Un bruit de grelots [Kestrel, Lucian, Stendhal]

Il avait trouvé le temps de se rétablir, avait pris un peu de repos avant que sa lubie ne refasse surface.

Depuis sa défaite cuisante, il n’avait qu’une idée en tête, retourner au dédale et retrouver la créature qui l’avait humilié afin de l’anéantir, en faire du petit bois, tout juste bon à brûler sur un bûche. Il ne désirait rien de plus. C’était cette idée qui l’obnubilait désormais. Il y avait en son regard une lueur inhabituelle, de la colère ou bien de la haine, on n’aurait su dire de quoi il s’agissait vraiment, mais il transpirait l’acerbité.

« Cherches ! »

« Non. »

« Allez ! Dépêches-toi. »

« J’ai dis NON. »

L’Opossum corrompu se cura les griffes avec toute la nonchalance qui siée à un individu de son espèce. Il n’avait visiblement pas l’intention de lui accorder son aide. Se prétendant bien au dessus des prétentions de son invocateur comme à son habitude. Le corbeau le foudroya du regard, il n’avait pas pour habitude d’avoir recours à tel stratagème, habituellement, il laissait le démon dormir tranquillement entre les nombreux tissus que formaient sa cape et son foulard, mais cette fois, c’était différent, c’était important. Il avait eu la prétention de penser que le démon se serait senti concerné puisque lui aussi était passé par loin de se faire écharpé. Mais non, il s’avérait comme à son habitude des plus oppositionnelle.

Lui aussi, Il va finir sur le bûché.
Le corbeau pesta, à quoi s’était-il attendu à recevoir l’aide d’un démon. Père l’avait mis en garde contre ce type d’ extravagances. Il détourna alors le regard de la créature. Cela ne servait à rien d’insister d’avantage, il la savait bornée et elle ne voulait de toute évidence pas entendre raison. La Bestiole remonta sur son épaule au grand damne de son propriétaire.

Exaspéré, le corbeau se remit en marche, longeant les couloirs étroits. Il n’alla pas très loin, son frère ne devait pas être loin. Après tout, il ne l’aurait certainement pas laissé s’aventurer seul un nouvelle fois ici, sans lui donner quelques recommandations et l’inviter à l’y attendre. Mais Lucian n’était pas très patient alors il faisait les cents pas, inlassablement.

Le démon lui tira sur les plumes afin d’attirer son attention avant de le railler.

La créature se fendit en rires. Évidemment, qu’il n’entendait rien, encore une farce de cette Bestiole, encore une de ses extravagances, de toute façon, il n’était digne de confiance et ça, il le savait. Il fronça le museau en signe de réponse, choisissant de l’ignorer plutôt que de s’agacer d’avantage.

« Stendhal, tu en as mis du temps. »

Il devait se préparer.
Il serait presque parti sans lui, presque. Si le démon n’avait refusé de lui servir de guide, prétendant ne pas être un animal de compagnie…et ne pas s’abaisser à de telles fonctions, foutaises, alors oui, il aurait certainement déjà pris beaucoup d’avance sur lui.
Nous perdons du temps et c’est par vôtre faute.
« Qu’est-ce qui t'as tant fait tarder ? »

Certainement qu’il avait autre chose à faire de plus urgent, mais ça, Lucian s’en moquait un peu, tout ce qui l’importait était la traque.

Curieux toutefois, il désigna la besace toujours pleine de son adelphe.

« Qu’est-ce que tu as emmené ? »

Alors qu’il s’apprêtait à se saisir de sa lanterne et à se mettre en marche, ses yeux bleus et jaunes se perdirent sur un individu qui vint se joindre à eux. Lucian le fixa un instant, remarquant son air surpris à la vue des sans-oreille, ce qui n’arrivait plus beaucoup parmi les siens, mais qui était bien compréhensible venant d’un étranger à la meute et à leur malédiction. Le corbeau n’était pas d’humeur particulièrement bavarde aujourd’hui. Il se contenta d’incliner la tête en signe de respect, c’était la moindre des choses, n’est-ce pas. Puis il avisa son frère du regard, soupçonnant qu’il n’allait pas tarder à lui révéler leur surdité, parce c’était bien évidement ce qu’il était le plus susceptible de faire. Toujours, il glissait cette phrase que lui ne prononçait jamais, par fierté sans doute, ou bien indifférence.

« ... »

Lorsque le loup au regard doré se redresse et semble indiquer une direction, le mage fut empli d’un doute. Et si pour une fois, il n’avait pas été trompé par un quelconque mensonge. Et si la bestiole, avait voulu jouer de ses doutes. Son regard inquisiteur glissa sur la créature, alors qu’elle émit un ronflement lovée contre son poil, vraiment inutile, bonne qu’à lui tirer les plumes et à le mener en bateau.

« Vous entendez quelques choses ? Serait-ce des bruits métalliques ? »

Peut-être le coffre, était-il tout près.

Il s’était mis en route poussé par la curiosité, marchant dans les pas de cet inconnu seul être ici capable de se repérer aux sons. Comme s’il avait d’autres choix que de se référer à lui, lui prêtant un peu de sa confiance pour le mener au travers du labyrinthe.

Marchant à l’arrière de la procession, il apparut fortement déçu lorsque le lycaon les conduisit en une pièce semblable à un cul de sac. Nul créature mimétique en ces lieux seulement un couloir qui s’ouvre sur une large pièce. Le bruit devait trouver une autre origine, mais sourd, il était bien incapable d’en déterminer l’origine, ni même de savoir si le son était toujours présent au oreille du grand loup tacheté.

Il avait beau considérer ce territoire comme sien, il n’avait eu connaissance de l’existence d’une telle pièce en ces lieux. Pourtant, il eu comme une réminiscence qui le fit frissonner. La ressemblance avec les lieux exploré durant l’un de ses cauchemars vint le frapper, il resta quelques peu déconcerté. Des bureaux, des tapis et de la poussière, une vieille office sans doute qui lui procurait quelques mauvais pressentiments.

Ce qui aurait pu prendre des allures de bonnes nouvelles, n'en était pas une, le mage savait qu'il devait s’inquiéter de ces similitudes.
Sa mine se fit plus sévère, ses traits plus durs, il tenta d’évaluer l’endroit,
D’abord, il parcourut la pièce grossièrement de ses deux pupilles claires tout en portant sa lanterne en hauteur. Une salle circulaire, emplis de seulement quelques meubles et surplombée par un immense miroir fragmenté. Il décida d’en faire le tour, cherchant parmi les murs ce qui semblait être un mécanisme, une ouverture, une faille, ou bien même des écrits ou des symboles.

Tout en scrutant la pierre, il s’interrogea, depuis quand le dédale avait tant changé, il lui semblait méconnaissable de par sa faune maintenant plus nombreuse, ses dangers multipliés, mais aussi ses méandres qui semblaient se façonner eux-même indépendamment des loups qui les traversaient jadis. Devait-il se montrer plus inquiet encore alors qu’il porte la lumière d’une lanterne sur ce qui pourrait s’avérer être un piège mortel.

[Lucian analyse les murs.]

Il ne trouva rien qui puisse l’inquiéter outre mesure, rien qui ne puisse les menaces d’une quelconque façon. Après avoir fait le tour de la pièce circulait et avoir vérifié que les murs ne comprenaient aucun mécanisme et aucun piège, l’oiseau perdant intérêt pour les pierres froides et immobiles, releva le museau vers le plafond. Ou plus précisément vers son reflet, ou plus généralement les leurs. Il passa de l’un à l’autre, limitant ses mouvements à quelques oscillements de tête, pointant l’une et l’autre des figures.

Un grondement s’éleva de son museau, à la fois léger et guttural, faisant vibrer ses cordes vocales au plus profonds de son être, il n’aimait pas ça, il n’aimait pas cela du tout. Ce sentiment, celui de se sentir épié par lui-même, peut-être n’était alors que de la paranoïa, une illusion de son esprit qui se plaisait parfois à se torturer lui-même lorsqu’il se trouvait en position des plus inconfortables. Pourtant l’envie grandissant de tout fracasser allait grandissante. Sans crier garde, il fit rotation sur lui-même, se saisit de la athamée qu’il porte toujours dissimulé sur l’une de ses pattes arrières, celle là même à laquelle personne ne fait jamais vraiment attention et la lança droit vers son propre reflet.

[Lucian tente de lancer sa dague contre son propre reflet pour briser un fragment de miroir. ]

Un fracas résonna entre les murs de la pièce circulaire, un écho inaudible aux oreilles des deux maudits. Le corbeau apparut peu satisfait de l’effet, si la dague avait bien atteins sa cible, il semblait que le bri de verre demeurait en haut et son reflet toujours présent continuait de le contempler encore et encore, se faisait doublure de sa personne à quelques détails près qu’il ne pouvait ignorer. Lucian alla ramasser sa dague qu’il glissa à nouveau dans son étui. Puis, il contempla de nouveau son reflet fragmenté, celui là même qu’il voulait voir prisée en mille éclat quelques instants plus tôt.

Il s’attarde, sur les détails, les tressaillements qui se font impromptu , observe sa propre patte – la droite, celle qui se fait miroir à l’individu qu’il semble ne pas reconnaître comme étant lui-même. Puis il entreprend à son tour à singer, suivre le mouvement indiqué en miroir. Qu’allait-il se passer alors s’il se pliait à sa propre image, à son propre reflet, se faisant double du sien, copie parmi les copies se reflétant à l’infini, toujours dans l’imitation.

[Ing pour la copie du mouvement de son propre reflet]