt. Et elle n’y pouvait cette solitude lui était imposée et c’était chose nouvelle et angoissante pour elle. Cependant, elle ne pouvait le laisser dire ou penser n’importe quoi.

« Mais pour que les choses soient bien claires, je n’ai pas de meute. Celui que tu as connu est mort il y a bien des années, il était devenu paria et traître au sein de sa propre meute, la potence l’attendait. Je ne répondrais plus en son nom. Personne ne doit savoir. C’est seulement entre toi et moi. »

Son regard se fait sévère, planté droit dans le sien, le jugeant de ses yeux émeraudes, le défi presque de dévoiler un tel secret. Puis s'abandonnant presque, elle vint plaquer sa fourrure contre la sienne. Une accolade, un contact inexistant pour elle, mais qu'elle savait diffus et chaud pour lui.

« Fais-moi la promesse de garder le secret, s’il te plaît. Donnes-moi ta parole. »

Il savait comment cela se passait chez eux, les continentaux étaient parfois plus cruels que les pirates eux-même.

« Une simple précaution, il en va de ma sécurité. »

Le contact se rétracte, la louve retire son appuie et elle glisse son voile autour de son cou dans un sourire. Puisqu'il ne comptait de toute évidence pas se mouiller, il pouvait bien lui garder son foulard au sec.

« Mais ne vas pas croire que je vous ai abandonné, ce n’est pas comme si on m’avait laissé l’embarras d’un choix. »

Dé réussite agilité : échec.

C'est au trot qu'elle s'était alors aventuré dans l'eau. Glissant sa tête sous l'eau à la recherche de poisson, sans prendre garde aux coquillages qui lui entaillaient les coussinets, elle ne ressentit ni la douleur de la lame, ni brulure du sel, alors même que ses pattes virent teinter légèrement de rouge la rive.

Lorsqu’il lui montre les dents, elle couche les oreilles de nouveau, hérisse son poil en guise de réponse, tout en se courbant sans pour autant le quitter des yeux, le défiant un instant ne sachant jusqu’où il souhaitait aller dans cette voie. Qu’est-ce qu’il cherche à faire ? Voulait-il qu’ils s’affrontent ici et maintenant, puisqu’il n’avait de cesse de la menacer. Toutefois, elle ravala un peu de sa fierté.

« Ce doit être dans mes possibilités. Je ferai un effort en ce sens. »

Elle surveillerai son langage, toute fois ne pouvait garantir quelques anicroches.

« Je ne compte pas partir en guerre contre les Raeders si c’est ce qui t’inquiètes, nous partageons un ennemi commun après tout. »

Une alliance valait mieux qu’affronter une meute entière partageant des valeurs communes qui plus est. Elle n’avait pas de temps pour jouer à ça. L’ennemi se trouvait être continental.

Elle ne prêta guère attention à son foulard déposé au sol tandis qu’elle se glissait dans les eaux.

Dommage, un si joli foulard souillé par le sable.

Lorsqu’il l’intima de regarder derrière elle. La louve s’exécuta, faisant un rond sur elle-même d’abord, observant les vagues rougit avant de soulever une à une ses quatre pattes. La louve fit la moue en distinguant la couleur écarlate venu teinter le bout de ses pattes, ses sourcils se froncèrent, elle devrait faire plus attention à l’avenir.

J’ai du marcher sur quelque chose.
« Ce n’est rien. J’ai du marcher sur des fragments de coquillages. » Lui cria-t-elle depuis les eaux. Tout en haussant les épaules.

«Je reviens»

Elle plonge sous l’eau, rapporte quelques algues marines qu’elle rince dans les eaux afin d’en éliminer le sable. Puis revint à son idée sans faire plus ample attention aux entailles qui venaient dessiner sur le sable. Lorsqu'elle arriva à son niveau, elle s'assit sur le sable et commença à bander ses pattes.

« Dis, tu n’aurais pas toujours un peu de Rhum sur toi. » Son regard se fait plus doux, ses yeux deux fentes en amande qui le toise. Elle en était persuadée, le capitaine devait bien avoir quelques provisions sur lui.