Doutes [PV Holzer]

Les lieux étaient très silencieux depuis quelques semaines. Les choses bougeaient, les loups partaient et venaient, et parfois même ne revenaient plus jamais. Papa Violette n'était plus. Et il n'avait pas pleuré, Holzër. Il n'avait pas le coeur brisé, l'âme en sang. Il était juste triste, n'arrivait pas à réaliser totalement.

Papa Violette, il faisait la sieste, encore, comme beaucoup de temps en ce moment.
C'était tout.
Il se réveillerait, à un moment.
Oui, il se réveillera ...

Plongé dans des pensées diverses et variées, entre son programme strict de la journée et des rêveries d'avenir, des pensées vagabondes sur les questions qu'on lui a posé, à lui directement, ou à lui et son partenaire de vie. Il était toujours timide à l'idée d'en parler, d'ébruiter la chose. Violette n'avait pas eu le temps d'être au courant, mais Hol' était persuadé que le vieux loup se doutait bien de quelque chose.

Un soupire calme.
Ses oreilles vibrent à l'entente de son prénom. D'abord surpris, la voix ne lui fait pas peur et laisse ses outils sur la terre fraîchement retournée pour se tourner, l'air doux, vers sa soeur. Il lui adresse un sourire en retour, ses yeux clairs la parcourent, tout va bien.

- Bien. Et toi ?

Ca faisait longtemps, se dit-il.
A vrai dire, il s'était un peu éloigné de tout ces derniers temps, comme si sa tête rattrapait le temps perdu ailleurs, que d'un coup des recherches jusque là en suspend devaient être poursuivies. Des quêtes aussi intimes que réelles, des explorations dans ses émotions et sentiment qu'au coeur des Nakhus. Son rôle de sortcellier était très pris à coeur et donnait un sens à ses journées.

Son regard s'ouvre un peu plus en un air inquiet lorsque le sourire de sa petite soeur disparait. Jamais il ne l'avait vue ne serait-ce que neutre, ce n'était pas normal, quelque chose n'allait pas. Son coeur se serre subitement, cherchant une réponse à la moins milliseconde qui passait. Ca ne va pas. Elle croit.

Hol' reste interdit, se mettant à son tour à trembler comme une feuille et être secoué par des spasmes en cherchant que faire. Il essuie rapidement ses pattes pleines de terre sur son ventre avant de s'approcher vivement de Liza, cherchant à l'enlacer, la serrer contre lui comme pour étouffer tous ses doutes. Ces yeux humides étaient la pire chose qu'il ait pu voir jusqu'à maintenant.

- Liza, Blizzard, d-dis moi. Ce qu'il se passe.

S'il te plait.
Est-ce que quelqu'un lui avait fait du mal, de nouveau ? Etait-ce lié à papa Violette ? Il devait lui manquer, il avait toujours été présent pour ses enfants, et Liza était une louve sensible qui avait besoin de ses ancres pour avancer. Et Hol', il n'avait pas été assez présent.

- Je suis là pour toi.

Lorsqu'elle se saisit de lui, il se détend un peu, pas grand chose, mais ne ressentait pas de rejet, de dégoût. C'était une petite victoire inconsciente. Hol' se montre attentif à tout, sa respirations, ses larmes, sa gueule qui se serre en spasmes. Comme une colère ... Oui, de la colère. Il la sent. De la colère qui migre en chagrin.

Il ne dit rien, s'impatiente au fond et reste de marbre en surface. Et puis, une voix cassée qui monte. Nyméria ... Lae compagnon de sa soeur. Ses sourcils se froncent un peu. Iel lui avait fait du mal ? Lui avait dit un truc méchant ? Le loup blanc se tend à son tour d'une toute autre énergie, son inquiétude troquée en amertume, en montée de violence. Ses yeux habituellement curieux ou tristes sont rivés sévèrement vers loin derrière Liza.

Il la laisse s'en servir comme doudou, après tout, il avait toujours été très câlin avec les êtres les plus proches. Donc il accepte de remplir ce rôle, d'être ce truc qui rassure lorsqu'on l'enlace. D'une patte, il caresse doucement la tête de sa soeur, dénuée de son chapeau habituel. Ce n'était pas usuel d'ailleurs.

Une voix qui tremble et qui semble incertaine. Hol' se surprend à bercer un peu Liza contre elle, toujours désireux d'en découdre. Et plus les raisons avançaient, plus il le voulait. Mais toute son attention était portée sur le bien-être de Blizzard, plus tard les offenses.

- Liza, Liza, là, je suis là ...

Sa voix se serre à son tour.

- Tu n'es pas pas assez pour qui que ce soit, Liza.

Le mâle se retire un peu, et lève la tête de sa soeur à son niveau pour la regarder dans les yeux, lui essuyer une larme qui coulait le long de sa joue. Dans ce regard, il y lit du doute, de la détresse, énormément de tristesse. Qu'avait-iel bien pu dire pour qu'elle soit dans cet état ? Qui était-iel pour oser faire du mal à un être si pur dans son intégrité ? Il tente un sourire.

- Iel n'a pas le droit de te faire sentir comme ça. Tu es parfaite comme tu es. Sois-en sûre.

Il finit par s'asseoir, toujours dans la tourmente de plein de questions, réflexions, le désir de laisser la peine le consumer. Il souffle pour se détendre, revenant sur la louve et ne dit rien quelques secondes. Que faire ?

- S'iel se moque de toi, alors iel ne te mérite pas. S'iel te ment, se joue de toi, te dit des trucs méchants ... C'est ... pareil.

Un vague souvenir du personnage qui avait laissé une très mauvaise première impression, un être acerbe et sévère, de très mauvaise compagnie. Qu'est-ce que Liza lui trouvait, elle qui vivait de choses simples et profitant de ce que la vie lui offrait sans s'en tourmenter ?

Il l'écoute attentivement, encore, toujours, surveillant le moindre soubresaut de sourcil, de lèvre, sa soeur se calme un peu, enfin. Iel n'avait rien fait, et d'autres informations déroutantes suivent. Aiiro, par contre, serait en tort. Un sourcil se hausse, son agressivité baisse drastiquement pour laisser place à une confusion envahissante. Lae déité qu'il convoitait ... faisait du mal à sa soeur. Sa gorge se serre, ne remettant aucunement en doute la parole de la louve.

Hol' suit tous ses gestes. Ses pattes qui joignent son coeur, qui se placent de façon nerveuse autour de son glowstick indigo. Et la suite le brise, et refusait d'y croire. Sa gueule s’entrouvre, aucun son ne sort. Ses oreilles tombent alors qu'un voile blanc semble aussi envahir ses yeux, des acouphènes commencent à se faire.

Elle doutait de sa famille aussi.
...
Et ça le met un peu en colère, de la déception certaine. Jamais il ne fallait douter de maman Cloud. De papa Violette. De Dusk, même si elle était peu souvent là aussi. De leurs demi-frères.
Ses yeux se plissent et ses babines tressaillent.

- C-ce n'est pas b-bien.

Ce n'est pas bien de penser à ça. Ce n'est pas bien qu'Aiiro fasse subir ça à sa petite soeur. Et pour le coup, il n'était pas possible de la protéger d'elle-même, de ses pensées, de ses doutes. Un début de larmes nait dans les yeux bleus. Il était perdu, pour le coup, et ne savait plus trop comment réagir. Tout ce qui avait été dit jusque là ... Etait-ce alors inutile ?

- Je n-ne sais pas qu-quoi te dire ...

Hol' se sent perdu, démuni, inutile. Il avait envie de la protéger, mais était-ce seulement utile si elle doutait des intentions de son propre frère ? Son estomac se tord de plus en plus, lui donnait de sales nausées, d'avantages lorsqu'elle continue. Un rayon de soleil dans le paysage brumeux. Il se calme, note l'attitude d'un coup moins tendue de Liza.

Devait-il lui en vouloir, alors qu'elle ouvre son coeur ?
Elle y arrivera. Oui, elle était parvenue à survivre à une attaque alors qu'elle était seule, elle avait un fils, un.e partenaire de vie bien qu'encore plus douteux.se désormais. Un frisson alors qu'elle s'approche, il reste immobile, toujours très interdit. Une petite lutte pour décrisper sa gueule.

- T-tu sais que j-je suis là pou-our toi.

Un regard assuré, quoi qu'un peu sombre. Il y avait encore tant à démêler, comprendre ce qu'il s'est passé pour que d'un coup, sa cadette doute de tout. Aiiro. Il fallait qu'il aille lae voir, lui demander conseils. Car ael avait été correct.e avec Stendhal et son don. Alors, pourquoi la torturer elle, qui avait déjà beaucoup vécu, qui était la pureté même. Est-ce que ça amusait lae déité, de salir les visions innocentes du monde d'un loup ?

Ou bien, ael avait voulu lui montrer quelque chose ... La protéger, l'empêcher d'être trop naïve. Il ne sait pas trop, il y avait trop de chemins possibles, et il fallait entamer cette route-ci pour avoir son propre avis. Le mâle souffle, et revient sur sa soeur.

- Mh. Et ... ne laisse personne ... te forcer à quoi que ce soit. Ou t'influencer.

Ni Nyméria, ni Aiiro, ni qui que ce soit. Le cran d'inquiétude monte un peu, fallait-il la suivre un temps pour s'assurer que lae loup.ve sombre n'abusait pas d'elle. Cette pensée le fait vaciller un peu.

Elle touche ses pattes, ses yeux les fixent. Il aurait aimé être à sa place, pour comprendre, pouvoir prévoir quoi faire, savoir où est-ce que quelque chose avait eu pour effet de la faire douter sur tout, même sur sa propre famille. Cette pensée ... elle le hantait, maintenant. Il relève le regard lorsqu'elle reprend la parole, lit sur ses lèvres, un mimétisme qu'il avait acquéri lorsqu'il se concentrait aussi.

Nyméria revient encore. Un désir de changer, d'avancer, y arriver. Il ne dit rien, dans un premier temps, tentant de remettre de l'ordre dans tous ses songes. Suivre lae compagnon de sa soeur. Etait-ce ses fées qui lui avaient chuchoté cette éventualité, cette pensée ? Un silence immobile, et il acquiesce doucement, sans la regarder dans les yeux.

- Oui.

Pour toi.
Pour tous.
Il lui rend son sourire, maladroitement, mais assuré. Rassuré, un peu aussi. Enfin, pour l'instant. Oui, il devait l'aider, pour qu'elle puisse retrouver la paix et son sourire. Il tend une patte pour l'enserrer contre lui, cachant ainsi une grimace douteuse, toujours un peu de colère qui faisait battre son coeur un peu plus fort.

- Comment faire ?

Il leur fallait un plan.